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00:00Europe 1 soir week-end, 19h, 21h, Stéphanie Demereux.
00:04Toujours en compagnie de mes débatteurs de la deuxième heure, Jean-Michel Salvatore et Eliott Mamann.
00:09Et mon invité, Béatrice Brugère, secrétaire générale d'unité magistrat FO,
00:13qui nous a évoqué les réticences que votre syndicat a envers le projet de loi L'Aide à mourir.
00:21On en a parlé longuement et je voulais donc profiter de votre présence pour parler de ce débat récurrent cette semaine
00:28après ces agressions de policiers à Tourcoing, notamment, extrêmement choquantes, des vidéos
00:33et surtout la remise en liberté des auteurs présumés de cet acte.
00:39Alors je ne vais pas vous faire réagir puisque ce n'est pas votre rôle de réagir à une enquête en cours,
00:43mais évidemment cette question qu'on s'est posée toute la semaine,
00:45faut-il rendre la loi plus ferme en cas d'agression d'un policier ?
00:48Puis ce débat sur l'idéologie présumée de certains juges.
00:53Je vous ai entendu tout à l'heure sur CNews dire
00:55« Attention, il ne faut pas mettre les policiers d'un côté et les juges de l'autre.
01:00Nous, les magistrats, on ne peut pas tout. »
01:02Béatrice Brugère.
01:04Sur la question de la violence décomplexée qui touche aujourd'hui les forces de l'ordre
01:08et qui est aussi une attaque de l'État en vrai,
01:10et de ce que l'État représente, il faut quand même se dire les choses,
01:14c'est quelque chose qui dépasse la question judiciaire.
01:19C'est-à-dire que c'est une question de société,
01:20et c'est un fait de société qui est aussi une question de société
01:24sur notre rapport à la violence, sur notre rapport à l'État,
01:27sur notre rapport à l'autorité, etc.
01:30Une fois qu'on a dit ça, ça ne veut pas dire qu'on ne peut rien faire, la justice.
01:32Au contraire.
01:33Mais on peut faire quelque chose dans la séquence qui est la nôtre,
01:37pas dans la séquence qui est celle d'avant.
01:39Mais déjà dans la séquence qui est la nôtre,
01:41faisons ce qu'on a à faire et faisons-le au mieux.
01:45C'est peut-être là-dessus que moi je peux parler,
01:47mais c'est vrai que ce n'est pas la justice qui va régler toute la problématique.
01:53Par contre, si elle est faible, elle va l'accélérer, voire l'accentuer.
02:00Sans commenter en effet cette affaire de Tourcoing,
02:02c'est vrai qu'on a beaucoup critiqué cette semaine
02:04la décision du magistrat de remettre en liberté,
02:08notamment le mineur et le majeur de 19 ans,
02:12qui ont été placés courtement en détention provisoire.
02:15Je ne sais même pas d'ailleurs si on peut appeler ça une vraie détention provisoire,
02:18puisqu'ils ont été ensuite placés sous contrôle judiciaire
02:20avec quelques petites obligations.
02:22Il y aura une nouvelle audience concernant le majeur.
02:24Le parquet a fait appel,
02:26mais on sait que la détention provisoire,
02:28c'est l'exception vraiment absolue.
02:32Est-ce qu'en l'espèce, il ne faudrait pas rendre plus sévère la loi ?
02:36C'est vrai que ça chaude beaucoup de Français.
02:38D'ailleurs, il y avait un sondage,
02:39CNews Europe 1 JDD,
02:4281% des Français souhaitent des peines minimales
02:45pour les agresseurs de policiers.
02:48Est-ce que la loi est suffisamment sévère,
02:50selon la magistrate que vous êtes ?
02:51Il y a deux phases dans votre question.
02:53Il y a la phase de l'enquête
02:55et la phase de la sanction.
02:58Parfois, elles sont très raccourcies,
03:00parfois, elles sont très allongées.
03:02Quand on est au criminel,
03:03elles sont très longues.
03:04Évidemment, vous avez l'intervention de plusieurs magistrats.
