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Comment Dassault Systèmes a révolutionné la conception 3D
Les Echos
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il y a 8 mois
Souvent oublié au profit de son aîné Dassault Aviation, Dassault Systèmes est pourtant le géant français de l’édition de logiciels. Et ce statut, l’entreprise le doit à un logiciel 3D qui a fait son succès.
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00:00
C'est quoi le point commun entre un rafale, ma machine à laver et cette pagode thaïlandaise ?
00:04
Et bien c'est ce monsieur qu'on a cherché, qu'on a trouvé, qu'on a interviewé.
00:07
Voilà donc quelques extraits de mes voyages d'affaires.
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D'accord, mais vous êtes ?
00:13
Je suis Francis Bernard.
00:14
Et Francis Bernard, ce n'est pas n'importe qui.
00:16
Je suis cofondateur de Dassault Systèmes, un ancien ingénieur de Dassault Aviation.
00:21
Dassault Aviation, ça vous parle certainement, mais Systèmes peut-être moins.
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En fait, c'est la petite sœur du constructeur aéronautique.
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Dassault Systèmes, c'est le mastodonte français de l'édition de logiciels.
00:31
Capitalisé à plus de 40 milliards d'euros à la Bourse de Paris.
00:33
C'est un peu le GAFAM français que le grand public ne connaît pas.
00:35
Et aujourd'hui, tous ceux qui veulent modéliser un avion, une machine à laver ou notre fameuse pagode
00:40
vont certainement passer par la case Dassault Systèmes.
00:43
Et avec Francis...
00:44
Oui, bien sûr.
00:44
On va vous raconter la secrète sauce de Dassault Systèmes.
00:48
Cette histoire, elle commence bien avant ma naissance.
00:50
C'était en février 1967.
00:52
À cette époque, Dassault conçoit encore ses avions à l'ancienne.
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Le bureau d'études de Dassault Aviation, c'était à Saint-Cloud.
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C'était des très grandes salles avec des dessinateurs qui étaient en charge de dessiner le futur avion.
01:06
Et puis pour tout ce qui concerne la dévision détaillée de l'avion,
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c'était fait sur une maquette dans l'atelier à côté du bureau d'études.
01:13
Voilà comment était la technologie à cette époque-là.
01:16
La technologie, justement, il y en a une qui va bouleverser le quotidien de l'entreprise.
01:20
Voici l'IBM 360.
01:22
C'est un gros ordinateur que Dassault a commandé pour essayer de mieux fabriquer ses avions,
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sans imaginer une seule seconde à quel point ça va marcher.
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Et qui c'est qui passait son temps sur cet ordinateur ?
01:31
C'est Francis et ses collègues ingénieurs.
01:33
En France, on était les seuls à travailler là-dessus.
01:35
On était à la pointe de la technologie.
01:36
On a appris à faire des programmes en utilisant un langage qu'on appelle le Fortran.
01:41
Finalement, on était un peu les geeks de l'époque.
01:44
Vous pouvez répéter Francis ?
01:45
On était un peu les geeks de l'époque.
01:47
En gros, son équipe développe tout un tas de formules mathématiques pour améliorer les avions.
01:51
Et Francis se pose une question qui paraît toute bête aujourd'hui,
01:54
mais qui ne l'était pas dans les années 60.
01:55
Est-ce qu'on pourrait visualiser en 3D ses avions sur des écrans ?
01:59
Les ordinateurs sont arrivés,
02:01
mais il y a eu aussi ce qu'on appelle les premiers écrans graphiques.
02:03
Les formes étaient définies mathématiquement dans les bases de données de l'ordinateur,
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et on pouvait les visualiser sur cet écran.
02:10
En fait, Francis Bernard et son équipe viennent de créer leur propre outil de CAO,
02:13
c'est-à-dire de conception assistée par ordinateur.
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Au lieu de dessiner sur une planche à dessin, on dessinait sur l'ordinateur,
02:18
et du coup, on pouvait plus facilement redimensionner les pièces en fonction des évolutions.
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Pascal Lemasson est ingénieur civil spécialisé en conception 3D.
02:26
À partir du moment où vous avez une forme digitalisée,
02:28
vous pouvez faire en sorte que la machine soit programmée
02:32
pour faire un usinage en fonction du dessin.
02:35
Progressivement, on a introduit de plus en plus des modélisations complexes
02:39
qui étaient non seulement la pièce, mais la machine, voire la chaîne de fabrication.
