- il y a 21 heures
L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, de retour en France après un an de détention en Algérie, accorde sa première interview à France Inter. Il évoque ses conditions de détention et son état d'esprit.
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00:00Bonjour Boilem Sansal.
00:01Bonjour.
00:02Merci d'avoir choisi France Inter ce matin pour votre première prise de parole à la radio.
00:07On est très heureux de pouvoir vous entendre.
00:10On va parler évidemment de cette année passée en détention,
00:13de votre regard sur l'état des relations entre la France et l'Algérie.
00:17Mais d'abord, tout simplement, Boilem Sansal, ça fait 12 jours que vous êtes sorti de prison.
00:22Vous êtes en France depuis 6 jours.
00:24Comment allez-vous ?
00:26Très bien. Voilà. Très très bien.
00:28Je suis très heureux, évidemment. Je ne m'attendais pas à être là.
00:32Je salue, je serai un jour ou l'autre libéré, mais pas aussi vite.
00:36Et donc, c'est très bien. Je suis super heureux.
00:40J'ai été très bien accueilli en Allemagne, très bien accueilli en France.
00:43Vraiment, parfait.
00:45Vous avez dit à Kamel Daoud au moment de votre arrivée en Allemagne,
00:50« Je suis costaud, tu sais. Je ne vais pas être détruit par une petite année de prison. »
00:54C'est de la bravade. J'ai dit ça comme ça.
00:56Non, mais c'est vrai que la prison, on peut s'y habituer. Il ne faut pas croire que c'est si terrible que ça.
01:05Ah bon ?
01:05Oui, on s'habitue. On a des amis. On a sa petite routine, la cellule, la cour, l'infirmerie.
01:13Bon, on a des amis. On discute. On s'amuse comme des gamins. On fait du sport.
01:18Parce qu'on est dans une prison, on est obligé de garder sa souffrance pour soi.
01:21Les prisonniers ne communiquent pas sur ça. C'est le silence. On pleure dans sa cellule, le soir, tout seul, dans sa tête.
01:32C'était votre cas ?
01:34C'était le cas.
01:35Vous dites « On garde sa souffrance pour soi ».
01:37Oui, c'est ça, absolument. Parce que parler avec les autres, on n'a pas les mêmes termes, on n'a pas la même façon de voir le monde.
01:46Moi, j'étais dans un quartier de très haute sécurité avec des terroristes, des gens de Daesh, des islamistes.
01:53J'avais en face de moi, qui était dans les années 90, le chef d'un groupe qui s'appelait le FIDA, appartenant au GIA,
02:05qui était chargé d'assassiner les intellectuels, les journalistes.
02:09Il a tué, lui, de ses mains, une centaine de journalistes, quelques écrivains, quelques...
02:15Et vous pouviez... Je l'avais en face de moi.
02:17Vous pouviez échanger avec lui ?
02:19Qu'est-ce que voulez-vous que j'échange avec lui ?
02:21Il y avait d'autres qui venaient de Daesh, qui avaient égorgé tant et plus.
02:25Et puis d'autres qui n'étaient pas de terrorisme, mais des islamistes combattants, combattants, qui prêchent.
02:36À un moment donné, j'étais le seul, on va dire, civil dans une unité carcérale.
02:44Tous les autres étaient des terroristes et des islamistes.
02:46Ça veut dire que, Boalem Sansal, on va revenir bien sûr sur les conditions de votre détention,
02:52mais ça veut dire que vous, l'écrivain, en prison pour ces idées, vous étiez incarcéré avec des gens qui avaient tué, qui avaient massacré ?
03:00Mais j'étais accusé de ça, moi aussi. Terrorisme, espionnage, atteinte à la sûreté de l'État, intelligence avec... etc.
03:12Donc j'étais comme eux. Sur le plan statutaire, c'est la même chose.
03:17Eux que vous dénoncez, les islamistes que vous dénoncez précisément et contre lesquels vous vous battez ?
03:22Oui, ceux que vous dénoncez depuis 20 ans, je les avais en face.
03:24Mais il y avait aussi, parmi ceux qui étaient classés islamistes et terroristes, qui ne l'étaient pas, vraiment.
03:28On les accusait, de cela, comme moi. J'étais accusé de terrorisme, mais je n'étais pas un terroriste, ni d'aucune manière.
03:36Ce qui nous frappe, Boalem Sansal, dans ses premières minutes d'entretien, c'est votre sourire, je le dis aussi pour ceux qui nous écoutent ce matin,
03:43votre force d'âme, malgré l'épreuve que vous avez traversée.
03:47Là encore, à votre ami Kamel Daoud, à peine sorti de prison, vous avez eu cette phrase, vous lui avez dit au téléphone,
03:55retranscrit cette phrase de ma part, bonjour la France, Boalem revient, on va gagner.
03:58Ça veut dire quoi, on va gagner ?
04:00J'ai gagné ma liberté, j'ai résisté à cela. C'est une victoire personnelle.
04:05Parce que j'aurais pu me laisser aller, ce qui arrive souvent chez des détenus qui sont là depuis très longtemps,
04:12qui ont été condamnés à des peines très lourdes, à 30 ans, 40 ans, où j'avais en face de moi des gens qui étaient là.
04:18Depuis 40 ans, ils peuvent être très dangereux pour eux-mêmes et pour les autres.
04:21Donc c'est une victoire. J'ai résisté à cela. C'est ma victoire, ma petite victoire.
04:28Une grande victoire.
04:30Vous avez été confronté à des conditions de détention particulières, plus sévères que les autres ?
04:36Non, je dirais plutôt au contraire. Au départ, j'étais un détenu comme les autres, droit commun.
04:43Et puis, je prends, enfin, le gouvernement algérien, constatant les réactions en Europe, en France,
04:51entendant Macron qui disait que le gouvernement algérien doit libérer immédiatement et sans condition,
04:56Boalem sans salle, il reprend ça trois jours après, de la même manière, encore plus fort.
05:00L'Union européenne qui a aussi fait des déclarations très fortes.
05:05Nous demandons au gouvernement algérien de libérer immédiatement et de recevoir une mission médicale pour s'assurer de...
05:11Bon. À partir de là, il y a eu une sorte d'un ordre qui a été donné, je pense, par le président.
05:17Il faut faire attention. Il faut le soigner. Il faut... Voilà.
05:19Et donc, à partir de là, j'étais comme un cocobat.
05:22Voilà. J'étais plus surveillé que d'autres, mais pour me protéger des attaques des islamistes ou des terroristes.
05:31Et puis, j'avais quelques petites facilités. Par exemple, la douche.
05:35Moi, je pouvais prendre une douche tous les jours pour les prisonniers.
05:38C'est une douche tous les dix jours.
05:42Cinq minutes, mon trauma. Il faut deux minutes pour se déshabiller.
05:46Une minute, il rentre sous le jet. Et il ressort deux minutes pour s'habiller.
05:50C'est terminé. Moi, j'allais à la douche tous les jours.
05:53Je prenais ma douche tranquillement. Voilà.
05:55Vous aviez des livres ?
05:56J'avais un menu spécial.
05:57Vous aviez des livres ?
05:58Non. Des livres en français, non.
06:01Des livres en arabe, il y a là. C'est sur le Coran, surtout.
06:04C'est des livres religieux.
06:06Des livres en français, c'est vraiment...
06:08C'est des trucs qui ont été abandonnés par d'anciens prisonniers.
06:12C'est de vieux trucs, tout pourris, bouffés par les mythes.
06:17C'est-à-dire, c'était quoi ces livres ?
