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  • il y a 2 jours
Il manquerait 6,7 milliards d’euros de financement de l’ESS pour la période 2021-2027 selon ESS France. Ashoka France regroupe et accompagne 86 entrepreneurs sociaux. Elsa Da Costa, la directrice générale du réseau, signe une tribune qui déplore le manque de vision à long terme de la part du gouvernement sur l’impact que peut avoir cet investissement.

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Transcription
00:00L'invité de ce Smart Impact c'est Elsa Dacosta, bonjour.
00:09Bonjour Thomas.
00:09Bienvenue, vous êtes la directrice générale de l'ONG Ashoka France, c'est quoi Ashoka ?
00:14Ashoka c'est le réseau d'innovation sociale, on fait d'à près de 4000 entrepreneurs sociaux dans 93 pays du monde
00:20et en France nous avons fêté nos 20 ans en juillet dernier avec 86 entrepreneurs sociaux,
00:24donc ces hommes et ces femmes qui s'attaquent à un problème de société et qui essaient de le résoudre, de le réparer en innovant en matière de politique publique surtout.
00:33Oui, alors ce sont des entrepreneurs mais qui oeuvrent à l'intérêt général d'une certaine façon on peut dire ça.
00:38Oui mais j'aime bien que vous posiez la question comme ça en fait, parce que c'est vrai que souvent on a tendance à penser qu'entrepreneur social ça peut être un oxymore,
00:45alors qu'en fait c'est une question de mission, donc qu'est-ce qu'on décide de faire dans la mission de son organisation ?
00:50Et effectivement eux ils travaillent de manière non lucrative pour pouvoir faire en sorte de contribuer de manière assez efficace à l'intérêt général.
00:58L'ESS, l'économie sociale et solidaire, on la présente souvent comme un modèle économique, un modèle économique qui peut être résilient, mais elle a ses fragilités.
01:07C'est quoi les fragilités de l'ESS ?
01:09Vous le voyez aujourd'hui, on en parle beaucoup, surtout avec l'actualité du budget qui est à voter,
01:14puisqu'on a remarqué que près de 50% des budgets qui étaient consacrés au soutien de l'économie sociale et solidaire avaient été faits, 50% c'est énorme en fait.
01:22Donc il n'est pas voté encore sur le budget, mais bon, sur le papier il y a une menace importante.
01:28Oui une menace qui plane, puis l'ESS c'est une famille avec énormément de sous-familles je dirais, vous avez les fondations, vous avez les entreprises sociales, les associations,
01:36dont on parle beaucoup, le tissu associatif, vous avez les entreprises adaptées, vous avez les mutuelles,
01:41enfin il y a énormément de familles au sein de cette ESS-là qui contribuent toutes, soit par leur statut,
01:47puisque les statuts de coopératives aussi mettent une manière de démocratiser les relations humaines au sein de l'entreprise,
01:53soit par leur mission d'intérêt général, et c'est vrai qu'aujourd'hui elles sont plutôt, je dirais, en tenaille,
02:00non seulement, je pense surtout au milieu associatif, qui est financé par deux aspects, soit les subventions de l'État,
02:04donc on l'observe aujourd'hui avec une coupe depuis une dizaine d'années, c'est-à-dire que ce n'est pas nouveau ce phénomène
02:09où les associations sont de moins en moins soutenues, et aussi une attaque qui est faite à la fiscalité de la philanthropie,
02:14c'est-à-dire qu'on va abaisser en fait les seuils de défiscalisation,
02:18donc ce qui veut dire que la manne financière qui permet aux privés de financer aussi ces associations
02:23et ou ces entreprises sociales va potentiellement diminuer.
02:26Donc la fragilité, elle est là.
02:27– Oui, mais pourtant il y a eu des plans de financement, il y a des ministères de l'économie sociale…
02:34– Il y a eu, il n'y a plus.
02:35– Voilà, de l'économie sociale et solidaire, donc on ne peut pas dire que l'État n'a rien fait,
02:40ou alors vous dites que c'est une sorte de faunée, une sorte d'hypocrisie ?
02:44– Moi je crois qu'on a nous aussi une autocritique à faire au sein de l'économie sociale et solidaire,
02:48qui fait qu'on n'arrive pas à expliquer clairement la contribution de cet écosystème à l'économie traditionnelle.