02:44
Nom de code du logiciel de Dassault ?
02:45
CATI, pour Conception Assistée Tridimensionnelle Interactive.
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Et pour ceux qui connaissent, le nom CATIA n'arrive que plus tard, mais on en reparlera après.
02:55
CATI, visuellement, ça ressemble juste à des lignes blanches sur un écran noir,
02:58
mais pour l'époque, c'est une avancée technologique énorme.
03:01
Un système complètement intégré au processus industriel.
03:05
Une réalité qui préfigure les méthodes de production de demain.
03:07
Pendant les années 70, le logiciel continue d'être perfectionné,
03:11
et l'équipe de Francis va surtout le rendre plus accessible.
03:14
L'objectif ? Convertir les dessinateurs au combo clavier-souris.
03:17
On était contents de voir des dessinateurs, des vieux, entre guillemets, de 60 ans, 62 ans,
03:23
ils se mettaient sur l'écran et on leur montrait comment il fallait faire, et ils savaient faire.
03:27
Et on a démontré qu'on était capables d'aller à peu près 10 fois plus vite que ce qu'on faisait avant,
03:33
avec du papier et puis des maquettes à l'échelle grandeur dans un atelier.
03:39
Ce gain de productivité, il va évidemment intéresser le big boss.
03:41
En 1980, Marcel Dassault, 88 ans au compteur, veut découvrir cette catille dont tout le monde lui parle.
03:47
Et c'est Francis qui assure les présentations.
03:49
Ce vieux monsieur, c'est un ingénieur, bien entendu.
03:52
Il est arrivé dans sa voiture avec un chauffeur, une énorme voiture.
03:56
Je lui fais une démonstration, je lui montre comment on fait pour concevoir une courbe et une surface
04:01
grâce à cet écran graphique, et puis il me pousse, il me dit, laissez-moi, je voudrais travailler tout seul.
04:05
Il a fait quoi ?
04:06
Il a fait une courbe, et je sais qu'on a gardé très longtemps dans la base de données
04:10
cette courbe dessinée par Marcel Dassault.
04:13
Et c'était une pièce de musée en quelque sorte.
04:15
Après cette visite, une question se pose.
04:17
Que faire de Cathy ?
04:18
C'est l'heure du dilemme.
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Première option, garder Cathy bien au chaud à la maison pour prendre de l'avance sur la concurrence.
04:23
Seconde option, vendre Cathy.
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Ça veut donc dire aider les rivaux, mais peut-être lancer un nouveau business qui va rapporter gros.
04:30
C'est finalement ce second scénario qui est retenu.
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Sinon, il n'y aurait pas cette vidéo.
04:33
Le groupe Dassault lance une nouvelle entreprise, Dassault Systèmes.
04:36
Elle voit le jour en 1981, et c'est Francis qui en prend la direction.
04:39
C'était comme une start-up qui démarre en quelque sorte.
04:42
Le premier chantier de cette jeune pousse, plutôt facile, c'est de changer le nom de son logiciel.
04:46
Parce que la marque Cathy est déjà déposée aux Etats-Unis.
04:48
Et donc on s'est dit, qu'est-ce qu'on fait ?
04:50
Et puis j'ai rajouté un A.
04:52
Cathy, ça veut dire Computer Aided Interactive Application.
04:59
Ça marche en français et en anglais.
05:01
Le deuxième chantier, beaucoup moins facile, c'est de réussir à vendre le logiciel dans le monde entier.
05:05
Le problème, c'est que Francis, il est ingénieur, il ne sait pas vendre.
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On n'y connaissait rien en commercial.
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Mais vous vous souvenez de cet ordinateur dont je vous parlais plus tôt, l'IBM 360 ?
05:14
Francis Bernard va voir IBM pour leur proposer un deal.
05:17
IBM, ils étaient les rois du monde en informatique.
05:23
On était les plus gros clients.
05:24
Je me suis mis en relation avec notre commercial d'IBM qui s'occupait de nous.
05:28
Et je lui ai dit, dis donc, tu ne crois pas que ton entreprise,
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elle pourrait être intéressée à vendre notre logiciel,
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en plus de ses ordinateurs, au niveau mondial.
05:37
À ce moment-là, des entreprises américaines négocient en parallèle avec IBM.
