- il y a 17 heures
Shein débarque en plein cœur de Paris. Après avoir conquis les réseaux sociaux, la marque s’installe au BHV Marais, temple historique du commerce parisien. Un symbole fort : la rencontre entre un grand magasin emblématique et un acteur controversé du commerce en ligne. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-debat-economique/le-debat-eco-du-vendredi-07-novembre-2025-2126051
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00:00Dominique Seux, Thomas Porchet, bonjour les amis.
00:02Bonjour Ali.
00:03La question Cheyenne, le géant chinois de la fast fashion qui débarque en plein cœur de Paris.
00:09La mode à la vitesse de la lumière, des milliers de nouveaux articles chaque jour des produits à bas coût.
00:16Le gouvernement qui s'empare de la question au moment même où s'ouvre le salon Made in France à la porte de Versailles de Paris.
00:24La question, vous l'avez abordée Dominique Seux en début de semaine lorsque vous évoquiez cette contradiction entre le citoyen et le consommateur.
00:33Et on va débattre de ce sujet.
00:36Cheyenne, symbole de modernité ou symptôme d'une consommation qui va au bout du bout du bout de sa logique ?
00:44Progrès ou renoncement lorsque l'on voit les réactions politiques en France ?
00:49Messieurs, justement, on va partir de cette question grand-angle.
00:53Cheyenne qui s'installe à Paris, les réactions politiques, les quelques manifestations devant le bazar de l'hôtel de ville en plein cœur de Paris.
01:03Qu'est-ce que ça vous a inspiré cette image-là ? De quoi est-elle le symbole Thomas Porchet ?
01:08Moi, je pense que Chine, en fait, nous a pris à notre propre jeu.
01:12Ça fait des années que l'industrie textile est attaquée dans les pays riches.
01:16Vous savez, en France, il y a deux tiers d'effectifs qui ont disparu dans l'industrie textile.
01:22Et aujourd'hui, Chine va encore plus loin dans ce qu'il y a de pire dans la mondialisation.
01:28Et en fait, quand vous dire, le consommateur a bien été préparé à ça depuis une trentaine d'années.
01:32Donc pour moi, c'est la dernière étape de ce qu'il y a de pire dans la mondialisation.
01:36Dominique Seux.
01:36Bon, c'est un multi-récidiviste.
01:40Donc il faut lui donner un grand coup sur la tête.
01:42Il n'y a aucun doute là-dessus.
01:43Cette entreprise, Chine, fait n'importe quoi.
01:46Elle vend n'importe quoi.
01:48Mais, et donc il y a de la concurrence des loyers, il n'y a aucun doute là-dessus.
01:53Les coûts, les prix ne correspondent pas aux coûts réels, puisqu'il y a des coûts environnementaux.
01:57Il y a des coûts de...
01:58On sait, on devine qui travaille et dans quelles conditions là-bas.
02:01Mais, sur le plan économique, au-delà, est-ce que ça, est-ce que le fait de suspendre ou de restreindre ou de demander des corrections va changer la donne fondamentalement sur le fait que les consommateurs souhaitent maintenant acheter sur des plateformes ?
02:16C'est-à-dire qu'on est passé en quelques décennies du petit commerce au grand magasin, à la grande surface, et maintenant les consommateurs veulent aller sur les plateformes.
02:25Ou en boutique, on le verra.
02:26Et où en boutique ?
02:27Si le corner UBHV connaît un succès.
02:29Il y a deux questions qui se posent, c'est, est-ce qu'il y aurait une réaction collective et politique aussi forte s'il n'y avait pas eu un magasin en dur qui s'installait au BHV ?
02:37Parce qu'en fait, chez INE, ça existe quand même depuis un certain temps.
02:39Ça progresse extrêmement vite.
02:41Mais ça existe depuis un certain temps.
02:42Et la deuxième question, c'est, en fait, il y a 30 ans, nous apportions à la Chine un certain nombre de nouveaux modèles.
02:51On exportait des savoir-faire, des procédés, des idées.
02:54Et en fait, c'est l'inverse aujourd'hui, et c'est ça qui est intéressant, et dans quelle mesure il faut dire stop ou encore ?
