- 18 hours ago
Category
🗞
NewsTranscript
00:00Il est 10h à Paris, on est ensemble pour une heure de discussion et de débat consacré aujourd'hui au cinquantenaire de la mort de Franco.
00:10Mais d'abord les titres de l'actualité internationale avec à la une ce revirement de Donald Trump sur le dossier Epstein.
00:17Le président américain a finalement signé une loi pour rendre public tous les documents liés à l'affaire.
00:22Mais le flou demeure sur l'étendue des révélations à attendre l'affaire tentaculaire entre les Etats-Unis depuis près de 20 ans.
00:30A la une également la banque de Gaza à nouveau sous les bombes malgré la trêve.
00:35La défense civile annonce trois morts ce matin.
00:37Hier, 27 personnes ont été tuées dans des frappes aériennes selon les autorités locales.
00:42Israël et le Hamas s'accusent mutuellement d'avoir violé le cessez-le-feu.
00:46Il est entré en vigueur le 10 octobre dernier.
00:49Et puis 50 ans donc après la mort de Franco, la mémoire du dictateur continue de fracturer l'Espagne.
00:56Il y a quatre décennies de terreurs dont les crimes n'ont jamais été jugés,
01:00qui hantent encore les débats et qui nourrissent l'extrême droite.
01:03Un demi-siècle plus tard que faire des symboles du franquisme qui persiste dans l'espace public.
01:08On en parle pendant les 45 prochaines minutes avec Pierre Salmon.
01:12Avec nous sur ce plateau, maître de conférence à l'école normale supérieure.
01:15Et avec Maud Petit, Jové, notre correspondante à Madrid.
01:19Bienvenue, c'est Parlons-Eux.
01:33C'était il y a 50 ans, jour pour jour, le 20 novembre 1975.
01:38Le général Franco mourait en Espagne.
01:41Et avec lui, 39 années d'une dictature née d'une guerre civile sanglante.
01:45Près d'un demi-siècle après sa mort.
01:47L'histoire, elle, n'a jamais vraiment été refermée.
01:50Pas de travail de mémoire collective, pas d'enquête officielle, aucun procès.
01:54C'est seulement à partir des années 2000 que le pays découvre les fausses communes,
01:58les bébés volés et l'ampleur de la répression.
02:00Et pourtant, l'image d'un gentil dictateur a continué à prospérer jusque dans les rues.
02:05Les monuments, les symboles encore présents aujourd'hui.
02:08Qu'en reste-t-il et que faut-il en faire ?
02:10Pourquoi ces crimes n'ont-ils jamais été jugés ?
02:13Et comment une démocratie moderne peut-elle continuer à vivre avec ses fantômes ?
02:17On en parle tout au long de ces 45 minutes avec nos invités.
02:21Mais d'abord, on va retrouver notre correspondante à Madrid, Maude Petit-Jauvet.
02:24Bonjour Maude.
02:25C'est une journée sous tension qui s'ouvre en Espagne.
02:29Entre ceux qui commémorent ce cinquantenaire d'une part
02:31et ceux qui refusent de le célébrer.
02:34Qu'est-ce qui est prévu aujourd'hui ?
02:36Eh bien, il n'y a aucune célébration officielle d'organisée aujourd'hui.
02:42Il n'y aura pas de cérémonie officielle le 20 novembre car nous ne célébrons pas la mort de Franco,
02:47mais le début de la fin.
02:48Ce sont les mots de Victor Torres, le ministre de la Mémoire démocratique.
02:52Seules des célébrations seront donc organisées demain,
02:55mais pour célébrer les 50 ans de la restauration de la monarchie en Espagne,
02:59au Palais-Royal et au Congrès des députés,
03:02avec la présence du roi, de la reine, de leurs filles
03:05et du Premier ministre espagnol Pedro Sánchez.
03:08Les seules commémorations organisées aujourd'hui
03:11le sont par la Fondation Nationale Francisco Franco,
03:15une fondation qui fait l'apologie du dictateur,
03:17pourtant en pleine procédure de dissolution
03:20depuis la loi sur la mémoire démocratique entrée en vigueur en 2022.
03:25Ces hommages aux dictateurs auront lieu avec des messes,
03:29par exemple une messe à Madrid à 20h ce soir
03:31et d'autres messes dans 13 autres villes espagnoles.
03:36Cette division de la mémoire démocratique,
03:38elle touche tout le pays.
03:39Ce samedi, dans la capitale, il y aura au même moment
03:42une manifestation fasciste et une manifestation antifasciste.
03:47C'est avec Mathilde Lopinski et Victoria David,
03:50nous avons voulu tendre le micro à ces deux visages de l'Espagne
03:54et le sujet est toujours très tabou.
03:56Lorsque nous parlions avec nos interlocuteurs,
03:59il parlait un peu moins fort en parlant du fascisme,
04:02des fascistes en général.
04:04Je vous laisse découvrir le reportage.
04:08Des portraits de Franco, une centaine d'objets à la gloire du dictateur,
04:13au cœur du marché le plus connu de Madrid.
04:15Le vendeur n'a pas souhaité être filmé,
04:18mais il l'assure, son stand a beaucoup de succès.
04:20On vend beaucoup.
04:22En ce moment, avec le gouvernement actuel,
04:23les gens achètent beaucoup d'articles.
04:26Il y a de plus en plus de jeunes.
04:28Et les curieux sont nombreux ce matin-là.
04:31Parmi eux, certains nostalgiques comme Antonio.
04:33C'est bien, c'est mon histoire.
04:37Avec l'âge que j'ai, c'est un bout de mon histoire, en fait.
04:40Les quelques symboles que j'ai, je les garde avec moi.
04:43Je ne les laisse pas à la maison
04:44parce qu'il y a une sorte de police politique qui s'est créée
04:48et qui présente tous ceux qui portent le drapeau comme des fascistes.
04:54Cela fait un demi-siècle que Franco est mort.
04:56Pourtant, partout dans le pays,
04:58les traces du régime franquiste sont encore bien visibles.
05:02Comme cette arche à l'entrée de Madrid,
05:04érigée par Franco à la gloire de ses troupes,
05:07qui fait polémique.
05:09C'est incroyable que ce monument soit toujours là
05:12alors qu'il met à l'honneur des idées antidémocratiques.
05:17Cette conseillère municipale de gauche
05:19fait partie des nombreux élus
05:21à réclamer la disparition des symboles de cette ère.
05:24À l'intérieur, on voudrait installer des panneaux explicatifs
05:28qui parlent de paix et de démocratie.
05:30À l'extérieur, il reste encore quelques vestiges du franquisme
05:33que nous voulons supprimer.
05:36Comme ce blason, avec l'aigle,
05:38symbole du régime totalitaire.
05:40Le gouvernement espagnol s'apprête à publier
05:42d'ici quelques semaines
05:43une liste d'objets franquistes
05:45à retirer de l'espace public.
05:47Une mesure insuffisante pour ces Espagnols
05:54rassemblés en mémoire des disparus du franquisme.
05:57S'il n'y a pas de volonté politique,
05:59ils peuvent faire autant de listes qu'ils veulent.
06:01Par exemple, on a pu retirer des noms de rues franquistes.
06:04Elles ont été supprimées
06:05et après, on a pu les remettre.
06:07Quelle mesure réparatrice cela va apporter aux victimes ?
06:11Concrètement, ça va apporter quoi cette liste ?
06:14C'est très bien de le faire, mais après ?
06:16Un demi-siècle après Franco,
06:19son héritage polarise toute l'Espagne,
06:21devenant même un enjeu politique.
06:23Aujourd'hui, 20% des Espagnols
06:26considèrent que la dictature
06:27a été bénéfique pour le pays.
06:31Un cinquantenaire, Maude,
06:32sur fond de montée de Vox,
06:34le premier mouvement d'extrême droite
06:36a émergé en Espagne après la fin du franquisme.
06:38Un parti qui relativise ouvertement
06:41l'héritage de la dictature.
06:42Qu'est-ce que ça nous dit de l'état du pays aujourd'hui ?
06:45Eh bien, il existe une réelle fracture aujourd'hui en Espagne
06:51sur cette mémoire de la guerre civile
06:53et de la dictature franquiste.
06:54Nous le disions aujourd'hui,
06:55un peu plus de 20% des Espagnols
06:58pensent que cette dictature franquiste
07:00a été bénéfique pour le pays.
07:01Il faut dire que cette partie de l'histoire
07:03est très peu enseignée à l'école
07:05et de façon très hétérogène
07:07puisque ce sont les régions elles-mêmes
07:09qui décident de leur programme.
07:10Et Vox joue là-dessus.
07:12Sur les réseaux sociaux,
07:13ce sont les moins de 25 ans
07:15qui sont ses cibles privilégiées.
