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00:00Europe 1 matin week-end, 6h-9h, l'Enaïc Monnier.
00:06Europe 1, 8h13, l'heure de l'interview actue d'Europe 1 matin week-end.
00:10L'Enaïc Monnier a trois jours du verdict concernant la peine de Boilem Sansal détenue en Algérie.
00:15Vous recevez celui qui est son ami, l'écrivain et diplomate Jean-Christophe Ruffin.
00:19Oui, dix ans de prison, un million de dinars d'amende, ça fait à peu près l'équivalent de 7000 euros requis
00:23contre Boilem Sansal par le parquet algérien lors de son procès en appel.
00:27Et effectivement, le verdict est attendu mardi qui vient, le tout dans un contexte de relations extrêmement tendues,
00:33toujours entre la France et l'Algérie.
00:35Bonjour Jean-Christophe Ruffin.
00:37Bonjour.
00:38Réquisitoire sévère, est-ce que vous auriez imaginé, espéré une évolution plus clémente de la situation
00:44lorsque le parquet a requis ses dix ans de prison ?
00:48Non, comme vous avez vu, c'est un réquisitoire qui est plus sévère que le précédent.
00:54C'est-à-dire qu'il n'y a aucun élément, si vous voulez, de compromis ou d'atténuation des charges contre Boilem Sansal.
01:05Mais bon, ça ne veut rien dire, parce qu'avec le pouvoir algérien, on est un petit peu comme autrefois avec l'Union soviétique.
01:12Vous savez, il faut interpréter les choses selon quand les dirigeants mettent leur chapeau de travers.
01:17Il faut penser ci ou ça. Peut-être que l'augmentation de cette peine peut préluder à une grâce ou quelque chose comme ça.
01:28On ne sait pas. Mais en tout cas, pour le moment, c'est mal parti.
01:30Alors, on a eu quelques bribes d'informations de la part du comité de soutien,
01:34notamment d'Arnaud Benedetti qui était sur l'antenne d'Europe 1 cette semaine.
01:37Il racontait que Boilem Sansal, au moment de se défendre, avait parlé en français,
01:41qu'il avait été capable de réfuter et de récuser tous les chefs d'accusation.
01:45Est-ce que ça montre qu'il reste combatif, malgré son état de santé vacillant ?
01:52Pour bien le connaître, ce n'est pas le genre à mettre ses opinions dans sa poche et à demander grâce.
01:59Certainement pas.
02:00Il a en effet toujours, et il a raison d'ailleurs, contesté ce qui lui était rapproché.
02:06Et le fait qu'il le fasse en français, c'est aussi un signe.
02:11C'est-à-dire que ça répond, ou en tout cas, ça souligne le fait qu'il est franco-algérien.
02:16Ce qui est une dimension qui a été un petit peu oubliée dans toute cette affaire.
02:19Parce que le pouvoir algérien le traite comme un algérien, mais il est franco-algérien.
02:24On ne doit pas l'oublier.
02:25Alors, c'est vrai que c'est courageux quand on voit effectivement comment le régime essaie de le faire taire depuis de très longs mois.
02:31On n'a pas pu avoir beaucoup de nouvelles.
02:34Est-ce que vous, vous avez eu quelques informations à son sujet ?
02:38Non, pas plus.
02:39Un peu comme tous les membres du comité de soutien, je suis ça de façon indirecte.
02:45Puisque comme vous savez, il n'a pas d'avocat.
02:48Le précédent, François Zimré a été, j'allais dire, poussé dehors.
02:53Pour des raisons d'ailleurs pas très honorables.
02:55Puisqu'il y avait quand même une espèce de campagne antisémite qui s'est déclenchée.
03:02En faisant comprendre qu'il valait mieux un autre avocat.
03:06Il y a un autre avocat français, mais il n'a toujours pas été autorisé à le voir.
03:10Donc, l'audience qui a d'ailleurs été très très rapide s'est déroulée sans avocat.
03:16Boalem s'est défendu lui-même, pour autant qu'il le puisse.
