- il y a 2 ans
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00:08 Je m'appelle Philippe Baptiste, je suis le président directeur général du CNES,
00:21 le Centre National d'Études Spatiales, c'est la plus grosse agence spatiale d'Europe.
00:26 On est un très gros acteur, 2,4 milliards de budget,
00:31 un des grands acteurs de l'ESAR, de l'Agence Spatiale Européenne.
00:36 Et puis on a aussi beaucoup de collaborations avec les grandes agences internationales,
00:42 la NASA, l'AJAXA au Japon, avec l'Inde, etc.
00:48 On a plein de super beaux projets.
00:50 Et on fait, qu'est-ce qu'on fait au CNES ?
00:52 On fait à la fois de la R&D, on soutient des projets scientifiques,
01:00 pour aller faire de l'observation, d'envoyer des sondes, etc.
01:04 On soutient des projets industriels, faire de nouvelles constellations de télécoms, par exemple.
01:09 On conseille le gouvernement, on travaille aussi sur l'exploration,
01:14 donc on a des champs qui sont extrêmement larges, on couvre en fait toutes les activités du spatial.
01:18 Quel a été votre parcours d'étudiant ?
01:21 Alors moi, je suis un étudiant...
01:23 En fait, j'ai été passionné par la science, par les maths et par les sciences de numérique.
01:32 C'est ça, initialement, mon parcours d'étudiant, ça a été ça.
01:36 Donc j'ai fait des études d'ingénieur.
01:38 Après, j'ai fait un master en Écosse.
01:44 Et puis là, je me suis vraiment intéressé à la recherche.
01:49 Et là, c'est un champ qui m'a passionné pendant très nombreuses années, toujours aujourd'hui d'ailleurs.
01:55 Et donc, j'ai fait une thèse de doctorat,
01:59 et puis à la frontière entre les mathématiques et l'informatique,
02:04 sur des questions qui sont l'optimisation des processus,
02:10 ou l'optimisation, la théorie de la complexité, l'algorithmique, des choses comme ça.
02:17 Et donc, j'ai adoré, et j'ai fait ça toujours à la frontière entre l'industrie et la recherche fondamentale,
02:24 avec un parcours un peu bizarre, c'est-à-dire que j'ai commencé par des sujets plutôt appliqués.
02:29 Et en fait, j'ai eu la chance, entre guillemets, c'est-à-dire qu'en travaillant sur ces sujets appliqués,
02:34 je suis tombé sur plein de questions assez fondamentales,
02:38 d'algorithmique, d'optimisation, de mathematiques,
02:42 que j'ai réussi à résoudre, j'ai eu de la chance.
02:45 Et donc, en fait, j'ai commencé par des choses appliquées,
02:49 puis je suis allé sur des choses très théoriques et très fondamentales.
02:52 Donc, je suis rentré au CNRS comme ça.
02:54 Quel a été votre parcours professionnel ?
02:56 Alors, donc là, en fait, j'ai commencé à en parler un petit peu,
03:00 parce qu'en fait, quand on est chercheur, même quand on fait une thèse, c'est déjà un parcours professionnel.
03:06 Donc, moi, j'ai fait de la recherche, chercheur, j'ai été professeur à Polytechnique.
03:12 Et puis, je me suis intéressé en parallèle, j'ai toujours été intéressé par les applications,
03:17 donc j'ai aussi contribué à créer un certain nombre de start-up.
03:21 J'ai travaillé dans l'industrie avec des contrats,
03:24 ou même en y allant, en étant moi-même dans différentes grandes entreprises,
03:30 je ne sais pas, IBM, WIG, Total, etc.
03:35 Donc, voilà, vraiment, ça m'a toujours intéressé de voir comment est-ce que je pouvais faire d'un point de vue théorique, s'appliquer.
03:42 Et puis, donc, à la fois, je m'intéressais aux questions industrielles,
03:46 et puis en même temps, moi, j'aime bien aussi comprendre comment fonctionne le système dans lequel on vit.
03:52 Donc, j'ai pris des responsabilités assez nombreuses et assez rapidement.
03:56 Donc, j'ai été directeur général du CNRS, directeur général délégué du CNRS.