07:17Vox y affirme que la dictature franquiste
07:19a été une période de progrès
07:21et de réconciliation.
07:23Ces deux dernières années,
07:24Vox a réussi à faire supprimer
07:26cette loi de la mémoire démocratique
07:28en Aragon
07:29et a l'intention de le faire en Cantabrie
07:31et à Valence.
07:33Là, ce sont les régions
07:34où il gouverne en coalition
07:36avec le parti de droite espagnol.
07:38Vox rejette par ailleurs
07:40l'étiquette franquiste.
07:42Il ne défend pas le franquisme explicitement
07:45mais ne le condamne pas pour autant.
07:48Selon un récent sondage,
07:49Vox arrive en troisième position
07:51après le parti socialiste espagnol
07:54avec 17,2% des intentions de vote.
07:59Une montée des extrêmes
08:00très inquiétante
08:01dans ce contexte de carence mémorielle.
08:04Petit Jové en direct de Madrid.
08:06Merci pour vos explications
08:09et bonjour Pierre Salmon.
08:12Merci d'être avec nous,
08:13maître de conférence en histoire contemporaine
08:15à l'École Normale Supérieure.
08:17Vous êtes membre de l'Institut d'Histoire Moderne
08:19et Contemporaine,
08:20auteur d'un antifascisme de combat
08:21armé, l'Espagne révolutionnaire
08:23aux éditions du Détour.
08:25On reviendra sur les enjeux mémoriels
08:27tout au long de cette émission.
08:30Mais d'abord, on l'a entendu
08:32dans ce reportage
08:33de notre correspondante à Madrid,
08:3520% des Espagnols qui considèrent
08:37que la dictature franquiste
08:38a été bénéfique pour le pays.
08:40On a un quart aussi
08:41des jeunes Espagnols
08:42qui préfèreraient l'autoritarisme.
08:47Ça, c'est une enquête
08:48d'El Pais.
08:49Ça paraît assez ahurissant.
08:50Il faut peut-être rappeler
08:51avant de commencer ces discussions
08:54ce que c'est que le franquisme.
08:55On parle de 500 000 morts.
08:57Alors effectivement,
08:57d'abord peut-être
08:58quelques points de contexte
08:59autour du franquisme.
09:01Le franquisme est quand même
09:01un régime qui a été établi
09:03à l'issue de la guerre civile
09:04et même pendant cette guerre civile
09:06qui est le résultat
09:07d'un coup d'État,
09:07un coup d'État mené par Franco
09:09et surtout d'autres protagonistes,
09:11des militaires,
09:13des extrêmes droits espagnols
09:14à cette époque
09:14qui ont tout fait
09:15pour anéantir la démocratie.
09:17C'est une guerre menée
09:18contre la démocratie,
09:19contre une grande partie
09:19du peuple espagnol,
09:21contre ce qu'on appelle
09:21à l'époque l'anti-Espagne.
09:23Et ensuite,
09:24cette dictature,
09:25grâce à l'aide
09:26notamment de l'Allemagne nazie,
09:27de l'Italie fasciste
09:28et aussi,
09:30on pourrait dire,
09:30à l'absence d'aide
09:31des démocraties de l'époque,
09:33a réussi à se maintenir,
09:36a réussi à gagner cette guerre civile
09:37et se maintenir
09:38pendant 39 années.
09:39Donc la dictature s'est transformée,
09:40elle n'a pas toujours été
09:41totalement fasciste,
09:42mais il y a une inspiration fasciste
09:43et même nazie très claire
09:44au début du régime.
09:46Et puis,
09:46le régime se transforme,
09:48profite aussi
09:48de la Seconde Guerre mondiale
09:49et ensuite
09:49de la guerre froide
09:51pour se présenter
09:53en garant de l'anticommunisme.
09:55Et ça va être
09:55une longue dictature,
09:57une dictature de presque 40 ans,
10:00une dictature
10:01qui va rester
10:02longtemps impitoyable.
10:04On a souvent expliqué
10:05que cette dictature,
10:07après,
10:07a mis l'accent
10:08plutôt sur le développement
10:09économique,
10:10a amené la démocratie.
10:12Ce n'est pas vrai.
10:13Jusqu'à la fin,
10:14on continue à exécuter,
10:15on continue à torturer
10:16pendant cette dictature franquiste.
10:18Donc voilà
10:19ce qu'est le franquisme
10:20à très grands traits,
10:21évidemment.
10:22Et une dictature
10:22qui a été très sanglante.
10:23Vous avez parlé
10:24des 500 000 morts
10:26de la guerre civile.
10:27c'est pendant la guerre,
10:28120 000 exécutions,
10:30à l'issue de cette guerre,
10:31un peu plus de 30 000 exécutions,
10:33sans compter
10:33les camps de concentration,
10:34les prisons.
10:35Et puis,
10:36dans cette politique
10:37d'anéantissement
10:37de la population,
10:38c'est une longue humiliation,
10:40une longue loi
10:41du vainqueur
10:42contre les vaincus.
10:43Et ce qu'on dit en Espagne,
10:44très clairement,
10:45à la radio,
10:46dans les médias,
10:46en 1939,
10:47quand la guerre civile
10:48est terminée
10:49et est gagnée militairement
10:50par les franquistes,
10:51c'est que la guerre
10:51n'est pas terminée.
10:52C'est que la guerre
10:53va longtemps continuer.
10:54Et tout le problème,
10:55c'est qu'il y a eu
10:56toute une guerre des récits
10:57en Espagne
10:57qui dure jusqu'à aujourd'hui.
11:00Et c'est aussi la raison
11:01pour laquelle
11:02il y a une résurgence
11:03du franquisme aujourd'hui.
11:05Peut-être que ça se fonde
11:06finalement sur l'ignorance
11:07de cette histoire.
11:09Oui, effectivement.
11:10Il y a une longue guerre
11:10des récits,
11:11il y a une ignorance actuelle
11:12et puis qui peut nous inquiéter
11:13parce que le chiffre
11:14que vous avez cité,
11:15c'est une progression.
11:16Il n'y avait pas autant
11:17de personnes qui étaient indiquées.
11:17Il n'y a pas de chiffre officiel
11:18puisqu'il n'y a pas de mémoire
11:19officielle,
11:20le travail de mémoire
11:21qui a été effectué.
11:22C'est un problème.
11:22C'est un problème.
11:24Mais il faut comprendre peut-être,
11:25et c'est un premier point,
11:27que vous avez quand même
11:29une politique de mémoire
11:30qui est très rapide,
11:30qui est celle du régime
11:31franquiste lui-même.
11:32Le régime franquiste,
11:33dès le début,
11:34et même la dictature
11:35pendant la guerre,
11:36s'est établie à écrire
11:38cette histoire,
11:38à écrire,
11:39à légitimer ce soulèvement,
11:40ce coup d'État de 1936,
11:42à le célébrer,
11:43à célébrer cette violence,
11:44cette victoire,
11:45et puis ensuite à changer,
11:46à proposer un autre discours
11:47à travers des monuments.
11:49On pense à la baillée
11:50de Los Caïdos,
11:50dont on parlera peut-être,
11:51qui est un monument
11:52assez connu
11:53à côté de l'Escorial à Madrid,
11:55mais aussi des monuments
11:56en l'honneur
11:57des différents martyrs,
11:58ceux qui sont appelés
11:59les martyrs,
12:00ce sont les soldats franquistes
12:01tombés pendant la guerre
12:03et évidemment pas
12:04les soldats républicains.
12:06Et puis,
12:07cette mémoire,
12:07elle a été établie
12:08par d'autres biais,
12:09une littérature officielle,
12:11des historiens officiels
12:12du régime,
12:14et aussi des messes,
12:16donc vous avez
12:17des poésies,
12:19on en trouve,
12:20si vous voulez,
12:21dans tous les lieux possibles,
12:22on parle de vecteurs
12:23de mémoire,
12:24et donc le régime
12:24a su jouer
12:25sur tous ces vecteurs
12:26pendant la guerre,
12:28après la guerre,
12:29et après,
12:30ces vecteurs
12:30n'ont pas toujours
12:31été déconstruits,
12:32on laissait des traces,
12:32ont été réactualisées,
12:34revitalisées,
12:35réutilisées,
12:35relues,
12:36ce qui explique peut-être
12:37en partie
12:38soit l'indifférence
12:40ou en tout cas,
12:41même pour certains,
12:42le soutien accordé
12:43à cette dictature,
12:44ce régime qui est mal connu,
12:45soutenu,
12:47défendu
12:47dans une certaine catégorie
12:49de la population,
12:50une certaine partie
12:50de la population.
12:51Et notamment les jeunes,
12:52puisque là,
12:53ce sont un quart
12:53des jeunes espagnols
12:54qui préféraient
12:56l'autoritarisme.
