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Emission TV : Les Dessous des Cartes sur Arte (Emission intégrale, Fr, 9 Nov 2025) Soudan guerre oubliée

Historique et descriptif de l'émission TV
Le Dessous des cartes ou DDC (Mit offenen Karten en allemand, littéralement Avec des cartes ouvertes) est une émission éducative hebdomadaire créée en 1990 et diffusée sans interruption sur La Sept puis sur la chaîne de télévision franco-allemande Arte.
Elle a pour but de traiter un sujet de géopolitique et de géographie principalement par le biais de cartes géographiques.
Elle a été présentée par le géographe et géopolitologue Jean-Christophe Victor jusqu'à sa mort en 2016. Celui-ci en préparait le contenu avec l'aide du Laboratoire d'études prospectives et d'analyses cartographiques (LEPAC), dont il était le fondateur et le principal actionnaire.

Site officiel : https://www.arte.tv/fr/videos/RC-014036/le-dessous-des-cartes/

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Transcription
00:00Ravie de vous retrouver pour ce nouveau numéro du Dessous des cartes au fil des derniers mois.
00:25Nous nous sommes presque habitués aux images de la guerre en Ukraine.
00:30La guerre encore, désolation et effroi, mais cette fois-ci, à Gaza.
00:34Vous voyez certainement moins, en revanche, les images de la guerre au Soudan.
00:38Un conflit pourtant sanglant qui déchire depuis plus de deux ans ce pays d'Afrique,
00:43déclenché par la rivalité entre deux généraux, vous allez voir.
00:47Des milliers de morts, des millions de déplacés dans ce pays immense, le Soudan.
00:51Un pays martyr qui a déjà souffert pendant plus de 20 ans du régime dictatorial d'Omar al-Bashir.
00:57L'occasion de mieux connaître l'histoire tragique de ce pays qui offre par ailleurs une grande diversité de paysages
01:03et qui n'aura connu que furtivement l'espoir de la démocratie et de la paix.
01:09Sortons nos cartes.
01:11Au cœur de l'Afrique de l'Est, voici le Soudan, 50 millions d'habitants, capitale Khartoum.
01:17Et voici le Soudan du Sud, un peu plus de 11 millions d'habitants, sa capitale est Djouba.
01:24Véritable pont entre l'Afrique équatoriale et le Sahara, les deux pays présentent une grande variété de paysages.
01:31Rivages tropicaux du Nil Blanc au Soudan du Sud, savannes à la frontière entre les deux pays,
01:36hautes montagnes dans le Darfour, dans l'ouest du Soudan.
01:40Zone fertile entre le Nil Blanc et le Nil Bleu, la Mésopotamie soudanaise.
01:45Trésors archéologiques des pyramides nubiennes en aval du Nil,
01:50désert du Sahara proche de la frontière égyptienne, sans oublier la côte de la mer Rouge.
01:57Jusqu'à peu, ces deux Soudans formaient un seul et même pays, et c'est ce qu'on va voir maintenant.
02:03Après un demi-siècle de domination britannique, le Soudan est en 1956
02:08parmi les premiers pays du continent à accéder à l'indépendance.
02:12Avec 2,5 millions de kilomètres carrés, c'est alors le plus grand pays d'Afrique.
02:181989, le général Omar al-Bashir arrive au pouvoir après un coup d'État.
02:24Il met en place un régime très répressif, s'appuyant à la fois sur l'armée et les milieux islamistes.
02:30Le régime d'Omar al-Bashir perpétue un système de hiérarchisation des populations,
02:36entre les élites arabes concentrées dans la vallée du Nil et les groupes ethniques marginalisés des périphéries.
02:43C'est le cas des populations du Sud-Soudan, majoritairement chrétiennes et animistes.
02:49Après des décennies de guerres civiles, elles accèdent à l'indépendance en 2011.
02:53Le Soudan est désormais scindé en deux, avec au milieu la petite région d'Abillé, revendiquée par les deux camps.
03:01Dès 2013, des rivalités ethniques internes au jeune Soudan du Sud vont le plonger dans un nouveau cycle de violence qui perdure encore aujourd'hui.
03:10Mais à présent, nous allons nous intéresser au Nord, au Soudan.
03:14A partir de 2003, d'autres populations marginalisées se soulèvent pour réclamer plus d'égalité,
03:20cette fois-ci à l'ouest du pays, dans la région du Darfour.
03:24Craignant le démembrement du pays, le régime d'Al-Bashir s'appuie sur une milice locale, les Djanjaouid,
03:31pour mener une répression sanglante des populations civiles, Fours, Massalit et Zagawa.
