00:00Bienvenue à l'heure des livres, Olivia Catan.
00:03Alors, vous êtes journaliste, vous êtes une femme qui s'engage, qui s'est engagée.
00:09Vous avez créé plusieurs associations, notamment SOS Autisme France et Parole de Femme.
00:15Vous avez écrit des essais sur des sujets qui vous sont sensibles, notamment le féminisme.
00:20Et vous publiez aujourd'hui Le sens de nos vies, un livre qui est publié dans la collection Les Impliqués chez l'Armatan.
00:25Alors, c'est un roman, est-il écrit, mais très autobiographique, très autobiographique, ce que vous ne cachez pas.
00:33Alors, pourquoi avez-vous voulu raconter votre vie et celle de votre famille, l'impérieuse nécessité de transmettre à vos enfants d'où vous venez, qui vous êtes ?
00:43C'était pour moi comme une lettre testamentaire à mes filles.
00:46Je voulais leur montrer aussi la femme que j'étais derrière la maman qu'elle connaissait.
00:50Leur parler de la petite fille, leur parler de l'adolescente, leur parler de la chanteuse, de la journaliste.
00:55En fait, des facettes qu'elle ne voyait jamais à la maison.
00:59Et puis, leur parler aussi de nos valeurs, de nos racines, de cette identité juive qui est parfois difficile à porter.
01:07Et pour moi, c'était important qu'elle connaisse l'histoire de mes grands-parents qui venaient d'Italie, d'Espagne, d'Algérie, jusqu'en France.
01:14Et puis, de notre intégration en France, des valeurs républicaines.
01:17Pourquoi c'était si important pour moi, ces valeurs républicaines que je défends ici ?
01:22Mais aussi le droit des femmes, évidemment, que j'ai beaucoup défendu et que je continue à défendre, même si le féminisme a beaucoup changé.
01:30Il n'est plus le même.
01:31Mais je voulais vraiment laisser cette trace-là.
01:36Et puis, je crois que ça parle aussi...
01:39Ça interroge aussi notre époque.
01:41Parce que, évidemment, les meurs sont changées.
01:43Tout a changé.
01:44Donc, ça témoigne, ce livre, aussi, d'un moment donné, dans une société.
01:49C'est des petites histoires dans la grande histoire.
01:50Alors, vous évoquez, effectivement, vos racines, ces farades, l'Algérie, un pays que vous n'avez pas connu, mais d'où vient votre grand-mère.
02:03Oui, tout à fait.
02:04Et un pays dans lequel... Enfin, en tout cas, une culture dans laquelle il y a une espèce d'empreinte patriarcale assez forte que vous évoquez, d'ailleurs.
02:14Une empreinte patriarcale par rapport à l'éducation, évidemment, que me donne mon grand-père, mon père.
02:18Mais pourtant, les femmes sont quand même les reines.
02:21Oui, c'est ce que vous dites.
02:22Mais elles arrivent...
02:23C'est paradoxal.
02:23Voilà.
02:24Elles arrivent à avoir, on va dire, une autorité au sein du couple, mais qui n'est pas avouée.
02:29C'est ça.
02:30Alors, il est question aussi, de ci, de là, après les racines, de violence.
02:36La plupart du temps, la violence d'hommes exercée à l'encontre de femmes.
02:42Une violence qu'a connue, aussi, votre grand-mère, que vous-même avez connue.
02:45Est-ce que...
02:48Et que vous avez connue récemment, on l'évoquait juste avant que commence l'émission,
02:51lorsque vous avez écrit une tribune sur les femmes israéliennes qui avaient été violées, juste après le 7 octobre.
02:59Est-ce que vous avez l'impression qu'on est dans une société qui, justement, est de plus en plus violente ?
03:04Oui. J'ai l'impression que, finalement, même si les années passent, la violence faite aux femmes est très difficile à combattre.
03:10Donc, évidemment, je m'y emploie.
03:13Alors, en Israël, c'était particulier.
03:14C'était le 7 octobre.
03:15J'étais allée là-bas parce que mon fils n'avait pas...
03:18Mon fils autiste n'avait pas de lycée.
03:21Donc, on est partis trois ans là-bas.
03:23Et c'est vrai qu'à un moment donné, il nous a réveillés.