06:19De vieux livres, au temps où l'Algérie était francophone, etc.
06:25Victor Hugo, j'ai trouvé Victor Hugo, c'était formidable.
06:28En bon état, Notre-Dame de Paris.
06:32J'ai retrouvé deux de mes auteurs favoris,
06:36Monterland et Maupassant.
06:39Tout déchiré.
06:40J'arrivais quand même à recoller les trucs.
06:42Et j'arrivais, voilà.
06:45Donc les détenus savaient que j'étais chercheur de livres.
06:49Et donc, quand ils tombaient sur un truc, ils me le faisaient parvenir.
06:52Quelquefois, c'était des livres de cuisine.
06:53Des choses comme ça.
06:54Mais donc, vous avez aussi tenu, en lisant ces livres, même s'ils étaient mités, même si certaines pages manquaient,
07:01vous avez relu Hugo, Monterland, Maupassant pendant cette année de détention ?
07:05J'ai découvert, cette chose est terrible, en prison, c'est que notre mémoire se vide.
07:13Je cherchais mes mots.
07:15Mais les mots les plus simples, comme table, chaise, comment ça s'appelle ça ?
07:19Voilà, la mémoire est touchée très rapidement.
07:23On ne sait plus parler, on ne sait plus...
07:25C'est vraiment terrible.
07:26Donc j'avais besoin, de la seule façon...
07:29Il fallait que je sois entouré de francophones, ce qui a été le cas.
07:32Donc on a trouvé des prisonniers qui parlaient bien français, qu'on a mis dans l'autorité carcérale.
07:40Un box, ça s'appelait un box.
07:43Et puis, la lecture.
07:45Mais chez nous, j'ai essayé de réciter de vieux poèmes.
07:49Lesquels, par exemple ?
07:50Je rêvais souvent, je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant d'une femme qui m'aime et que j'aime,
07:57et qui me comprend vers l'âme.
07:58Et puis, là, je calais, alors que je connaissais des milliers de poèmes par cœur.
08:04Et là, je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant d'une femme qui m'aime et que j'aime et qui me comprend.
08:13Et puis, je sais qu'après, c'est passionnant, c'est formidable.
08:15Lisez-le, vous verrez.
08:17C'est un poème magnifique.
08:20Mais je calais.
08:21Mais c'est l'effet de la solitude, ça ?
08:22Je ne sais pas.
08:24Je ne sais pas.
08:25C'est la mauvaise alimentation.
08:27On est complètement déréglé dans son rythme.
08:31Son horloge biologique fonctionne d'une drôle de manière.
08:34On déjeune à 10 heures, on dîne à 16 heures.
08:37On dort à 4 heures du matin parce qu'on ne dort pas la nuit.
08:41On se dérègle complètement.
08:43Intérieurement, on se ferme.
08:48On peut être très volubile.
08:49Je suis volontiers avec les gardiens.
08:51Je blague et tout ça.
08:52Venez, on va faire du sport, un truc, machin.
08:54Mais intérieurement, on se ferme.
08:56Qu'est-ce qui était le plus dur en détention quand on est un écrivain comme vous ?
09:06Est-ce que c'est, là encore, comme le disait Florence, la solitude ?
09:09Est-ce que c'est le manque de liberté ?
09:12Est-ce que c'est cette impression d'être coupé du pays que vous aimez ?
09:16Je rappelle que vous veniez d'être naturalisé français.
09:18Qu'est-ce qui était le plus dur ?
09:19Non, je crois que c'est l'absence de liberté.
09:25D'abord, j'avais l'impression que j'allais rester toute ma vie.
09:29À mon âge, condamné à 5 ans, la probabilité pour que je finisse en prison était quand même très, très grande.
09:37Vous aviez l'impression que c'était quand même...
09:38En 80 à 80 ans, c'est quand même là...
09:40C'était quasiment une sorte de...
09:41C'était quasiment une peine de mort pour vous ?
09:43Quasiment.
09:45Je le ressentais comme ça.
09:46Je me suis dit, même s'il me libère dans 5 ans, quoi, il me restera peut-être 6 mois, une année à vivre.
09:52Je serais dans un état...
09:53Parce que je voyais quand même les prisonniers longue durée, dans quel état ils étaient.
09:57C'est des légumes, hein.
10:00Et des prisonniers, j'ai passé avec une année, je ne les ai jamais entendus parler.
10:04Ils sortent de la cour, ils s'assoient dans un coin, puis sont comme ça.
10:06Vos soutiens, on dit, leur colère, on lui a volé un an de sa vie.
10:14Vous, vous avez cette sensation-là aussi ? Vous êtes en colère ?
10:17Oui, mais plus que la liberté, c'est ma dignité.
10:21J'ai été humilié constamment.
10:25Être prisonnier, c'est une humiliation.
10:27On vous fout, il m'intéresse soir.
10:29Vous êtes comme un toutou.
10:30Viens ici, assieds-toi là-bas, va là-bas, truc.
10:34Mange, assieds-toi.
10:35Moi, ça c'est terrible, on est un chiot, quoi, entre les mains.
10:40Les gardiens, ils vous parlent comme ça, ils n'ont même pas besoin de vous parler, ils vous font comme ça.
10:45Ça veut dire, vous, ok.
10:48Un geste.
10:49L'humiliation, la perte de la dignité, la perte de soi, quoi.
10:54Je n'étais plus Boilem-Sensel, j'étais un prisonnier parmi d'autres.
10:58Je voudrais, Boilem-Sensel, qu'on vienne en arrière, votre arrestation à Alger en novembre 2024.
11:05Vous aviez des craintes en allant en Algérie.
11:09Est-ce que vous saviez que vous étiez en danger en atterrissant à Alger ?
11:12Bien entendu.
11:14Le régime est très sévère avec les intellectuels de manière générale.
11:20Les journalistes, le nombre de journalistes qui ont été incarcérés ces deux dernières années.
11:26Je crois qu'on peut les compter par dizaines.
11:28On doit être à 50 journalistes qui sont passés en prison.
11:31Certains ont été très peu de temps, une semaine, deux semaines, mais d'autres sont restés deux années, trois années, quatre années.
11:37Ils sortent de là complètement détruits.
11:39Donc, je sentais cette...
11:41Moi, je vis en Algérie, je ne vivais pas en France.
11:44Je vis en Algérie.
11:45Donc, je venais ici pour mes rencontres littéraires et tout ça.
11:49Et donc, si, je sentais quand même un moment donné, avec l'arrivée de ce nouveau régime,
11:54qui a tout de suite montré qu'on disait à l'époque, la récréation est terminée.
12:02Le pouvoir veut absolument contrôler la société totalement pour éviter la réédition du Irak des dernières années.
12:11Le Irak était ce mouvement de protestation, notamment des jeunes contre le régime.
12:15En fait, Boalem Sansal, pour ce régime algérien, vous êtes sans doute tout ce qu'il déteste.
12:22Vous combattez contre l'islamisme.
12:25Vous êtes un militant de l'universalisme.
12:27Un militant aussi de la laïcité.
12:29Un voltairien qui défend la liberté d'expression, la démocratie.
12:34C'est tout ça qu'ils ont voulu enfermer.
12:37Alors, oui, évidemment.
12:38À cause de tout ça, ils me détestent.
12:40Je suis surveillé.
12:41Bien sûr, j'ai été limongé.
12:43Ma femme a été limongée également.
12:46Donc, il y a eu plein d'actions comme ça qui ont fait que je voyais venir le...
12:50Non, mais là, c'est conjoncturel.
12:52Je crois qu'il n'a jamais été dans l'esprit du gouvernement de m'arrêter.