12:57On se demande
12:58comment on est arrivé là ?
13:00Alors effectivement,
13:00c'est le chiffre,
13:02le sondage de El País
13:03dont vous avez parlé
13:04qui est assez inquiétant,
13:05c'est ce que je vous disais
13:05tout à l'heure,
13:06c'est ce chiffre qui progresse,
13:07on n'avait pas une proportion
13:08aussi importante dans les jeunes.
13:10Alors déjà,
13:11on le relativise,
13:12mais il faut comprendre,
13:13remettre ce chiffre
13:14dans un contexte
13:15un peu plus général,
13:16il n'y a malheureusement
13:17pas qu'en Espagne
13:18où le rapport
13:20à la démocratie
13:21s'est un peu affaibli
13:22et frité
13:23chez les plus jeunes.
13:26Donc ça,
13:26ça s'explique...
13:26Une montée globale
13:27de l'extrême droite
13:28en Europe.
13:28Voilà,
13:28une montée globale
13:29de l'extrême droite
13:29et une banalisation,
13:32un regard un peu plus clément
13:33envers les périodes
13:34de la dictature
13:35et puis surtout,
13:35plus généralement,
13:36d'un consensus antifasciste,
13:38au sens propre du terme,
13:39du combat antifasciste
13:41qui a été mené
13:41pendant la Seconde Guerre mondiale
13:42parce que le combat
13:43de la Seconde Guerre mondiale,
13:44le consensus
13:45qui a été établi
13:45à partir de 1945 en Europe
13:47et même aux Etats-Unis,
13:49c'est le consensus
13:49sur lequel il fallait
13:51combattre le nazisme,
13:52le fascisme
13:53pour établir
13:54nos démocraties.
13:55Et ça,
13:55ce discours-là
13:56commence à être
13:57remis en question,
13:59à s'effriter,
14:00à ne plus forcément
14:02remporter l'adhésion
14:03chez des catégories
14:04les plus jeunes
14:04et notamment
14:04chez des jeunes garçons.
14:06On le voit
14:06dans les sondages en Espagne,
14:08il y a un rapport aussi,
14:10un développement
14:10de l'extrême droite
14:11qui peut toucher
14:12certaines catégories
14:12de la population.
14:13C'est genré ?
14:14C'est ça que vous voulez dire ?
14:14C'est assez genré.
14:15Le rapport
14:16de la défense
14:17et de la démocratie
14:18ou alors
14:19de la dictature
14:20est quelque chose
14:21d'assez genré
14:22parce que
14:23ça dialogue
14:24avec ce qu'est
14:25l'extrême droite
14:26aujourd'hui.
14:26Maintenant aussi,
14:27un discours viriliste,
14:28masculiniste
14:28qui fait écho
14:30à ce que pouvait être
14:31évidemment le franquisme.
14:33Et donc,
14:34on peut le retrouver
14:34en Espagne
14:34assez clairement
14:35avec des blogueurs,
14:37des influenceurs
14:38d'extrême droite
14:39qui ne sont pas seulement
14:40des défenseurs
14:41du franquisme.
14:42Ils sont des activistes.
14:43Mais Vox n'est pas forcément
14:45un défenseur
14:45du franquisme,
14:47même si il ne revendique pas
14:47du tout
14:48de cette échéance-là.
14:49Oui, alors Vox
14:50va pas...
14:50Le parti d'extrême droite
14:51dont on parlait avec...
14:52Le parti d'extrême droite
14:53fondé dans les années 2010
14:54et qui a vraiment
14:55pris son envol
14:56à partir de la crise
14:57en Espagne
14:58autour de l'indépendantisme
14:59catalan.
15:00Et donc,
15:02Vox, après,
15:02n'est pas forcément
15:03un défenseur de franco.
15:04On parle très rarement
15:05de franco directement.
15:07Mais va défendre
15:08plutôt le contenu
15:09du franquisme.
15:09Sans forcément...
15:11La distinction est un peu mince.
15:13Et assez ténue.
15:14Mais c'est-à-dire qu'on va dire
15:15que...
15:16Et ça a été très bien expliqué
15:17dans le petit reportage
15:19d'introduction.
15:20On va dire qu'il y avait
15:21un développement économique.
15:22On va dire que le franquisme
15:23a apporté la démocratie.
15:25On va essayer
15:26de parler d'une vision positive
15:28de la dictature.
15:29C'est un contresens,
15:30si vous voulez.
15:32Donc ça,
15:32ça va aussi
15:33emporter l'adhésion.
15:35Et ces différents...
15:37Comme en militant,
15:38influenceur,
15:39ils jouent sur plusieurs catégories.
15:40Si vous voulez,
15:40ils ne parlent pas du franquisme
15:42comme on en parlait
15:42dans les années 1930, 1940.
15:44Ils parlent du franquisme
15:46depuis notre époque,
15:47depuis notre actualité.
15:48Donc, quand ils parlent
15:49du franquisme,
15:49c'est aussi une manière
15:50d'attaquer les indépendantismes.
15:52En Espagne,
15:53c'est aussi une manière
15:53d'attaquer les mouvements
15:55d'émancipation sexuelle.
15:56C'est aussi une manière
15:56d'attaquer la gauche
15:57plus généralement
15:59et voire même
16:00de nourrir.
16:01Ça, ça va s'accoler
16:01à d'autres discours
16:02qui sont des discours
16:04climato-sceptiques
16:05dans certains cas
16:05ou autres.
16:08Enfin, tous les discours
16:09qu'on peut retrouver
16:09dans l'extrême droite actuelle.
16:10Donc, il y a aussi
16:11une légende autour
16:12de Franco
16:13qui se développe.
16:15Stéphane Michonneau
16:16nous a rejoint.
16:17Bonjour.
16:18Bonjour.
16:18Professeur d'histoire contemporaine
16:19à l'Université Paris-Est-Créteil.
16:21Vous êtes spécialiste
16:22de l'histoire de l'Espagne,
16:23auteur de Franco,
16:24le temps
16:25et la légende aux éditions Flammarion.
16:28On parlait à l'instant
16:29avec votre confrère
16:30des enjeux mémoriels
16:32autour de la dictature
16:34et de ce chiffre
16:35ahurissant,
16:3620% des Espagnols
16:37qui considèrent
16:38que la dictature franquiste
16:39a été bénéfique
16:40pour le pays.
16:42c'est à peine croyable
16:43un tel chiffre
16:45compte tenu
16:45de ce que l'on sait
16:46aujourd'hui
16:47des horreurs
16:48de la dictature.
16:49Oui, ça peut paraître incroyable
16:50mais pas tant que cela
16:51parce que
16:52c'est relativement
16:53alors ça monte
16:54ça monte
16:55mais c'est relativement constant.
16:56Il y a eu toujours
16:57cette légende
16:57selon laquelle
16:58à certains égards
16:59la dictature
17:00était positive
17:01en particulier
17:01dans le domaine économique
17:03par exemple
17:03que la dictature
17:05a amené la prospérité
17:06et le miracle économique
17:07des années 60.
17:08Ce qui est
17:09d'un point de vue historique
17:09faux.
17:10les historiens
17:11l'ont bien montré
17:12mais cette légende
17:13continue à survivre
17:15et puis il y a
17:15d'autres légendes
17:16comme par exemple
17:18Franco
17:18garant de l'unité
17:20du territoire.
17:21Alors oui, garant
17:22mais enfin
17:22à quel prix ?
17:23Mais c'est une chose
17:24qui continue à circuler
17:25dans l'opinion publique
17:26certaines images
17:27et certaines légendes
17:28de Franco
17:28sont encore d'actualité
17:29mais il faut aussi noter
17:31que d'autres
17:31ont disparu
17:32par exemple
17:33le Franco des années 20
17:34qui était le chef
17:35de la Légion
17:36aujourd'hui
17:37personne ne s'en souvient
17:38naturellement.
17:39Mais pourtant
17:39aujourd'hui
17:40c'est ce qu'on lit
17:42dans la presse
17:43en tout cas
17:43c'est que dans
17:44les déjeuners dominicaux
17:45en Espagne
17:46il y a notamment
17:47une ancienne génération
17:48qui affirme avoir
17:50grandi dans des structures
17:51sociales
17:52créées par des franquistes
17:54et qui revendiquent
17:55cet héritage.
17:56Oui, naturellement
17:57il y a toujours une partie
17:58de l'opinion publique
17:59et aujourd'hui
18:02avec le mouvement
18:04de Vox.
18:04ça correspond à quelle réalité
18:05historique
18:06justement
18:07toutes ces structures
18:08sociales
18:09qui ont été créées
18:10et dont bénéficie
18:11aujourd'hui
18:12une partie des Espagnols ?