03:26C'est lui qui nous a réveillés.
03:27Il nous a dit, il y a les sirènes, vite, dans les abris.
03:30Et je profite de votre émission pour aussi dire à quel point, et j'essaie de t'en parler dans ce livre,
03:36à quel point c'est difficile d'être israélien, de vivre là-bas.
03:40Les gens ne s'en rendent pas compte.
03:41Alors, on peut, évidemment, philosopher sur la politique, oui ou non, ici, en Occident,
03:46dans cette tranquillité, dans les beaux salons.
03:48On peut en parler.
03:50Une fois qu'on est sur place, on voit les choses quand même autrement.
03:52C'est la guerre, c'est les bombes, c'est la peur de mourir, c'est la peur de voir mourir son enfant.
03:58Et, évidemment, ça a changé ma vision de la vie, ça a changé beaucoup de choses chez moi.
04:04Et, peut-être, ça m'a appris à vivre vraiment à fond.
04:07Et c'est pour ça que les Israéliens vivent à fond.
04:09Oui, parce que vous êtes française, mais ce que vous dites,
04:11enfin, en tout cas, votre héroïne, qui vous ressemble singulièrement,
04:15dans ses rêves, il y a celui de vivre en Israël à un moment.
04:20Ça a toujours été mon idéal.
04:21Je me suis toujours revendiquée et affirmée comme sioniste, comme française et comme israélienne.
04:28aussi, puisque je le suis devenue.
04:30Mais c'est vrai que j'ai cette double identité, comme beaucoup de juifs, d'ailleurs, du monde entier.
04:35On a cet attachement à Israël.
04:37Et aujourd'hui, on souffre parce qu'on nous met dans...
04:42On a une espèce de vision d'Israël qui est complètement tronquée.
04:44D'abord, on met tout le peuple israélien dans une même vision,
04:47ce qui est totalement injuste parce qu'il y a énormément de pacifistes,
04:51des gens de gauche qui manifestent, d'ailleurs, contre le gouvernement.
04:53Et je pense qu'on n'a pas de leçons non plus à recevoir de la part de l'Occident.
04:58Parce que quand on vit là-bas, on connaît les dangers.
05:00On connaît ce quotidien où il y a peut-être un attentat,
05:04où il y a peut-être des bombes qui explosent.
05:07Et moi, j'ai vu exploser une bombe pas très loin de moi.
05:10Et donc, on n'a peut-être pas cette sensation ici, ce sentiment,
05:15parce qu'on est protégé.
05:16On ne se rend pas compte de la chance qu'on a de vivre en France.
05:18Non, ce qui n'empêche pas qu'il y a aussi des problèmes de l'autre côté
05:22lorsqu'il y a des victimes.
05:24Bien sûr, mais de toute façon, il ne faut pas déshumaniser l'autre.
05:27C'est la pire des choses.
05:28Et la guerre, et la pire des monstruosités que l'homme ait pu faire.
05:32Alors, vous évoquez aussi, et d'ailleurs, c'est lié à Israël,
05:35votre fils autiste, Ruben, que vous avez sauvé,
05:39justement en allant à Israël, parce qu'il a pu suivre un traitement
05:44qui était proposé uniquement là-bas.
05:47Et en fait, ça, ça fait partie des...
05:51Vous vous êtes battu comme une lionne pour votre fils
05:53qui vous est retourné ensuite là-bas en Israël
05:56pour qu'il puisse passer son bac, ce qui n'était pas possible en France.
05:58Alors qu'en France, quand il avait été diagnostiqué,
06:01on vous avait dit des mots terribles.
06:02On vous avait dit, placez-le dans un établissement spécialisé.
06:05Faites le deuil de votre fils, ce qui est monstrueux.
06:09Finalement, votre livre, c'est un éloge de la liberté,
06:12de l'espoir et de la nécessité de se battre, quoi qu'il advienne.
06:16Alors, on parle tellement de la loi pour l'aide à mourir.
06:19Je pense que c'est une ode à la vie, surtout.
06:21Oui, c'est ça.
06:22En tout cas, je vous conseille ce livre.
06:26Ça s'appelle Le sens de nos vies.
06:28Merci, Olivia Caton.
06:29Merci à vous.
06:30C'est publié dans la collection Les Impliqués à l'Armaton.