04:02 Puis, j'ai été, chez Total, directeur de la R&D.
04:06 Je me suis donc toujours à la frontière entre la technologie, la science, et puis les applications.
04:13 Et, en fait, ma première grande vraie rencontre avec le spatial, ça a été au CNRS,
04:18 puisque, en fait, le CNRS est un des très grands partenaires du CNES.
04:23 Et que le CNES, en fait, comment est-ce qu'on travaille ?
04:26 En fait, c'est les scientifiques du CNRS qui réfléchissent, qui conçoivent,
04:30 pas seuls aussi avec les universités, mais qui réfléchissent, qui conçoivent des missions, qui ont des projets.
04:35 Et, en fait, nous, au CNES, on prend les projets, on les solidifie, on les rend robustes, on les industrialise,
04:42 on fait l'interface avec l'industrie.
04:45 Et puis souvent aussi, on aide en amenant des compétences techniques pour faire que ces projets aboutissent vraiment.
04:52 Et donc, cette relation, voilà, là, ça a été un premier contact vraiment important avec le spatial.
04:59 Et puis après, dans une dernière partie de ma carrière, avant de rejoindre le CNES, pendant ces dernières années,
05:03 j'ai travaillé dans les cabinets ministériels, donc au contact direct des politiques.
05:10 J'ai été directeur du cabinet de Frédéric Vidal,
05:12 donc le ministre de l'Enseignement supérieur à la recherche et de l'innovation.
05:15 Et puis après, j'ai été conseiller sur l'éducation, la science et la recherche d'Edouard Philippe
05:24 pendant les derniers mois, pendant la crise.
05:29 Avez-vous une rencontre particulière durant votre parcours d'étudiant
05:34 qui vous a influencé pour vous orienter sur une carrière liée au spatial ?
05:40 Alors, en fait, non, parce que quand j'étais étudiant, moi, le spatial, ça m'a passionné quand j'étais tout petit.
05:47 Quand j'étais tout petit, moi, j'avais des photos de Yagari de partout, comme beaucoup de gens de ma génération.
05:52 Voilà, c'était vraiment une passion quotidienne.
05:57 Après, je me suis rendu compte, quand j'étais petit, que je n'y voyais rien,
06:02 je ne voyais ni de près, ni de loin, ni du milieu d'ailleurs, même pas en relief.
06:07 Donc assez rapidement, j'ai compris que le rêve d'être astronaute ou cosmonaute,
06:14 c'était plutôt les Russes qui m'attiraient quand j'étais petit, était inatteignable.
06:19 Donc j'avais un peu oublié ça. Et en fait, moi, je me suis réintéressé beaucoup au spatial plus tard.
06:25 Donc pas comme étudiant, mais après. J'ai démarré ma carrière vraiment comme chercheur
06:30 à la frontière entre les maths et l'informatique.
06:34 Pouvez-vous nous présenter les différents défis du CNES sur l'actualité internationale
06:39 où la concurrence est incontestablement rude ?
06:43 Alors ça, c'est une question très large, effectivement.
06:47 La première chose qu'il faut avoir en tête, c'est qu'on vit une espèce de rupture en ce moment dans le monde du spatial.
06:52 C'est-à-dire qu'on a traditionnellement les enjeux de science.
06:56 Je ne sais pas, je fais un télescope, que je vais embarquer sur un satellite.
07:01 Je fais des objets qui vont faire de l'observation de la Terre.
07:05 Donc ça, c'est vraiment un champ qui est extrêmement important et qui est historique.
07:10 Les enjeux de défense, là aussi, avec de grandes ruptures, mais toujours un champ qui est là depuis très longtemps.
07:16 Les enjeux de télécom, avec des télécoms de satellites géostationnaires
07:20 pour la télévision, pour les télécommunications, etc.
07:27 Ça, c'est des enjeux qui sont bien énormément...
07:30 Enfin, ils sont là depuis longtemps, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu de très grandes évolutions technologiques,
07:34 mais ils sont là depuis longtemps.