18:13Oui, enfin
18:14la prospérité
18:16on pourrait franchement
18:17beaucoup en parler
18:17parce qu'elle est extrêmement
18:18courte
18:19elle ne dure que 15 ans
18:20elle s'est faite
18:20simplement à partir
18:22des années 60
18:23et contre la volonté
18:24de Franco
18:24donc je ne suis pas certain
18:27que Franco soit
18:27vraiment responsable
18:28et puis on parle aussi
18:30beaucoup des politiques sociales
18:31de la sécurité sociale
18:32etc.
18:33Sous le franquisme
18:34franchement
18:35l'Espagne est un état social
18:37extrêmement petit
18:38qui n'a rien à voir
18:39avec ce que l'on peut
18:40connaître en France
18:41dès 1944
18:42mais il y a ce souvenir
18:44effectivement
18:44de ces quelques éléments
18:48de construction
18:49d'une politique sociale
18:50qui demeure dans la population.
18:51Avec une guerre des récits
18:52finalement.
18:53Oui, tout à fait
18:54en plus il faut peut-être
18:56souligner pour compléter
18:57ce que disait Stéphane Michonneau
18:58sur ces récits
19:00ces mythes
19:00ils se construisent aussi
19:01contre certaines réalités
19:03historiques
19:03le développement économique
19:04c'est oublier
19:05qu'il y a une politique
19:05d'autarcie
19:06les premières années du régime
19:08et que cette politique
19:09d'autarcie
19:09voulue par Franco
19:10est responsable
19:11d'une famine
19:11qui cause la mort
19:14d'environ 200 000 personnes
19:15en Espagne
19:16un phénomène
19:17assez peu connu.
19:19Ensuite
19:20pour le contenu social
19:21ne pas oublier
19:22que le franquisme
19:23c'est une guerre
19:24faite contre la société
19:25contre la démocratisation
19:27contre la démocratie
19:28même en Espagne
19:29qui était là en 1931
19:30depuis 1931
19:32avec la république espagnole
19:33et ça a été une manière
19:35de réarticuler le social
19:36sous une autre coupe
19:37une coupe fasciste
19:39et une coupe catholique aussi
19:40donc c'était une autre manière
19:42de contrôler la société
19:43certainement pas
19:44quand on pense à des politiques sociales
19:45d'émanciper une partie de la société
19:48de l'aider
19:49c'était plutôt vraiment
19:50une manière de contrôler
19:51de réguler
19:52et d'encadrer
19:53sur le très long terme
19:54ça c'est un point
19:55assez important
19:55peut-être à souligner
19:56parce qu'on joue un petit peu
19:58sur des non-dits
19:58des mal-dits
19:59peut-être
20:00et qui ont pu perdurer
20:02parce qu'il y a aussi
20:04une mémoire du franquisme
20:05qui a été officielle
20:07je vous l'ai dit
20:07et c'était le régime lui-même
20:08qui s'est établi
20:09à écrire sa propre histoire
20:10il a bien fait
20:11dans la mesure
20:12je dis bien fait
20:13parce que c'était
20:13un certain succès
20:14ça a laissé une marque
20:15il faut le préciser
20:16et d'un autre côté
20:18il y a aussi
20:18d'autres mémoires parallèles
20:20il n'y a jamais une mémoire
20:21quand on pense à une mémoire
20:21on pense à une mémoire officielle
20:22mais les mémoires
20:23elles sont multiples
20:24elles passent par différents vecteurs
20:25il y a aussi des mémoires familiales
20:27et ces mémoires familiales
20:28on n'a parfois pas toujours vu
20:30le dialogue qu'elles pouvaient avoir
20:31avec cette mémoire officielle
20:32elles pouvaient rentrer en contradiction
20:34quand on pense à des descendants républicains
20:36qui ont vécu dans leur chair
20:37la répression franquiste
20:38ou d'autres mémoires
20:40qui ont pu être là
20:42qui ont pu vivre dans des familles
20:43qui ont pu grandir
20:45vivre avec le franquisme
20:46et qu'on a pour certaines catégories
20:48de la population
20:48tiré un bénéfice
20:49certaines parties
20:50dirigeants politiques
20:52ont tiré un bénéfice
20:54évidemment du franquisme
20:55ça a pu aussi
20:55c'est un régime de faveur
20:57le franquisme
20:58et ces personnes ont pu
20:59développer l'idée
21:01d'un franquisme bienveillant
21:03prospère
21:03parce qu'en fait
21:04quand elles disaient ça
21:05c'était leur propre histoire
21:06et pas forcément l'histoire
21:07de toute la population espagnole
21:08et pourtant 50 ans
21:09on est 50 ans après là
21:11pourquoi ça polarise autant l'opinion
21:14comment on explique ?
21:15ça polarise parce qu'il y a
21:16une instrumentalisation politique
21:18de part et d'autre
21:19très clairement
21:20c'est une polarisation
21:21droite-gauche
21:22Pierre Salmon
21:25parlait de cette mémoire familiale
21:26c'est très notable
21:28d'un point de vue
21:28des exhumations
21:29par exemple
21:29dont on sait aujourd'hui
21:30qu'elles ont commencé très tôt
21:31dès 72-73
21:33alors que Franco
21:33n'est pas encore mort
21:34et c'est une chose
21:35qui ne se reflète
21:36absolument pas
21:37politiquement
21:38voilà une mémoire
21:39tout à fait
21:39souterraine de la société
21:41mais qui travaille
21:42et puis
21:43pendant très longtemps
21:44pendant la démocratie espagnole
21:46la volonté
21:47de ne pas instrumentaliser
21:48les souvenirs
21:48de la guerre civile
21:49c'est la période
21:50des années 80-90
21:51et à partir des années 2000
21:53lorsque surgit
21:54la grande vague
21:55d'exhumation
21:56la gauche
21:57ne comprend pas
21:58tout de suite
21:58la potentialité politique
22:00qu'elle peut tirer
22:00de ce phénomène
22:01mais elle le comprend
22:02relativement vite
22:03puisque ça devient
22:04un argument électoral
22:05en 2002-2003-2004
22:06et c'est sans doute
22:07l'une des raisons
22:08qui portent les socialistes
22:09au pouvoir
22:09José Luis Zapatero
22:11en 2004
22:12et là
22:12à partir de ce moment-là
22:14l'instrumentalisation politique
22:15est totale
22:16et donc pour vous
22:17la mémoire de Franco
22:18aujourd'hui
22:19c'est un carburant
22:20électoral
22:21oui
22:22et rien d'autre
22:23aujourd'hui en Espagne
22:24ah non
22:24je ne dis pas
22:26que c'est rien d'autre
22:26mais c'est un aspect
22:27de la question
22:28qui est absolument
22:29je crois
22:30tout à fait déterminant
22:31alors justement
22:32on va voir
22:32quels sont
22:33les enjeux mémoriels
22:34autour de ces symboles
22:36mais d'abord
22:36de quels symboles
22:37parle-t-on exactement
22:38alors des symboles
22:40il n'en manque pas
22:41parce que ce régime
22:42je crois qu'on en dénombre
22:436000
22:43je ne sais pas
22:44que vaut ce chiffre
22:46oui
22:46dites nous
22:46ce que l'on peut avancer
22:48factuellement
22:50sur ces symboles
22:51quels sont-ils
22:52combien sont-ils
22:53où sont-ils
22:54alors je serais
22:55qu'est-ce qu'ils représentent
22:56oui
22:56alors évidemment
22:57un régime
22:58pendant 40 ans
22:58qui a imposé
22:59une vision du passé
23:01extraordinairement
23:02rigoureuse
23:03et donc
23:04il y a des monuments
23:05partout
23:06des grands monuments
23:07comme le Vallée de Los Caïdos
23:08des monuments
23:09d'importance
23:10comme des statues équestres
23:11etc
23:11et puis ensuite
23:12une myriade
23:13de bustes
23:14de noms de rues
23:15de petites marques
23:16que le régime a laissé
23:18alors
23:18la défranquisation
23:20de l'espace public
23:21est extrêmement lente
23:22elle est extrêmement lente
23:23elle commence
23:24à la fin des années 70
23:25dans les municipalités
23:26qui sont gagnées
23:27par la gauche
23:28et puis le mouvement
23:29se prolonge
23:30tout doucement
23:30pendant 30 ans
23:32aujourd'hui
23:32on peut dire
23:33surtout après la loi
23:34mémoriale de 2007
23:35que les monuments
23:38les plus importants
23:39du franquisme
23:40ont été débarrassés
23:40de l'espace public
23:41expliquez ce qu'est
23:42cette loi
23:42mémoriale de 2007
23:43alors cette loi
23:44elle est une loi
23:45de reconnaissance
23:46de la dignité
23:47des victimes
23:48du franquisme
23:48avec toutes sortes
23:50de mesures
23:50d'indemnité
23:51de rattrapage
23:52d'indemnisation
23:53économique
23:54et symbolique
23:55naturellement
23:56et elle prévoit
23:57dans l'un de ses articles
23:58justement
23:59de retirer
24:00les monuments
24:01franquistes
24:02les plus évidents
24:03avec une petite nuance
24:05qui est de ne retirer
24:07les monuments
24:07que s'ils n'ont pas
24:08de valeur esthétique
24:09c'est-à-dire qu'il était
24:10possible
24:10s'ils avaient une valeur
24:12en tant qu'histoire de l'art
24:13s'ils avaient une valeur
24:14esthétique
24:14on pouvait éventuellement
24:16les garder
24:16alors évidemment
24:17les municipalités
24:19conservatrices
24:19se sont emparées
24:20de cette petite nuance
24:21pour valoriser
24:23leur monument
24:23en disant
24:24mais c'est un monument
24:25extraordinaire
24:25d'un point de vue esthétique
24:26il faut absolument
24:27le classer
24:28comme monument stérique
24:29et ne plus y toucher
24:30du coup
24:30finalement cette loi
24:32a eu un impact
24:33naturellement
24:33mais pas autant
24:34qu'on pourrait le croire
24:35d'où la nécessité
24:36d'une seconde loi
24:37en 2022
24:37qui cette fois-ci
24:39défranquise
24:40totalement l'espace public
24:41mais évidemment
24:43qu'il reste des petites traces
24:44naturellement
24:45on n'y est pas
24:46oui il y a encore peu de temps
24:47il y avait cette fondation
24:48franco
24:49qui avait pignon sur rue
24:50à Madrid
24:52comment expliquer
24:53une telle persistance ?
