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  • il y a 5 mois
Des violences urbaines sur fond de trafic de drogues touchent des villes comme Béziers, Limoges et Nîmes. Il y a des affrontements entre les forces de l'ordre et des jeunes. Certains maires sont dans l'obligation d'imposer le couvre-feu pour les mineurs et de faire venir, via les préfets, les CRS. À Béziers, notamment, 80 agents du CRS ont été déployés sur place. Et le préfet a d'ailleurs dit que cette compagnie restera autant qu'il le faudra. On en parle avec : Pierre-Olivier Dentant, envoyé spécial BFMTV à Nîmes (Gard). Émile Roger Lombertie, maire "Les Républicains" de Limoges. Patrick Vignal, acien député Renaissance de l'Hérault. Bruno Bartocetti, secrétaire national chargé de la zone Sud syndicat UN1TÉ. Paul Conge, journaliste police-justice BFMTV.

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Transcription
00:00On va revenir sur ces violences urbaines qui touchent non pas des très grandes villes, on parle de Béziers, de Limoges, de Nîmes,
00:07avec sur fond de trafic de drogue, des affrontements entre les forces de l'ordre et des jeunes,
00:13et l'obligation pour certains maires d'imposer le couvre-feu pour les mineurs, et de faire venir via les préfets les CRS, notamment à Béziers.
00:22La CRS 80 a été déployée sur place, et le préfet a d'ailleurs dit tout à l'heure que cette compagnie restera autant qu'il le faudra.
00:30Écoutez ce qu'en disait tout à l'heure mon invité, le maire de Béziers, Robert Ménard.
00:34On a saisi un certain nombre de quantités de drogue, et des quantités de drogue importantes, et c'est la réponse de ce milieu-là.
00:42Il nous explique, si vous voulez avoir des problèmes, vous n'avez qu'à continuer comme ça.
00:46Le problème c'est qu'il tombe en l'occurrence sur nous, et nous on va continuer à les emmerder, on va continuer à arrêter ceux qui doivent être arrêtés,
00:53et on va continuer à saisir la drogue qui doit être saisieuse, parce qu'il est hors de question de baisser les bras.
01:01Alors voilà ce que dit Robert Ménard, couvre-feu à Béziers, couvre-feu également à Nîmes.
01:06Nous retrouvons sur place pour BFM TV Pierre-Olivier Dantan.
01:09Bonsoir Pierre-Olivier, un couvre-feu qui entre en vigueur à Nîmes pour les mineurs.
01:17Oui exactement Olivier, ce couvre-feu entre en vigueur ce soir, vous l'avez dit.
01:21Entre 21h et 6h du matin, tout mineur non accompagné, âgé de moins de 16 ans, est donc interdit de sortir.
01:28Il y a plusieurs quartiers sensibles de la ville de Nîmes qui sont concernés.
01:31Évidemment le quartier de Pisevain où nous étions cet après-midi avec Corentin Guistot,
01:35mais aussi le quartier de Val-de-Gour, le quartier de Masse-de-Mingue.
01:39Cette décision de la mairie, elle intervient après la succession de plusieurs fusillades dans la ville.
01:44On a compté plus de 8 fusillades sur les 15 derniers jours.
01:47La dernière en date, c'était jeudi dernier.
01:49Dans le quartier de Pisevain, des tirs ont été entendus, ils n'ont pas fait de blessés.
01:53Mais le parquet a relevé plusieurs impacts de balles sur la façade d'un immeuble.
01:57Les habitants sont donc pour la plupart soulagés de la mise en place de ce couvre-feu.
02:01Écoutez-les, ils sont au micro de Corentin Guistot.
02:03Franchement, ça me rassure.
02:06C'est vraiment quelque chose de bien.
02:09Et normalement, ça devrait être depuis longtemps ça.
02:12Il n'y a pas de raison que les enfants à moins de 16 ans sont dans la rue à n'importe quelle heure.
02:17Honnêtement, je comprends la mesure.
02:19Je comprends.
02:20Maintenant, est-ce qu'elle sera vraiment utile ? Je ne sais pas.
02:22Nous, ce qu'on attend en tant qu'habitants, c'est plus une réaction au niveau des forces de l'ordre,
02:27plus qu'un couvre-feu.
02:28Maintenant, ça fait sens et je pense quand même que c'est nécessaire que des jeunes aient l'interdiction justement de sortir,
02:34alors même qu'il y a des tensions partout dans le quartier.
