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Dans son édito du 13/12/2025, Jules Torres revient sur la colère des agriculteurs.

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Transcription
00:00Il y a des images qui devraient tous nous faire arrêter des gendarmes face à des agriculteurs,
00:04des troupeaux condamnés, euthanasiés, des exploitations encerclées,
00:08parfois sous protection de blindés.
00:10Et pourtant, en face, ce ne sont pas des black blocs, ce ne sont pas des émeutes,
00:14ce ne sont pas des casseurs professionnels, ce sont des éleveurs, des paysans, des agriculteurs,
00:19des hommes et des femmes qui travaillent, qui produisent, qui nourrissent ce pays depuis des générations.
00:24Et pourtant, ce sont eux que l'on affronte aujourd'hui.
00:26Ce qui choque, ce n'est pas la colère, elle est compréhensible.
00:29Ce qui choque, ce sont ces scènes que vous voyez à l'écran de confrontations
00:32entre ceux qui protègent les Français et ceux qui les nourrissent.
00:36Deux mondes qui, normalement, ne s'opposent jamais.
00:38Deux piliers d'une même France, la France qui se lève tôt,
00:41la France qui ne demande pas grand-chose, la France qui ne brûle pas, qui ne casse pas,
00:45qui ne bloque pas par plaisir, la même France, celle dont on est habituellement fiers.
00:49Et pourtant, l'État nous oblige à voir ces images.
00:52Et quand l'État se retrouve face à face avec nos agriculteurs,
00:55c'est que quelque chose est brisé.
00:57Ce n'est donc plus un simple problème d'ordre public.
01:00C'est un malaise politique, presque un malaise moral.
01:02Et cette colère, Jules, elle ne tombe pas du ciel.
01:04Elle naît des décisions qui sont prises loin, en fait.
01:07Oui, les agriculteurs ne contestent pas l'existence d'un risque sanitaire sur cette fameuse DNC.
01:12Ils ne sont ni irresponsables, ni inconscients.
01:14Ils contestent en revanche une décision qu'ils jugent brutale, disproportionnée, imposée sans discussion.
01:20Ils contestent donc une méthode, et cette méthode, encore une fois, vient d'en haut, de Paris et de Bruxelles.
01:26Des règles européennes pensées loin des terres, traduites en arrêtés nationaux,
01:30appliquées mécaniquement sur le terrain par la petite armée grise des ministères et des préfectures.
01:34Une logique administrative, froide, abstraite, complètement déshumanisée,
01:39comme si la colère des agriculteurs exprimées depuis des mois n'avait finalement jamais existé,
01:43comme s'ils n'avaient à rien demandé qu'autre chose de très simple,
01:47être entendu ou au moins écouté.
01:49Mais pour l'administration, il ne s'agit que de tête de bétail.
01:52Au fond, une vache, c'est un chiffre, une ligne sur un tableau Excel.
01:56Pour l'éleveur, c'est autre chose.
01:57Ce sont des années de travail, de sélection, de soins, de patience.
02:00Un troupeau, ce n'est pas un stock, c'est un capital vivant, un lien, une histoire et même une fierté.
02:06Il suffit d'avoir discuté cinq minutes avec un éleveur pour le comprendre.
02:11Et pourtant, une fois de plus, les agriculteurs ont le sentiment d'être mis devant le fait accompli,
02:15pas consulter, pas écouter, sommet d'appliquer et surtout sommet de se taire.
02:20Quand Paris décide, quand Bruxelles prescrit et que la France des champs encaisse,
02:25ce n'est pas seulement une crise agricole, c'est le symptôme d'un pouvoir qui ne fait plus confiance à ceux qui savent,
02:30qui gouverne par des normes plutôt que par le dialogue et qui préfère la règle parfaite sur le papier
02:35à la réalité souvent imparfaite du terrain.
02:38Et derrière les normes, les arrêtés, il y a aussi des hommes et c'est trop souvent eux qu'on oublie.
02:43Oui, au bout de cette chaîne, il y a des hommes, il y a des femmes que l'on laisse seuls face à leur désespoir.
02:48Alors oui, il faut le dire clairement, ce matin sur CNews, les agriculteurs méritent mieux.
02:52Ils méritent autre chose que des arrêtés tombés du ciel, autre chose que des forces de l'ordre envoyées
02:56pour faire appliquer des décisions qu'ils ne comprennent pas,
02:59prises par un pouvoir qui trop souvent ne cherche même plus à comprendre les raisons de leur colère
03:03parce que nous avons tous en réalité une dette morale envers les agriculteurs.
03:07Parce que ce sont eux, encore une fois, qui nous nourrissent,
03:09parce que ce sont eux qui tiennent nos campagnes, parce que ce sont eux qui, malgré les charges, malgré les normes, malgré les crises,
03:14continuent quand tant d'autres auraient déjà renoncé.
03:16Ils ne demandent pas l'impunité, ils demandent du respect, de la considération, un petit peu de concertation,
03:21car on ne protège pas une filière en s'en prenant à ceux qui la font vivre.
03:25On parle beaucoup, vous savez en ce moment, de souveraineté alimentaire,
03:28mais elle ne se décrète malheureusement pas depuis un bureau parisien.
03:31Elle se construit avec ceux qui travaillent la terre,
03:33un pays qui humilie ses agriculteurs, se fragilise lui-même,
03:36un pays qui oppose la force publique à ceux qui le nourrissent,
03:39perd le sens de ses priorités.
03:41On peut protéger la santé animale sans écraser les éleveurs,
03:44on peut appliquer des règles sans mépriser le terrain,
03:47parce qu'à la fin, une chose est certaine,
03:49un pays qui cesse de respecter ceux qui le nourrissent
03:51finit toujours par avoir faim.
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