24:55alors il y a peut-être
24:57un point pour expliquer
24:58bon la fondation
24:58francisco franco
24:59elle a été fondée
25:00au moment de la transition
25:01en 1976
25:02enfin à la sortie
25:03de la dictature
25:03en tout cas
25:04pour défendre
25:05la mémoire de franco
25:06elle existe toujours
25:07elle envoie dissolution
25:08parce qu'avec une dernière
25:10loi de mémoire
25:10en 2022
25:11interdit plus clairement
25:12l'apologie du franquisme
25:13ça c'est un point
25:15mais pour comprendre
25:17pourquoi ça a pu persister
25:18c'est aussi
25:19vous avez parlé
25:20de la polarisation
25:21qui est un fait
25:22indiscutable
25:23et de plus en plus important
25:24je pense plus en plus marqué
25:25autour de cette question
25:25mais il y a aussi
25:26de l'indifférence
25:26ou de la méconnaissance
25:28il y a un arc
25:30de la victoire
25:30à Madrid
25:31à côté de l'université
25:32Complutense
25:32qui est assez imposant
25:34très imposant même
25:35et qui a été
25:36on l'a vu dans le reportage
25:37voilà on l'a vu dans le reportage
25:38qui a été établi
25:39pour célébrer
25:40l'entrée
25:40des troupes franquistes
25:42en mars 1939
25:43dans la ville
25:44et cet arc
25:46de la victoire
25:48il est évidemment
25:49très chargé
25:50il y a d'autres lieux
25:50un petit peu
25:51autour de cet arc
25:51mais tout le monde
25:52toutes les personnes
25:53on pourrait faire un sondage
25:53qui passe au pied de cet arc
25:55je pense qu'il n'y a pas
25:56forcément une majorité
25:57des personnes
25:58qui connaissent
25:58le signifiant
26:00de cet arc
26:01de la victoire
26:02pareil pour d'autres lieux
26:04pour les rues par exemple
26:05donc ça explique
26:06que parfois
26:06il va y avoir
26:07une forte polarisation
26:08de forte résistance
26:09politique
26:10militante
26:11pour les noms des rues
26:11à Madrid
26:12il y a eu des rues
26:12avec une mairie de droite
26:14on a enlevé
26:14quasiment tous les noms de rues
26:16relatifs à la guerre civile
26:19en l'honneur
26:19en tout cas
26:20du franquisme
26:22et ce qu'il y a
26:23autour du franquisme
26:23des personnes
26:24qui ont accompagné
26:24Franco
26:25avant la guerre
26:26je pense
26:26et pendant la guerre
26:28je pense à une rue
26:28Myanna Stray
26:29qui a été débaptisée
26:30et avec le retour
26:31d'une mairie de droite
26:32cette rue a été réinaugurée
26:34et donc
26:36on a trouvé aussi
26:37d'un côté
26:38des personnes
26:39qui étaient très militantes
26:40pour débaptiser cette rue
26:42on peut évidemment
26:43le comprendre
26:43Myanna Stray
26:44ça a été
26:45un des premiers
26:46soutiens de Franco
26:48avant le franquisme
26:49dès 1920
26:50il rencontre en 18
26:51il est avec la Légion étrangère
26:52c'est un des artisans
26:54de cette grande brutalité
26:55du franquisme
26:55et puis après
26:56pendant cette guerre civile
26:57et puis d'un autre côté
26:59des personnes
26:59qui ont voulu défendre
27:00cette mémoire
27:01et puis entre les deux
27:02il y a eu un discours
27:02qui a été établi aussi
27:03en Espagne
27:04au moment de la transition
27:05l'idée de
27:05et ça en fait
27:06c'est aussi le régime
27:07qui avait insisté là-dessus
27:08en disant
27:08c'est une guerre fratricide
27:09il y a des bons
27:10et des méchants
27:11des deux côtés
27:12on a tous été
27:13finalement victimes
27:14de cette guerre
27:15maintenant il faut arrêter
27:16d'en parler
27:16et donc ça a créé
27:17un peu cette espèce
27:18de zone grise
27:19de cet entre-deux
27:20et j'ai retrouvé
27:21j'ai lu quelques articles
27:22autour de cette rue
27:23de Myana Stray
27:24et il y a des personnes
27:25entre les deux
27:25qui disent
27:26bon on en a un peu marre
27:27de cette querelle
27:28remettez le nom de la rue
27:29et on n'en parle plus
27:30et ça c'est obligé
27:31que d'une certaine manière
27:32cette symétrie
27:34méchant, mauvais
27:35est elle-même
27:37une écriture
27:38de l'histoire
27:38de la guerre civile
27:39dont les principaux artisans
27:41sont le franquisme
27:42alors ça a été réutilisé
27:43et ça a été aussi repris
27:45par une partie
27:45de la gauche en Espagne
27:46cette idée de
27:47voilà on est tous coupables
27:48il ne faut pas réouvrir
27:49les blessures du passé
27:50mais à l'origine
27:51c'est quand même
27:52vraiment un discours
27:53que le régime a promu
27:55et que maintenant
27:56la droite espagnole
27:57et l'extrême droite espagnole
27:59insistent beaucoup
28:00sur ce discours
28:01en disant
28:01bon voilà
28:01arrêtez de parler
28:03du passé
28:04on fiche tout
28:05et on n'en parle plus
28:07mais alors justement
28:07que va changer
28:08la décision du premier ministre
28:10donc socialiste
28:11de publier une liste officielle
28:12des symboles à retirer
28:14déjà on ne l'a pas encore
28:14cette liste
28:15pourquoi ça prend
28:15trop tant de temps
28:16pourquoi il y a tout ce flou
28:18en fait qui entoure
28:19cette mémoire là
28:20c'est extrêmement long
28:22vous parlez de la liste
28:24effectivement des symboles
28:25mais il y a bien
28:25d'autres initiatives
28:26il y a par exemple
28:27la liste de toutes les entreprises
28:28qui ont pu profiter
28:29de la main d'oeuvre gratuite
28:31des prisonniers républicains
28:32ce sont des entreprises
28:33qui existent encore
28:34naturellement
28:35pour beaucoup d'entre elles
28:36il y a beaucoup
28:37d'autres listes
28:37la liste des victimes
28:39naturellement
28:39on ne connait pas
28:40on dit 130, 160 000
28:42victimes de la répression
28:43franquiste
28:43mais on n'a pas
28:44évidemment le chiffre exact
28:45l'aura-t-on d'ailleurs
28:46un jour
28:47donc c'est un travail
28:48extrêmement long
28:49un travail extrêmement minutieux
28:51qui demande
28:51beaucoup de temps
28:52en vérité
28:53c'est la raison
28:54pour laquelle
28:55on n'a pas la liste
28:57tout de suite
28:57en cette année
28:59cinquantenaire
28:59du début de la démocratie
29:01en tout cas
29:01de ce que le gouvernement
29:02veut présenter
29:03comme une célébration
29:04de la démocratie
29:05et non pas
29:06comme une commémoration
29:08de la mort
29:09d'un dictateur
29:10c'est une raison
29:11et l'autre raison
29:11c'est qu'on s'y met
29:12très tardivement
29:13si on s'y était mis
29:14dès les années 70
29:15ou 80
29:16évidemment que cette liste
29:17se serait aboutie
29:18depuis fort longtemps
29:19mais on peut dire
29:20vraiment que l'état espagnol
29:21est en train de bâtir
29:22une politique de mémoire
29:23depuis les années 2010
29:25pas davantage
29:27et comme le disait
29:27Pierre Salmon
29:28avant
29:28c'est plutôt
29:29on n'en parle pas
29:31silence
29:32pasar pajina
29:34on dit en espagnol
29:35on tourne la page
29:36et on voulait Spagne
29:38à la construction européenne
29:39à l'OTAN
29:40à l'avenir
29:41ce sont des choses
29:41qui n'inquiètent absolument
29:43pas les espagnols
29:43des années 80 et 90
29:45pas du tout
29:46donc on s'y met très tard
29:47c'est sans doute
29:48la raison
29:49mais là on a l'impression
29:50que la démarche gouvernementale
29:53il s'agit plutôt
29:54de dresser un état des lieux
29:56plutôt que de contextualiser
29:58de transformer
30:00de muséaliser aussi
30:01il n'y a pas cette volonté
30:02politique là
30:03est-ce qu'il ne faudrait pas
30:04aller plus loin ?
