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00:00Bonjour à tous, bienvenue sur France 24 dans Paris Direct, dans l'info du jour.
00:05Aujourd'hui on se consacre à cette crise entre les Etats-Unis et le Venezuela, mais aussi entre Washington et Bogota.
00:12Depuis plusieurs semaines, le gouvernement américain mène des attaques en mer des Caraïbes et dans le Pacifique.
00:17On reviendra en détail sur ces événements avec Jean-Jacques Kouryanski, directeur de l'Observatoire de l'Amérique Latine pour la Fondation Jean Jaurès.
00:30Les tensions s'accentuent de jour en jour entre les Etats-Unis et le Venezuela.
00:42Depuis plusieurs semaines, le président américain mène des opérations militaires en mer des Caraïbes.
00:47Donald Trump dit vouloir ainsi lutter contre le narcotrafic.
00:50Plusieurs navires ont été la cible de frappes américaines, des attaques qui ont fait des dizaines de morts.
00:55Retour sur ces dernières semaines dans la région avec Valérianne Gauthier.
01:00Des avions de combat F-35, un sous-marin et huit navires de guerre, dont le plus grand porte-avions du monde,
01:09une véritable armada déployée en mer des Caraïbes.
01:14Depuis début septembre, l'armée américaine a revendiqué dix frappes qui ont fait au moins 43 morts.
01:20Donald Trump a intensifié sa guerre contre le narcotrafic, notamment les gangs vénézuéliens.
01:27Je pense que l'on va tuer ces gens qui apportent de la drogue dans notre pays, ok ?
01:32On va les détruire, vous voyez, ils seront morts.
01:35Le président américain a autorisé la CIA à mener des opérations clandestines
01:41et étudie la possibilité de frappes terrestres sur le sol vénézuélien.
01:46Sa bête noire, Nicolas Maduro, qui reproche à la Maison-Blanche d'inventer une guerre éternelle.
01:54Le peuple des Etats-Unis est conscient que ce qui est envisagé contre le Venezuela
02:02est une agression armée visant à imposer un changement de régime,
02:07à installer des gouvernements fantoches
02:09et à voler le pétrole, le gaz, l'or et toutes les ressources naturelles d'une patrie.
02:17Également dans le viseur de Donald Trump, le président colombien,
02:24il l'accuse de ne rien faire contre la production de cocaïne dans son pays
02:28et le trésor américain a même inscrit Gustavo Petro sur sa liste noire de narcotrafiquants.
02:35Ce n'est pas vrai, nous n'inondons pas le monde de cocaïne,
02:39ce sont des mensonges passés de mode.
02:41Le monde, à commencer par les Etats-Unis, est envahi par le fentanyl,
02:45qui est 30 fois pire.
02:48Les pays d'Amérique latine observent avec une certaine appréhension
02:52la mise en place d'une nouvelle doctrine Monroe,
02:56l'idéologie de l'impérialisme américain
02:58qui avait fait de la région sa zone d'influence exclusive.
03:01Et on continue d'en parler avec Jean-Jacques Kourlianski,
03:06directeur de l'Observatoire de l'Amérique latine pour la fondation Jean Jaurès.
03:09Bonjour.
03:09Bonjour.
03:10Merci d'être avec nous.
03:11Alors, qu'est-ce que Donald Trump a en tête exactement ?
03:14Est-ce qu'il s'agit simplement d'une histoire de narcotrafic ?
03:17Bon, il faut s'en tenir aux faits.
03:19On a quelques certitudes et on a aussi quelques interrogations.
03:23Bon, première certitude, ce qu'il dit.
03:27Qu'est-ce qu'il dit ?
03:28Je lutte contre le trafic de stupéfiants et le Venezuela est l'un des acteurs importants.
03:34Je me dois pour la sécurité et la santé des Américains,
03:38en particulier des jeunes Américains,
03:40de mettre fin à ce qui porte atteinte à leur santé
03:45et finalement à notre sécurité.
03:48C'est ce qu'il dit depuis sa campagne électorale,
03:50c'est ce qu'il a dit depuis le 20 janvier,
03:52depuis sa prise de fonction.
03:53Alors, il avait une priorité à l'époque, c'était les migrations, les migrants,
03:58qui étaient des facteurs de criminalité, dont le trafic de stupéfiants.
04:03Donc, il est passé à la page suivante.