12:55J'étais, au contraire, une caution pour le gouvernement.
12:59Et ça a été dit et redit.
13:01Le président qui disait, vous nous traitez de dictateur.
13:04Mais regardez, Boalem Sansal.
13:06La preuve que non.
13:07Il passe son temps à nous égratigner, à nous é...
13:10Voilà, il est libre.
13:12Non, c'est qu'à un moment donné, entre l'Algérie et la France, il s'est passé quelque chose.
13:18Un divorce ontologique au moment où Macron a décidé de reconnaître la marocanité.
13:24du Sahara occidental.
13:26Ça, c'est hyper, hyper, hyper sacré.
13:29Le gouvernement algérien a deux hauches, on va dire, politiques, idéologiques.
13:36C'est le Sahara occidental et la Palestine.
13:38C'est avec ça qu'il se justifie, qu'il se donne une dimension messianique, africaniste.
13:47Et là, c'était la rupture avec la France.
13:49Et moi, je suis la France.
13:51Pour eux, je suis la France.
13:52Un morceau de la France.
13:54Vous vous considérez...
13:56Vous avez été otage de la dégradation de cette relation entre la France et l'Algérie.
14:01Absolument, c'est ça.
14:04Et il fallait...
14:05Alors, il y avait déjà beaucoup de franco-algériens et même français, comme Christophe Glees.
14:11Mais il fallait que la qu'un emblématique...
14:14Qui, voilà, c'était...
14:16Ça aurait pu être qu'Amel Daoud, il le déteste autant, sinon plus que moi.
14:20Mais moi, j'étais en Algérie.
14:22J'étais là, il me tenait...
14:24Et vous avez été inculpé pour des propos qui relèvent, selon le régime algérien, de l'atteinte à l'unité nationale.
14:34Vous vous êtes exprimé sur le partage des frontières entre l'Algérie et le Maroc.
14:40C'est pour ça qu'on vous a arrêté.
14:42On vous a demandé de revenir sur ces propos ?
14:44Non, mais il fallait un prétexte.
14:46Ils ont décidé d'arrêter parce que, voilà, rupture ontologique avec la France à propos du Sahara occidental.
14:54Sur le plan formel, il faut un grief bien identifié.
14:59C'était terrorisme, espionnage, atteinte à ceci, atteinte à la sûreté de l'État, atteinte à la morale de l'armée.
15:10Il y avait toute une liste, une kyrielle de griefs, dont celui-ci, atteinte à la frontière.
15:17Et vous l'avez raconté, quelqu'un qui vient vous voir quand vous êtes en prison et qui vous dit,
15:23Boilem Sansal, ce serait bien de mettre de l'eau dans votre vin.
15:27Ça, c'était le dernier jour.
15:29J'avais reçu, évidemment, ce que j'ai appelé, en faisant référence à des événements français,
15:36les visiteurs de la nuit, je les appelais.
15:37De temps en temps, c'est vrai, c'est quand j'étais à l'hôpital.
15:41Quand j'étais à l'hôpital, c'est arrivé deux ou trois fois, le soir, vers minuit, une heure du matin,
15:48crac, crac, crac, la porte s'ouvre entre des gens.
15:51C'était des visiteurs, c'était des généraux, des trucs, des machins, qu'ils voulaient voir, par curiosité,
15:56qu'ils venaient discuter.
15:57J'étais en curiosité pour eux.
15:59Et ils vous disaient, ce serait bien de modérer ses propos.
16:03De manière très, très bourgeoise, on s'asseyait, je m'asseyais sur mon lit, et puis ça va, vous êtes bien traité.
16:10Ben oui, merci beaucoup.
16:12Est-ce que je pourrais avoir une autre télé ? Parce que ça ne marche pas.
16:14C'était, voilà, on blaguait.
16:17Et puis, ils ont profité pour me faire ma petite leçon.
16:22Vous savez, je pense que, d'abord, vous n'êtes pas historien, vous dites beaucoup de choses qui...
16:28Alors, ce n'est pas bien, vous n'êtes pas historien, vous racontez n'importe quoi.
16:32Ben, très bien, envoyez-moi vos historiens qui m'expliquent.
16:35Moi, j'ai mes sources, et j'ai des sources d'historiens sérieux.
16:41Ben, si vous avez des historiens sous la main, vous me les envoyez, qui m'expliquent.
16:45Voilà, tout ce genre de conversation, mi-sourir, mi-menace, voilée.
16:50Oui, mais quand ces gens-là vous disent, ce serait bien de modérer les propos, de mettre de l'eau dans votre vin, qu'est-ce que vous leur répondiez ?
16:56C'est le dernier jour, c'est quelqu'un, j'imagine que c'était un général, un patron des services secrets, je ne sais pas.
17:01Dans sa dégâne, c'était vraiment un homme très, très important, qui m'a reçu pendant une demi-heure.
17:07Une demi-heure après, j'étais embarqué pour rejoindre l'aéroport, prendre l'avion pour Berlin, où c'était quand même ça, en faisant un deal.
17:14C'est ça qu'il est venu me dire.
17:15Voilà, j'espère que vous allez être libérés, alors que l'avion m'attendait pour partir à Berlin, il me dit, j'espère que vous serez bientôt libérés.
17:23Ce serait quand même bien de faire très attention à ce que vous dites, l'Algérie est dans une situation, elle est haïe, tout le monde, on critique, c'est faux, vous le savez très bien,
17:33et nous, c'est le pays des martyrs et des trucs et des machins.
17:36Et voilà, c'était un moment donné, on m'a tendu là-bas.
17:41J'espère que vous avez compris.
17:43J'ai dit, oui, je pense avoir compris.
17:46Au revoir.
17:47Et puis là, on est venu me prendre pour m'amener à l'aéroport.
17:50Mais donc, quand on vous dit cela, ça veut dire que vous allez mettre de l'eau dans votre vin,
17:55que d'une certaine manière, compte tenu de ce qui vous est arrivé, vous allez modérer vos propos, être peut-être moins libre ?
18:01Momentanément, oui, parce qu'il y a des enjeux aujourd'hui.
18:07La partie n'est plus seulement entre l'Algérie et la France et Bolem Sansal au milieu.
18:12Il y a l'Algérie et la France, il y a l'Allemagne, il y a une scénographie qui a été établie.
18:18On ne peut pas penser que le président allemand, subitement, un matin, il se l'avait dit,
18:24je vais écrire à Teboud pour qu'il libère Bolem Sansal.
18:27On voit bien qu'il y a un scélario qui a été écrit déjà, je crois, au mois de juin, déjà.
18:32Moi-même, parce que j'écrivais beaucoup au président Teboud et aux ministres de la France.
18:38Ah oui, je passais mes journées à leur écrire.
18:41Tantôt des lettres très violentes dans lesquelles je les traitais de dictature, qui n'avaient rien compris, etc.
18:48Et quelquefois, au contraire, j'ai essayé de jouer un rôle.
18:50J'ai même proposé au président, dans ma dernière lettre, je lui ai dit, écoutez, amenez-moi à l'ambassade de France.
18:59Je vais appeler Macron et on va, si vous voulez, on va concocter un truc qui...
19:04Vous avez proposé d'être un médiateur entre la France et l'Algérie.
19:08Mais je lui ai dit, je vous précise, parce que Macron ne me prendra pas au téléphone sur une ligne quelconque.
19:14Il faut que ce soit une ligne sécurisée.
19:15Donc, celle de l'ambassade, évidemment, cryptée, mais j'aurais proposé, bien sûr.