07:36 La très grande rupture du moment, c'est qu'en gros, aujourd'hui, on a beaucoup de données qui viennent du spatial,
07:41 beaucoup de données pas chères, parce que les prix des satellites, des lancements baissent radicalement,
07:47 et donc derrière, beaucoup de business, c'est-à-dire beaucoup de nouvelles entreprises
07:51 ou d'industries traditionnelles qui s'intéressent au secteur spatial.
07:54 Et donc, il y a une espèce de boule de déflagration des applications et des services,
07:59 et c'est ça un enjeu qui est absolument majeur et qui est en train de tirer tout le monde du spatial.
08:04 Alors, évidemment, il faut qu'on soit équilibré, c'est-à-dire qu'il faut continuer à faire de la science,
08:07 il faut continuer évidemment à s'intéresser aux applications de la défense, etc.
08:10 Tous ces enjeux qui existent historiques du spatial, ils sont toujours là,
08:14 et il faut toujours évidemment les alimenter, les financer, etc. C'est évident.
08:23 Mais il y a quelque chose de vraiment nouveau, c'est le boom des applications,
08:26 qui est à la frontière, au croisement entre le monde du numérique et le monde du spatial.
08:30 - Qu'il faut savoir lire aussi. - Oui, absolument.
08:33 - Parce que ça, c'est un travail absolument pas négligeable. - Oui.
08:37 - Alors, l'apparition des nouveaux lanceurs, liés notamment aux startups,
08:43 nous insère inévitablement dans ce que nous appelons un nouveau marché.
08:47 Pouvez-vous nous en dire un peu plus, tout en tenant compte, bien entendu,
08:52 de l'histoire du spatial à l'échelle européenne ?
08:55 Je fais allusion, vous l'auriez pleinement compris, la famille d'Ariane,
08:59 et l'arrivée très prochaine, nous le souhaitons tous, du lancement d'Ariane 6.
09:04 - Ariane 6. - Ariane 6 2022, qu'on attend tous.
09:10 On est tous hyper mobilisés autour d'Ariane 6, c'est un défi pour tout le monde.
09:15 On est à la fin du développement du programme, maintenant, il faut qu'on ait le premier vol.
09:20 Je touche du bois, c'est un premier vol, il y a toujours une part de risque.
09:24 Mais on est très confiants, le développement technique est très bon,
09:28 le groupe maîtrise son programme, donc on est tous mobilisés autour d'Ariane 6.
09:35 Maintenant, si on prend un pas de recul, et je rebondis sur votre question,
09:38 vous parliez des start-up du lancement.
09:42 Si on pense à Elon Musk, c'est une start-up qui a bénéficié au total de 12 milliards d'euros
09:48 de subventions et de contrats de la part du gouvernement américain.
09:52 Donc il ne faut pas avoir... ce serait une erreur de croire que c'est une start-up
09:57 qui a été faite dans un garage et qui a sorti une fusée dans un garage.
10:00 C'est un garage à 12 milliards d'euros, donc il faut quand même l'avoir en tête.
10:03 12 milliards de dollars, pardon.
10:06 Ça n'enlève rien aux qualités techniques et aux très bonnes idées qu'ont pu avoir Elon Musk et SpaceX.
10:16 A la fois un génie de la communication, il a participé clairement à remettre le spatial au cœur du rêve de tout le monde.
10:25 C'est vraiment génial, bravo.
10:28 Il a mis en place un programme de réutilisable qui permet de faire des lancements pas chers, mais nombreux.
10:37 Ça c'est intéressant aussi.
10:40 Ce n'est pas lui qui est à l'origine du concept, la question du réutilisable a été sur la table depuis longtemps,
10:44 mais par contre il l'a mise en... enfin voilà, il l'a vraiment développé, il l'a industrialisé de manière extrêmement efficace.
10:50 Donc il a fait plein de choses.
10:52 Il faut savoir un truc, c'est que derrière Elon Musk, il y a le gouvernement américain qui subventionne énormément chaque lancement
10:59 et qui subventionne aussi le développement.
11:02 Donc il ne faut pas se tromper, c'est-à-dire qu'on a en face de nous un concurrent très agressif sur les prix
11:12 qui vend ses lancements au coût variable parce que les coûts fixes sont payés par le gouvernement américain.