04:05Il a fait beaucoup de choses qui ont été très discutées sur la question des migrants.
04:13Aujourd'hui, il s'attaque à celle du trafic de drogue, du trafic de stupéfiants.
04:20Alors, la question qu'on peut se poser, effectivement,
04:23pourquoi le Venezuela, dans la mesure où le Venezuela n'est pas l'acteur principal,
04:28il y en a d'autres, il y a la Colombie, il y a le Mexique,
04:31il y a de plus en plus l'Équateur.
04:34Alors, on est obligé de présenter un certain nombre d'hypothèses non vérifiées.
04:42Et je dis non vérifiées parce qu'avec Donald Trump,
04:44on ne sait pas très bien à quoi s'en tenir.
04:47Il peut changer de politique du jour au lendemain.
04:49Il a déjà parlé de problèmes de stupéfiants avec le Mexique.
04:53Puis, il a rebasculé sur les problèmes de commerce extérieur, d'investissement,
04:59dans la mesure où le Mexique est le premier partenaire commercial des États-Unis.
05:05Alors, les stupéfiants.
05:06Le secrétaire d'État, Marco Rubio, était, il y a quelques semaines, en Équateur,
05:12qui est devenu un pôle, non pas de production, mais de redistribution de la drogue,
05:19enfin, la cocaïne, le fentanyl, vers les États-Unis, vers l'Europe, un petit peu partout.
05:23Et il a dit au président équatorien, Daniel Nauboa,
05:29écoutez, nous savons que vous êtes concernés,
05:32mais en ce qui concerne les questions de trafic de stupéfiants,
05:37comme d'autres d'ailleurs,
05:38on peut les traiter de deux façons.
05:40D'une façon avec les amis,
05:42vous, vous êtes un ami, vous êtes un partenaire,
05:44et d'une autre façon avec les autres.
05:46Alors, il n'avait pas parlé de Venezuela,
05:48maintenant, on sait que les autres, c'est le Venezuela.
05:51Alors, ami, l'Équateur,
05:54qu'est-ce qu'il a obtenu de l'Équateur ?
05:56Il a obtenu la probable installation
05:58d'une base militaire des États-Unis en Équateur,
06:01dont il disposait déjà en 2009 pour surveiller la Colombie.
06:05Donc, peut-être aujourd'hui, c'est toujours pour la Colombie,
06:07puisqu'il y a également, après le Venezuela,
06:10des problèmes bilatéraux avec la Colombie,
06:12mais aussi le Brésil.
06:15Alors, la question qu'on est en droit de se poser,
06:17effectivement, bon, si on admet
06:19qu'effectivement, en matière de politique intérieure,
06:22c'est très important de sécurité
06:24et de l'intérieur des États-Unis
06:25d'affronter, pour Donald Trump,
06:28cette question du trafic des stupéfiants,
06:31pourquoi le Venezuela,
06:33même avec ce bémol équatorien,
06:35vous êtes, le Venezuela n'est pas un pays ami.
06:38Mais justement, jusqu'ici, il n'a fourni aucune preuve
06:40concernant un lien supposé entre ces navires
06:42qui ont été attaqués et le marque au trafic.
06:43Oui, alors, sur la méthode, effectivement,
06:45oui, la méthode, mais ça, c'est la méthode Trump.
06:48Il s'assoit sur le droit international.
06:49Est-ce qu'il a le droit, justement ?
06:50J'allais vous poser la question.
06:52Le droit international n'y autorise ou pas ?
06:54Non, mais comme il n'avait pas le droit
06:55de bombarder le Yémen ou l'Iran,
06:57enfin bon, c'est...
06:59Il a une conception de promoteur immobilier.
07:04Je négocie.
07:06Si je suis le plus fort, je frappe.
07:08Si je ne suis pas le plus fort,
07:09comme avec la Chine, on s'assoit et on discute.
07:11Bon, il est évident qu'avec les pays d'Amérique latine,
07:14mais le Venezuela et les autres,
07:16le rapport de force militaire étant ce qu'il est,
07:18même économique et commercial,
07:20donc il peut y aller, il n'y a pas de problème.
07:22Alors, je dis sanctions économiques et commerciales
07:25parce que c'est la voie qu'il a choisie aussi
07:28pour la Colombie,
07:29mais qu'il ne peut pas appliquer pour le Venezuela
07:32parce que le Venezuela est soumis depuis des années
07:34à des sanctions.