02:54– C'est pour ça qu'il faut qu'on se professionnalise aussi et qu'on explique qu'en fait,
02:58nous permettons de diminuer la facture sociale en travaillant aussi sur la diminution de la fracture sociale.
03:04Donc je m'explique, quand on parle de la diminution de la facture sociale,
03:07ça veut dire que l'investissement qu'on peut faire sur ces entreprises ou ces associations
03:11permet de limiter en fait les contributions d'un bénéficiaire sur des minimums sociaux,
03:17sur le budget de la sécurité sociale, parce qu'en fait on agit en amont.
03:21Et je pense que jusqu'à présent on n'a pas été assez lisible et explicatif
03:24sur cet aspect-là.
03:25– C'est de l'argent public bien dépensé, c'est ce que vous dites.
03:27– Exactement, bien investi et surtout investi sur du long terme,
03:30et on a un peu de mal aujourd'hui, vous savez, à parler de long terme,
03:32mais en fait des changements de société ont besoin de s'installer dans le temps.
03:36Donc c'est pour ça aussi que je suis très contente que vous m'invitiez,
03:38parce que je peux aussi prétendre à expliquer ce que c'est que cet environnement-là,
03:42et j'ai peur qu'on s'aperçoive de son bienfait au moment où justement
03:46il y en aura de moins en moins qui contribueront à l'intérêt général.
03:48Parce que le sujet de fonds il est là tout au moins en réalité.
03:50C'est comment on finance aujourd'hui dans ce pays et au XXIe siècle l'intérêt général.
03:54– D'ailleurs vous avez signé une tribune sur ce thème-là,
03:59le financement de l'intérêt général, on va détailler ça,
04:01mais vous avez évoqué les baisses de financement,
04:05c'est ESS France qui nous donne ces chiffres,
04:09financement manquant de l'économie sociale et solidaire,
04:11estimé à 6,7 milliards d'euros pour la période 2021-2027.
04:17– Je reste sur la responsabilité politique, c'est toujours facile,
04:21bon je ne suis pas dans le politique bashing facile,
04:26mais il y a une question de temporalité,
04:29c'est-à-dire que les politiques, on a du mal à avoir des politiques
04:32qui effectivement se projettent dans le long terme,
04:35parce qu'il y a une élection de mi-mandat, il y a un renouvellement,
04:38alors en ce moment c'est même plutôt en semaine ou en mois
04:42qu'on compte la durée de vie d'un gouvernement.
04:44Vous n'arrivez pas à convaincre sur l'importance de la temporalité,
04:49de voir loin ou alors c'est juste consubstantiel,
04:52c'est-à-dire que ce n'est plus possible d'obtenir ça des politiques ?
04:55– Alors heureusement que le politique ne se résume pas au gouvernement
04:59et qu'au contraire en local on a beaucoup de chance aussi
05:03d'avoir des maires et des élus locaux qui comprennent l'importance…
05:06– Oui mais ils ont besoin d'être élus aussi.
05:07– Là on va le voir notamment en mars évidemment.
05:09– C'est en mars, donc ils vont privilégier le court terme aussi souvent ?
05:13– Oui et non parce qu'ils sont en contact direct avec la population
05:15qui elle est la bénéficiaire de l'économie sociale et solidaire en premier chef.
05:19C'est beaucoup plus compliqué d'aller voir un élu, un député ou même un ministre
05:23qui en fait n'a jamais été confronté de près ou de loin à une forme d'épiphanie
05:28quand il s'aperçoit de ce que peut faire justement l'économie sociale et solidaire
05:31pour pouvoir la promouvoir.
05:32Alors on avait eu de la chance avec Olivia Grégoire qui avait été secrétaire d'État
05:36et puis vous avez vu en fait progressivement on est passé d'un ministère
05:40puis après un secrétariat d'État et pour finir un délégué interministériel
05:42dont malheureusement malgré tout son déploiement
05:45et je le remercie beaucoup Maxime Baduel d'œuvrer et d'essayer
05:49il est quand même assez cornerisé aussi et pas suffisamment audible
05:53en matière d'intérêt général pour vanter par le SS.
05:56– Oui et donc vous avez besoin d'un ministre ?