03:37C'est le massacre systématique de plus de 300 000 personnes, qualifiées de génocide par la Cour pénale internationale.
03:44Un homme va profiter de ce conflit pour émerger, Mohamed Hamdan Daglo, dit Emethi.
03:51Il a peu à peu gravi les échelons, jusqu'à devenir le principal chef de guerre Djanjaouid. On y reviendra.
03:59Économiquement fragilisé par la perte d'une grande partie de sa manne pétrolière avec la sécession du Soudan du Sud,
04:06le régime d'Omar al-Bashir s'enfonce dans la crise dans les années 2010.
04:102018, en réaction aux pénuries généralisées et à la corruption endémique du régime militaire,
04:17des émeutes éclatent dans les villes du centre du pays.
04:21C'est le début du printemps de Khartoum.
04:25Intéressons-nous justement à cette métropole tentaculaire de plus de 7 millions d'habitants,
04:30située à la confluence du Nil bleu et du Nil blanc.
04:33Khartoum est en fait constituée de trois villes différentes.
04:39Au nord, on trouve Bari, ville industrielle tournée vers l'Egypte et la mer Rouge.
04:44A l'ouest, c'est Omdurman, la capitale culturelle historique.
04:48Elle forme aujourd'hui une immense étendue de quartiers populaires,
04:52peuplés de Soudanais ayant fui la désertification et la guerre.
04:56Enfin, au sud, entre les deux Nils, Khartoum a proprement parlé.
05:01On y trouve le palais présidentiel, l'aéroport international et la principale université du pays.
05:07C'est notamment autour de cette jeunesse éduquée des universités que va se structurer la contestation.
05:14Les manifestants prennent l'habitude de se rassembler ici, devant le quartier général de l'armée,
05:19pour exiger la fin du régime.
05:21Avril 2019, face à l'ampleur du mouvement, l'armée décide de déposer Al-Bashir
05:27et d'installer un gouvernement de transition.
05:31C'est la fin de 30 années d'une dictature sanglante
05:34et un immense espoir démocratique pour la société soudanaise.
05:38Sauf que dès 2021, le gouvernement civil est à son tour renversé.
05:43Les militaires reprennent le pouvoir.
05:46C'en est fini du printemps de Khartoum et des espoirs démocratiques.
05:50Le Soudan retombe aux mains de l'armée, ou plus précisément de deux généraux concurrents,
05:55dont la rivalité va se transformer en affrontement direct à partir de mars 2023,
06:01plongeant le pays tout entier dans la guerre.
06:03Et c'est ce qu'on va voir maintenant.
06:06D'un côté, le général Abdel Fattah al-Bourhan, à la tête de l'armée régulière.
06:12Ses troupes occupent le sud-est du pays et surtout le nord, avec Port-Soudan comme capitale de fête.
06:18Face à lui, le général Emetti, à la tête des forces de soutien rapide,
06:23héritière des milices Janjaweed.
06:26Il mène la guerre depuis son bastion du Darfour
06:28et recrute parmi les cohortes de jeunes désœuvrés de l'ouest du pays.
06:34Dans les premiers mois du conflit,
06:35l'essentiel des combats se concentre autour de la capitale, Khartoum.
06:41Une ville fracturée comme le reste du pays.
06:44L'armée régulière, ici en bleu, est repliée dans ses casernes.
06:49Elle a recours à son aviation et ses blindés
06:51et frappe sans relâche les positions ennemies,
06:54n'hésitant pas à viser des quartiers d'habitation.
06:57À présent, en jaune, les forces de soutien rapides.
07:01Dotées d'un armement léger,
07:02elles mènent quant à elles une guerre de mouvements
07:04et multiplient les exactions, pillages, massacres et viols.
07:08Dans les deux cas, les principales victimes sont les populations civiles.
07:14Après deux années de combats acharnés,
07:16l'armée du général Al-Bourhan parvient à prendre le contrôle de la capitale
07:19en mars 2025 et à progresser dans plusieurs régions du pays.
07:24Dès lors, les combats se recentrent sur le Darfour
07:26et notamment autour d'El-Facher,
07:29dernière ville qui échappait au FSR dans la région
07:32et qui a finalement été prise en octobre 2025.
07:36Les troupes d'Emeti mènent alors un véritable nettoyage ethnique dans la ville
07:39et filment leurs massacres.
07:42Des crimes de guerre comparables à ceux commis à El-Geneïna
07:45par ces mêmes FSR en 2023.