02:38La préfecture, de son côté, parle d'une décision justifiée.
02:42Nous faisons face à des criminels, à des trafiquants qui ont perdu toute notion de la valeur.
02:47Alors, fin de citation, voilà ce que disait sur notre plateau samedi dernier le préfet du Gard, Jérôme Bonnet.
02:52Ce couvre-feu sera donc mis en place, je le disais, ce soir à partir de 21h et ce pour 15 jours
02:57et renouvelable si nécessaire, indique la mairie.
02:59Merci Pierre-Olivier Dantan avec Corentin Guistot.
03:03Dans un instant, on va retourner à Nîmes.
03:04On sera avec un policier pour voir comment on peut faire appliquer un couvre-feu
03:07et quels moyens doit-on déployer.
03:10Justement, on va en parler aussi avec le maire de Limoges,
03:12parce que là aussi, il y a un couvre-feu, c'est Émile Roger Lomberti qui est avec nous,
03:16maire Les Républicains de Limoges.
03:18Bonsoir monsieur le maire.
03:19Vous-même, vous dites, le couvre-feu a ses limites.
03:23Si on n'a pas la police pour le faire respecter, c'est inutile.
03:27Tout à fait, tout à fait.
03:28Nous avions décrété un couvre-feu et dans le quartier où le couvre-feu devait s'appliquer,
03:35plus de 100 jeunes ont affronté une trentaine de policiers
03:39et comme ils étaient plus nombreux, il n'y a pas eu d'interpellation
03:42et on ne sait pas quel était l'âge de ceux qui intervenaient.
03:45Mais là, le couvre-feu n'a servi à rien.
03:48En quelque sorte, les jeunes ont gagné sur les policiers, c'est ce que vous nous racontez.
03:52Oui, mais on ne peut pas le dire comme ça,
03:54parce que quand on est dans ce tel niveau d'organisation et de violence,
03:58de destruction et d'agressivité pour casser de la population et du policier,
04:05c'est extrêmement dangereux.
04:08Donc, ils étaient plus nombreux.
04:10Eh bien, ils ont gardé leur territoire et ils ont montré qu'ils pouvaient le tenir face aux policiers
04:16avec le trafic de drogue sous-jacent et la puissance sous-jacente de leur dire
04:22« Vous voyez, vous, ceux qui passez à côté de ce quartier,
04:27on peut vous arrêter, vous interdire de passer quand on veut.
04:29Vous, les policiers, vous venez nous faire des descentes pour arrêter les trafiquants,
04:35pour faire des saisies de drogue.
04:37Eh bien, nous, on peut vous tenir tête et vous n'y pouvez rien. »
04:41Donc, en fait, c'est extrêmement inquiétant.
04:43C'est une question de rapport de force.
04:45La CRS 82 a été déployée dans votre ville ?
04:48« Oui, la CRS 82 a été déployée, elle devait repartir ce soir.
04:52Ce soir, je pense que nous aurons encore des CRS présents.
04:56Mais je suis très inquiet, moi, pour le moment où les CRS partiront. »
05:02Pourquoi ils partiraient ? Pourquoi ils ne restent pas plus longtemps ?
05:06Parce que, vous savez, les compagnies de CRS sont mobilisées pour remettre de l'ordre, éteindre le feu.
05:12Donc, comme il y a le feu dans beaucoup d'endroits en France,
05:15les compagnies de CRS font la tournée des villes de France
05:18où éclatent les phénomènes les uns après les autres.
05:22Donc, nous sommes limités en termes de quantité de police disponible.
05:27Et je crois qu'un des gros problèmes que nous aurons, nous, à connaître,
05:31et je suis tout à fait d'accord avec Robert Ménard,
05:34un, il ne faut rien lâcher, mais deux, nous ne pourrons rien
05:36si nous n'avons pas des policiers à temps permanent,
05:40des policiers nationaux que nous pouvons faire tourner dans les cités,
05:47présents au quotidien, tous les jours, et avec nos policiers municipaux.
05:51Mais tant que nous n'aurons pas plus de policiers nationaux,
05:54eh bien nous serons en grande fragilité.
05:55– Ça, il faut le dire à Bruno Rotaillot, le ministre de l'Intérieur,
05:59ça tombe bien, c'est le président de votre parti.