07:34Et il est sanctionné.
07:38Alors, il y a un autre élément
07:40de politique intérieure nord-américaine
07:42qui est important.
07:44Il a dans le conglomérat
07:47de tous les groupes qui le soutiennent,
07:51qui est représenté, ce groupe,
07:53et d'ailleurs représenté dans son gouvernement
07:54par le secrétaire d'État Marco Rubio,
07:57un électorat républicain très idéologique,
08:00très fort en Floride,
08:01qui est un État important.
08:03Chaque fois qu'il y a des élections
08:05aux États-Unis,
08:07et ce groupe très idéologisé
08:09fonctionne un peu comme fonctionnait
08:13le parti républicain il y a quelques années.
08:16Donc, le chef d'État du Venezuela
08:21est représentant du chavisme,
08:24du marxisme, etc.
08:26C'est un ennemi à cibler.
08:28Il semblerait que...
08:30Il semblerait, je dis toujours,
08:31il faut parler au conditionnel avec Donald Trump,
08:35qu'il se soit fait un peu forcer la main.
08:36Je ne sais pas si vous vous rappelez
08:38le commentaire qui a été fait par la Maison-Blanche
08:41après l'attribution du prix Nobel de la paix
08:43à Maria Corine Amatchado,
08:46qui est la leader du groupe de l'opposition,
08:49qui est le plus lié au secteur,
08:52le plus à droite du parti républicain aux États-Unis.
08:54Donald Trump, enfin, son porte-parole,
08:58ou sa porte-parole, a fait savoir qu'il n'était pas content,
09:01que c'était une décision politique.
09:04Alors, il faut se rappeler, c'est intéressant,
09:06il faut revenir sur le passé,
09:08qu'en 2019, au cours de son premier mandat,
09:11il avait déjà essayé de forcer la main,
09:15on avait essayé de lui forcer la main,
09:17il y avait eu la reconnaissance du président
09:20de l'Assemblée nationale du Congrès du Venezuela, Guaido,
09:25qui s'était proclamé président dans la rue
09:27et qui avait été reconnu par les États-Unis
09:30et à la suite des États-Unis
09:31par un certain nombre de pays latino-américains et européens.
09:36Et qui s'est ensuite exilé ?
09:37Et à l'époque, son secrétaire à la Défense
09:40avait parlé de « on va revenir à la doctrine Monroe ».
09:44Et Trump l'avait remercié.
09:47Et les choses, d'ailleurs, ne se sont pas du tout arrangées.
09:50Il lui fait actuellement un procès à John Bailey
09:54parce qu'il a écrit des mémoires
09:56dans lesquelles il dit que Trump,
09:58ni qu'on n'est rien en politique étrangère,
09:59il n'a pas de doctrine.
10:00Mais est-ce qu'on doit craindre
10:02une intervention militaire des États-Unis au Venezuela ?
10:06En tout cas, il brandit cette menace, Donald Trump.
10:08Bon, Trump est tout à fait opposé
10:12aux aventures type Irak, type Afghanistan,
10:18et considère qu'on ne sait pas combien de temps ça peut durer,
10:22donc que ça peut coûter cher financièrement,
10:24ce qui est important pour lui,
10:26qui vient d'un milieu d'affaires
10:27et dans lequel un sou est un sou.
10:30Et ça peut coûter cher en vie humaine,
10:32donc électoralement.
10:34Donc il fait de la gesticulation.
10:37Alors manifestement, il y a quelques milliers de marins
10:39et d'aviateurs américains sur zone.
10:42Ce n'est pas suffisant pour envahir un pays
10:45comme le Venezuela.
10:46Ce n'est pas l'île de la Grenade,
10:48comme ce qu'avait fait Reagan en 1983,
10:51ou George Bush à Panama en 1989.
10:54C'est un pays quand même qui est assez grand,
10:57qui est relativement peuplé,
10:58même s'il y a beaucoup de Vénézuéliens
11:00qui sont actuellement à l'étranger.
11:02Mais il y a quand même beaucoup de monde.
11:08On peut penser que c'est de l'action psychologique
11:11en vue de forcer la main
11:12à une partie des militaires au Venezuela
11:17pour qu'ils fassent ce que ne veut pas faire Trump,
11:20c'est-à-dire que ce soit eux
11:21qui prennent l'initiative de renverser le régime.