03:19Et puis, les témoins se réduisent à un journaliste qui était présent, je crois.
03:27Voilà.
03:27Donc, tout ça est très indirect.
03:29Et il n'y a pas notamment toutes les visites consulaires auxquelles il a droit, normalement.
03:34Puisqu'il est français.
03:35Tout ça ne permet pas d'avoir d'informations directes.
03:41Ce qu'on sait simplement, notamment par sa femme, c'est que son état de santé, évidemment, est préoccupant.
03:49Mais il n'est pas grave dans l'immédiat.
03:51C'est-à-dire qu'il a une maladie de fond.
03:53Je veux dire, il a un cancer.
03:55Il doit bénéficier de traitements.
03:56D'ailleurs, il va à l'hôpital chaque semaine, là-bas.
04:00Mais il est, évidemment, conscient, alerte et, je pense, très déterminé.
04:06Alors, vous l'avez souligné il y a quelques instants, Jean-Christophe Ruffin, verdict mardi 1er juillet.
04:11La fête nationale algérienne, c'est le 5 juillet prochain.
04:14Est-ce que vous envisagez une éventualité grâce présidentielle ?
04:18Est-ce que ça me semble possible ?
04:20Oui, c'est possible.
04:22Comme toujours, il y a probablement au sein du pouvoir différentes tendances.
04:27On a vu qu'il y a des tendances dures.
04:29Alors, la veuve du président Boumediene s'est distinguée récemment,
04:34qui est avocate, qui vit en France par des propos extrêmement durs,
04:37en disant que la place de Boualem-Sensal était en prison.
04:40Donc, il y a incontestablement des courants comme ça.
04:43Mais il y a aussi, semble-t-il, au sein du pouvoir algérien,
04:45des gens qui souhaiteraient tourner cette page parce qu'elle n'est pas à l'honneur de l'Algérie.
04:49Elle provoque des réactions internationales qui sont des irritants dans la relation.
04:55Donc, c'est possible.
04:56Est-ce que ce serait bien, peut-être, certainement, même pour l'état de santé,
05:02pour la vie de Boualem-Sensal, pour la morale de l'affaire ?
05:06Pas forcément parce qu'une grâce, ça veut dire qu'il est coupable,
05:10ce qui n'est pas le cas.
05:11Alors, ce serait la moindre des solutions, mais ça laisserait quand même un goût amer
05:18parce que la place d'un écrivain, il faut le répéter, n'est pas en prison.
05:22Il n'est accusé que d'avoir exercé sa liberté de penser et de parler.
05:26Et alors, il y a de nouveaux écrivains.
05:28Il y a vous, bien sûr, il y a Kamel Daoud, il y a Salman Rushdie qui se sont mobilisés pour Boualem-Sensal.
05:33Il y a une opération, d'ailleurs, je vais le souligner, jolie Sensal,
05:36qui a été lancée conjointement par le comité de soutien,
05:39parce qu'il faut de toute façon continuer à en parler.
05:42Oui, c'est ce qui le menace le plus, c'est l'oubli.
05:46Alors, il y a toute une frange, notamment pour des raisons un peu politiques,
05:51qu'essayer depuis le début, qu'on promet, d'expliquer,
05:55qu'il n'était peut-être pas si innocent que ça, etc.
05:58Il faut vraiment casser cette espèce de petite musique,
06:02et répéter et dire qu'il y a une communauté des écrivains qui le défend.
06:08Je ne pense pas qu'ils doivent être défendus par les partis politiques
06:11ou qu'ils doivent être un enjeu politique.
06:13Il est d'abord et avant tout un intellectuel,
06:15et c'est les intellectuels qui doivent le défendre.
06:17Et c'est la raison pour laquelle nous vous avons sollicité ce matin, Jean-Christophe Ruffin.
06:22Merci beaucoup.
06:23On va profiter des vacances pour vous lire,
06:24ou pour vous relire avec votre dernier ouvrage,
06:27Un été avec Alexandre Dumas.
06:30C'est aux éditions des Équateurs.
06:31Merci à vous.

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