11:20 Je caricature un petit peu, mais c'est pas ça.
11:23 Mais il ne faut pas se tromper, c'est-à-dire qu'il ne faut pas qu'on y aille en naïveté et il faut que l'Europe reste libre.
11:29 Donc évidemment c'est des défis.
11:31 Quand on a conçu Ariane 6, personne n'imaginait que les prix seraient si bas.
11:38 Donc évidemment on a un défi commercial à relever, mais moi je suis convaincu qu'on va y arriver.
11:44 Et c'est évidemment un moment où tous les pays d'Europe doivent se serrer les coudes pour faire face à cette concurrence incroyable.
11:49 Il faut aussi qu'on prépare l'avenir.
11:51 Et c'est aussi ce qu'on fait avec Ariane Group en réfléchissant demain à des modèles réutilisables, à des petits lanceurs, etc.
11:59 Toutes les lignes, les UPSAT aussi...
12:01 Et c'est aussi évidemment...
12:03 Alors là où on est le plus challengé aujourd'hui, c'est sur le monde des lanceurs.
12:09 Sur le monde des satellitiers, il y a évidemment des grandes ruptures, etc.
12:14 Mais on a une industrie qui est en très grande forme aujourd'hui.
12:19 Qui fonctionne très bien.
12:22 Thales Anisb, Airbus, sont quand même deux champions français et européens.
12:28 Qui ont une départ de marché absolument considérable.
12:32 Sur les télécoms, c'est 60% du marché mondial.
12:36 Je ne suis pas sûr qu'il y ait beaucoup de secteurs technologiques où la France peut se prévaloir de tels succès.
12:42 Donc vraiment ça marche bien.
12:44 Les liens entre le CNES qui finance les programmes de R&D, etc.
12:47 Tout ça fonctionne très bien.
12:49 Ça marche d'enfer.
12:51 Après sur les lanceurs, on est très challengé.
12:53 Et puis il faut aussi préparer le futur.
12:54 Il faut préparer les constellations, etc.
12:56 C'est d'avoir la conscience qu'il faut pérenniser toutes ces actions excellentes, comme vous l'avez dit, sur la durée.
13:02 C'est ça.
13:04 Après ils sont très matures aussi.
13:06 Ils ont leurs propres programmes de R&D.
13:08 On a avec nous Airbus, Thales.
13:12 C'est juste de très très grands champions.
13:15 Et donc nous, notre rôle, c'est de les accompagner, c'est de les aider.
13:18 C'est de les pousser en les alimentant sur la technologie.
13:22 En les encourageant à faire des programmes de R&D.
13:24 Qui ne feraient pas naturellement tout seuls sur des sujets très risqués ou très amonts.
13:28 Mais ils sont très très bons.
13:30 Comment se place le CNES dans ce contexte international où les pays et l'économie ont été fragilisés par la crise ?
13:39 En sachant que si l'on observe attentivement la Chine, on remarque pleinement que son économie interne a repris.
13:46 Ainsi que leurs nombreux projets spatiaux.
13:49 Un autre aspect est à mon sens à considérer.
13:51 C'est que chaque année, il y a plus de 200 000 étudiants scientifiques chinois qui rentrent sur le marché du travail.
13:59 Or ce n'est pas la quantité, mais la qualité qui est à considérer.
14:03 En sachant incontestablement que l'histoire nous a toujours montré que l'ESA et le CNES ont toujours joué un rôle pertinent sur la scène internationale en faisant le bon choix.
14:15 Alors, il y a beaucoup de questions dans votre question.
14:18 Premier point, peut-être la sortie de crise et la situation sanitaire.
14:22 Déjà, sortie de crise, là aussi, je touche du bois pour une deuxième fois.
14:26 Il faut tous espérer qu'on est vraiment en sortie de crise.
14:30 Moi, déjà, je voudrais saluer la mobilisation incroyable, non seulement des salariés du CNES, pendant la crise sanitaire.
14:39 C'est juste remarquable.
14:41 Les gens ont travaillé beaucoup de chez eux, mais pas tous.
14:44 Il y en a un certain nombre, des gens qui opèrent des satellites, etc.