11:26Et avec un soutien civil
11:28dans le courant de l'opposition
11:30qui est favorable aux Etats-Unis à 100%,
11:33qui est le courant de Maria Corina Machado.
11:35Parce qu'il y a un autre courant de l'opposition
11:37qui est opposé à Maduro,
11:41mais qui ne souhaite pas
11:42que le rétablissement de la démocratie
11:45se fasse par la voix,
11:47par l'aide, par la main
11:48d'un pays étranger, donc, des Etats-Unis.
11:51Donc c'est une gesticulation
11:53qui va se prolonger, probablement,
11:55qui va être accompagnée
11:56de bombardements de bateaux
11:58pour montrer à l'opinion des Etats-Unis
12:00qu'on lutte contre le trafic de stupéfiants.
12:03Mais il est probable
12:04que d'ici quelques temps,
12:05il n'y aura plus de bateaux.
12:06Les bateaux,
12:08pour des raisons évidentes,
12:10ne vont plus sortir du Venezuela
12:12ou de la Colombie.
12:13Et là, il n'a pas exclu,
12:15puisqu'il a autorisé des actions
12:16à l'intérieur du Venezuela,
12:19de la CIA.
12:20Et d'ailleurs, hier, Caracas a annoncé
12:22avoir démantelé une cellule criminelle
12:23liée à la CIA.
12:24On doit y croire ?
12:25C'est probable, c'est possible.
12:26Je ne sais pas si ces personnes-là
12:28sont vraiment membres de la CIA,
12:30comme les bateaux sont vraiment des bateaux.
12:32On est un peu dans le brouillard.
12:36Les faits ne sont pas vérifiés.
12:38On est obligé de prendre en compte
12:40ce que disent les uns et les autres
12:41sans avoir le moyen de les authentifier.
12:44Et il est possible aussi
12:47qu'il y ait des assassinats ciblés
12:51ou un bombardement ciblé
12:53à un moment ou à un autre,
12:54puisqu'il a signalé qu'il a anticipé
12:57le fait qu'il n'y aurait plus de bateaux
12:59et que ça pourrait passer
13:00par la voie terrestre.
13:01Et que donc, à ce moment-là,
13:03la voie terrestre ou aérienne,
13:04donc le bombardement d'un petit aéroport
13:06utilisé par des transporteurs de drogue.
13:09Mais dans la mesure où il a considéré,
13:12il a présenté Nicolas,
13:14Maduro et son gouvernement
13:15comme un réseau de trafiquants de drogue
13:20qui n'est pas non plus vérifié.
13:22Il a même vérifié Nicolas Maduro
13:23de baron de la drogue.
13:24Oui, le baron de la drogue,
13:25avec, il a donné l'inventaire...
13:26Sa tête est mise à prix, d'ailleurs.
13:2850 millions de dollars.
13:28Le cartel des soleils,
13:30parce qu'ils ont des étoiles
13:31en forme de soleil sur les épaulettes.
13:34Mais là aussi, il faut se fier
13:35à la parole de Donald Trump.
13:37Enfin bon, ça paraît un peu tiré par les cheveux.
13:41Alors, le fait qu'ils s'en prennent à la Colombie,
13:44là, ça paraît un peu plus évident.
13:46Il y a effectivement beaucoup de problèmes
13:48de stupéfiants en Colombie,
13:50mais ça vient de loin.
13:52Et là aussi, on peut discuter le fait
13:54de présenter le président de la Colombie
13:56qui a lutté contre le trafic de stupéfiants,
13:59mais qui fait ce qu'il peut,
14:00comme ses prédécesseurs,
14:02comme le chef d'un autre baronni de la drogue.
14:07En 1989, les Etats-Unis avaient envahi le Panama
14:11en justifiant justement cette intervention
14:13par la lutte contre le trafic de drogue.
14:16Est-ce qu'on pourrait se retrouver
14:17dans la même situation ?
14:18Ou alors le Panama était plus simple à...
14:20Le contexte est différent.
14:21On était un mois de la chute du mur de Berlin.
14:24On était encore...
14:26Enfin, c'était la fin de la guerre froide.
14:28Cette opération avait un caractère de test
14:30en direction de l'Union soviétique,
14:33voir s'il est...
14:33Comme Noriega, donc le président de Panama,
14:38qui a été renversé, avait des liens avec Cuba.