06:02– D'abord, je ne suis plus à l'air, et quant à Bruno Rotaillot,
06:06je le lui ai dit à deux reprises, je le lui ai encore dit samedi matin,
06:11où nous avons eu des échanges qui ont été tout à fait constructifs, fructueux.
06:16Mais vous savez, on a une autre problématique que tout le monde oublie
06:21dans le Yaka Faucon, c'est qu'aujourd'hui, nous manquons de policiers formés
06:26et nous manquons de policiers municipaux formés.
06:29Ce qui fait que tous les postes de policiers ne sont pas pourvus par des agents,
06:35ce qui crée encore un problème de fragilité supplémentaire pour nos interventions de police.
06:41– Restez avec nous, monsieur le maire, encore quelques minutes,
06:44sur le plateau ici à BFM TV, il y a Patrick Vignal, l'ancien député Renaissance de Lérault.
06:49On parle de Béziers, beaucoup en ce moment.
06:51Le maire de Béziers était très en colère tout à l'heure, Robert Ménard,
06:54parce qu'il dit qu'on a un vrai souci de maintien de l'ordre
06:59et puis surtout de justice qui ne suit pas derrière.
07:02Que fait-on notamment de ces mineurs et de leurs parents ?
07:05– Écoutez, moi d'abord, je voudrais saluer le travail que fait le maire de Limoges
07:08en matière de médiation sociale, puisque j'avais une loi sur la médiation, monsieur le maire,
07:13mais je vous avais écrit, plus sérieusement, pour moi, ce qui se passe, Olivier,
07:17on a des quartiers qui sont des ghettos, on a des endroits…
07:20– Mais si on le sait, pardon.
07:21– Mais oui, mais attendez, attendez, c'est un des ghettos.
07:23– C'est la longueur de plateau qu'on dit ça, et l'en fait quoi, maintenant ?
07:27– Mais Olivier, c'est l'urbanisation qui pourrit les choses,
07:29avec deux thématiques, de l'entrisme communautariste,
07:33et maintenant, c'est dur ce que je vais vous dire,
07:36on a des enfants soldats du Kaïda.
07:39Moi, j'étais au quartier Pissevin il y a un an, avec des médiateurs.
07:43– À Nîmes.
07:43– À Nîmes, ou à Béziers, ou à Sète même, ou à Montpellier, où il y a aussi ça.
07:47– Des enfants soldats.
07:48– Vous savez ce que c'est des gamins de 14 ans qui vous disent
07:51« Mon rêve, c'est un, marier avec une influenceuse, vivre à Dubaï,
07:55deux, je sais que je finirai en prison, une balle dans la tête ».
07:58Vous savez ce que c'est quand une mère vous écrit, vous dit
08:01« M. Vignal, mettez mon gamin en prison, il a 14 ans, je ne peux pas en occuper ».
08:06Vous savez ce que c'est quand les gens vous écrivent en disant
08:08« Est-ce qu'on pourra avoir des petits blancs à l'école ? »
08:11On en est là, Olivier Truchot, 30 ans de l'acheter.
08:14Alors qu'est-ce qu'on fait ?
08:15– Qu'est-ce qu'on fait ? Parce que ça, on le dit, on le répète,
08:18on le répète, mais on fait quoi ?
08:20– Mais je vous aime, les éditorialistes, mais je vous fais quoi ?
08:22– Moi je viens de raccrocher le téléphone avec Jérôme Bonnet,
08:27préfet du Gard, et François-Javier Loche, préfet de l'Hérault.
08:32Ils font un boulot remarquable.
08:33– Oui, ils font venir notamment les compagnies de CRS.
08:34– Mais vous voulez que je vous dise, on ne donne pas assez la place au maire, au préfet.
08:39En fait, on n'a rien décentralisé.
08:41Je prends le cas de François-Javier Loche.
08:43Quand un consommateur, parce qu'il faut s'attaquer au consommateur,
08:46vient en voiture et qu'il est attrapé positif,
08:50on y enlève le permis six mois.
08:52Il faut taper au portefeuille des consommateurs.
08:55– Est-ce que la justice suit ?
08:57– Mais la justice, elle est complètement encombrée,
08:59même si Darmanet et Dubombe…
09:00– Pas seulement, il y a des policiers qui disent que derrière, ça ne suit pas.