19:21Boulême Sansal, pour, là encore, qu'on comprenne ce que vous avez vécu pendant un an,
19:25qu'est-ce que vous vous disiez sur votre pays, l'Algérie, que vous connaissez bien, vous y êtes né, c'est votre pays natal,
19:32sur ce qu'était devenu ce pays capable de mettre en prison un de ses écrivains ?
19:36Je n'ai jamais dit que des bonnes choses sur l'Algérie.
19:39L'Algérie, c'est un pays avec un peuple, des montagnes, des rivières.
19:44Il n'y a rien à dire.
19:45Moi, j'ai toujours critiqué le gouvernement, et de manière toujours très précise.
19:49Moi, je n'aime pas les trucs d'ordre général, de dictature, dire « je dénonce la dictature », mais c'est quoi ?
19:56Donc moi, dans mes écrits, c'est toujours très précis, très « je dénonce monsieur un tel, monsieur un tel, pour telle politique et telle politique ».
20:03Et ça, je l'ai toujours fait, depuis toujours, avant même d'être l'écrivain.
20:08J'étais un citoyen, un militant dans des...
20:11Encore un mot sur votre détention, Boilem Sansal.
20:14Vous parliez des livres que vous aviez, certains mités.
20:20Est-ce que vous pouviez écrire ?
20:22Non.
20:23Non, écrire, c'est...
20:25On a besoin d'être avec soi.
20:29Alors, ça ne peut pas se faire dans ces conditions-là.
20:31J'ai essayé, évidemment.
20:33Dès que je suis rentré en prison, j'ai commencé à chercher du papier, parce qu'il faut avoir du papier, c'est pas...
20:38Un stylo ?
20:38Ah, c'est pas évident.
20:39Et puis, de trouver des cachettes, parce qu'on m'a expliqué en prison, on n'a pas intérêt à écrire des choses, parce qu'on est fouillé à l'improviste, à peu près une fois par mois, et ils prennent tout ce qu'ils trouvent, tout ce qu'ils...
20:54Et ensuite, c'est décrypté, et pour vous, et ensuite, vous pouvez être punis, et les punitions sont terribles.
21:00C'est par exemple, vous ne verrez pas votre faim pendant six mois.
21:03Interdit de parloir, ça s'appelle comme ça.
21:05Ou interdit de cantine.
21:06La cantine, c'est une sorte de mouloperie à l'intérieur de la prison, où on va acheter...
21:13Parce qu'on ne mange rien en prison.
21:14C'est tellement mauvais que les chiens n'en veulent pas.
21:18Et donc, on va...
21:19On se nourrit des biscuits, des choses comme ça.
21:23Donc, interdit de cantine, interdit de téléphone, parce qu'on a le droit, une fois par mois, de téléphoner à sa famille.
21:31Interdit de tout.
21:32Et puis, en plus, ils peuvent ajouter 15 jours de cachot.
21:34Donc, voilà, on touche...
21:36Donc, je n'ai pas trouvé où cacher les choses, mais ils connaissent, ils savent tout.
21:41Mais c'est des...
21:41Alors, ceux qui fouillent, qu'on appelle les fouilleurs, ne sont pas des gardiens de prison.
21:46C'est des spécialistes qui viennent de l'extérieur.
21:49C'est une section de l'administration pénitentiaire, parce qu'ils savent reconnaître entre une drogue et une autre.
21:55Comment, je ne sais pas, nous voyer la drogue dans du couscous.
22:01C'est très compliqué.
22:03Et quand on les voit travailler, voilà, ils démontent tout.
22:08Et voilà.
22:09Et puis, ils prennent tout.
22:10Ensuite, ils analysent au niveau de leur commissariat.
22:14Et puis, le lendemain, on vous annonce les sanctions.
22:1715 jours de ceci, 20 jours de cela.
22:19Bon, l'aime sans salle, tout ça a duré donc presque un an.
22:22Vous finissez par être gracié le 12 novembre dernier.
22:26Comment, qu'est-ce que vous avez ressenti quand vous avez appris la nouvelle ?
22:30Ça y est, je suis gracié.
22:32C'est-à-dire que j'ai été amené petit à petit à la...
22:35Ce n'est pas un truc qui est venu comme ça.
22:37Vous êtes libre.
22:39Depuis l'été, on annonçait ma libération la semaine prochaine.
22:44Plein de rumeurs circulaient, des tas de prisonniers venaient me voir.
22:47Écoute, Jérôme, c'est bon l'avocat.
22:50Il connaît la secrétaire du général, la concierge, etc., du ministre.
22:57Tu sors la semaine prochaine.
22:58Ah oui, tu crois ?
22:59Oui, oui.
22:59Bon, voilà.
23:00J'étais donc...
23:01Depuis l'été, j'étais dans cette...
23:03De date en date.
23:04Et la dernière, je n'y ai pas cru.
23:07Je n'y ai pas cru.
23:07Un matin, on vient m'extraire de ma cellule.
23:10Le gardien me dit, ramasse tes affaires.
23:12Je ramasse tout.
23:14Et puis, on m'emmène où ?
23:15Ben, dans un être prison.
23:16Ben, voilà, dans une autre prison.
23:19Alors que, depuis quelques jours, on est...
23:20Libération, libération.
23:22Je me retourne dans une autre prison.
23:23Donc, je fais la sortie d'écrou de ma prison.
23:27Dans une autre prison à Alger.
23:30Terrible.
23:31C'est une vieille prison qui date d'un siècle et demi.
23:33Complètement mitée, pourrie.
23:35Oh, mon Dieu.
23:37Et donc, on m'amène et je fais un dépôt d'écrou.
23:43Je signe des papiers et tout.
23:46Et puis, on m'amène dans une cellule.
23:48Mais, absolument, c'est un cauchemar.
23:51Mais ça a duré cinq minutes.
23:51Au bout de cinq minutes, on me dit, ramassez vos affaires et...
23:53Je suis au-mâ.
23:56On sort des couloirs.
23:59J'arrive dans le parking.
24:00Un fourgon m'attendait.
24:02Donc, ils ramassent mes affaires.
24:03Mon fourgon.
24:04On va où ?
24:04Alors, ils me disent, on va à Boumerdes récupérer votre femme.
24:08Mais pourquoi ?
24:10Vous l'avez arrêtée ou quoi ?
24:12Je ne sais pas.
24:13Le gardien me dit, je ne sais pas.
24:14Le chauffeur me dit, je ne sais pas.
24:16Et puis, on roule.
24:17Et puis, je dis, mais ce n'est pas la route de Boumerdes.
24:19Où est-ce que vous m'emmenez, là ?
24:21Je commençais à m'énerver.
24:24Et puis, je vois l'aéroport d'Alger.
24:29L'aéroport, mais qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
24:32Bon, il s'arrête dans un endroit.
24:35Et puis, là, je vois l'avion présidentiel allemand.
24:40Avec l'ambassadeur.
24:42Et puis, un conseiller du président allemand.
24:45Tout ça, qui viennent vers moi.
24:46Voilà.
24:49Et ma femme, ils m'ont dit qu'ils allaient chercher ma femme.
24:53Ils me disent, non, finalement, on est en retard.
24:55Vous devez être à Berlin ou plus tard à 21h.
24:58Et donc, le concile général de France s'occupe de la chose.
25:02Il est en route pour Boumerdes.
25:05Il va récupérer votre femme.
25:06Elle va dormir à l'ambassade.
25:07Et ce n'était pas curieux que ce soit l'Allemagne
25:10qui s'occupe de ce départ ?
25:12Vous atterrissiez à Berlin.