14:47 qui ont été mobilisés 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, parce que c'était des services vitaux et qui ont opéré dans des conditions qui n'étaient pas simples.
14:57 Franchement, moi, je tire mon chapeau.
15:00 C'était remarquable.
15:02 Et je crois que ça dépasse aussi le CNES.
15:05 Les autres acteurs de l'écosystème ont aussi été extraordinairement mobilisés.
15:10 On a un plan de relance, qui est lancé par Bruno Le Maire et par le gouvernement.
15:16 Et qui est porté par le CNES pour ce qui s'agit du spatial.
15:20 Ça y est, on a commencé à signer les premiers contrats.
15:23 Donc moi, j'espère, je suis convaincu qu'on va y arriver et qu'il n'y aura pas de casse.
15:30 On a pris un peu de retard sur un certain nombre de programmes.
15:33 Mais il n'y a rien qui m'inquiète vraiment, fondamentalement.
15:36 Il faut qu'on fasse très attention à nos petits sous-traitants, parce que ce ne sont pas tellement les Prime qui m'inquiètent le plus.
15:42 C'est plutôt les sous-traitants de deuxième ligne qui ont plus de mal à encaisser le choc de la crise.
15:49 Il faut qu'on soit vigilant.
15:51 Sur la Chine.
15:56 La Chine est une puissance spatiale qui augmente son investissement de manière absolument considérable.
16:03 La Chine investit plus que l'Europe sur le spatial.
16:08 Moins que les US probablement, mais plus que l'Europe.
16:12 Et ils ont quelques très beaux succès, en particulier sur le vol habité, qu'on a pu voir ces dernières semaines.
16:19 Ils ne maîtrisent pas encore tous les sujets.
16:24 Mais j'ai aucun doute sur le fait que nos amis chinois ont démontré leur capacité à non seulement apprendre,
16:30 mais faire plus qu'apprendre, à se mettre au meilleur niveau international
16:33 et à concevoir aussi de nouveaux objets et de nouvelles idées dans plein de secteurs.
16:37 Et donc, y compris dans le spatial, je suis confiant.
16:41 On a historiquement de bonnes relations avec les Chinois dans le monde du spatial.
16:47 Maintenant, il faut être très clair, on voit bien qu'on est dans une repolarisation politique
16:52 à niveau géoscientifique global, mais aussi au niveau spatial.
16:56 Et donc, si je prends l'exemple de la Lune et de Mars,
16:59 on voit bien qu'aujourd'hui, il y a deux, voire trois projets qui sont en train de rentrer en compétition.
17:03 Un projet autour des Américains, un projet veux-Chinois de l'autre,
17:07 et peut-être un projet européen, ce n'est pas complètement clair.
17:10 Probablement que l'Europe contribuera de manière très significative au projet américain,
17:15 mais ce n'est pas encore complètement décidé, complètement fait.
17:20 Donc, on voit bien qu'il y a une forme de recolarisation du monde sur ce sujet-là,
17:24 et avec des volontés de puissance qui sont extrêmement affirmées,
17:29 qui vont peut-être doper les investissements.
17:31 Après, on peut peut-être regretter aussi, tout simplement,
17:33 qu'on ne soit pas en mesure, tous ensemble, de se mettre ensemble
17:35 pour réfléchir à ce que pourrait être l'exploration spatiale de demain.
17:38 Si on veut aller sur Mars, on a peut-être intérêt à le faire tous ensemble,
17:41 plutôt que d'aller avec trois équipes différentes.
17:45 Mais ça, c'est un autre sujet.
17:47 Peut-être un dernier point, vous mentionnez la question des compétences
17:51 en science, en technologie.
17:55 Alors, moi, j'ai beaucoup travaillé sur ces sujets-là,
17:58 pas forcément dans le domaine du spatial, mais plus sur l'ensemble des sujets,
18:01 sciences et technologies.
18:03 On est très, très bons en France et en Europe.
18:08 On a des ingénieurs ou des universitaires ou des chercheurs
18:12 qui sont remarquablement formés, très, très bons.
18:18 Si vous allez sur la côte ouest des États-Unis et que vous vous promenez,
18:21 il y a beaucoup de gens qui parlent français,
18:23 énormément de jeunes qui viennent de nos grandes écoles et de nos universités.