09:02– Olivier, je vous invite une semaine, venez voir les centres de rétention,
09:07venez voir les prisons Villeneuve-les-Magolones,
09:09180% de surpopulation.
09:12Moi j'avais un projet que j'avais mis en place,
09:14je ne sais pas ce qu'en pense le maire de Limoges.
09:17Aujourd'hui, il faut accompagner le tissu associatif.
09:20Vous avez des gamins de 15 ans qui gagnent 4 000 euros par mois,
09:24c'est foutu ceux-là.
09:26Par contre, on a une génération.
09:27Les 6-12 ans aujourd'hui…
09:29– 6-12 ans ?
09:30– Mais oui Olivier, mais oui !
09:32– Ceux qui ont 14-15 ans, ils sont foutus,
09:34et donc il faut protéger les 6-12 ans maintenant ?
09:35– Vous savez, ceux qui ont 14-15 ans et qui ont 4 000 euros d'argent,
09:39qui sont menacés, mais vous savez comment ça marche ?
09:42Le petit, il chouffe, il doit ramener 3 000 euros à celui qui collecte l'argent.
09:47On va menacer sa famille !
09:49Moi j'ai une personne dans le quartier Pissevin,
09:51qui habite au dernier étage, qui m'a appelé un jour,
09:53je me suis déplacé en me disant, voilà, j'ai une terrasse.
09:56Quand les policiers débarquent, les dealers, ils forcent ma terrasse.
10:00Je n'ai pas voulu ouvrir la première fois, ils m'ont brûlé la voiture.
10:03La deuxième fois, il m'a dit, on va violer ta fille de 12 ans.
10:05On en est là, Olivier, ce n'est pas la guerre, c'est une vraie guérilla.
10:10Et là maintenant, il faut que ce soit une cause nationale.
10:12– Alors Bruno Bartoschetti est avec nous,
10:14c'est un policier qui est à Nîmes, un secrétaire national chargé de la zone sud,
10:18syndicat, unité.
10:19Bonsoir, vous avez entendu les propos du député,
10:23c'est la guérilla, il faut s'en donner les moyens.
10:25On parle d'enfants-soldats, alors on a déployé les compagnies de CRS,
10:29mais on voit bien que c'est une solution qui n'est pas une solution à long terme.
10:32– Oui, bonsoir, je viens effectivement d'écouter M. Patrick Vignal
10:39et j'adhère tout à fait à ce qu'il vient de dire
10:41et il fait partie de ceux qui se sont battus et qui se battent
10:44pour justement qu'on s'améliore un petit peu dans notre pays
10:47sur ce fond de stupéfiants.
10:49Mais très sincèrement, de vous à moi, ce n'est pas d'aujourd'hui.
10:53On a l'impression de découvrir le problème, ça fait 20 ans qu'on en parle,
10:56ça fait 20 ans qu'on tire le signal d'alarme.
10:58Et aujourd'hui, on vient de nous sortir un arrêté municipal de couvre-feu,
11:02on fait venir des CRS très compétents en violences urbaines,
11:05mais qui vont rester quelques jours.
11:07Et le problème, on va le retrouver.
11:08Et vous êtes, mais très sincèrement, pour les policiers,
11:11vous êtes les seuls, vous, médias, BFM entre autres et d'autres chaînes,
11:15à nous permettre d'exprimer notre colère.
11:19Parce que là, je suis très très en colère.
11:20– Contre quoi ? Contre qui ?
11:21– Les policiers sur le terrain le sont aussi.
11:22Ils se sentent abandonnés, lâchés.
11:25– Par qui ?
11:26– Alors, tout simplement contre l'État, de manière générale.
11:29Mais depuis 40 ans.
11:31Voilà, si vous voulez, je vous cite.
11:32– Les préfets sont là.
11:33– Pardon, pardon, mais les préfets interviennent.
11:36– Mais les préfets interviennent, ils sont sur ordre.
11:42Vous savez, moi, je vais vous dire une chose.
11:44La réalité, ce n'est pas l'intelligence artificielle.
11:47Ce n'est pas de faire des annonces de renforts d'effectifs.
11:50Depuis 20 ans, on a le même nombre d'effectifs aujourd'hui en France.
11:53Et la délinquance a changé.
11:55Et aujourd'hui, on nous demande à nous, policiers,
11:58d'intervenir sur tous les maux de la société.
12:00Nous ne sommes pas des médecins.