14:41Il avait des liens avec la CIA d'ailleurs aussi.
14:44C'était un personnage qui était devenu incontrôlable
14:47pour les Etats-Unis.
14:49Mais cette opération-là avait une valeur de test aussi.
14:53Savoir un peu comment, dans le contexte nouveau
14:55de la préchute du mur de Berlin,
14:57comment les Moscous allaient réagir.
15:00Donc là, on n'est pas...
15:01Même si Maduro a des liens avec la Russie,
15:04mais Poutine n'est pas un président marxiste-léniniste
15:08avec la Chine.
15:11Mais le Venezuela n'est pas le pays
15:13qui a le plus de liens économiques avec la Chine.
15:15Donc on a beaucoup de blancs,
15:18de points d'interrogation.
15:20Ce qui veut dire qu'on ne peut pas exclure non plus
15:23que les choses pourraient évoluer dans quelque temps.
15:25Il ne faut pas oublier qu'il y a un enjeu quand même économique
15:28et qui intéresse beaucoup Trump
15:30dans toutes ses relations avec quelques pays du monde que ce soit.
15:33C'est l'économie et l'énergie.
15:35Et le Venezuela est le pays
15:37qui a la plus grande réserve pétrolière du monde.
15:41Ce qui explique d'ailleurs qu'il y a quelques mois,
15:45Trump avait envoyé un émissaire auprès de Nicolas Maduro
15:48pour négocier des arrangements.
15:50Et la conclusion avait été que
15:52la société pétrolière Chevron
15:54pouvait reprendre ses activités au Venezuela.
15:57Ça a été la seule d'ailleurs.
15:58Et apparemment, en dépit du contexte,
16:00elle continue ses activités pétrolières.
16:02Et dans cette confrontation avec le Venezuela,
16:05il y a un pays qui joue un rôle important,
16:07un archipel, Trinité et Tobago.
16:09Un navire de guerre américain est même arrivé là-bas dimanche.
16:12Expliquez-nous ce que Trinité et Tobago
16:14vient faire là-dedans.
16:16Je rappelle que l'archipel est situé
16:17à seulement une dizaine de kilomètres du Venezuela.
16:18Oui, Trinité et Tobago est un voisin très proche,
16:23effectivement, de 10 kilomètres.
16:25C'est un pays qui a des accords pétroliers énergétiques
16:28avec le Venezuela.
16:30Le Venezuela est très lié au pays du Caricom,
16:33du pays des grandes et petites Antilles.
16:37Et donc, le fait que le gouvernement de Trinité et Tobago
16:42appuie les États-Unis,
16:43on ne voit pas d'ailleurs comment il pourrait résister
16:46à une pression des États-Unis.
16:48Mais d'un autre côté, ils sont liés,
16:49ils sont entre le marteau et l'enclume,
16:51ils sont liés pour des raisons énergétiques
16:53et des raisons humaines aussi.
16:54Il y a pas mal de personnes originaires de Trinité et Tobago
16:57qui sont au Venezuela depuis plusieurs années
17:01pour des raisons de travail,
17:02à l'époque où le Venezuela était un pays opulent.
17:07Et comme Maduro ne peut pas répondre aux États-Unis directement,
17:12ça serait mettre le doigt dans un engrenage,
17:14il se heurterait à une riposte importante militaire des États-Unis.
17:20Donc, il veut éviter.
17:21Mais il peut faire les gros yeux à plus petit que lui.
17:26Donc, c'est ce qu'il est en train de faire avec Trinité et Tobago,
17:28faute de pouvoir le faire avec Donald Trump.
17:30Alors, on a parlé du Venezuela, de Trinité et Tobago.
17:34Mais il y a aussi un autre pays avec lequel Donald Trump
17:36est entré en conflit ces derniers jours, la Colombie.
17:39Là aussi, il a accusé le président colombien
17:41d'être un baron de la drogue.
17:43Des opérations américaines ont été menées dans le Pacifique.
17:46Gustavo Petro affirme que les États-Unis ont violé
17:49la souveraineté de l'espace maritime colombien
17:51et ont tué un pêcheur.
17:52On va écouter Gustavo Petro.
17:54Il faut replacer cela dans le contexte global du discours.
18:01Le message est qu'aucun soldat au monde,
18:04qu'il soit colombien, européen, africain, nord-américain ou américain,
18:09ne peut décemment exécuter un ordre
18:11lui indiquant de tirer sur des êtres humains
18:14et commettre un crime contre l'humanité.