05:40
Mais c'est Dassault qui remporte Jackpot.
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IBM devient distributeur exclusif de Catia.
05:44
Et les revenus sont partagés de façon égale entre les deux boîtes.
05:47
Cet accord avec IBM, c'est vraiment l'ingrédient qui permet à Dassault de terrasser la concurrence.
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C'est aussi un gage de crédibilité.
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Parce que pour certains Américains, les Français sont mitterrands.
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C'est un peu déconviniste.
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C'est en 1986 que Boeing a décidé que Catia allait être leur solution
06:02
pour concevoir et fabriquer leurs avions.
06:04
Quand je suis monté jusqu'au niveau du CEO de Boeing,
06:08
il m'a dit, votre logiciel, il est bien, mais ce n'est pas à vous que je l'achète, c'est à IBM.
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Rapidement, des entreprises qui ne sont pas dans l'aéronautique s'intéressent à Catia.
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Honda, Mercedes ou bien BMW détectent un gros potentiel pour leurs futures voitures.
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Une carrosserie de voiture, ça ressemble plus ou moins à une carrosserie d'avion.
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Et donc, ils pouvaient commencer à utiliser notre logiciel tel quel.
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Pour faire la voiture, petit à petit, on a appris à passer des avions aux voitures,
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puis après des voitures aux outils de consommation.
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Par exemple, un de mes premiers clients en Allemagne, ça a été Miele,
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les fabricants de machines à laver.
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Cette capacité à s'adapter à de nouveaux marchés explique aussi le succès de Dassault Systèmes.
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Et à partir du moment où les concepteurs automobiles en ont intéressé,
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alors ils travaillent avec eux et ils comprennent où est-ce qu'il faut faire évoluer un tout petit peu l'outil.
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Et ce qui est très intéressant dans l'histoire de Dassault,
07:00
c'est qu'ils ont su faire ça de façon très répétée et très continue.
07:04
Dassault Systèmes s'impose donc partout dans la conception 3D et entre en bourse en 1995.
07:08
La même année, Francis Bernard quitte la direction de l'entreprise.
07:11
Je n'étais plus trop intéressé à avoir la direction générale de l'entreprise.
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Moi, ce qui m'intéressait, c'était le travail sur le terrain,
07:18
la rencontre avec les clients,
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l'évaluation de nouvelles possibilités à développer,
07:24
ce genre de choses. C'est ça qui m'intéressait.
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De nouvelles possibilités, l'entreprise en a saisi un paquet depuis le départ de Francis.
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Aujourd'hui, elle commercialise 14 logiciels, dont Katia.
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Aujourd'hui, on peut assez raisonnablement penser que Dassault Systèmes a une sorte de boîte à outils
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qui couvre un très grand nombre de situations contemporaines.
07:44
Mais on peut aussi penser que leur job en ce moment doit être de travailler sur
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c'est quoi les business qu'on n'adresse pas avec n'importe quelle combinaison de ces 14 briques.
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Ces dernières années, Systèmes a notamment investi dans le domaine de la santé
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et a racheté l'entreprise Medidata en 2019 pour près de 6 milliards de dollars.
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L'entreprise ambitionne de modéliser en 3D le corps humain.
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Elle veut carrément simuler le fonctionnement des organes pour faire tout un tas de tests,
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à l'image de ce qu'elle faisait au départ avec les avions.
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Systèmes a quand même quelques galères en ce moment,
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surtout en bourse où son cours s'est un peu cassé la figure.
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Mais ça reste un taulier du CAC 40.
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Bon, maintenant qu'on a dit tout ça, c'était quoi selon vous, Francis, la secrète sauce de Dassault Systèmes ?
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On a eu la chance d'être au bon endroit au bon moment.
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Le début de l'informatique, les premiers ordinateurs qui sont arrivés.
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L'accord équibé nous a donné aussi une culture d'écosystème,
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c'est-à-dire une culture qui dit qu'une entreprise, même très bonne dans son domaine,
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n'a aucune chance de réussir dans le monde si elle ne crée pas autour d'elle un réseau de partenaires.
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C'est ça qui nous a permis de réussir.
08:46
Merci d'avoir regardé cette vidéo, on espère que ce nouveau format vous a plu.
08:50
Dites-nous dans les commentaires ce que vous en pensez,
08:52
quelle secrète sauce vous aimeriez découvrir dans les prochains épisodes.
08:55
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