03:01Évidemment, on ne peut pas dire globalement stop, ça n'a pas d'intérêt, et ça n'a pas de sens.
03:05Mais dans quelle mesure on peut, vis-à-vis de la Chine, avoir une autre politique ?
03:08Donc j'ai ouvert énormément de tiroirs.
03:09Oui, quand vous dites Dominique, c'est le consommateur qui veut.
03:12Moi, je ne pense pas que ce soit le consommateur.
03:14Enfin, il y a une société, parce que vous savez, Margaret Thatcher, there is no society.
03:18Non, il y a une société.
03:19There is no such thing as society.
03:21Il y a une société, la société...
03:23Il n'y a que des individus.
03:24Voilà, et bien moi, je ne pense pas...
03:24C'est 1 plus 1 plus 1 plus 1, là, qu'eux qui avaient devant le BHA l'autre jour.
03:28Le fonctionnement de l'économie influe les individus.
03:31Il y a une société de consommation de masse.
03:34Il y a une société qui a légitimé la publicité à outrance.
03:36Il y a une société qui a légitimé la mondialisation.
03:39Parce que quand vous dites Chine est un multirécidivisme, vous avez raison, c'est un multirécidivisme.
03:43C'est Dominique Seux qui l'a dit.
03:45Oui, mais toutes les marques sont des multirécidivistes.
03:47Il faut avoir un peu de mémoire.
03:48Nike, dans les années 90, il y a eu un grand article qui a montré qu'il y avait des ateliers de misère qui employaient des enfants.
03:54Et je me souviens que le patron de Nike avait réagi en disant « Mais non, c'est la mondialisation, etc. »
03:58Il avait dû faire marche arrière.
03:59L'effondrement du Rana Plaza, plus de 1 100 morts.
04:02Au Bangladesh.
04:03Au Bangladesh.
04:04Et c'était qui qui était impliqué ? Quelle marque était impliquée ?
04:06C'est des marques occidentales dont des marques françaises.
04:08Carrefour, Texte, Benetton, Camailleux, H&M, Lee Cooper.
04:12Donc ça fait des années quand même que le textile utilise quand même des méthodes qui sont pour le moins, on va dire, on peut dire très condamnables.
04:20Et Chêne va encore plus loin.
04:21Chêne.
04:22Chêne va encore plus loin.
04:23Et moi j'espère sincèrement dans le fond que Chêne est subventionné.
04:27Parce que s'il n'est pas subventionné, il faut voir à mon avis dans quel environnement social travaillent les gens qui font ces produits-là.
04:35J'espère vraiment que ce soit subventionné.
04:37Mais alors justement, je vais me faire l'avocat du dialogue parce que vous parlez de l'abolition de la morale, de la réduction en quasi-esclavage d'ouvriers,
04:46de mise en danger des consommateurs éventuellement depuis 30 ans, de pulvérisation de notre commerce, de destruction de l'environnement.
04:53À la veille de la COP, malgré tout, combien de marques françaises font fabriquer leurs produits en Chine ?
05:01Pourquoi s'attaquer à Chêne, Dominique Seux, et pas à toutes les autres marques ?
05:06Alors, excellente question.
05:07Évidemment, si vous allez dans la plupart des magasins en France, vous avez énormément de produits chinois.
05:12Vous allez, c'est pas, il n'y a rien de très nouveau.
05:14Ce qui est nouveau, c'est que c'est industrialisé et que, en fait, c'est la conjonction de modes de production à très bas coût et de la plateformisation.
05:25Vous avez chez Decathlon, depuis très longtemps, des produits fabriqués en Chine et ils ne sont pas tous produits dans des conditions absolument déplorables dont vous parlez.
05:34Ne faites pas de cas particuliers, une règle générale vis-à-vis de toute l'industrie textile française qui, y compris, importe.
05:42Il y a eu un certain nombre de scandales.
05:45Remettons un tout petit peu quand même, 30 secondes de photographie.
05:50Chêne, plus Temu, disons, on va mettre les deux dans le même sac.
05:53Et Alibaba, AliExpress.
05:55Non, c'est 5 milliards de chiffre d'affaires, probablement.