25:14Comment vous l'avez vécu, ça ?
25:15Si ça avait été la France, les Algériens n'auraient pas accepté.
25:20Ça aurait été interprété par eux comme étant une défaite terrible.
25:24La France a décidé.
25:26Donc, il y a un arrangement entre les deux.
25:29Un arrangement.
25:30Mais moi-même, dès le mois de mai, quasiment 8 mois avant,
25:33à ma sortie d'hôpital, j'avais dit à ma femme,
25:38tu diras, donc, notre contact ici, il faut absolument voir avec l'Allemagne.
25:43J'ai vu là-bas, évidemment, j'ai un statut particulier.
25:48Parce que vous avez reçu des prix en Allemagne.
25:51C'est ça, qui est un prix.
25:52Donc, en fait, l'idée de passer par l'Allemagne, c'est aussi la vôtre.
25:55Je crois que ça vient, en tout cas, c'est ce que j'ai dit à ma femme.
25:59Tu diras à Jean-Paul, tu diras à X, à Antoine Gallimard, et tout ça.
26:02Il faut absolument contacter mon éditrice en Allemagne.
26:06Elle portera l'affaire au niveau du président.
26:07Non. Parce que tout ce qui vient de Paris est refusé par l'Assemblée.
26:12Et tout, même un gâteau, ils auraient été...
26:15Et parce que vous avez entendu, Boilem Sansal, sans doute,
26:18depuis votre libération et, effectivement, ce transit par l'Allemagne,
26:22certains responsables politiques en France,
26:24certains médias aussi dirent, c'est une humiliation pour la France
26:28que Boilem Sansal, il ait été obligé de passer par l'Allemagne,
26:31que ce soit l'Allemagne qui ait réussi à obtenir sa libération.
26:34Non, je n'y crois pas du tout.
26:36Je n'y crois pas du tout.
26:37Mais je pense que les autorités françaises sont quand même intelligentes et claires.
26:43Ils savent très bien que tout ce qui vient de France sera rejeté.
26:48Donc, il fallait trouver un biais quelconque.
26:51Ça aurait pu être la Belgique, ça aurait pu être...
26:53Il fallait un biais, quoi. C'est tout.
26:56Et le plus crédible et le plus intéressant, c'était l'Allemagne,
26:58parce que l'Algérie, dans son isolement depuis 2-3 années,
27:02un isolement terrible, elle n'a plus rien.
27:05Elle est seule sur la planète Mars.
27:07Ils ne se rendent pas compte.
27:09Donc, il fallait trouver quelque chose pour se réinsérer dans le monde.
27:16Et donc, l'Algérie, depuis 2 années, s'est lancée dans une opération de séduction.
27:20On a lancé des missions vers tous les pays d'Afrique.
27:25Venez, l'Algérie va vous donner de l'argent.
27:27Personne n'est venue.
27:29Ou alors, ils sont venus prendre le chèque et repartir.
27:31Ensuite, ça a été de la drague.
27:33Ils ont dragué tous les pays européens.
27:36C'était l'Espagne, c'était l'Italie.
27:37Venez, on va vous donner du gaz.
27:39Mais venez.
27:40La Slovenie, petit pays de 2 millions d'habitants, est reçu comme si on avait reçu, je ne sais pas, Trump et compagnie.
27:49Vous avez passé quelques jours en Allemagne, à l'hôpital notamment, pour continuer d'être soigné.
27:57Vous êtes ensuite revenu en France.
28:00Vous êtes allé voir le président de la République à l'Elysée qui vous a reçu.
28:04Qu'est-ce que vous vous êtes dit ?
28:05Et plus généralement, Emmanuel Macron a été beaucoup pointé du doigt pour sa gestion, non seulement du cas sans salle, comme on vous appelait pendant un an,
28:13le cas où elle aime sans salle, aussi pour ses changements de pieds sur la façon dont il fallait gérer la politique de la France vis-à-vis de l'Algérie.
28:21Est-ce que vous avez trouvé que ces critiques, elles ont été justifiées ?
28:23On a parlé de beaucoup de choses, évidemment.
28:25Mais on a effectivement parlé de ça.
28:27Quel est le chemin ?
28:29Algérie, elle est où ?
28:30Quel est le chemin qui mène ?
28:31Et si on se rend compte, on peut discuter, on peut échanger, on peut faire du business, etc.
28:40Ce chemin n'existe pas.
28:42Tous les chemins maintenant à l'Algérie ont été coupés.
28:45Voilà.
28:46C'est pas compliqué.
28:47Donc ça veut dire que...
28:48Macron a essayé, depuis deux années, Macron a embrassé Théboune sur la bouche tous les trois mois à une certaine époque.
28:59Macron venait toujours.
29:00Moi, c'est là que je l'ai connu.
29:01Donc...
29:02Mais bon, après, tous les ponts ont été rompus.
29:05Mais de quel rapide ?
29:05Il y a un prix économique, tout, tout, tout, tout.
29:08Réaction, la France, évidemment, à réagir, en coupant aussi les...
29:13Mais là, ce qu'on dit, Bolem Sansal, c'est que vous êtes libérés à la faveur d'un moment où la France essaye de se rapprocher de l'Algérie,
29:21où la situation semble se détendre.
29:23alors que, quelques mois plus tôt, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Bruno Retailleau, compte sur le bras de fer.
29:33Sa position, c'est ça, c'est le bras de fer.
29:34Et on a dit que ce parti pris avait pu retarder votre libération.
29:41Je sais que vous l'avez eu, Bruno Retailleau, depuis que vous êtes rentré.
29:44Ça aussi, vous en avez parlé ?
29:45Oui, c'est mon copain, Bruno Retailleau.
29:47Non, mais c'est...
29:48Oui, on est des amis de...
29:50Mais, vous savez, chaque jour, il y a quelque chose qui peut faire avancer.
29:56Et chaque jour, il y a quelque chose qui fait reculer.
29:58Chaque jour.
29:59Il y a eu des épisodes extrêmement nombreux.
30:02À un moment donné, les choses semblaient vraiment aller dans la bonne direction.
30:12délégation d'armes d'affaires, etc.
30:15On a signé des trucs.
30:17Et puis, peut-être, trois jours après, parce que déclaration de X, déclaration de Y...
30:21Donc, vous n'en voulez pas, Bruno Retailleau, d'avoir tenu cette position ferme à l'égard de l'Algérie ?
30:27Non, moi, j'ai interprété ça de la manière suivante.
30:31C'est comme dans toute négociation, dans les prises d'otages, il faut que quelqu'un joue le dur.
30:36Et le policier gentil, le policier...
30:38Le goût de copre, mais le bas de copre.
30:39Non, t'inquiète pas, donne-nous tes trucs, on va te libérer, t'inquiète pas.
30:44Et l'autre qui vient pour tabasser, quoi, pour dire, je vais te tabasser.
30:48Mais en Algérie, c'est pareil.
30:50Il y avait M. Sourire et tout ça.
30:53On va dire que c'est le ministre des Affaires étrangères.
30:55Et puis, il y avait les envoyés spéciaux qui viennent taper sur la table.
30:59Sur les relations entre la France et l'Algérie, vous dites, là, tous les chemins sont coupés.
31:03Mais c'est de la faute de qui ?
31:06Est-ce que c'est la responsabilité de la France ?
31:08C'est ce que dit le régime algérien, qui reprochait à Bruno Retailleau ses positions,
31:12qui reprochait à Emmanuel Macron d'avoir utilisé cette expression, la rente mémorielle.