12:01On a une société qui est malade.
12:03On nous demande d'être éducateurs, d'être dans la prévention,
12:07d'être dans l'approche.
12:08Nous, ce qui compte, c'est d'avoir un sens dans notre métier.
12:11Lorsqu'on interpelle, lorsqu'on intervient,
12:13s'il n'y a pas de suivi derrière éducatif,
12:15ou dans la sanction,
12:19on n'a aucun intérêt de faire cette profession.
12:21Vous avez des policiers courageux aujourd'hui
12:22qui travaillent avec parfois la peur au ventre,
12:25mais avec beaucoup de courage et beaucoup de détermination.
12:29Et ils sont en danger.
12:30Moi, je suis représentant du personnel.
12:31Je ne fais pas de politique.
12:32Je peux vous dire qu'aujourd'hui, mes collègues policiers,
12:34vous en avez quand même 14 000 par an
12:36qui sont blessés en service.
12:37Ils en ont marre.
12:38Tous les discours politiques, aujourd'hui,
12:41ils n'en peuvent plus.
12:42On sait qu'on est pris dans un étau politique,
12:44qu'on est instrumentalisés.
12:45Et alors, en 2026-2027, je ne vous dis pas
12:48jusqu'où ça va aller.
12:49Toutes les promesses vont être bonnes à entendre,
12:51mais ça fait 40 ans qu'on entend des promesses,
12:53et ça fait 40 ans qu'on souffre,
12:54et la population souffre.
12:56La question restait avec nous.
12:57La question, ça va,
12:58est-ce que le couvre-feu est vraiment efficace,
12:59notamment pour endiguer le trafic de drogue ?
13:03Et ça, c'est une vraie question.
13:04C'est la question qui est posée en creux,
13:06finalement, par toutes ces mesures de couvre-feu.
13:09On voit bien que le but d'un couvre-feu
13:12n'est pas de résorber le trafic,
13:13n'est pas vraiment de lutter contre le narcotrafic.
13:15C'est plutôt une mesure, j'allais dire cosmétique.
13:18Le terme est un peu fort,
13:18mais en tout cas, c'est une solution extrêmement provisoire
13:20qui permet effectivement de rassurer les habitants
13:22et puis d'empêcher que pendant un certain laps de temps,
13:24les mineurs ne se retrouvent pas dehors,
13:26éventuellement ne prennent pas des balles perdues.
13:28De fait, c'est quelque chose d'extrêmement drastique,
13:31mais très sincèrement,
13:33on voit là, notamment avec l'intervention de M. Bartocelli,
13:35que les acteurs locaux,
13:37les personnes spécialisées sur ces questions-là
13:39sont extrêmement sceptiques face à ces mesures-là.
13:41Elles savent très bien que pour démanteler
13:42un réseau criminel de narcotrafiquants,
13:45ça ne passe pas par des couvre-feu,
13:46ça ne passe pas par des arrêtés préfectoraux municipaux,
13:48ça passe par des moyens de police judiciaire,
13:50ça passe par des moyens d'enquête,
13:51la lutte contre le blanchiment,
13:52la lutte contre le trafic.
13:53Donc, ce sont ces questions-là
13:55qu'il faut peut-être plutôt poser
13:56et ce qui permet effectivement ce débat sur le couvre-feu,
13:58permet d'amener ces questions-là éventuellement.
14:00Mais il faut aussi s'interroger
14:01qui est dehors,
14:03qui s'attaque aux policiers,
14:05qui tient ces points de deal.
14:06Et je me retourne vers le maire de Limoges.
14:08On avait coutume de dire
14:09que ce qui se passait dans ces quartiers,
14:10c'était plutôt en région parisienne,
14:12à Marseille, à Lyon,
14:13dans les grandes villes.
14:14Et puis maintenant, on parle de Limoges,
14:15qui n'avait a priori pas cette image
14:17d'une ville avec certains quartiers aussi difficiles.
14:21Comment l'expliquer ?
14:22Oh, vous savez, j'étais psychiatre
14:26et j'avais des amis à Nîmes,
14:28à Montpellier, à Marseille.
14:30Quand j'en discutais avec eux
14:31de comment, il y a 25 ans,
14:33voire 30 ans,
14:34tournaient les quartiers,
14:36ils me disaient
14:36« Mais tu me parles des quartiers Nord. »
14:38Eh bien, aujourd'hui, nous y sommes partout.