05:58C'est 10% du textile habillement en France.
06:02Donc, c'est beaucoup.
06:03Mais ça n'est pas non plus, pour l'instant, le raz-de-marée total.
06:07Sachez que les produits que nous apportons de Chine, au total, c'est 70 milliards d'euros par an.
06:14C'est nettement moins que ce qu'on importe d'Allemagne.
06:16C'est un peu plus que ce qu'on importe d'Italie.
06:21Les produits qui viennent de Chine, c'est 10% de nos importations totales.
06:24Ce que je veux dire, c'est que oui, il y a évidemment un risque de rouleau compresseur.
06:30Certains secteurs sont effectivement débordés.
06:33Les panneaux solaires, le textile.
06:35Mais ça n'est pas la totalité de notre commerce international.
06:38Sur la photo, d'un mot pour la précision.
06:42Mais il faut stopper.
06:42Il faut dire stop aujourd'hui.
06:43Il faut fermer des portes.
06:45Les ventes chez Hine en France, elles représentent 2,3 milliards d'euros en 2024.
06:52Si l'on rajoute l'autre marque que vous avez citée, Temu, c'est 2,3 milliards.
06:58Ça fait 800 millions de colis en 2024, dont un quart sont traités par la Poste.
07:05Donc il y a aussi des jeux...
07:07Moi j'ai dit, il y a quand même, pour répondre, il y a une responsabilité du consommateur.
07:10Et du consommateur que nous sommes.
07:12C'est-à-dire que c'est trop facile de dire la société.
07:14En fait, je pense que quand vous achetez, pour certains clients de Chine, vous achetez, je ne sais pas, 10 vêtements par mois.
07:20Excusez-moi, est-ce qu'on a vraiment besoin de 10 vêtements par mois ?
07:23Excusez-moi de poser cette question-là. Un peu de frugalité ne nuit pas, Thomas Borcher.
07:27En fait, pour moi, Chine a profité de tous les maux du capitalisme libéral et de la mondialisation.
07:33C'est-à-dire que le capitalisme libéral précarise.
07:35Donc vous êtes obligé d'acheter des biens le moins cher.
07:37Mais aussi, il fabrique des désirs.
07:39Et aujourd'hui, Chine les utilise de manière extrêmement agressive sur les plateformes.
07:45En faisant de la publicité à outrance, en disant qu'il y a moins de stock, en faisant des soldes constamment.
07:51Donc il joue vraiment le jeu, mais en allant encore plus loin.
07:55Et en fait, il y a un côté un petit peu de l'arroseur arrosé.
07:58Ça fait des années que certains disent qu'il faut mettre une limite à cette mondialisation, ça va aller trop loin.
08:02Et aujourd'hui, des gens se réveillent en disant « Ah bah oui, ça va trop loin, pourquoi ? »
08:05Parce que c'est une marque chinoise et parce que cette marque chinoise a été encore plus loin que les marques européennes.
08:10Et c'est ça que je trouve condamnable.
08:11Après, les consommateurs, vous ne pouvez pas leur mettre des produits peu chers,
08:16mais que ce soit dans l'alimentaire ou partout, sous le nez constamment comme ça.
08:19Et après dire « Attention, mangez moins de sucre.
08:21Attention, utilisez moins les plateformes TikTok.
08:24Attention, n'achetez pas des produits chênes qu'on vous met sous le nez constamment. »
08:28C'est cruel de rapprocher ce que vous dites pour les consommateurs français.
08:31Parce que Schein, par exemple, utilise des influenceurs.
08:34Vous parlez des consommateurs comme si les Français étaient influençables.
08:39Ils le sont, désolé.
08:40Ils le sont par l'industrie agroalimentaire depuis des années.
08:43Et ils le sont également par l'industrie textile aujourd'hui.
08:45Je crois quand même à la liberté.
08:47Vous pensez justement à la liberté.
08:48Je me méfie beaucoup du discours.
08:49Ou est-ce qu'on est influençable et influencé ?
08:51Je me méfie du discours « C'était mieux avant, dans les années 50, avec les magasins juste à côté de la... »
08:55On a eu les mêmes débats, vous savez.