30:06alors si il y a quand même
30:06une politique
30:07qui a une volonté
30:08de créer des musées
30:09de contextualiser
30:10en fait cet événement
30:12en fait c'est l'aspect
30:15le plus symbolique
30:16et le plus marquant
30:17dans l'espace public
30:18d'abord parce qu'il polarise
30:19peut-être le plus
30:20je pense
30:20mais il y a d'autres aspects
30:23les programmes scolaires
30:24sont réinterrogés
30:25il y a une volonté
30:27de créer des musées
30:27et puis surtout
30:28ce ne sont pas
30:29les 50 ans
30:30de la mort de Franco
30:31c'est la volonté
30:32du gouvernement actuel
30:33c'est de célébrer
30:33plutôt l'arrivée
30:36de la démocratie
30:36permise
30:37nouvel horizon
30:38permis par la mort de Franco
30:38d'ailleurs je précise
30:39que le gouvernement espagnol
30:40ne commémore rien
30:41aujourd'hui
30:41mais que les célébrations
30:43ont lieu à J plus 1
30:44c'est-à-dire donc
30:44demain pour célébrer
30:45célébrer la démocratie
30:47ça c'est la stratégie
30:48du gouvernement
30:49tout à fait
30:50et en parallèle
30:51de cet événement
30:53en fait il y a tout
30:53un cycle d'événements
30:54des événements
30:56par exemple
30:56pour parler de la participation
30:57de républicains espagnols
31:00exilés
31:01victimes du franquisme
31:02à la résistance française
31:04il y a une exposition
31:05actuellement
31:06en plein air
31:07qui est prévue
31:07à Madrid
31:08donc le gouvernement espagnol
31:11remet à une vraie politique
31:13de mémoire
31:13pour recontextualiser
31:14apporter d'autres éléments
31:15faire un contre-récit
31:17en fait
31:17de ce qu'est
31:18du récit
31:19qui avait été établi
31:20par le régime
31:20par le régime franquiste
31:22et pourtant justement
31:24cette image
31:25du dictateur
31:26bienveillant
31:27du gentil dictateur
31:28elle est encore présente
31:29chez certains espagnols
31:31oui elle est présente
31:32c'est une image
31:33qui s'est instaurée
31:35assez tardivement
31:36dans la seconde
31:37c'est assez inédit
31:38en Europe
31:38c'est vraiment
31:39une spécificité
31:40de cette mémoire espagnole
31:42qui n'est pas gérée
31:43finalement
31:43oui oui tout à fait
31:45vous avez raison
31:46fin 60
31:48quand Franco
31:49est déjà vieux
31:50il est déjà malade
31:51on sait qu'il a
31:51la maladie Parkinson
31:52il est de plus en plus
31:54photographié
31:54dans les journaux
31:55entouré de
31:56de ses petits enfants
31:57en train de pêcher
31:58en train de chasser
31:59bon bref
32:01un bon bourgeois
32:01en quelque sorte
32:02catholique
32:03un peu radical
32:04mais enfin
32:05qui mène bien son pays
32:07et puis
32:08c'est important
32:10dans l'opinion publique
32:11espagnole
32:11mais aussi dans l'opinion
32:12publique étrangère
32:13pas tellement en France
32:14pas tellement au Royaume-Uni
32:16où l'image de Franco
32:17reste extrêmement négative
32:18mais on en parle peu
32:20quand même
32:20par les exilés
32:21naturellement
32:22qui sont extrêmement nombreux
32:23mais par exemple
32:23dans l'opinion publique
32:24des Etats-Unis
32:25voilà
32:26c'est le strong man
32:27et finalement
32:28l'important c'est
32:29qu'il soit évidemment
32:30très clairement
32:31ancré dans le camp occidental
32:33et qu'il soit anticommuniste
32:34donc
32:34eh bien
32:35on peut travailler
32:36avec un homme comme cela
32:37est-ce que
32:39justement
32:40on peut dire
32:41que la démocratie espagnole
32:43s'est construite
32:44autour de ce pacte
32:45d'oubli
32:45donc notamment
32:46à travers cette loi
32:47d'amnistie
32:47de 1977
32:48comment s'est construite
32:50cette démocratie espagnole
32:52est-ce qu'elle peut survivre
32:53aussi avec tous ces fantômes
32:54du passé
32:54qui sont
32:55encore clairement présents
32:57et qui hantent encore
32:57les esprits
32:58cette amnistie
33:00c'est un contrat politique
33:01et il a été partagé
33:03enfin je veux dire
33:04il y a un consensus
33:05un global
33:06il y a évidemment
33:06des voies discordantes
33:07mais globalement
33:08au niveau des classes politiques
33:09il y a un consensus
33:10on a sorti de la dictature
33:12au moment de la transition
33:13pour cette amnistie
33:14parce qu'elle est jugée positive
33:16on n'en voit pas forcément
33:17toutes les conséquences
33:18et c'est un outil politique
33:19qui a plutôt bien fonctionné
33:21en tout cas
33:21dans son objectif
33:22qui était d'amener
33:23à la démocratie
33:23dans les premières années
33:24ça c'est un point important
33:27un autre point
33:28c'est peut-être de dire
33:28qu'avec cette amnistie
33:29on n'a pas jugé
33:30on n'a pas condamné
33:31et la justice
33:33a un rôle évidemment
33:34en société
33:35et elle a un rôle aussi
33:36au niveau mémoriel
33:36c'est un lieu de mémoire
33:37la justice
33:38et je voyais peut-être
33:39un parallèle à faire
33:40pour celles et ceux
33:41qui nous regardent
33:42on a beaucoup parlé
33:43dans les médias
33:44en France actuellement
33:45d'une messe
33:46en l'honneur du maréchal Pétain
33:48à côté de Metz
33:49une enquête
33:51qui a été ouverte
33:52justement
33:52pour contestation
33:53de crimes
33:53contre l'humanité
33:54Pétain
33:55qui a été frappé
33:56d'indignité nationale
33:57en France
33:57et traduit en justice
33:59à la différence
34:00de Franco
34:00qui lui
34:01n'a jamais eu de procès
34:03c'est précisément
34:04cette absence de justice
34:05aujourd'hui
34:06qui pose problème
34:07dans le pays
34:08qui pose problème
34:08et qui est réclamée
34:09par une grande partie
34:10de la population
34:10les fausses communes
34:11dont parlait Stéphane Michonne
34:12c'est aussi ça
34:13l'ouverture des fausses communes
34:14à partir de la fin des années 90
34:15surtout des débuts
34:16des années 2000
34:17c'est une volonté
34:17de récupération
34:18de justice
34:19à la fois de mémoire
34:20d'histoire
34:21et aussi de justice
34:22mais d'une justice
34:23sans l'appareil judiciaire
34:24d'une certaine manière
34:25parce que
34:26aussi c'est peut-être
34:27un déblocage
34:27en Espagne
34:28on pourrait parler
34:29c'est certaines
34:30parties de la population
34:33mais aussi
34:33de l'appareil d'Etat
34:34où la transition
34:36on pourrait dire
34:36vers la démocratie
34:37n'a pas été complète
34:38et l'appareil judiciaire espagnol
34:39est encore habité
34:40par certaines personnes
34:42qui pourraient être
34:43plutôt partisans du régime
34:44ou en tout cas
34:45qui bloquent
34:47ces exhumations
34:48qui bloquent
34:49certaines démarches
34:50qui font vraiment
34:51obstacle
34:51à ces lois mémorielles
34:53vous confirmez ?