18:28 C'est à la fois un motif, évidemment, de fierté, et c'est très bien de faire ça.
18:32 Il faut que ça se passe dans les deux sens.
18:35 Je ne crois pas qu'on ait de fuite de cerveau,
18:37 mais il faut qu'on ait des flux qui viennent de...
18:40 Il faut qu'on ait des flux dans tous les sens.
18:42 Le seul risque que je vois aujourd'hui, je pense qu'on est bien positionnés,
18:45 le seul risque que je vois, c'est...
18:49 Il faut dire aux jeunes de venir faire de la science et de la technologie.
18:52 C'est juste un bonheur, quoi.
18:54 Parce que si vous voulez comprendre le monde aujourd'hui,
18:57 vous ne pouvez pas comprendre le monde aujourd'hui
18:59 si vous ne comprenez pas ce que sont les mathématiques,
19:03 le numérique, la physique, la biologie, la science.
19:07 Ce n'est pas juste une petite culture dont vous avez besoin.
19:10 C'est simplement, tout le monde dans lequel vous vivez aujourd'hui,
19:13 il est construit autour de la science et de la technologie.
19:16 Et donc, pour penser ce monde,
19:18 il faut que vous ayez une culture scientifique solide.
19:21 C'est vraiment un message de bons citoyens.
19:24 Évidemment que c'est important de faire des humanités.
19:27 Évidemment que c'est important de faire des langues, de la science,
19:30 de la science politique, tout ça, bien sûr.
19:32 Mais aujourd'hui, la science et la technologie,
19:35 ça structure notre pensée et ça structure le monde.
19:37 Regardez les débats que vous avez autour du Covid aujourd'hui.
19:41 C'est absolument incroyable, le vaccin, comment il a été mis en place.
19:45 C'est quoi ces nouvelles technologies de vaccins ?
19:49 C'est quoi les débats sur les essais ?
19:51 Toutes ces questions-là, c'est des questions de science et de technologie
19:55 qui sont profondément bouleversées
19:57 parce qu'on est encore dans une phase d'accélération de la science et de la techno.
20:01 Venez, je dis aux jeunes, mais venez faire de la science et de la technologie.
20:04 Mais même sur un mode mineur, même si ce n'est pas demain votre métier,
20:09 par contre, il faut que vous soyez exposés dans votre parcours.
20:12 C'est un truc auquel je crois profondément.
20:14 Il faut que vous soyez exposés dans votre parcours
20:16 à ces questions de science et de technologie.
20:18 Il faut que, j'ai envie de dire, nos amis de Sciences Po,
20:24 mais c'est très bien de faire des sciences politiques, c'est fabuleux,
20:28 c'est des gens très brillants que j'ai eu le plaisir de beaucoup côtoyer ces dernières années.
20:33 Mais par contre, pourquoi vous n'avez pas fait de science et de technologie ?
20:36 Venez, c'est important, c'est important pour comprendre le monde.
20:39 Alors, que conseillez-vous aux jeunes filles et aux jeunes garçons
20:45 intéressés par les sciences en général et le spatial et l'aéronautique en particulier ?
20:50 Continuez. Moi, j'ai envie de dire, c'est continuez et ouvrez-vous.
20:54 Tout à l'heure, je disais en gros aux gens qui ne faisaient pas de science, faites-en.
20:58 Mais moi, je dis maintenant aux gens qui font des sciences,
21:00 attention, les sciences, c'est super, mais ouvrez-vous au-delà des sciences,
21:04 au-delà de votre champ applicatif.
21:06 Donc, si vous faites de la biologie, intéressez-vous à l'informatique.
21:09 Si vous faites de l'informatique, intéressez-vous à la physique.
21:12 Et dans tous les cas, intéressez-vous aussi à ce qui se passe à côté.
21:15 Regardez, faites de la philo, ouvrez-vous au reste du monde, c'est important.
21:20 C'est votre culture d'honnête homme et c'est votre culture de citoyen de demain.
21:23 Mais c'est aussi votre culture d'ingénieur et votre culture de manager demain
21:29 dans le monde de l'industrie ou de la recherche.