05:58– Oui on a besoin d'un ministre mais on a besoin que tous les ministres comprennent
06:02parce que cette affaire-là elle est systémique, on parle d'économie
06:04l'économie c'est tous les jours, l'économie c'est la gestion de la maison
06:07si on reprend l'étymologie grecque en fait
06:09donc ça me paraît assez logique que la gestion de la maison
06:12elle soit faite à l'aune aussi de nos valeurs républicaines
06:14– Mais donc ça veut dire… – liberté, qualité, fraternie
06:16– Mais l'intérêt général il devrait, et puisqu'on en revient à votre tribune
06:20évidemment il devrait effectivement concerner tous les ministres
06:24c'est un principe de base de l'action politique
06:28pourquoi son financement finalement et à travers lui celui de l'économie sociale et solidaire
06:37c'est une sorte de non-dit ou de non-réfléchi ?
06:42– En fait j'ai observé depuis à peu près une dix-quinzaine d'années
06:46que la manière dont aujourd'hui notre économie est structurée
06:50et notamment avec les nouvelles technologies vous savez à archipéliser
06:53c'est-à-dire que chacun a sa petite notion très personnelle
06:56de ce que c'est que l'intérêt général
06:57à tel point que vous avez même des responsables politiques de premier plan
07:01c'est là où le danger arrive à mon sens
07:03qui ne parle plus d'intérêt général
07:04mais qui parle comme Donald Trump d'intérêt national
07:07donc quelle est la perception de chacun
07:09de ce que c'est que l'intérêt national versus l'intérêt général
07:12l'intérêt général c'est l'intérêt de la totalité
07:15c'est pas l'intérêt de la majorité des gens
07:17et ce qui est très intéressant c'est que vous observez dans les courants politiques
07:20suivant les obédiences de chacun
07:22que certains privilégient la liberté
07:24liberté d'entreprendre, liberté d'exister, d'être, etc.
07:28et d'autres l'égalité
07:29et qu'on oppose en fait ces deux valeurs
07:32dans notre triptyque républicain
07:33liberté contre égalité
07:35alors que la réalité c'est que c'est la fraternité en tant que telle
07:38qui devrait presque sous-tendre et rééquilibrer ces deux matrices-là
07:41et depuis une quinzaine d'années
07:43on a beaucoup plus privilégié la liberté d'entreprendre
07:45sous couvert de dire que l'ESS traitait le côté égalitaire
07:48mais comme une espèce de conséquence à quelque part une liberté
07:52qui avait été pas du tout regardée à l'aune de ce que peut être en fait l'égalité
07:55et aujourd'hui on est en espèce de surcompensation avec une fraternité
07:59qui à la base devrait être celle qui devrait régir notre intérêt général
08:02et vous l'avez dit très justement aujourd'hui
08:04les politiques qu'est-ce qu'ils cherchent ?
08:06ils cherchent très souvent la réélection
08:08donc pour chercher une réélection c'est comme une marque de grande consommation
08:12elle va regarder sa clientèle
08:13elle va regarder comment elle fait pour attirer de plus en plus
08:15avec un bon marketing, avec des bons éléments de langage
08:18qui vont être plutôt en mode démagogique
08:20plus qu'en se disant
08:22ok il faut que je sois responsable et courageux
08:25pour pouvoir faire en sorte de prendre les bonnes décisions au bon moment
08:28et ça c'est pas un truc évident
08:29on va le chercher encore un petit moment
08:30alors vous avez publié, c'était le 15 octobre dernier
08:33une étude menée avec KPMG
08:34sur l'innovation sociale, la performance durable
08:37avec une notion
08:39qui est la notion d'hyperlocal
08:41l'hyperlocal levier d'un changement
08:43systémique, c'est quoi l'hyper, je comprends bien
08:45mais je veux bien que vous m'expliquiez avec vos mots à vous
08:47ce qu'est l'hyperlocal
08:49et pourquoi c'est un changement systémique
08:52c'est ça qui est intéressant
08:53c'est depuis le local
08:55on va changer le système
08:56en fait ce que je trouve intéressant
08:58c'est que l'économie capitaliste
09:00nous a vanté le fait que le passage à l'échelle
09:02était assez simple
09:02et qu'une paire de baskets d'une certaine marque
09:04vous pouvez la retrouver aussi bien