14:41Et pendant ce temps-là,
14:42les quartiers Nord se sont aggravés.
14:44Donc, ce n'est pas nouveau, effectivement.
14:46La deuxième chose,
14:47c'est qu'on a eu une double explosion.
14:51On a eu une explosion du tissu des collectivités
14:55avec une implosion des compétences.
14:59Tout ce qui fonctionnait autrefois,
15:00il y a 30 ou 40 ans,
15:02en matière de prévention,
15:03en matière d'accompagnement,
15:05en matière de contact social,
15:07a tout disparu.
15:08Disparu.
15:09Donc, ça, déjà, c'est dramatique.
15:12L'autre chose, c'est qu'effectivement,
15:13je suis d'accord avec le commissaire,
15:15la police, elle est faite pour sanctionner
15:18et pour dissuader.
15:21Et quand elle sanctionne et qu'elle dissuade
15:23et que la justice joue le jeu de la sanction immédiate,
15:26ça, c'est encore un autre problème aujourd'hui,
15:29vous pouvez faire de la prévention.
15:31Mais aujourd'hui, on a supprimé
15:33tout ce qui faisait de la prévention.
15:35On n'a pas des forces de police suffisantes.
15:37Un de mes quartiers prioritaires de la ville,
15:39il y avait un commissariat il y a 20 ans,
15:43on a enlevé ce commissariat.
15:44Aujourd'hui, je l'ai redemandé à Bruno Retailleau,
15:47qui m'a dit, on va l'étudier.
15:49Mais le problème, c'est que pour le recréer,
15:51il faut qu'on ait les personnels suffisants
15:53et nécessaires pour les affecter.
15:55On ne les a pas.
15:57– Apolle poste trop tard.
15:58– Oui, donc ça veut dire qu'on a laissé
16:00ces quartiers être gangrénés.
16:02Néanmoins, quand même, tout à l'heure,
16:03Robert Ménard nous expliquait que s'il y avait
16:05des violences aussi, c'était en représailles
16:08au travail des policiers qui essaient
16:09de démenter des points d'île.
16:11En gros, c'est une guerre de territoire.
16:13Donc ça veut dire quand même qu'on agit,
16:14qu'il n'y a pas de passivité.
16:16– Mais attendez, sur Nîmes,
16:18le préfet me disait sur Montpellier,
16:19on a baissé deux fois la délinquance.
16:21Mais ce que disait le maire de Limoges,
16:23moi je pense que la police de proximité
16:25que j'ai connue, dans certains territoires,
16:27elle ne pourrait plus fonctionner.
16:29Le vrai débat dans ces quartiers, si vous voulez,
16:31que j'appelle l'entre-soi,
16:33il y a un triptyque.
16:34Éducation, prévention, répression.
16:36Vous savez, quand je suis monté à Paris,
16:37j'ai pris le train, Olivier.
16:39– Oui, c'est vrai.
16:40– Non, mais vous avez compris.
16:40– C'est pas exceptionnel, ça.
16:41– Non, parce que j'ai vu un éducateur
16:43que j'avais audité pour Maloua
16:45avec un petit jeune de 14 ans.
16:47Parce que c'est le cas typique de ces jeunes.
16:49Il a 14 ans, c'est un chauffeur.
16:51Pendant deux mois, on va le mettre
16:52dans un centre à Paris.
16:54Le père et la mère sont des toxicaux.
16:56Ce gamin, il n'a aucune règle de société.
16:59C'est pour ça que certains disent
17:01on va réinventer le service militaire.
17:03Moi, je l'ai fait, le service militaire.
17:04Peut-être que vous aussi.
17:05– Mais pas à 14 ans.
17:05– Mais c'est pas ça, mais c'est qu'on n'a plus les structures.
17:08Par contre, remettons du tissu associatif.
17:10– Mais on en fait quoi de ces gamins de 14 ans ?
17:11– Eh bien, celui-là, on le met pendant une année
17:13dans un camp, tissu associatif,
17:15ce que j'ai fait moi avec des gamins.
17:16– Mais ça n'existe pas, ça.
17:17– Mais on va l'inventer.
17:18On n'a plus des casernes.
17:19Ou celles qui restent,
17:20on mettra des éducateurs sportifs le matin.
17:23À 5 heures du matin, il va arrêter
17:24d'être sur son téléphone.