18:16Il parle de crimes contre l'humanité.
18:24Est-ce qu'on en est là ?
18:26Bon, le droit international a été piétiné.
18:29Alors après la qualification de l'acte,
18:32bon, le président colombien a choisi
18:34« crimes contre l'humanité »,
18:36mais il y a de toute évidence
18:37une violation du droit international.
18:39Mais il y a des civils qui ont péri.
18:40Lorsqu'il y a des problèmes, même en haute mer,
18:46donc un pays a possibilité d'arraisonner le bateau suspect,
18:52de l'arraisonner, d'arrêter les personnes,
18:54mais pas de les exécuter.
18:55D'ailleurs, pourquoi ne pas les avoir arraisonnés, ces bateaux ?
18:59Donald Trump, je vous dis,
19:01a une relation avec les pays, avec les autres pays,
19:05qui est une relation de force.
19:06Si je suis plus fort, j'agis.
19:08Et il a comme tribunal l'opinion des États-Unis.
19:11Donc il montre à l'opinion des États-Unis,
19:13c'est lui qui se donne le droit de dire le droit.
19:18Et donc personne ne peut le contester,
19:23selon la façon dont il présente les choses.
19:27Donc le multilatéralisme, le droit international,
19:30l'ONU, il a quitté l'OMS, il a quitté l'UNESCO,
19:33il a quitté les accords de Paris.
19:35En fait, tout ça, ça ne l'intéresse pas.
19:36Il a même menacé de sanction les juges de la Cour pénale internationale.
19:42Bon, donc tout ça, ce qui se passe en mer des Caraïbes
19:47et du côté pacifique,
19:49est dans la logique de sa conception des relations internationales.
19:53C'est le droit du plus fort qui est le droit réel,
19:58le droit qui doit s'appliquer.
19:59Donc il est évident que la Colombie, pas plus que le Venezuela,
20:04n'est en mesure de riposter à des actions militaires des États-Unis
20:08et que, bon, ces actions militaires des États-Unis
20:12sont accompagnées de commentaires très désobligeants
20:15et non vérifiés non plus sur son homologue, entre guillemets,
20:20si on peut dire qu'il s'agit d'un homologue,
20:22pour Trump, certainement pas, Gustavo Petro.
20:26Mais c'est vrai qu'avec la Gustavo Petro,
20:30c'est un peu un caillou dans le soulier de Donald Trump.
20:34Le contentieux est ancien.
20:36Le contentieux remonte dès la fin du mois de janvier de cette année,
20:41dès la prise de fonction de Donald Trump.
20:42Gustavo Petro s'était opposé à la politique migratoire des États-Unis.
20:47Il avait refusé deux avions qui transportaient...
20:50Il avait dû retourner.
20:52Voilà.
20:52Et alors là, Donald Trump avait donné à fond,
20:55non pas dans le militaire,
20:57puisqu'avec la Colombie, il y avait des relations,
21:00il y avait des relations normales,
21:02mais dans les sanctions économiques.
21:03Il avait menacé la Colombie de lui coller,
21:07ce qu'il fait habituellement,
21:0850% de droits de douane sur ses produits exportés aux États-Unis.
21:13Pour la Colombie, c'est compliqué,
21:15parce qu'il y a beaucoup de pays latino-américains
21:17qui ont des relations privilégiées avec la Chine.
21:19La Colombie, non.
21:20Le premier partenaire économique et commercial de la Colombie,
21:24ce sont les États-Unis.
21:25Il y a 3 000 entreprises concernées en Colombie,
21:29des producteurs de fleurs, des producteurs de café,
21:32des producteurs de pétrole,
21:34puisque la Colombie produit également du pétrole.
21:37Et donc tous avaient fait savoir à Gustavo Petro
21:40qu'il fallait mettre un bémol.
21:41Et dans les 48 heures,
21:44Petro avait quand même obtenu d'aller lui-même envoyer
21:48un avion colombien, un avion militaire colombien,
21:51chercher, les expulser,
21:53pour ne pas les laisser revenir dans un avion
21:57de la police ou de l'armée des États-Unis.