03:07Et c'est vrai que notre procédure, aujourd'hui,
03:10demande aux magistrats d'incarcérer le moins possible.
03:15Donc, c'est la loi.
03:17La loi des loupes, c'est ça ou pas ?
03:19Oui, c'est 15 ans de procédure qui arrivent aujourd'hui
03:23sur cette idée que même pendant la phase d'instruction,
03:28qui est le cas que vous avez cité,
03:30on ne peut pas, il faut vraiment éviter de mettre en détention provisoire.
03:35Ça, c'est la première chose.
03:36Mais on a supprimé aussi un critère de détention provisoire
03:41qu'il faut bien avoir en tête,
03:42qui est celui de l'ordre public.
03:44On a eu plein d'affaires comme ça.
03:45Quand vous n'êtes pas au criminel,
03:47mais en délictuel,
03:48alors, excusez-moi, c'est un peu technique,
03:49on ne peut pas mettre en détention provisoire
03:51sur le seul critère du trouble à l'ordre public.
03:55Ça, c'est la première chose.
03:56Et donc, ça, c'est la loi qui nous a encore réduits.
03:59Troisièmement, sur cette phase encore,
04:01j'allais dire, d'instruction,
04:02les mineurs, et ils sont nombreux
04:04dans les affaires qui concernent les forces de l'ordre,
04:08ils sont même de plus en plus nombreux
04:09dans une violence de plus en plus décomplexée,
04:12on ne peut quasiment pas les mettre en détention.
04:14Et ça, c'est encore la loi.
04:15D'ailleurs, je vous rappelle
04:16qu'il y avait une PPL qui est dite à TAL,
04:19qui essayait, mais il n'était pas tout seul,
04:23qui essayait justement
04:24de réparer en partie cet aspect-là.
04:27Donc, il y a une partie législative...
04:29Et qui a été retoquée par le Conseil constitutionnel ?
04:31Oui, alors pas tout à fait là-dessus,
04:32mais pas surtout.
04:34Donc, il y a une partie législative
04:35qui est problématique,
04:36et après, il y a une partie application de la loi
04:38qui est celle des acteurs
04:39qui ont aussi une appréciation différenciée
04:42selon les cas.
04:44Donc, la réponse,
04:46c'est que ce phénomène devient
04:49de plus en plus grave et important.
04:51Je l'ai dit tout à l'heure,
04:51mais je me permets de le redire sur votre antenne.
04:53En 2024, moi-même, j'étais très effarée
04:56par ce chiffre.
04:57Vous avez 54 morts, décédés,
05:00des forces de l'ordre poli-gendarmerie
05:02en 2024 dans le cadre de leur mission.
05:05Je ne parle pas de forces de l'ordre
05:07qui se suicident,
05:08parce que là aussi,
05:08on a des chiffres absolument dingues.
05:11Décédés, je ne parle pas blessés,
05:1254 quand même, 54 en 2024.
05:16Donc, comment répondre à ça ?
05:19Sur la phase de la procédure,
05:21il faut rectifier certains aspects,
05:23élargir les possibilités de mettre en détention,
05:25arrêter de nous mettre une pression
05:26en disant que la détention,
05:28c'est mal, c'est pas bien, etc.
05:29Construire des places de prison,
05:31changer la culture et changer la procédure.
05:33Sur la sanction,
05:35qui est la deuxième phase
05:36que souvent on confond,
05:37notre syndicat est favorable
05:39et le soutien depuis plusieurs années
05:42et d'ailleurs, avec, je crois,
05:43les forces de l'ordre
05:44qui eux aussi sont favorables,
05:46a instauré ce qui existait déjà,
05:49c'est-à-dire des peines minimales,
05:51ce qui ne sont pas des peines planchées.
05:52Les peines minimales, c'est quoi ?
05:54Si j'ai une seconde, parce qu'on confond tout.
05:55Eliane Maman voulait vous poser une question aussi,
05:57mais allez-y, je vous en prie.