17:26Il va faire du footing, de la boxe.
17:27Il va faire ce que c'est que la violence.
17:29– Et il oubliera les trafics de drogue ?
17:31– Mais il faut l'éloigner du territoire.
17:33– Il y a beaucoup d'argent à 14 ans.
17:34– Vous savez, moi j'écoute Bruno Rotaillot,
17:36j'écoute tous ces gens.
17:38C'est un combat permanent qui est dur d'être gagné.
17:41Il y a tellement d'argent.
17:43Ils sont devenus entrepreneurs.
17:44Un point de deal, c'est 30 000 euros.
17:47D'accord ?
17:47Aujourd'hui, sur Montpellier,
17:49j'en vois, il y en a, ils ont 3 points de deal.
17:51Vous imaginez, tous les soirs,
17:52vous avez 90 000 euros de liquide.
17:54Et maintenant, ils sont des vrais entrepreneurs.
17:56Sur WhatsApp, maintenant, ils vous livrent à la maison.
17:59Alors, le consommateur, ça suffit.
18:01Le préfet du Gard et de l'Hérault,
18:03quand il chope quelqu'un positif qui vient,
18:05ça prévient ses 6 mois de permis.
18:07Allons plus loin, touchons au portefeuille.
18:09– Une dernière question à notre ami policier
18:12qui est avec nous, Bruno Bartocetti.
18:14Est-ce que la justice suit ?
18:15Est-ce qu'elle est assez rapide ?
18:16Parce qu'on sait qu'elle est engorgée.
18:18Elle manque aussi, elle, de moyens.
18:20Mais lorsque vous attrapez un jeune
18:22qui commet des actes de délinquance,
18:24est-ce qu'il y a une réponse judiciaire immédiate ?
18:27– Oui, une partie de la réponse est dans votre question.
18:32Elle ne peut pas suivre parce qu'elle manque de moyens.
18:35Alors, je mets de côté ceux qui sont dans l'idéalisme
18:38et qui pensent que tout peut se régler sur la planète Bisounours.
18:41Mais vous avez de nombreux parquetiers,
18:43de nombreux procureurs ou juges qui ont envie de sanctionner.
18:47Et la sanction ne doit pas être un sujet tabou.
18:48Ça doit être un sujet aussi dissuasif.
18:51Évidemment que si on pouvait très rapidement sanctionner un jeune,
18:56mais immédiatement, en l'écartant justement du territoire
19:00dans lequel il évolue, en le mettant dans un centre d'éducation fermé
19:03lorsqu'il y a un mineur,
19:04eh bien là, la justice aurait des résultats certainement plus probants.
19:08Aujourd'hui, les procédures sont engorgées,
19:10que ce soit dans les commissariats ou dans les parquets,
19:13par manque de greffiers, par manque de magistrats.
19:15Comment voulez-vous que ça avance ?
19:16Parce que, vous savez, lorsque vous parlez à un enquêteur
19:19qui est en contact régulièrement avec un procureur,
19:22ensemble, dans la plupart des cas,
19:24ils ont envie d'aboutir à des résultats probants.
19:27Et le boulot, il est fait, les procédures sont montées.
19:29Et après, ça ne répond pas, tout simplement par manque de moyens.
19:33Vous savez, c'est le nerf de la guerre.
19:34Ou on nous donne les moyens d'aller plus loin,
19:36ou on ne nous les donne pas.
19:37Et aujourd'hui, je vous invite à regarder ce qui se passe en Italie ou en Espagne.
19:41Je peux vous garantir que la délinquance,
19:43elle sera toujours présente.
19:44Les trafics de stupes seront toujours présents.
19:47Pourquoi, dans ces pays-là, on a réussi à affaiblir une certaine forme de délinquance ?
19:51Et pourquoi, nous, on n'y arrive pas et on se fait absorber ?
19:53La question est structurelle.
19:55Est-ce qu'aujourd'hui, un gouvernement, quel qu'il soit...
19:59D'accord.
19:59Entre autres, oui, mais pourquoi pas, bien sûr.
20:02Il faut s'inspirer des endroits où ça marche.
20:04Et en France, ça ne marche pas.
20:05Merci, merci d'avoir été avec nous.
20:08Merci au maire de Limoges, également à Patrick Vignal et à Paul Conge.
20:11Merci.
20:12Merci.
20:14Merci.
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