31:16Et en France, on dit non, c'est qu'en réalité, on a un pouvoir algérien qui, de toute façon,
31:20ne cesse d'utiliser la France comme carburant pour tenir au pouvoir.
31:25C'est tout ça. C'est tout ça depuis 1962. C'est comme ça.
31:30Alors, tantôt c'est ceci, tantôt c'est cela. Mais ça, depuis toujours.
31:34Et donc, on fait comment pour s'en sortir, alors ?
31:36Eh bien, c'est ça, ce que je disais tout à l'heure. Il faut trouver un nouveau chemin.
31:38Parce que tous les chemins ont été essayés et n'ont pas abouti.
31:45Voilà. Alors, peut-être que...
31:48C'est-à-dire qu'aujourd'hui, l'Algérie est dans une situation particulière.
31:52Elle est totalement isolée.
31:53Sur la question du Sahara occidental, elle est maintenant seule.
31:59Je crois que même les Saharaouis, si j'ai bien compris,
32:01ils ne veulent plus de la médiation algérienne.
32:04Parce qu'ils disent, ça nous bloque.
32:05Alors qu'on peut, après tout, discuter avec les Marocains.
32:08Peut-être qu'on va retrouver la décision du Conseil de sécurité
32:12qui reconnaît la marocainité du Sahara occidental
32:15et le désaveu de la Russie et de la Chine,
32:19qui n'ont pas soutenu l'Algérie.
32:20Donc là, ils sont au fond du gouffre.
32:22Ils disent, absolument, il faut faire quelque chose.
32:25Et on a un atout, c'est Bolem Sansal.
32:27On va le lâcher.
32:29Et du coup, ça va...
32:30Alors on attend la suite de l'épisode Bolem Sansal.
32:33Donc vous espérez que votre libération aide à ce que ça aille mieux ?
32:37Oui, je pense que c'est...
32:39En Algérie, presque tous les gens le disent.
32:43On croit cela.
32:43On l'a libérée comme amorce.
32:48Votre ami Kamel Daoud, il dit...
32:49C'est pour ça que tout le monde dit, il faut être prudent dans les paroles.
32:52Il ne faut pas...
32:53Parce qu'il pourrait penser qu'il y a un piège, tout simplement.
32:56Donc après tout, Bolem Sansal, on s'en fiche.
32:58Donc c'est pour ça que vous ne dites pas tout ce que vous avez sur le cœur ?
33:00Non, oui, bien sûr.
33:01Dans six mois, je vous dirai tout.
33:02Ah, donc on vous réinvitera dans six mois.
33:05Votre ami Kamel Daoud dit, maintenant Bolem est libre, il reste à libérer l'Algérie.
33:12Oui, oui, c'est ce que je dis.
33:14Vous savez comment on m'appelle en Algérie maintenant ?
33:16D'abord dans ma prison, puis toutes les prisons, puis toute l'Algérie.
33:20La légende.
33:21Bolem, la légende.
33:23Parce qu'il s'est construit une légende autour de ça.
33:26On est dans l'espion qui vient du nord, les trucs secrets, les visiteurs de la nuit.
33:30Oui, c'est toute une...
33:32La faute asmagogie s'est créée autour de ça.
33:37Et je pense qu'ils m'ont libéré pour ça.
33:41Voilà, c'est le meilleur signe, le meilleur geste qu'on puisse faire, c'est de le libérer.
33:46Ils ont l'air d'y tenir.
33:47Et puis voilà, donc on va amorcer sans perdre la face.
33:52Sans perdre la face.
33:53Il faut dire, Bolem Sansal, un mot sur ce qu'on a vu pendant un an dans le débat politique.
33:58La quasi-intégralité de la classe politique vous a défendu.
34:00Il y a même des élus du Rassemblement national au Parlement européen, notamment le président du parti, Jordan Bardella,
34:07qui ont souhaité que vous obteniez le prix Sakharov, qui est un prix qui couronne la liberté de l'esprit.
34:14Votre éditeur, quand vous étiez en prison, Antoine Gallimard, a expliqué que vous refusiez cette récompense
34:21parce qu'elle était proposée par l'extrême droite.
34:23Pourquoi ?
34:24Non, je n'ai rien refusé.
34:25Moi, je ne le savais pas.
34:27J'ai appris toute cette histoire quasiment trois ou quatre semaines après.
34:32C'était déjà de la vieille histoire.
34:34Donc il y a eu effectivement la reconstitution de l'histoire.
34:38J'ai appris que Bardella avait proposé le truc et que Gallimard, Antoine, a dit qu'il n'y avait pas de question.
34:47Et on va appeler sa femme.
34:49Mon épouse a confié, voilà, Boilem, du franc Rassemblement.
34:53Pas du tout.
34:54Il n'est dans aucun parti.
34:56Il n'y avait pas dit qu'il n'est dans aucun parti.
34:57Il milite pour lui, tout seul.
34:59Voilà, et donc ça a conforté la position d'Antoine Gallimard, qui a fait un communiqué.
35:06Et la question a été réglée.
35:08Vous avez le sentiment d'avoir été instrumentalisé, justement, aussi en France, dans le combat de certains contre l'Algérie ?
35:17Je n'utiliserai pas le mot instrumentalisé.
35:21Je veux dire que c'est normal.
35:22On prend ce qu'on a sous la main.
35:23C'est vrai que certains partis aimeraient...
35:28Mais ils savent que moi, je ne fais pas de politique.
35:30Je ne suis pas quelqu'un qui pourrait être un jour encarté quelque part.
35:35Pas du tout.
35:36Moi, je suis un individu.
35:37Je n'ai pas d'autre prétention que celle-ci.
35:40Parce que vous avez entendu aussi certains d'une mauvaise foi insignes qui disaient
35:44Boilem Sansal, il est proche de l'extrême droite.
35:48Boilem Sansal, il a tenu des propos contre l'islam qui font de lui...
35:51Quand vous avez entendu ça...
35:56Je l'ai toujours entendu.
35:58Je l'ai toujours entendu, bien entendu.
35:59Mais qu'est-ce que je veux dire ?
36:01J'aime l'islam alors que je ne l'aime pas.
36:04Ça, c'est une fois, moi, ce n'est pas possible.
36:07Ce n'est pas que je n'aime pas quand je dis que je n'aime pas l'islam.
36:09Non, ça ne m'accroche pas.
36:11J'ai étudié cette religion comme j'ai étudié toutes les religions.
36:15Je suis expert dans toutes les religions.
36:16Bon, ça ne m'a pas apporté des réponses aux questions méta-religieuses, etc., qu'on peut se poser.
36:27J'ai trouvé plus de réponses dans, je ne sais pas, le taoïsme, etc.
36:32Mais c'est des réponses qu'on a fait quoi ?
36:34C'est satisfaisant à un moment, puis après, on a été...
36:38On parlait du Rassemblement national.
36:41Il y a aussi des députés de la gauche radicale, dans le cas d'espèce de la France insoumise,
36:47qui ont refusé dans des votes au Parlement français, au Parlement européen,
36:54de voter des résolutions qui appelaient à votre libération.
36:57Comment est-ce que vous l'avez compris ?
36:58Et tout naturellement, ils ont le droit de...
37:03Ça me chagrine, parce que pour moi, la gauche, ça reste quand même l'humanisme.
37:09Au départ, c'est ça.
37:11Bon, c'est comme ça.
37:15La France insoumise, et puis ces partis-là, je pense qu'ils cherchent un électorat,
37:21et ils pensent l'avoir trouvé chez les islamistes, chez les...
37:28Tant bien pour eux.
37:30Donc c'était pour des raisons politiques qu'ils faisaient ça ?