05:59Sur les courtes peines, d'ailleurs, je crois bien.
06:00Oui, alors c'est encore autre chose.
06:03Mais sur les peines minimales, c'est quoi ?
06:04C'est ce qui existait dans le code pénal
06:06avant 1994.
06:08C'est-à-dire que vous aviez,
06:10pour chaque délit ou chaque crime,
06:12une peine maximale prévue
06:14et une peine minimale, j'allais dire,
06:16un socle minimum
06:17sur lequel on ne pouvait pas descendre.
06:19Robert Vaninter arrive,
06:20fait le nouveau code pénal,
06:21il garde les maximums,
06:23qui d'ailleurs continuent à augmenter,
06:25et suppriment les minimums.
06:27La question, elle est des deux côtés.
06:30On nous reproche à la fois
06:31de jamais mettre les maximums,
06:33on n'en parle pas,
06:35mais c'est un enjeu,
06:35pourquoi on ne monte jamais finalement,
06:38alors qu'on n'arrête pas
06:39d'aggraver les peines,
06:40et de descendre trop bas.
06:42Donc, de ne pas monter assez haut
06:43et de descendre trop bas.
06:44Donc, le projet de loi
06:45que nous, on soutient,
06:46c'est de dire
06:47rétablissement des minimums,
06:49comme ça a existé.
06:50Ce que fait Gérald Darmanin, donc ?
06:51Exactement,
06:52repris par la loi Sûr
06:53de Gérald Darmanin,
06:54et rétablissons déjà des minimums,
06:57pour que sur certaines infractions,
06:58on peut le faire
06:59sur toutes les infractions,
07:00on s'assure que,
07:02quand c'est grave,
07:03et c'est pour les forces de l'ordre,
07:04on ne descende pas en deçà.
07:05Pardonnez-moi,
07:06parce que du coup,
07:06je vous coupe l'air
07:07sous le pied, Elliot,
07:08mais juste une petite question,
07:10sur ces peines planchées,
07:11elles ont déjà existé ?
07:12Ce n'est pas planchées.
07:12Ah oui, ce n'est pas la même chose.
07:14Ça n'a rien à voir.
07:15Les peines planchées,
07:15ce sont des peines
07:16pour les récidivistes,
07:18qui étaient en fait
07:19des minimums
07:20quand vous étiez récidiviste.
07:22Là, on n'est pas sur les récidivistes.
07:23Ok, non mais très bien,
07:23parce que j'allais vous dire,
07:24elles existaient sous Nicolas Sarkozy
07:27et n'étaient pas toujours appliquées.
07:28C'est pour ça que je vous ai dit,
07:29c'était avant ma 20h
07:30et ça a été comme ça
07:32sur toutes les infractions.
07:32J'allais réviser ma procédure pénale.
07:34Pourtant, j'en ai fait en droit.
07:35Non, mais c'était cool.
07:36Ce n'est pas normal.
07:37Elliot m'ammanouillait.
07:37Non, simplement,
07:38un contre-argument
07:39régulièrement opposé
07:40aux peines minimales
07:40et de dire que cela violerait
07:41le principe de l'individualisation
07:43de la peine.
07:43Non, pas du tout.
07:44Comment expliquez-vous...
07:45C'est un contre-argument
07:45régulièrement entendu,
07:46donc souvent,
07:47je voulais vous entendre.
07:48Oui, je vous ai expliqué.
07:49Oui, non mais c'est le propos
07:50de ma question.
07:52Comment expliquez-vous
07:53cette asymétrie
07:53entre un certain nombre
07:55d'acteurs politiques
07:56qui estiment que
07:57la peine maximale
07:58ne viole pas
07:59le principe de l'individualisation
08:00tandis que la peine maximale,
08:01elle,
08:02contreviendrait
08:03à la souveraineté du magistrat ?
08:05Comment interprétez-vous
08:06cette asymétrie ?
08:07Alors, d'abord,
08:07il n'y a pas d'asymétrie
08:08parce que c'est faux.