21:33 C'est très, très important d'avoir à la fois des gens qui sont très bons dans leur domaine,
21:38 ça, on en a absolument besoin, parce que si vous faites de la propulsion,
21:42 vous voulez le gars qui soit top dans le domaine de la propulsion,
21:44 pareil dans le domaine de la thermique.
21:46 Mais après, si vous voulez vous épanouir dans votre environnement,
21:49 c'est important pour vous, et ça, c'est vraiment mon message,
21:52 c'est important pour vous d'aller regarder à côté, d'aller regarder dans d'autres champs
21:56 et de vous ouvrir. Ouvrez-vous.
21:58 Allez à l'étranger, allez voir ce qui se passe à l'étranger.
22:01 Allez passer trois ans aux US, allez passer trois ans n'importe où.
22:05 Ouvrez-vous, ouvrez-vous, vous allez apprendre plein de choses.
22:08 Et puis n'ayez pas peur.
22:10 Moi, dans mon expérience, qui n'est rien d'autre que mon expérience propre,
22:16 il y a plein de parcours, chacun doit construire son parcours.
22:18 J'ai souvent changé de secteur. J'ai fait de l'informatique, j'ai fait des maths.
22:22 Je suis allé m'intéresser au monde de l'énergie, au monde spatial.
22:26 Et à chaque fois, moi, j'ai appris plein de choses.
22:28 Et à titre personnel, c'est hyper enrichissant.
22:34 Pour finir, les associations scientifiques et techniques,
22:39 sont-elles pour vous une nécessité au sein de notre société et pourquoi ?
22:44 En tout cas, moi, ce que je crois, c'est qu'il faut développer la culture scientifique et technique.
22:48 Lorsque l'on parle d'une culture scientifique, on dit qu'on est sur la bonne lignée
22:54 d'une culture scientifique et technique acquise sur le terrain,
22:58 de la manipulation, de l'expérimentation, de la maîtrise des notions
23:01 et de l'engagement sur les projets.
23:03 Oui, bien sûr. Et ça, ça doit commencer très tôt.
23:06 Ça commence à l'école. Et j'ai envie de dire, ça ne devrait jamais finir.
23:11 Donc, voilà, ça, c'est vraiment très important.
23:14 Je pense que la place des sciences dans notre société,
23:18 je veux dire les choses pudiquement, n'avance pas.
23:21 Et ça, c'est un vrai sujet. Pourquoi ? Parce que vous avez la montée
23:27 de tous ces phénomènes totalement absurdes, complotistes, climato-sceptiques,
23:34 vaccino-sceptiques, whatever.
23:37 Et ça, je veux dire, c'est... Alors, à la fois, le doute est consubstantiel à la science,
23:43 mais c'est un doute qui est un doute qui est raisonné et qui est un doute qui est étayé.
23:47 Le doute, ce n'est pas de s'opposer simplement à des vérités scientifiques
23:54 qui sont établies simplement pour le plaisir de créer de la polémique.
24:00 Et c'est ça qu'on voit émerger aujourd'hui et que je trouve très, très inquiétant.
24:04 Douter, pour un scientifique, encore une fois, c'est au cœur de notre travail.
24:08 Mais ce doute, il s'inscrit au sein d'un modèle.
24:11 Ça veut dire que j'ai un modèle qui est posé, j'en vois ses limites,
24:14 donc j'en doute et éventuellement, je vais construire un autre modèle.
24:17 C'est comme ça qu'on raisonne et c'est comme ça qu'on fait avancer la science.
24:20 C'est la polémique et ce n'est pas la juxtaposition de polémique.
24:25 Ce que je trouve dramatique et profondément triste,
24:28 c'est de voir qu'on a aussi un certain nombre de scientifiques qui sont très bons
24:31 et qui tombent dans cette polémique et qui, quelque part, fourvoient plein de gens
24:37 et une partie de la société à travers ces polémiques absurdes.
24:41 Merci.
24:42 Merci beaucoup.
24:44 Merci.
24:45 Merci.
24:47 Sous-titrage Société Radio-Canada
24:51 © Sous-titrage Société Radio-Canada
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