00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h10h, Patrick Roger.
00:05Il est 7h41, ça va tous vous intéresser.
00:08Sud Radio vous explique, est-ce que les entreprises recrutent dans ce contexte qui est très incertain économiquement et surtout évidemment politiquement ?
00:16Nous sommes avec Benoît Serre, qu'on connaît bien, coprésident du Cercle des Réflexions Humania, qui réunit des centaines de DRH, au moins 600 je crois.
00:24Bonjour.
00:24Alors, qu'en est-il ? Parce que j'ai vu que France Travail dit que le nombre de projets de recrutement a baissé, a chuté 12,5% en 2025 par rapport à 2024.
00:36Que se passe-t-il dans les entreprises ?
00:38On est dans une situation paradoxale, c'est-à-dire que vous connaissez les chiffres de la démographie qui devraient nous engager à avoir un taux d'emploi meilleur.
00:44Or, on projette pour l'année prochaine 8% de taux de chômage en France, alors qu'on était descendu à peu près à 7%.
00:51C'est majoritairement lié à l'instabilité dans laquelle nous sommes. Il y a beaucoup d'inconnus pour les entreprises.
00:57Vous savez, une entreprise déteste l'instabilité. Parce qu'elle ne sait pas comment construire son budget, elle ne sait pas quels risques prendre, etc.
01:06Ça, c'est le premier phénomène. Le deuxième phénomène, c'est que pour les individus, la situation politique est aussi très instable et donc chacun reste où il est.
01:14Donc il n'y a plus de mobilité, on va dire. Et donc dès lors que des gens ne passent plus d'une entreprise à l'autre, il y a moins de recrutement et ça fait deux bonnes raisons pour que le taux de recrutement chute.
01:21Oui, est en train de chuter. Et puis, parce que vous, les DRH, vous êtes en première ligne, que vous dit-on dans les directions ?
01:28Parce que souvent, on se dit, bon ben allez-y, il faut recruter, là on a tel projet, tel projet, et aujourd'hui on est un peu à l'arrêt, on ralentit.
01:35Non, là c'est fini. Vous avez un phénomène qui vient se surajouter, c'est un mot pas très joli, mais c'est ce qu'on appelle la réallocation de ressources.
01:42Autrement dit, la transformation des métiers, le déploiement de l'IA, tout un tas d'éléments de transformation des organisations font qu'on essaye d'abord de couvrir les besoins qu'on a en interne,
01:52on allait en prendre des gens à un endroit pour les mettre à un autre. Dans les formations, on les forme à d'autres métiers, etc.
01:58Donc ça c'est le premier sujet. On nous dit beaucoup moins recruter. On nous dit faites avec ce que vous avez.
02:03Parce qu'on a trop d'inconnus, budgétaires, fiscales, politiques, économiques, pour prendre les risques d'eux.
02:12On sait par exemple que là, les négociations annuelles obligatoires sur les salaires vont pas tarder à démarrer.
02:18On présume que ça va être assez tendu tout de même. Parce que l'inflation est basse, donc ça veut dire que probablement les négociations seront pas très élevées.
02:27On est autour de 2% quand on a été jusqu'à 4 il y a 3 ans. Mais c'est normal, puisque quand vous regardez...
02:35Alors j'ai vu que le projet de budget, de recette, ça avait pas été voté par la Commission, ça avait été en débat à l'Assemblée.
02:43Enfin, soyons honnêtes, personne sait qui va être taxé, comment et combien. Une entreprise, elle attend.
02:48Et puis pendant ce temps-là, d'autres pays avancent, la concurrence internationale est redoutable.
02:52Et ce que je dis ne vaut pas que pour les grandes entreprises. Ça vaut pour les PME qui sont fournisseurs des grandes entreprises.
02:57Oui, bien sûr. Donc si vous aviez un... Sans faire de la politique, Benoît Serres, mais si vous aviez un message quand même à passer à la classe politique, au personnel politique aujourd'hui ?
03:08C'est pas de la politique ce que je dis. Je dis que quand on regarde le débat, quand on regarde les propositions qui sont faites ici ou là,
03:16on a presque l'impression que la négociation budgétaire ou la préparation de ce budget s'est faite, ce qui se fait tout le temps, pour des raisons politiques,
03:25mais sans prise en considération de la réalité de l'économie. Et donc comme s'il y avait une sorte de dichotomie entre la vie politique qui tourne sur elle-même
03:35et puis les entreprises et leur réalité. Parce que leur réalité, c'est des taux d'intérêt qui ne baissent pas, c'est des inconnus fiscales comme je l'ai évoqué.
03:42Donc voilà, le sujet, c'est à quel moment on reprend un peu son sérieux et en considérant qu'on a un environnement.
03:50La France n'est pas une île, en fait. On est encoutouré de pays, il y a de la concurrence.