37:32Oui, absolument.
37:33Mais à quoi d'autre ?
37:34Uniquement.
37:36La gauche n'a plus de troupes, donc il lui faut des troupes pour aller aux élections,
37:40pour exister en tant que parti, en tant qu'idée,
37:44mais aussi en tant que parti disposant de financement, tout ça, ils ont besoin.
37:49Donc ils draguent comme tout le monde.
37:53Comme tout le monde.
37:55Boulême Sansal, pour vous, aujourd'hui, l'Algérie, c'est terminé ?
37:58Non, pas du tout.
37:59J'avais dit à Macron, je vais y aller la semaine prochaine.
38:03Il m'a dit, attention, pas du tout, attention, qu'est-ce qu'on fait ?
38:08Mais je lui ai dit, si.
38:09Et je lui ai dit, c'est là qu'on va vérifier la réalité, la justice des choses.
38:17Et si on m'arrête à la rentrée, tout le monde comprendra qu'il fallait absolument chercher.
38:25Il n'y a pas de chemin pour mener vers ce pouvoir.
38:29Mais j'étais prêt à parier qu'il ne se passerait rien.
38:32Au contraire.
38:33Je pense qu'ils seraient...
38:35Et ils enverraient la presse à l'aéroport.
38:38Ah, bienvenue chez vous.
38:39Presque.
38:39Et alors, Macron m'a dit, puisque je vois le président Théboune en Afrique du Sud, je vais lui poser la question.
38:47Je veux dire, il veut rentrer dans son pays.
38:49Est-ce qu'il peut le faire ?
38:51Voilà.
38:51Et repartir.
38:53Et parler.
38:54Parce que si je vais juste pour voir mes arbres fruitiers, j'ai quelques arbres à la maison, ça porte bien.
39:01Vous êtes joueur, en disant ça, je retourne en Algérie dès la semaine prochaine.
39:07Mais sérieusement, vous...
39:09Alors, d'abord, vous parlez de la discussion entre le président Théboune et le président Macron.
39:12Il s'avère que finalement, le président algérien n'est pas allé en Afrique du Sud.
39:16Donc, il n'y a pas eu de rencontre avec le président de la République.
39:19Vous comptez vraiment, dans les prochains jours, dans les prochaines semaines, retourner dans votre pays natal ?
39:23Non, mais absolument. Je dois retourner. Sinon, c'est... Je ne sais pas si vous traversez une... Je ne sais pas, vous subissez une injustice et tout ça.
39:32Vous cherchez tout naturellement à obtenir réparation. Voilà. Moi, pour moi, aller, aller et ressortir, c'est une grande réparation.
39:42Je n'ai pas besoin d'argent. Je n'ai même pas besoin d'un nouveau procès qui... Non, c'est juste le fait d'y aller et de ressortir. Pour moi, c'est une réparation.
39:51Boilem Sansal, si vous avez été libéré, il reste un otage, un otage d'État français détenu en Algérie, le journaliste Christophe Glaze.
39:59Son procès doit se tenir dans quelques jours, début décembre, le 3 décembre. Est-ce que vous avez l'espoir de le voir retourner en France bientôt ?
40:07L'analyse que j'ai faite jusqu'à il y a une heure, c'était la certitude. J'avais la certitude que Christophe sortirait le 3.
40:17Il sera déclaré acquitté et donc libéré immédiatement.
40:24Mais là, ce matin, j'ai appris que finalement, Teboune ne va pas en Afrique du Sud.
40:28Donc c'est tout de suite... On ne peut pas penser autrement.
40:32C'est une humiliation. Il veut humilier Macron.
40:35Ils avaient pris rendez-vous. C'était réglé.
40:37Le monde entier savait qu'ils allaient se rencontrer en Afrique du Sud.
40:42Il annonce qu'il n'y va pas. C'est une insulte. C'est une humiliation.
40:48Voilà. Et donc, à partir de là, je me suis dit, s'ils en sont encore là, c'est possible.
40:54Mais je ne crois pas trop.
40:56Donc ça vous rend moins optimiste pour la sortie à court terme de Christophe Glaze ?
41:00Un peu moins. Mais je reste quand même à peu près persuadé qu'il sortira.
41:02Maintenant, la question qui se passe, c'est est-ce qu'ils vont libérer seulement Christophe
41:08ou tous les prisonniers politiques ? Il y en a des dizaines.
41:12Franco-algériens, français, etc.
41:15Ou algéro-allemand, algéro-italien, tout ça. Il y en a beaucoup.
41:24On arrive à la fin de cet entretien, Boilem Sansal. Vous avez 81 ans.
41:29D'abord, une question sur votre état de santé. Vous étiez soigné aussi pendant un an.
41:35Vous aviez un cancer. Est-ce que vous êtes guéri aujourd'hui ?
41:38Oui, oui, oui. J'ai subi une radiothérapie, un traitement de 38 séances de radiation.
41:46Ça s'est très bien passé. Le cancer, ça y est, c'est fini.
41:52J'ai quelques soucis. Finalement, je suis parti d'Algérie avec la mention
41:57totalement guéri sur tous les plans.
42:00J'arrive à Berlin et me dit, oui, oui, vous êtes guéri sur tous les plans, sauf deux.
42:04Enfin non, c'est très léger.
42:05Ce qui nous frappe, j'imagine que c'est le cas, Benjamin,
42:08ce qui nous frappe, c'est cette fraîcheur que vous avez là devant nous
42:14pour quelqu'un qui a passé un an en prison sans savoir si ça n'allait pas durer jusqu'au bout de sa vie.
42:19Vous avez un détachement, une fraîcheur.
42:24J'imagine que les gens de colère, je dois beaucoup leur manquer parce que j'étais l'animateur de tout ça.
42:38Je donnais des cours. J'avais organisé des cours pour les prisonniers qui passent des examens, le bac et tout ça.
42:44Tout ça en prison ?
42:45Oui, oui, tout ça.
42:46Vous étiez l'animateur. C'est vous qui réussissiez à mettre un peu de joie ?
42:50Oui, c'est moi. J'ai demandé l'autorisation. Elle a été accordée. Donc, les gens s'inscrivaient.
42:55Je ne pouvais pas donner des cours dans tout parce que tout est arabisé. C'était en maths et en physique.
43:01J'ai donné des cours. Je faisais des tas de trucs. J'avais organisé aussi des séances de sport.
43:08Tout ça. Plein.
43:09Donc, finalement, cette année de détention arbitraire, on peut le dire, vous en tirez quand même une expérience.
43:17Ça a été une expérience de vie.
43:19Absolument. J'ai remercié Teboum pour ça. En tout état de cause, merci pour le petit séjour à Coléa qui m'a fait beaucoup de bien.
43:28En quoi cette année de détention, elle vous a changé ? Entre le Boilem sans salle en novembre 2024 qui prend l'avion pour Alger, qui atterrit et qui se fait emprisonner, et le Boilem sans salle qu'on a devant nous ?
43:41Non, moi, je n'ai pas l'impression d'avoir vraiment. Il n'y a pas un véritable gap entre les deux. Il y a un peu de tristesse, un peu d'amertume.
43:50Je pense, par exemple, à ceux qui étaient avec moi dans les prisons. Tous les prisons que j'ai vues sont des innocents. Il y a des centaines, dans toutes les prisons d'Algérie, des centaines de gens accusés d'être des maquistes.
44:06C'est quoi les maquistes ? Vous connaissez tous la Kabylie. C'est une région d'Algérie, un peu comme la Corse, très rebelle, qui depuis toujours milite pour sa spécificité et tout ça.