22:01Ensuite, il y avait eu, si vous vous rappelez,
22:03au mois de septembre,
22:05à l'occasion de l'Assemblée générale des Nations Unies,
22:08le président Petro avait participé à un meeting pro-palestinien
22:12dans une rue de New York,
22:14qui avait suscité, et là aussi, la colère de Donald Trump,
22:18qui a suspendu le visa d'entrée aux États-Unis
22:21de Gustavo Petro à ce moment-là,
22:24et qui a suspendu également le visa du ministre des Affaires étrangères de Colombie.
22:29Donc là, ça semble personnel, en fait.
22:30Voilà. Et le 5 septembre,
22:33Petro ne s'était pas laissé marcher sur les pieds.
22:35Il avait provoqué une réunion de la CELAC,
22:38la Communauté des États de l'Amérique latine et caraïbe,
22:42qui réunit l'ensemble des pays de l'Amérique,
22:45à l'exception des États-Unis et du Canada,
22:49pour faire voter une déclaration condamnant
22:51le premier bateau qui avait été coulé le 2 septembre
22:54sur les côtes vénézuéliennes,
22:58ce qui avait entraîné là aussi une riposte de Donald Trump.
23:01Le 16 septembre, la Colombie avait été
23:04ce qu'on appelle « décertifiée » dans le jargon américain,
23:07c'est-à-dire que les États-Unis donnent des notes
23:10et certifient des pays qui comportent bien ou mal
23:14dans leur politique sur le trafic des stupéfiants.
23:17Donc la Colombie avait été dégradée,
23:19décertifiée le 16 septembre.
23:22Donc on est dans cette logique,
23:24cette escalade entre la Colombie et les États-Unis
23:30depuis le mois de janvier.
23:32Est-ce qu'il a des raisons, Donald Trump,
23:33de penser que depuis l'arrivée au pouvoir de Gustavo Petro,
23:36il y a plus de cocaïne, de drogue qui entre aux États-Unis
23:39ou est-ce que là encore, il ne se fonde sur rien ?
23:41Bon, alors statistiquement, il semblerait que la politique de Petro,
23:45qui est un peu différente de celle de ses prédécesseurs,
23:48d'essayer de coupler la lutte contre le trafic des stupéfiants
23:53sur la recherche de la paix,
23:55puisque c'est un pays qui traditionnellement connaît une violence délinquante
24:01et même politique très importante,
24:03n'ait pas donné les résultats attendus,
24:05mais de là à dire qu'il l'a fait pour se mettre de l'argent dans la poche
24:08en tant que chef d'un réseau criminel,
24:10c'est plutôt sa politique qui n'a pas donné les résultats qu'il attendait,
24:14que la logique d'une politique délinquante
24:20qui serait pratiquée par le président de la Colombie.
24:23Mais pour Trump, peu importe, je veux dire,
24:25c'est son discours qui, dans les médias,
24:28doit effacer tous les contre-discours
24:34et s'imposer aux États-Unis, comme en Colombie,
24:37comme dans le reste du monde.
24:39En tout cas, depuis son arrivée au pouvoir,
24:41Gustavo Petro a tenté de calmer les choses avec l'ex-guérilla des FARC,
24:45qui d'ailleurs lui a apporté son soutien.
24:47Il a déclaré que s'il y avait une intervention américaine,
24:49le président Gustavo Petro pourrait compter sur son aide
24:52pour combattre les États-Unis.
24:53En Colombie, on se prépare à tout ?
24:56Non, il n'y aura pas, alors encore moins qu'au Venezuela.
24:59Compte tenu, là aussi, la Colombie est un pays d'un million de kilomètres carrés,
25:02il y a des montagnes, la forêt amazonienne.
25:05Alors, même si Donald Trump a des relais politiques,
25:11des partis d'extrême droite qui sont dans la même ligne politique
25:17et qui souhaitent faire partir Gustavo Petro,
25:22il y a des élections au mois de mars prochain en Colombie.
25:26Les élections en Colombie sont transparentes,
25:29il n'y a pas de problème.
25:30Donc, le pari, c'est plutôt de faire du bruit
25:33pour renforcer l'opposition
25:35et lui permettre de faire élire un candidat
25:37qui serait proche de Donald Trump et des États-Unis.
25:42Merci beaucoup, Jean-Jacques Kouryanski,
25:44d'avoir été avec nous sur ce plateau
25:45et d'avoir répondu à nos questions.
25:47Merci.
25:47Merci.
25:48Merci.
25:49Merci.
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