34:54oui
34:54le régime
34:55de transition démocratique
34:57est un régime
34:57qui veut aller
34:58de la loi
34:58à la loi
34:59de la loi franquiste
35:00à la loi démocratique
35:00et il n'y a pas
35:02de rupture
35:03on n'est pas au Portugal
35:04et au contraire
35:04le Portugal
35:05et la révolution portugaise
35:06fait horreur
35:07aux espagnols
35:07des années 70
35:08le Portugal
35:09qui est en paix
35:10avec l'héritage
35:11de sa dictature
35:12qui a fait une révolution
35:13et qui a rompu
35:14de manière extrêmement brutale
35:15donc il n'y a pas
35:15de notion d'ancien régime
35:17c'est vraiment la continuité
35:18et la monarchie
35:19est construite
35:19dans la continuité
35:20du régime
35:21même si finalement
35:22elle va opter
35:23pour la démocratie
35:24probablement pour survivre
35:26le roi est avant tout
35:29un monarchiste
35:29la rupture
35:30elle serait survenue
35:31grâce au travail
35:32de la justice
35:32qui n'a pas eu lieu
35:33et c'est ce qui explique
35:34d'ailleurs
35:35vous parliez
35:35de la messe
35:37organisée en France
35:38en hommage à Pétain
35:39mais il y a des messes
35:41organisées aussi
35:42en Espagne bien sûr
35:44en hommage à Franco
35:45mais aussi à Paris
35:46le samedi 29 novembre prochain
35:48une messe
35:49en hommage à Franco
35:50qui est organisée
35:51par le cercle franco-hispanique
35:52en France
35:53ah bah je ne savais pas
35:54c'est intéressant
35:55oui le 28 novembre
35:57il y a une cérémonie organisée
35:59à Paris
36:008ème arrondissement
36:01donc par une organisation
36:02en fait
36:03on pourrait qualifier
36:03de néo-fasciste
36:04le cercle franco-hispanique
36:06qui a été fondé
36:06pour défendre la mémoire
36:07de José Antonio
36:08Primo de Rivera
36:09qui était le fondateur
36:10un des fondateurs
36:11du fascisme espagnol
36:12et qui ensuite
36:13cet appareil
36:14a été réutilisé
36:14par le franquisme
36:15comme partie unique
36:16pour aller vite
36:17et ça c'est un point
36:20assez intéressant
36:21parce que
36:21Stéphane Michonneau le disait
36:22ça circule cette mémoire
36:23cette mémoire
36:24elle a circulé
36:25à l'étranger
36:25et quand bien même
36:26en France
36:27la mémoire hégémonique
36:27était de mémoire
36:28antifranquiste
36:29il y a eu des volontés
36:31dès le début du régime
36:32de créer des contre-récits
36:34de créer des légendes
36:35des lieux de mémoire
36:35favorables au régime
36:38à son image
36:39des biographies écrites
36:41traduites
36:42de franco
36:43heureusement
36:43maintenant
36:44on a des vraies biographies
36:45historiques
36:46comme celle écrite
36:47par Stéphane Michonneau
36:48donc il y a eu
36:49une diffusion
36:50de cette mémoire
36:51des hommages
36:52mais qui reste quand même
36:52quelque chose
36:53d'assez marginal
36:53et qui est réduit
36:54à des franges
36:55très très faibles
36:57même des extrêmes droites
36:58même pour ne pas parler
36:59des droites françaises
37:00fort heureusement
37:01Stéphane Michonneau
37:02peut-être complétera
37:03sur ses biographies
37:04mais
37:04je voulais aussi répondre
37:06à la question
37:07que vous posiez
37:08est-ce que l'Espagne
37:09peut vivre
37:09avec tous ses fantômes
37:10moi je crois
37:11il y a certaines voies
37:12de résolution
37:13de la crise mémorielle
37:14qui sont évidemment
37:15bloquées en Espagne
37:16c'est la justice
37:16puisque la loi de 77
37:18l'interdit
37:18il y a eu des tentatives
37:19par le juge Garçon
37:20dans les années 2005
37:22elles n'ont pas abouti
37:23donc ça c'est bien certain
37:24ce matin
37:24dans un sondage
37:26de El País
37:27du grand journal
37:28El País
37:28on en parlait
37:29avant que vous arrivez
37:30une majorité d'Espagnols
37:32ont l'air de regretter
37:33que les crimes du franquisme
37:34n'aient pas été jugés
37:36c'est d'un autre chiffre
37:38alors allez-y
37:39d'accord
37:40mais il y a d'autres voies
37:41vous parliez par exemple
37:43du retrait
37:44et de la défranquisation
37:45de l'espace public
37:46la patrimonialisation
37:47d'un certain nombre de lieux
37:49la justice
37:51est évidemment
37:52un lieu de mémoire
37:53mais elle n'est pas
37:53l'unique voie
37:54de résolution
37:55des crises mémorielles
37:56mais pourtant
37:56pour rester
37:58sur ce sujet
37:59de la messe
37:59en hommage
38:00à Pétain
38:01qui avait organisé
38:01en France
38:02en France
38:02il y a toujours
38:04des leviers juridiques
38:06face à ce type
38:07d'initiative
38:08vu que Franco
38:10n'a pas été condamné
38:11une messe
38:12peut totalement
38:13se tenir en France
38:14en toute impunité
38:15absolument
38:16parce que là
38:17il y a eu une enquête
38:17pour contestation
38:18de crimes contre l'humanité
38:19c'est dit en France
38:21là on n'a aucun outil
38:23n'importe qui
38:24peut organiser
38:25n'importe qui
38:26dans une paroisse
38:27on peut organiser
38:27une messe
38:28en hommage
38:28à Franco
38:29ça pose question
38:31c'est vrai
38:32oui oui
38:33ça pose question
38:33elle va avoir lieu
38:35cette messe
38:36et personne ne va
38:36l'en empêcher
38:37et de toute façon
38:38il n'y a pas d'outil
38:38juridique
38:38pour l'en empêcher
38:40c'est ça
38:40ma question
38:41non
38:41mais est-ce qu'une mémoire
38:43démocratique
38:43ce n'est pas précisément
38:44une mémoire
38:45qui gère
38:45ces dissensus
38:47mémoriels
38:48là il n'y a rien
38:48justement
38:49plutôt que de tenter
38:50de les réduire
38:51comment on les gère
38:53avec quels outils
38:54puisqu'on n'a pas
38:55les outils de la justice
38:56dans le cadre franco
38:57en France
38:59ou en Espagne
38:59vous parliez justement
39:02des lieux
39:03je pense à ce lieu
39:04de mémoire conflictuelle
39:05qu'est le baillet
39:06des los caidos
39:07que faire de ce lieu
39:10où a été
39:11d'où a été exhumé
39:12franco
39:12en 2019
39:13alors même
39:15que la montée
39:16du parti d'extrême droite
39:17Vox
39:18favorise
39:19de nouvelles appropriations
39:20aujourd'hui
39:20de ce complexe monumental
39:21vous en parliez tout à l'heure
39:23qu'est-ce qu'on en fait
39:24de ce lieu ?
39:24Alors le gouvernement espagnol
39:26actuel a lancé
39:26un concours international
39:27c'est ce que nous expliquait
39:29et donc le résultat
39:31qui n'est pas fameux
39:32en vérité
39:33mais enfin
39:33le résultat
39:34est tombé
39:34l'année dernière
39:36la semaine dernière
39:36donc voilà
39:38la volonté
39:38de patrimonialisation
39:39de ce lieu
39:39de le neutraliser
39:40d'une certaine manière
39:41même si on peut douter
39:42que le projet choisi
39:43le fasse
39:44mais enfin
39:44la volonté
39:45l'intention en tout cas
39:46est là
39:47ça ce sont d'autres formes
39:48de résolution
39:49des difficultés mémoriales
39:51Mais toute la question
39:51c'est est-ce que ça peut
39:52se substituer à la justice
39:54est-ce que c'est suffisant ?
39:57De toute façon
39:57jusqu'à ce que
39:58cette loi d'amnistie
39:59soit abolie
40:01il n'y a pas d'autre voie possible
40:02et vous le savez
40:03beaucoup de victimes
40:05du franquisme
40:06ont recouru
40:07à la justice internationale
40:08et ont posé des causes
40:09en Argentine
40:10en particulier
40:11au nom de la justice internationale
40:12et c'est de contourner
40:14cet obstacle en Espagne
40:15pour faire des procès
40:19en Argentine en particulier
40:20Oui justement
40:21c'est ça qu'il faut expliquer
40:23Pierre Salmon
40:23c'est qu'il y a encore
40:24des familles
40:25qui cherchent leurs morts
40:26qui cherchent leurs enfants
40:27qu'est-ce qu'on leur répond
40:29à ces gens-là ?