44:18Et donc, des Kabylie, notamment un chanteur, un grand chanteur, Ferhat Meni, un chanteur moderne, a créé un mouvement, le mouvement pour l'autonomie de la Kabylie, l'autonomie culturelle, maque.
44:36Et puis, tous les Kabylie, tout naturellement, adhèrent à cette association. Ils veulent être comme la Corse, pareil.
44:44Mais ils ont toujours été réprimés, mais très fortement, condamnés, arrêtés, torturés, exécutés, exilés. Et le pouvoir a trouvé la solution.
44:57Il en avait marre. Parce que le BAC, mouvement pour l'autonomie culturelle de la Kabylie, est devenu mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie.
45:06Et du coup, ils ont créé un parti, un gouvernement en exil, donc un président, des ministres.
45:13Et donc, tous les gens qui sont plus ou moins, qui lisent les trucs sur les e-mails, ils sont tous en prison.
45:20Et comment ? C'est que le pouvoir a criminalisé ce mouvement pacifique. Il a été déclaré mouvement terroriste.
45:29Et vous pensez à eux, parce qu'effectivement, vous avez été en prison avec certains d'entre eux.
45:35Votre femme, Nazia, qui venait vous voir tous les 15 jours en prison, vous l'avez retrouvée au quotidien.
45:42Ça, c'est aussi un bonheur immense.
45:44Un bonheur immense, oui.
45:45C'est l'amour aussi qui vous a fait tenir comme ça pendant un an, la possibilité de la voir tous les 15 jours.
45:49Et vous l'avez retrouvée aujourd'hui ?
45:51Oui, oui, oui. C'est formidable. C'est merveilleux.
45:55Quand ma femme m'a rejoint à Berlin, à l'hôpital, Tariultard, je ne savais pas qu'elle était...
46:01Je savais qu'elle venait, qu'elle arrivait.
46:04Mais j'étais dans ma chambre, à l'hôpital.
46:05J'allais dormir, toc, toc, on ouvre.
46:07C'est le médecin-chef, les trucs, l'ambassadeur de France.
46:10Et on me jette, ma femme, dans les bras.
46:13Non, c'était formidable.
46:15Je ne l'avais pas vue depuis une année.
46:16Enfin, je la voyais au parloir, en prison, à travers...
46:21C'était formidable, quoi.
46:22Mais c'est-à-dire que vous pouviez vous parler, dans ce parloir ?
46:25Oui, en téléphone.
46:26En téléphone ?
46:26On est séparés de deux mètres.
46:29Donc vous avez pu vous prendre dans les bras pour la première fois à l'hôpital ?
46:32Non, pas du tout.
46:33C'est quand même difficile de retrouver les gestes.
46:37Comme ça, affectueux, tout ça, quand on a été...
46:40Les premiers jours, c'était vraiment très difficile.
46:44Ce qui est tout naturel, de prendre sa fin par la main, de l'enlacer, de « bonjour, chéri »,
46:51ces mots-là, c'est...
46:53Mais il a fallu quelques jours, quand même.
46:55Peut-être une dernière question ?
46:57Enfin, en tout cas, une question, évidemment, à laquelle on pense, c'est...
47:02Votre libération, elle est toute récente, c'est 12 jours,
47:05mais est-ce que vous pensez déjà à un prochain livre ?
47:09Est-ce que vous avez retrouvé la sérénité pour y penser, pour peut-être commencer à écrire ?
47:14Non, franchement, oui, j'avais décompensé à un livre,
47:24mais je n'ai écrit que le titre, la légende.
47:28La légende.
47:28Entre deux trucs, et puis après, non, presque,
47:31il y avait ou écrire quelque chose comme Sarkozy, son livre,
47:41c'était quoi déjà ? Souvenir de prison ?
47:43Oui, il va écrire le journal d'un prisonnier,
47:47mais lui, il a passé 20 jours en prison.
47:49Oui, donc, je me suis dit, non,
47:51c'est déjà fait, je ne fais pas ça.
47:56La légende, mais la légende, il faut généraliser,
47:59nous vivons tous sur des légendes.
48:02Finalement, la vérité est une abstraction, ça ne digiste pas.
48:08On vit sur des légendes, la légende, voilà.
48:12Et donc, comment donner à mon histoire, sans parler de moi,
48:15sans parler de la prison, une dimension comme ça universelle ?
48:19Que nous sommes dans des légendes, à la fois qui nous enferment dans leur logique,
48:24quand on est du bon côté, c'est très bien, c'est positif,
48:28quand on est du mauvais côté de la légende, c'est très mauvais.
48:31Il faut trouver la façon de raconter cette histoire-là.
48:34Mais c'est quoi votre légende, à vous ?
48:37Quelle est votre légende ?
48:39La légende, c'est, je ne sais pas, m'installer en France, là, je m'installe.
48:45Et voilà, puis retrouver mes amis, j'en ai retrouvé beaucoup déjà.
48:51Après, il va se créer certainement une légende, je ne sais pas laquelle.
48:55Mais vous pouvez rassurer nos auditeurs de France Inter,
48:57ceux qui aiment vous lire.
48:58ils vont bientôt pouvoir lire de nouveau Boilem Sans Salle, un nouveau livre ?
49:04Ah, sûrement.
49:05De toute façon, on ne me laissera pas en jachère d'Eli Martien,
49:08sûrement, à me voir reprendre la plume.
49:12Non, je le ferai avec plaisir.
49:14Une dernière question, Boilem Sans Salle.
49:16Au-delà de ce livre que vous allez donc écrire, on l'espère tous,
49:19pourquoi vous allez vous battre demain ?
49:22Le combat de Boilem Sans Salle ?
49:23Ah, mais moi, j'aime bien me battre.
49:24Moi, je me battais déjà dans le quartier quand j'avais deux ans et demi.
49:28Je ne sais pas, j'ai toujours été comme ça.
49:30Il y a des choses qui me choquent.
49:33Voilà, quelquefois, ça m'a causé du souci.
49:38Donc, vous battre Boilem Sans Salle pour la liberté d'expression,
49:42pour la lutte contre l'islamisme, pour les valeurs de votre pays, la France ?
49:48Puisque je rappelle que vous avez été naturalisé en 2024.
49:50Oui, l'islamisme, c'est le grand enjeu pour la France.
49:54On n'en prend pas assez conscience.
49:57Parce que tant qu'il reste un phénomène politique dans la rue,
50:00ce n'est pas grave, on le contrôle par la surveillance,
50:04des soucis, des radicalisations,
50:06enfin, il y a mille façons de contenir.
50:10Mais quand il se développe dans le terreau familial,
50:13c'est terrible.
50:15Parce que là, vous avez des petits ayatollahs qui poussent.
50:18À la naissance, il est déjà...
50:20Il naît ce barbu, et là, c'est fini.
50:25Or, là, il a atteint ce stade-là, depuis très longtemps.
50:27Moi, à l'époque, je disais qu'il reste un mouvement politique.
50:32C'est très bien, il n'y avait aucun souci.
50:34Le ministère de l'Intérieur surveille ces choses-là.
50:38Ils vont tous...
50:39Ils finiront par commettre des délits,
50:41donc ils seront arrêtés, etc.
50:43Mais quand ça pousse dans les familles,
50:46dans le quartier,
50:48qu'est-ce que vous voulez faire ?
50:49Et donc ça, ce sera un nouveau combat.
50:51Merci beaucoup, Bolem Sansal.
50:52Merci infiniment de nous avoir accordé vos premiers mots à la radio.
50:56Merci, Bolem Sansal.
50:57Merci.
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