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  • il y a 2 jours
Julien Pearce , rédacteur en chef adjoint de France 3 Centre-Val de Loire, ancien rédacteur en chef d'ici Orléans

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Transcription
00:00Il y a le témoignage ce matin, Marie Dorset, d'un rescapé dix ans après une date qui a marqué la France entière le 13 novembre 2015
00:07et les attentats terroristes de Paris et Saint-Denis.
00:11Ce soir-là, le rédacteur en chef adjoint de France 3 Centre Val-de-Loire,
00:14qui est notre ancien rédacteur en chef de l'équipe d'ici Orléans, était au Bataclan.
00:19Et il est notre invité maintenant, Marie.
00:21Bonjour Julien Pierce.
00:21Bonjour Marie, bonjour à tous.
00:22Ce soir du 13 novembre 2015, vous aviez témoigné en direct sur la radio pour laquelle vous travailliez à l'époque, Europe 1.
00:28et puis presque plus rien depuis.
00:30Dix ans après, vous acceptez de prendre la parole. Pourquoi ?
00:34J'ai beaucoup hésité, parce que ce n'est pas simple.
00:37Ça remue beaucoup de choses et surtout, je ne voulais pas donner le sentiment d'accaparer une lumière qui ne m'appartient pas
00:43et qui n'appartient qu'aux 132 victimes de cette nuit d'horreur.
00:49Et j'ai beaucoup réfléchi et je me suis dit que c'était nécessaire.
00:56C'était nécessaire que tous, collectivement, on se rappelle ce qui s'était passé cette nuit-là.
01:02A fortiori dans un pays qui est plus que jamais divisé, qui se cherche une direction, qui ne sait pas exactement où il va.
01:09Et peut-être que cette journée pourrait permettre de nous rassembler
01:12et de nous rappeler ce qu'on s'était tous dit le 14 novembre,
01:18que Paris est une fête et que ce triptyque liberté, égalité, fraternité, qui m'est très cher.
01:28Vous l'avez dit, effectivement, il y a eu un élan de solidarité après.
01:32On a parlé des fleurs déposées à Orléans, ça a été le cas.
01:35Pour vous, il reste encore quelque chose de cette communion-là nationale, de cette union nationale ?
01:41Je l'espère.
01:42Je l'espère.
01:42C'est le sens de cette journée, dix ans plus tard,
01:45de nous rappeler ce qui s'est passé,
01:47de nous questionner aussi sur ce qui a permis à ces terroristes d'oeuvrer, malheureusement, cette nuit-là.
01:57C'est le sens de mon témoignage.
02:00Vous acceptez de parler, donc, dix ans après,
02:02comme d'autres victimes aussi qui n'avaient pas témoigné jusqu'à présent.
02:05Est-ce que c'est parce que dix ans, ça permet, peut-être,
02:08quand on est rescapé comme vous, d'avoir un peu plus de recul ?
02:13Sûrement.
02:14Sûrement.
02:15Chaque parcours est différent, chaque trauma est différent.
02:20Il y a des personnes qui vivent encore très fortement dans leur chair,
02:24ce qui s'est passé le 13 novembre,
02:26que ce soit sur les terrasses, aux abords du Stade de France
02:28ou au Bataclan où j'étais.
02:32Ce n'est pas mon cas.
02:34J'arrive à vivre normalement.
02:36J'ai évidemment des réminiscences.
02:40Il ne se passe pas une nuit sans que cette nuit-là ne se rappelle pas à moi
02:43d'une manière ou d'une autre,
02:44mais on apprend à vivre avec, par la force des choses.
02:48On apprend à en faire peut-être une force aussi.
02:52mais évidemment que chaque trauma est particulier
02:58et que, bien que ça fasse dix ans et que ça paraisse long dix ans,
03:02pour certaines personnes, c'était comme si c'était hier.
03:05Vous avez l'habitude de dire que vous n'aimez pas le statut du victime.
03:08Pourquoi ?
03:11Parce que pour moi, les victimes, c'est celles que j'ai vu se faire tuer
03:16par les terroristes se faire assassiner.
03:21Au regard de la justice, je suis une victime.
03:23J'étais parti civil au procès, j'ai été reconnu en tant que tel
03:26et ça me va très bien.
03:27Maintenant, dans la vie de tous les jours,
03:31je ne veux absolument pas qu'on me mette cette pancarte autour du cou.
03:36Je ne veux pas de compassion.
03:39Je ne veux pas de passe-droit.
03:43Je veux être traité exactement comme n'importe quelle autre personne.
03:48Je préfère le terme de rescapé.
03:50Vous avez parlé du procès qui a eu lieu l'année dernière.
03:54Salah Abdeslam était à ce procès.
03:55Salah Abdeslam qui, il y a quelques jours,
03:57a dit qu'il était volontaire pour une forme de justice restaurative.
04:01Ça veut dire échanger avec des victimes, des familles de victimes.
04:05Quel est votre sentiment sur cette annonce ?
04:08Je comprends les personnes qui pourraient répondre favorablement
04:12à cette proposition en ce qui me concerne.
04:16J'estime que c'est un piège.
04:21Personnellement, je ne répondrai absolument pas
04:22à cette proposition de Salah Abdeslam.
04:26Pour une raison simple, c'est que la justice restaurative, à mon sens,
04:31c'est pour des faits de droit commun.
04:32Mais le terrorisme n'est pas un fait de droit commun.
04:35La preuve, c'est que c'est une cour spéciale
04:38qui juge les faits de terrorisme.
04:41Ce sont des juges spéciaux qui se prononcent.
04:43Et je pense que c'est une tentative de la part de cet individu
04:48de banaliser le fait terroriste.
04:51Il ne faut surtout pas le banaliser.
04:53Il faut que ça reste exceptionnel,
04:55voire que ça n'existe pas du tout.
04:57Et puis, il y a le timing aussi de cette annonce.
05:01à la veille de cette journée de commémoration
05:03de ce dixième anniversaire ô combien symbolique.
05:07Je trouve ça d'une indécence crasse
05:09de venir maintenant nous proposer d'échanger,
05:14alors qu'il avait tout le loisir de le faire pendant ce procès,
05:17qui a duré dix mois,
05:18qui a été un procès exceptionnel de par son ampleur,
05:20mais aussi de par les moyens qui ont été alloués.
05:23Il avait une défense.
05:25On lui a fourni tout ce qui fait notre État de droit
05:28et la fierté de notre République.
05:31Il avait dix mois pour le faire.
05:33Et il n'en a strictement rien fait.
05:35D'ailleurs, la première journée, je m'en souviens très bien,
05:37il s'est présenté comme un combattant de l'État islamique.
05:41Alors, le juge Perriès lui avait répondu par un trait d'esprit
05:45« Ah, ben, moi, j'avais juste marqué intérimaire. »
05:49Mais qu'est-ce qu'on pourrait se dire avec cet individu
05:54dont on apprend il y a encore quelques jours
05:56qu'il consulte du matériel djihadiste
05:59qui se fait passer secrètement par des clés USB ?
06:03C'est pas ça la rédemption.
06:05Et pour continuer à ne pas banaliser le terrorisme,
06:07il faut entendre des témoignages comme les vôtres
06:09que vous avez acceptés de nous livrer ce matin.
06:11Merci beaucoup, Julien Perriès, d'avoir été avec nous ce matin.
06:14Merci à vous.
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