François Ozon adapte le roman d'Albert Camus "L'Étranger" au cinéma, un des trois romans francophones les plus lus au monde. Le film avec Benjamin Voisin et Rebecca Marder sort ce mercredi 29 octobre dans les salles de cinéma.
00:00Pour son nouveau film, François Ozon s'attaque à un classique de la littérature, L'étranger et d'Albert Camus.
00:04Oeuvre réputée inadaptable.
00:06Et 60 ans avant lui, c'est le réalisateur Visconti qui avait tenté parce que...
00:10Oui, il faut parler de défi quand même.
00:12Ah oui, complètement. Comment retranscrire à l'écran un personnage aussi insaisissable que Meursault ?
00:18Donc un jeune homme froid, sans empathie, qui n'exprime absolument rien et qui va tuer, sans raison, un homme.
00:24Donc oui, pari risqué pour un réalisateur. Que vaut cette adaptation ?
00:28On regarde tout de suite un extrait.
00:30Pourquoi êtes-y vous armé d'un révolveur ?
00:38Et pourquoi revenir vers cet endroit précisément ?
00:43Moi aussi, je me demande parfois si je t'aime.
00:51C'est bizarre. Pas comme les autres.
00:53Pour retrouver toute la tension, toute la pesanteur du livre, François Ouzon a opté, vous l'avez vu, pour un noir et blanc épuré, très stylisé.
01:05Il y a très peu de dialogue, peu d'effet. Tout repose sur les regards, les silences, le décor. On est dans les années 30 à Alger. Les images sont magnifiques.
01:13Magnifiques, donc, malgré cette atmosphère oppressante. Et tout repose aussi, évidemment, sur la prestance de l'acteur Benjamin Voisin. Fascinant en Meursault.
01:23Ils avaient déjà tourné ensemble dans les T-85 ?
01:25Oui, alors, c'était un film radicalement différent. Benjamin Voisin avait un rôle d'extraverti dans la séduction. Rien à voir, mais alors absolument rien à voir avec ce personnage.
01:34Un rôle, d'ailleurs, qui l'a épuisé. Parce que retenir émotionnellement, ça a été très dur pour lui. On l'écoute au micro de Claire Fleury.
01:41Et vu que ça a duré cinq mois, non pas le tournage seulement, mais le tournage plus la préparation, au bout d'un moment, j'ai commencé à fatiguer. J'en ai marre.
01:50De ne pas réagir, de ne jamais être en réaction. C'est un jeune homme Meursault, l'étranger de Camus. C'est un jeune homme qui ne réagit pas.
01:58Et notre société nous habitue à tous à réagir. Alors moi, je suis à 3000. Tout ce qui est social, j'adore ça. Parlez pour ne rien dire, je peux faire ça cinq heures d'affilée.
02:09Mais là, on est quand même du coup sur un rôle de compo. On est sur un taiseux qui est une vie intérieure plus que grande.
02:20Rôle de composition, donc on a compris. Alors c'est l'un des trois romans à l'étranger, les francophones les plus lus au monde, il faut le rappeler aujourd'hui.
02:26Pourquoi François Ozon, il a voulu s'y attaquer ?
02:28C'est le personnage justement, c'est le personnage de Meursault qui l'a toujours fasciné. Mais cette idée d'en faire un film, d'adapter Camus, est venue un petit peu par hasard.
02:36Là, je l'ai relu il y a deux ans pour justement m'inspirer de ce personnage pour un autre film.
02:42Et en relisant le livre, je me suis dit mais c'est quand même incroyable. Alors effectivement, c'est un livre inadaptable, c'est un livre philosophique.
02:49Mais ça serait fascinant comme défi d'essayer d'incarner ce personnage de Meursault et voir si au cinéma, ce qui marche dans le langage littéraire peut marcher dans le langage cinématographique.
03:00C'était un défi.
03:01Voilà, c'était un défi. François Ozon le reconnaît. Mais là où il réussit, j'ai trouvé son pari, c'est de nous proposer quelque chose de vraiment différent, qu'on n'a pas l'habitude de voir au cinéma.
03:10Il faut voir un peu ce film comme une expérience cinématographique, surtout la première partie qui est presque sensorielle.
03:17François Ozon donc a voulu vraiment rester fidèle au livre. Et moi d'ailleurs, après le film, ce que j'ai voulu faire, c'est relire L'étranger d'Albert Camus.
Écris le tout premier commentaire