40:31Alors
40:31il y a eu plusieurs politiques
40:32et parfois
40:33elles sont encouragées
40:33au niveau local
40:34dans certaines localités
40:36mairies
40:37donc des politiques
40:38d'exhumation
40:39des morts
40:39d'identification
40:40et un rapport aussi
40:41à l'identification des morts
40:42qui est très important
40:43on cherche des traces
40:44même des traces ADN
40:45c'est assez spectaculaire
40:47on voit des fausses communes
40:48je ne crois pas
40:50qu'on l'ait dit
40:50dans cette émission
40:51mais l'Espagne
40:51est le pays
40:52avec le deuxième
40:53plus grand nombre
40:54de fausses communes
40:55au monde
40:56derrière le Cambodge
40:57donc c'est un chiffre
40:59évidemment surprenant
41:01qu'on ne connaît pas toujours
41:02et donc il y a une volonté
41:04d'exhumation
41:05et ça
41:05ça a été permis
41:06encouragé par la loi de 2007
41:08et puis un petit peu plus clairement
41:09par une nouvelle loi
41:10dite de mémoire démocratique
41:12en 2022
41:13et ça après
41:15le fait est qu'en Espagne
41:16il y a aussi
41:16un pouvoir important
41:18aux communautés locales
41:20et aux régions
41:21et donc ça dépend
41:23un petit peu
41:24des régions
41:24où parfois c'est encouragé
41:25dans certaines régions
41:26et dans d'autres régions
41:27notamment des régions
41:28où il y a des coalitions
41:29entre droite
41:30et extrême droite
41:31il y a des blocages
41:32face à ces politiques
41:33d'exhumation
41:34et puis ça se joue aussi
41:34à l'échelle un peu plus fine
41:36des mairies
41:37et pas toujours
41:39même s'il y a un clivage
41:40droite-gauche
41:41qui est très très marqué
41:42mais c'est pas toujours
41:43toujours ce clivage
41:44droite-gauche
41:44il y a une impossibilité
41:45justement
41:46d'harmoniser
41:47la gestion
41:48de ce traumatisme
41:50national
41:50en Espagne
41:52les problèmes
41:54mémoriels
41:54ne se jouent pas
41:55nécessairement
41:56à l'échelle de l'Etat
41:57et l'Etat
41:58est tout un petit peu
41:58à la remorque
41:59de ce que font
41:59les communautés autonomes
42:00donc il y a des communautés
42:02comme l'a dit Pierre
42:03en Andalousie
42:05au Catalogne
42:06au Pays Basque
42:07etc.
42:07qui sont très très en avance
42:08dans ce processus
42:10on parle de 6000
42:11fausses communes
42:12en Espagne
42:12beaucoup en Andalousie
42:14en particulier
42:14d'autres régions
42:15sont complètement
42:16à la remorque
42:17mais en général
42:17et ça c'est très différent
42:19de la France
42:19les questions mémorielles
42:20se réjouent
42:21plutôt à l'échelle
42:22locale ou régionale
42:23qu'à l'échelle nationale
42:25donc selon
42:26selon où l'on est
42:27en Espagne
42:28à IT
42:29on peut espérer
42:30ou pas
42:30une réparation
42:31c'est ça ?
42:32absolument
42:32et ça justement
42:34comment on peut réparer
42:35une mémoire
42:36la mémoire
42:37de tout un pays
42:37si ça se joue
42:39comme ça
42:39à l'échelle locale
42:41comment on peut
42:42réconcilier tout le monde
42:45comment on peut espérer
42:46sortir justement
42:47de ce traumatisme national
42:49c'est un sacré défi
42:52c'est ce que disaient
42:54les témoignages
42:56du reportage
42:57de notre correspondante
42:58à Madrid
42:58c'était des Espagnols
43:00qui attendent
43:02une volonté politique
43:03finalement
43:04et la volonté politique
43:06ce que j'en comprends
43:07c'est qu'il faudrait
43:08harmoniser
43:09qu'il faudrait
43:09qu'il y ait des initiatives
43:10nationales
43:11pour prendre en charge
43:12cette mémoire
43:12alors initiative nationale
43:14il y en a malgré tout
43:15puisque cette loi
43:15de 2022
43:17elle est tardive
43:18la récupération
43:19attention
43:20évidemment
43:22les politiques
43:23d'indemnisation économique
43:24ont déjà eu lieu
43:25les victimes
43:26ont été très largement
43:27indemnisées
43:28on parle de 25 milliards d'euros
43:30versés à plus de 600 000
43:32650 000 personnes
43:33donc on parle là
43:35aujourd'hui
43:35plutôt de réparation
43:37symbolique
43:38et de rendre
43:39la dignité
43:40de ces victimes
43:41mais votre question
43:43est une question
43:43d'une française
43:44en Espagne
43:46la question nationale
43:47est fort compliquée
43:48et l'identité
43:50qui prime
43:51n'est pas nécessairement
43:52l'identité nationale
43:53une identité régionale
43:55comme en Catalogne
43:55ou au Pays Basque
43:56peut largement primer
43:57sur le sentiment
43:58d'être espagnol
43:59et donc
44:00c'est un jeu politique
44:02très complexe
44:02qui n'existe pas en France
44:03où les régions
44:04ont leur poids
44:06considérable
44:07Oui et peut-être
44:09une question
44:10c'est doit-on faire rentrer
44:11aussi tous les récits
44:12individuels
44:12toutes les mémoires
44:13personnelles
44:14dans un cadre global
44:15au risque peut-être
44:16de gommer aussi
44:16certaines trajectoires
44:17parcours
44:18la répression
44:19en Andalousie
44:20n'a pas été celle
44:21du Pays Basque
44:22par exemple
44:23donc je pense
44:25que c'est peut-être
44:26pas forcément
44:26une mauvaise chose
44:27il faut un récit global
44:29ça c'est important
44:30parce qu'il n'y a pas
44:30en l'absence
44:31de cadre judiciaire
44:32global en fait
44:33oui voilà
44:33il y a différentes choses
44:34ce que vous soulignez ici
44:36c'est aussi
44:36qu'il y a la justice
44:37mais le régime
44:39a laissé des marques
44:40un peu partout
44:41et ces marques
44:42elles peuvent être réparées
44:43ou pas
44:44il y a déjà un chemin
44:45qui est un chemin personnel
44:46le chemin des familles
44:47et ça c'est pas à l'état
44:48de dire à quelle famille
44:49quel chemin doit faire
44:50pour réconcilier
44:51revenir se réapproprier
44:52sa propre aménement
44:53répondre aux questions
44:54qu'elles ont
44:55sur ce que sont devenus
44:56leurs proches
44:57on peut imaginer
44:58que c'est déjà
44:58une sacrée étape
44:59bien entendu
45:00il y a ce chemin là
45:01mais il y a d'autres chemins
45:02qui sont menés
45:02et puis après
45:03il y a le travail
45:03des historiennes
45:04et des historiens
45:04il y a le travail
45:05de la justice
45:05il y a le travail
45:06des politiques
45:07ce que je veux vous dire là
45:07c'est qu'il y a plein de voies
45:09qui sont ouvertes
45:10elles ne vont pas nécessairement
45:12dans le même sens
45:12elles peuvent être parallèles
45:14parfois un peu concurrentes
45:16et derrière tout ça
45:17en fait
45:18des familles
45:18des personnes
45:19des enfants
45:19des descendants
45:20des petits-enfants
45:21se réapproprient
45:22leur propre histoire
45:23l'important est peut-être
45:25que cela soit possible
45:26que les voies soient ouvertes
45:28et après
45:28les personnes se saisissent
45:30des voies judiciaires
45:31des récits historiques
45:33ou plutôt des travaux
45:36de scientifiques historiques
45:37qui ont été établis
45:37l'important est que ce chemin
45:39soit possible
45:39je dirais ensuite
45:40chacun emprunte
45:42le chemin qu'il veut
45:43et il l'est
45:45il l'est possible
45:45ce sera le mot de la fin
45:46on arrive vraiment
45:47à la toute dernière seconde
45:49de cette émission
45:50la voie est possible
45:50pour apaiser les mémoires
45:51moi il me pense que
45:52ça s'ouvre
45:53oui
45:53ça s'ouvre
45:54ça s'ouvre
45:55oui
45:55mais ce n'est pas encore ouvert
45:57encore du chemin à faire
45:58pour tourner la page franco
45:59en Espagne
46:00merci à tous les deux
46:01pour vos analyses
46:03sur cette mémoire
46:06très contrariée
46:07c'est la fin
46:07de notre discussion
46:08on se retrouve dans un quart d'heure
46:09pour un journal complet
46:11sur France 24
46:11restez avec nous
Recommended
0:35
4:38
Be the first to comment