08:56Mais Amazon ?
08:58Pour démonter les McDonald's, il fallait...
09:01C'était la malbouffe qu'il y a.
09:03Les Français adorent McDonald's.
09:04J'y peux rien, c'est comme ça.
09:06Amazon, on a dit « C'est épouvantable. »
09:08C'est le premier marché McDonald's dans les Etats-Unis.
09:10Absolument.
09:11Je crois que le McDo des Champs-Elysées est peut-être le premier au monde.
09:14Je ne le dis plus très bien.
09:15On a eu les mêmes débats sur Amazon, les mêmes débats sur Uber.
09:19À chaque fois, on a les mêmes débats.
09:20La question n'est pas de dire « C'est non ou c'est oui », c'est dans quelles conditions ça se passe.
09:25Et donc sur, par exemple, les VTC, enfin ce qu'on appelle les chauffeurs Uber, un certain nombre de protections existent pour les taxis.
09:34Il y a eu un certain nombre de lois, elles sont efficaces ou pas.
09:36Mais les consommateurs que vous prenez pour des petites victimes innocentes ne sont pas que des petites...
09:43Ils sont aussi décideurs de ce qu'ils souhaitent comme type de consommation.
09:49Mais bien sûr, Dominique, vous avez des grandes marques qui profitent de failles juridiques.
09:57Ça a été le cas d'Uber, qui profitent du fait que la réponse aujourd'hui législative en France et en Europe prenne du temps.
10:02Et elles s'installent aidées par certains qui défendent ça.
10:05L'Uberisation a été défendue par des économistes.
10:07Par des politiques, parce qu'il y avait quand même M. Castaner qui travaillait pour Cheyne, il faut le dire aussi.
10:12Donc elles profitent de tout ça pour s'installer.
10:15Et après, une fois qu'elles sont là...
10:16Mais la fast fashion, c'est un phénomène social et de consommation globale.
10:20Oui, mais qui a commencé progressivement avec H&M, avec d'autres, etc.
10:23Avec Zara.
10:24Avec Zara.
10:24Avec des marques européennes.
10:26Avec des marques européennes.
10:27C'est même elles qui l'ont inventée, il faut le dire.
10:29Et maintenant, ça va beaucoup trop loin.
10:31Mais ça avait déjà été trop loin avant.
10:33Il y avait déjà eu des scandales avant.
10:34Il aurait peut-être l'arrêté avant.
10:36Dominique Seuil, il nous reste une minute.
10:38Alors, oui, il faut mettre des limites.
10:40La bonne nouvelle, c'est que le shérif se réveille quand même.
10:43Que le shérif...
10:44Il y a des procédures qui sont en cours.
10:46Le shérif, c'est qui ? C'est Roland Lescure ?
10:48Le shérif, c'est les autorités.
10:49Ou c'est Ursula von der Leyen ?
10:50C'est une réponse.
10:54Oui, il y a des shérifs européens qui commencent à agir.
10:58Mais évidemment, c'est trop lent.
10:59C'est trop lent parce que, eh bien, nous sommes 27.
11:03Donc, les Pays-Bas et la Belgique n'ont pas la même réaction vis-à-vis de Chine qu'en France.
11:08Bon, mais c'est l'Europe, c'est comme ça.
11:09Est-ce que Chine profite de ça ?
11:10Oui, Chine, bien sûr.
11:11Mais nous avons quand même un argument massif.
11:14Non, mais ce qui se passe en France, c'est très intéressant parce que, cette nuit,
11:17on a appris que Chine vise un bénéfice de 2 milliards de dollars cette année,
11:25ce qui est un doublement par rapport à l'année dernière.
11:27Et ils espèrent se coter en bourse à Hong Kong dans les semaines qui viennent.
11:31Et donc, ce qui se passe en France est regardé de très très près, je pense, partout.
11:36Bon, on reprendra le débat en tout cas, puisque la question de la régulation
11:39et de notre responsabilité est posée.
11:43Chine, le miroir de nos contradictions.
11:45C'était passionnant de vous écouter, messieurs.
11:47Merci Thomas Porchet, merci Dominique Seuss.
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