03:54Alors ça, c'est intéressant, Benoît Serres, parce que quand on est dans des grandes entreprises comme vous, on travaille avec l'international.
04:00Et qu'est-ce qu'on vous dit et quel regard on porte à l'international, que ce soit dans les filiales ou même, parfois, on peut être nous-mêmes une filiale,
04:09d'une grosse boîte à l'international ? Je vais vous dire, les plus gentils vous disent, ah, les Français.
04:16On a un peu une réputation comme ça. Dans d'autres disent, à quel moment se stabilise, à quel moment on va pouvoir être certain de ce qui se passe.
04:24Vous voyez un peu l'opposition entre l'Allemagne et la France sur les voitures électriques, le fait de repousser ou pas.
04:29Enfin, tout ça, ça instabilise beaucoup quand même. Je ne sais pas si vous avez vu, il y a des plans sociaux qui se préparent,
04:35notamment dans le domaine des fournisseurs automobiles. Il y a beaucoup d'inquiétudes quand même.
04:39internationales, les gens, je pense qu'il y a beaucoup, enfin on le voit, il y a beaucoup d'inquiétudes sur la nécessité ou la possibilité
04:47ou le caractère raisonnable d'investir en France pour créer de nouvelles usines ou autre chose.
04:53Et paradoxalement, en même temps, on a une démographie qui devrait nous emmener à un emploi de meilleur niveau.
04:57C'est ce que vous avez dit, c'est ça, oui.
04:59Oui, mais ce n'est pas normal. Tous nos voisins européens sont à 4, 4,5% de chômage ou 5, quelquefois.
05:05Nous, on est à 7,5, bientôt 8.
05:07On a une période démographique. De toute façon, le chômage va baisser, c'est de la mathématique.
05:11Le problème, c'est que par notre instabilité politique, on retarde le moment où on bénéficie d'un régime démographique
05:16qui est maintenant favorable à l'emploi, même s'il est défavorable à l'avenir.
05:19Oui, mais sauf que dans des grandes entreprises, on peut aller investir plutôt à l'étranger plutôt qu'en France.
05:25Dans certains endroits, c'est ce qui se passe.
05:28Et il faut bien comprendre que l'économie, c'est une chaîne.
05:30Donc, si une grande entreprise décide d'aller plutôt investir à l'étranger,
05:33ça va avoir des impacts sur les PME françaises qui sont ses fournisseurs
05:37et qui, pourtant, eux, ne peuvent pas aller se promener à l'étranger.
05:39Donc, c'est un ensemble de chaînes qui est totalement déréglé.
05:43À la limite, ça se règle.
05:44Mais c'est plutôt l'hyper-instabilité, l'inconnu total.
05:47Est-ce qu'on taxe plus ? Est-ce qu'on taxe moins ?
05:49Est-ce qu'on taxe ces gens-là ? Pas ces gens-là ?
05:50Et puis, on a quelques talents qui fuient.
05:52Ah oui, ça vaut le santé.
05:54Très fortement.
05:55Très fortement.
05:56Quand on est dans des grandes entreprises.
05:57Voilà, ils sont très inquiets.
05:59Merci beaucoup, Benoît Serré.
06:00Avec plaisir.
06:00Et puis, il y a des incertitudes aussi liées.
06:02Mais ça, on en reparlera.
06:03Au géopolitique.
06:05Oui.
06:05Bien sûr.
06:06Voilà, bien sûr.
06:07Tout est déréglé.
06:08Mais justement, on est déréglé à l'intérieur avec un dérèglement à l'extérieur.
06:10C'est vrai qu'on n'est pas mieux placé.
06:11C'est l'intelligence artificielle, d'une façon générale.
06:13On n'a pas le temps, mais c'est un sujet colossal de transformation des organisations,
06:17des compétences, des personnes, des formations et du modèle d'éducation dans notre pays.
06:20Oui, oui.
06:21Absolument.
06:21Et pourtant, il y a certains postes, on l'a vu tout à l'heure dans la petite enfance,
06:24où on recherche du monde.
06:2613 000 emplois qui ne sont pas pourvus, évidemment.
06:29Dans le domaine social et d'aide à l'individu, il y a énormément d'emplois à pourvoir.
06:33Et dans l'industrie.
06:34Et dans l'industrie.
06:35Oui, oui, bien sûr.
06:36Parce qu'il y a beaucoup de gens qui partent à la traite.
06:37Bien sûr.
06:38Merci beaucoup, Benoît Serré.
06:39Donc, co-président du cercle de réflexion, Humania, qui réunit 600 DRH.
06:44Si vous voulez réagir, tout à l'heure, entre 8h30 et 9h,
06:47nous pourrons revenir sur ce sujet, évidemment, qui est fondamental, le recrutement.
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