08:09Excusez-moi,
08:10ce n'est pas vous
08:10qui dites une erreur.
08:11Non, mais c'est bien.
08:12C'est pour ça qu'on vous invite.
08:13C'est difficile.
08:15C'est assez technique.
08:17La liberté du magistrat,
08:18c'est d'éviter
08:19la peine automatique.
08:20C'est-à-dire,
08:20le magistrat,
08:21vous faites un délit
08:22et moi,
08:23je n'ai pas le choix,
08:23je vais vous mettre 3 ans
08:24parce qu'on m'a dit
08:24que c'est 3 ans
08:25que ce soit grave,
08:26pas grave,
08:27c'est 3 ans.
08:27Voilà,
08:28vous avez volé une pomme
08:28ou vous avez volé,
08:30je ne sais pas,
08:31la place Vendôme,
08:31c'est 3 ans.
08:32Ça, c'est une peine automatique
08:33sans discernement.
08:35Le minimum et le maximum
08:36vous laissent dans cet écart,
08:38on va dire,
08:39entre 0 et 10 ans,
08:40l'individualisation,
08:41le juge peut individualiser
08:42entre 0 et 10.
08:44On a déjà des minimums,
08:45en vrai,
08:45mais ils sont à 0.
08:50Donc, ce n'est pas du tout
08:51un problème constitutionnel
08:54ni d'individualisation.
08:55D'ailleurs, ça existait,
08:56c'était comme ça avant
08:57et d'ailleurs,
08:57ça existe dans notre code pénal,
08:59comme ça,
08:59vous aurez le contrairement,
09:01sur les crimes contre l'humanité,
09:02nous avons des minimums.
09:04Jean-Michel, ça va être...
09:05Oui, mais j'ai lu quelque part,
09:06quand même,
09:06et là,
09:07je viens un petit peu
09:09vous poser une question
09:10qui prolonge celle d'Eliott,
09:13c'est que j'ai lu quelque part
09:14que le Conseil constitutionnel,
09:16depuis 2005,
09:18finalement,
09:19considère que les peines minimales
09:22ne sont pas constitutionnelles
09:23parce que, précisément,
09:25elles sont contraires
09:26à ce principe
09:27de l'individualisation des peines.
09:29Non, parce qu'en fait,
09:30on va rentrer dans la technique,
09:34puisque, en fait,
09:35vous avez raison de le poser,
09:37si, dans l'écriture de la loi,
09:40vous avez des minimums,
09:41ce qui est déjà le cas,
09:41puisque vous avez toujours
09:42un minimum dans l'écriture de la loi,
09:45vous donnez la possibilité
09:46au magistrat
09:47d'y déroger
09:49avec des circonstances atténuantes
09:50qu'il doit motiver,
09:52vous n'avez pas
09:52de problème de constitutionnalité.
09:54Donc,
09:54tout est une question d'écriture.
09:56Mais sur le principe même
09:57d'avoir un minimum
09:58et un maximum,
09:59tant que le magistrat
10:00a la possibilité
10:01d'individualiser
10:01entre le minimum
10:03et le maximum,
10:04en fait,
10:04ce qui est vraiment
10:05anticonstitutionnel,
10:06c'est les peines automatiques.
10:08C'est ça qui est anticonstitutionnel.
10:09Je ne sais pas
10:10si j'ai répondu à votre question.
10:11Merci beaucoup,
10:12Béatrice Brugère.
10:14Après,
10:14le Conseil constitutionnel
10:15peut changer d'avis.
10:17C'est peut-être probable.
10:19On s'y est heurté
10:20plusieurs fois,
10:21effectivement,
10:22et on en parle souvent
10:22de ce Conseil constitutionnel.
10:24Merci, Béatrice Brugère,
10:25d'être passée
10:26par le studio d'Europe 1.
10:27Restez avec nous,
10:28on se retrouve dans quelques instants
10:30pour la suite
10:30de nos débats
10:32avec Elliot Mamane
10:32et Jean-Michel Salvatore.
10:34Sous-titrage Société Radio-Canada
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