09:06j'en sais rien, moi, à Palavasse-les-Flots
09:08qu'à New York
09:09et vous étiez tous contents de porter la même paire de chaussures
09:12la réalité c'est que quand on traite des problèmes de société
09:14ça ne fonctionne pas comme ça
09:15ce qui se passe à Palavasse-les-Flots
09:17n'est pas tout à fait la même chose que ce qui se passe à New York
09:19et on s'aperçoit que la solution est détenue
09:21en réalité par ceux qui connaissent extrêmement bien
09:23les problématiques de leur territoire
09:24donc c'est pour ça que quand on arrive à faire travailler
09:27des entreprises dites lucratives
09:29mais qui ont une implantation dans le territoire
09:30avec des emplois
09:31avec un tissu social qui se crée
09:33et des associations qui elles-mêmes
09:36sont sur un autre endroit de la photo
09:37pour faire en sorte d'appréhender cette problématique de société
09:40type déterminisme social
09:41l'accès des jeunes à un emploi
09:44et bien on arrive à trouver ces solutions
09:47qui sont pérennes et durables dans le temps
09:49et c'est systémique
09:49non pas parce que ça irradie l'ensemble du territoire français
09:53mais c'est systémique à l'échelle du territoire
09:55et que si cette méthode-là
09:56elle est appliquée en prenant en compte
09:58les ingrédients de chacun de ces territoires
10:00à d'autres endroits
10:01ça devient systémique en agrégation
10:03de ces modifications qui sont territoriales
10:05c'est plus clair
10:06oui c'est très clair
10:07nous on est dans notre jargon
10:10et c'est un problème aussi parfois
10:11et donc le bon interlocuteur
10:14parce qu'on se pose souvent la question
10:16du bon échelon administratif
10:18en France on est les rois du millefeuille
10:20mais le bon interlocuteur c'est le maire
10:23ça dépend
10:24parfois ça peut être le département
10:25parfois ça peut même être la région
10:27ça dépend
10:27oui ça dépend
10:28c'est surtout la personne qui a envie
10:29et qui a conscience
10:30que sa responsabilité
10:32c'est vraiment de transformer profondément la société
10:34et de résoudre ce problème-là
10:36et de se dire que l'objectif
10:37c'est pas forcément de faire immédiatement tâche d'huile
10:39vous savez dans la vie
10:40c'est les premiers pas qui sont les plus difficiles
10:42un être humain chute 2000 fois
10:44avant d'apprendre à marcher
10:45et de faire son premier pas
10:46donc il y aura 2000 chutes
10:47mais c'est pas grave
10:48parce qu'en fait à la fin on arrivera
10:49parce qu'on sera accompagné par quelqu'un
10:51encouragé par un parent
10:52on s'accrochera à un meuble
10:54et on finira par y arriver en fait
10:55valoriser la chute et l'échec
10:57ça c'est un message aussi
10:59pour notre modèle éducatif
11:01Ander, allez on va prendre une minute
11:02mais pas pour nos politiques
11:03mais non, il ne faut surtout pas montrer ses échecs
11:06on va terminer avec le programme Impact Earth
11:09ou Earth
11:10je ne sais pas comment vous prononcez
11:11les lauréats seront dévoilés le 17 novembre
11:14c'est quoi ce programme ?
11:15l'idée c'est de trouver 20 jeunes
11:17qui vont profondément transformer la société française
11:20que ce soit avec des projets entrepreneuriaux
11:22des projets artistiques
11:23des projets de recherche
11:24donc nous sommes en plein jury en ce moment
11:26on va révéler effectivement les 20 lauréats
11:28on va les accompagner pendant 3 ans
11:30avec une bourse
11:31les faire pénétrer ce réseau
11:33HOK qui est assez exceptionnel
11:35parce que beaucoup d'entrepreneurs sociaux
11:37vont être en contact
11:38vont être en contact avec eux
11:40et puis on se réjouit d'avoir peut-être
11:42potentiellement
11:42le prochain maire d'une grande ville
11:44et pourquoi pas le prix Nobel de la paix
11:46dans quelques années
11:46il faut être ambitieux
11:47merci beaucoup Elsa Dacosta
11:49et à bientôt sur Bsmart4Change
11:52on passe à notre débat
11:53pourquoi l'économie circulaire patine dans le secteur du bâtiment
11:56et puis on se réjouid
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