07:49Longtemps épargnée, la ville de Port-Soudan,
07:52fief du général Al-Bourhan,
07:54se retrouve elle aussi au cœur du conflit à partir de mai 2025,
07:58subissant de nombreuses attaques de drones de la part des FSR.
08:02En deux ans, le conflit aurait déjà fait plus de 150 000 morts
08:06et la moitié de la population serait menacée par la famine.
08:1013 millions de personnes ont déjà été déplacées,
08:12parfois à l'intérieur du pays, mais aussi vers des pays voisins.
08:161,5 million vers l'Egypte, 1 million vers le Soudan du Sud,
08:19800 000 vers le Tchad.
08:22Un conflit initié par la rivalité, on l'aura compris,
08:25entre deux hommes, Al-Bourhan et Emeti,
08:28et entretenus par des ressorts ethniques,
08:30mais qui n'auraient pas pu prendre une telle ampleur
08:32et se poursuivre aussi longtemps
08:34sans l'implication des puissances étrangères.
08:39Qu'elles soient attirées par les nombreuses ressources du Soudan,
08:42or, pétrole, produits agricoles, gommes arabiques,
08:45ou motivées par des intérêts stratégiques,
08:48les puissances de la région entretiennent le conflit
08:50en fournissant des armes à leurs protégés respectifs.
08:54Et c'est ce qu'on va voir maintenant.
08:55Commençons par le cas de l'Egypte et de l'Ethiopie,
09:01opposés sur la question de la répartition des eaux du Nil
09:04et qui se livrent une guerre par procuration
09:06à travers les deux camps qui s'opposent au Soudan.
09:10Addis Abeba soutient Emeti,
09:12tandis que le Caire défend le général Al-Bourhan,
09:16passé par l'académie militaire égyptienne.
09:18Au-delà, l'armée régulière soudanaise bénéficie du soutien de l'Iran
09:23et surtout de la Turquie d'Erdogan et de ses fameux drones Bayraktar.
09:28Emeti, lui, compte avant tout sur les Émirats,
09:31très impliqués dans le conflit.
09:33La proximité entre les FSR et Abu Dhabi est ancienne,
09:38des mercenaires soudanais ayant participé dès 2018
09:40aux opérations militaires émiriennes au Yémen.
09:43Mais plus récemment, Abu Dhabi s'intéresse surtout à Emeti pour son or.
09:48Le chef de guerre est en effet à la tête d'un empire orifère
09:52qui lui rapporterait un milliard de dollars par an.
09:55En échange de cet or venu du Darfour,
09:58les Émirats livrent au FSR du matériel militaire sophistiqué.
10:04Autre acteur intéressé par cet or,
10:06la Russie de Vladimir Poutine via l'Africa Corps,
10:10anciennement connue sous le nom de Milis Wagner,
10:12présente en Libye et en Centrafrique.
10:15En contrepartie, le groupe paramilitaire russe
10:18aurait fourni des armes aux forces de soutien rapide
10:20et aurait même combattu à leurs côtés.
10:23Sauf que Vladimir Poutine poursuit un autre objectif en parallèle,
10:28celui de construire une base navale ultra-stratégique à Port-Soudan,
10:32le long de l'une des routes majeures du commerce d'hydrocarbures.
10:35Poutine s'est donc progressivement rapproché aussi du général Al-Bourad,
10:39maître de Port-Soudan,
10:40et a obtenu le 12 février 2025
10:43un accord pour la construction de sa précieuse base sur la mer Rouge.
10:47Un double jeu russe qui se fait une fois de plus
10:50au détriment de la population soudanaise.
10:54Voilà pour ce voyage au Soudan,
10:56pays martyr qui n'a que trop connu la dictature
10:59pendant les années al-Bashir,
11:00puis la guerre depuis deux ans,
11:02cette guerre que nous regardons peu ou pas
11:05et dans laquelle on l'a vu interférer un certain nombre
11:07de puissances étrangères.
11:08Sans oublier le voisin, le Soudan du Sud,
11:11qui lui aussi inquiète les Nations unies,
11:14lesquelles dénonçaient en juin 2025
11:16l'escalade des offensives militaires,
11:18la répression politique
11:19et la présence militaire étrangère
11:22au Soudan du Sud.
11:23Pour creuser la période spécifique du printemps de Khartoum en 2018,
11:27cet ouvrage « Lutter en ville au Soudan »,
11:30mouvement militant contestataire de la révolution contemporaine
11:32par Clément Dessay.
11:34Ainsi s'achève ce nouveau numéro du Dessous des cartes.
11:37Rendez-vous bien sûr la semaine prochaine,
11:38même endroit, même heure.
11:40Et d'ici là, n'oubliez pas,
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