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Fondé en 1846 par un couple, Lefèvre-Utile (LU) fabriquait des biscuits haut de gamme pour la bourgeoisie nantaise. Un jour, le fils reprend l’entreprise avec une seule idée en tête : en faire un empire industriel national.

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Transcription
00:00Ce biscuit, vous l'avez sûrement déjà croqué.
00:03Mais à la fin de cette vidéo, vous ne le verrez plus jamais de la même manière.
00:08Derrière le véritable petit beurre, se cache l'histoire d'une marque, Lu.
00:13Ce logo rouge estampille aujourd'hui une multitude de biscuits,
00:16petits écoliers, napolitains, barquettes, pins ou princes.
00:21Des millions de personnes les dévorent chaque jour, en France et dans le monde.
00:25Toutes les études que nous avons faites depuis trois ans
00:28nous ont permis de constater que ce logo était le plus attractif sur le plan international.
00:33Mais avant de devenir un géant des biscuits, Lu, c'était avant tout une petite pâtisserie.
00:38Tout a commencé il y a près de deux siècles dans cet atelier à Nantes fondé par un couple.
00:44Voici l'histoire insoupçonnée de Lu et du biscuit qui a changé son destin.
00:53Les biscuits Lu, c'est avant tout l'histoire d'un couple,
00:55Jean-Romain Lefebvre et Pauline Isabelle Util.
00:59Ce sont les initiales de leur nom qui donneront naissance plus tard à Lu.
01:04Dans les années 1840, le couple quitte l'Est de la France dont il est originaire pour s'installer à Nantes.
01:10Jean-Romain Lefebvre a appris son métier de pâtissier plutôt au contact de sa famille et de ses frères.
01:15Jules-Olivier Fruneau-Mégret est historien d'art, collectionneur et auteur d'un livre sur lu.
01:21Pauline Isabelle Util était une fille de propriétaires terriens qui avait une certaine puissance,
01:25qui était un caractère fort, qui avait vraiment une âme d'entrepreneuse,
01:28qui a vraiment fait évoluer l'entreprise au niveau de toute la stratégie commerciale.
01:32A Nantes, le couple veut faire connaître les spécialités de sa région d'origine.
01:37Avec deux ou trois apprentis, ils confectionnent alors des macarons, des masse-pins et des biscuits de Reims.
01:44A l'époque, ce sont des gâteaux plutôt haut de gamme, appréciés par la bourgeoisie.
01:48L'histoire ne nous dit pas à l'époque si Jean-Romain Lefebvre et Pauline Isabelle Util
01:52possédaient une véritable pâtisserie ou un lieu de vente.
01:55Je pense qu'ils travaillaient déjà avec des maisons de vente, des commerces de comestibles,
02:01des épiceries fines qui diffusaient et commercialisaient leurs biscuits.
02:04Tout laisse supposer aussi qu'il pouvait y avoir des étalages de vente devant la fabrique
02:08qui était vraiment au cœur d'une rue commerçante de la ville de Nantes.
02:12La petite fabrique prospère et se retrouve avec environ 14 ouvriers en 1882.
02:17Mais l'année suivante, Jean-Romain décède.
02:20En 1883, le fils cadet du couple reprend l'activité, Louis Lefebvre Util.
02:28Le jeune homme de 24 ans n'a qu'une obsession, concurrencer les Anglais.
02:32Car outre Manche, les biscuits sont produits à la chaîne, de façon industrielle et exportés
02:37dans le reste de l'Europe.
02:39Louis Lefebvre Util veut donc transformer l'entreprise locale de ses parents en une marque nationale.
02:44A Nantes, il fait construire une usine à biscuits sur le site d'une ancienne filature.
02:49Elle est équipée de machines mécaniques dernier cri.
02:52Désormais, la production est industrialisée.
02:56Dans le même temps, de nouvelles variétés de biscuits sont sans cesse créées.
03:02Et parmi eux, il y en a un qui va changer le destin de l'entreprise.
03:07En 1886, Louis Lefebvre Util invente le petit beurre.
03:12Voici le croquis originel qu'il a dessiné à l'époque.
03:15La légende veut que ce soit une allégorie du temps.
03:17Le biscuit est doté de quatre angles pour les quatre saisons
03:21et de 52 petites dents pour les 52 semaines de l'année.
03:2624 points parsèment sa surface pour les 24 heures de la journée.
03:31Enfin, huit petits beurres empilés conservent les proportions d'un petit beurre debout.
03:36Si Louis Lefebvre Util s'est donné autant de mal, c'est là aussi pour surpasser les Anglais.
03:41Quand il a créé le petit beurre, il disait qu'il voulait créer un biscuit savoureux, équilibré,
03:46qui ne s'émiette pas et qui pardonne le pion aux biscuits anglais,
03:51qui étaient fades comme un bouillon de navet et tristes comme un coucher de soleil sur la tamise.
03:55Ça veut bien dire ce que ça veut dire.
03:57Mais en France, le succès du petit beurre dérange.
04:01Un concurrent intente un procès en contrefaçon.
04:04Le tribunal prononce un non-lieu.
04:06Mais désormais, pour affirmer qu'il s'agit véritablement de son biscuit,
04:10l'U le renomme véritable petit beurre.
04:14L'obsession des Anglais de Louis Lefebvre Util se poursuit avec la paille d'or en 1905.
04:19Et contrairement à aujourd'hui, au début, elle n'était ni à la fraise, ni à la framboise.
04:25Et lui se dit, je vais créer une gaufrette, une gaufrette avec une ganache,
04:29donc soit la gaufrette pralinée, soit la gaufrette vanille.
04:31Et pour ça, je vais carrément aller en espionnage en Angleterre.
04:35Et il va même jusqu'à embaucher un ingénieur de la marque Huntley Palmer,
04:39qui s'appelait M. Sturge, qui va venir à Nantes,
04:43après avoir été débauché de chez Huntley Palmer par Louis Lefebvre Util,
04:46et qui va venir à Nantes, étudier les premiers processus de fabrication d'une gaufrette.
04:53Louis Lefebvre Util enchaîne les succès,
04:55et l'U n'a plus rien à envier aux Anglais,
04:57ni à ses deux autres concurrents français,
04:59les biscuits olibés et la biscuiterie nantaise, BN aujourd'hui.
05:04Mais cette ascension, il ne la doit pas uniquement au goût de ses gâteaux.
05:11Les biscuits, autrefois vendus en vrac,
05:13sont désormais conditionnés dans des boîtes métalliques.
05:16Et pour taper dans l'œil des clients,
05:18elles sont recouvertes de lithographie.
05:21Le maître de l'art nouveau, Alphonse Mucha,
05:23dessine une réclame pour les gaufrettes.
05:25Et pour les petits beurres,
05:26l'illustrateur Firmin Bouisset
05:28imagine un écolier revêti d'une cape
05:30et portant une croix du mairie.
05:32C'est ce dessin qui inspirera à lui
05:35un autre biscuit des décennies plus tard,
05:38le petit écolier.
05:39En grand visionnaire marketing,
05:41Louis Lefebvre-Util avait une stratégie
05:43et dès le début, c'était de dire
05:44pour susciter la gourmandise,
05:47rien de tel que de séduire l'œil.
05:49L'imagination de Louis Lefebvre-Util est sans limite.
05:52Il fait même ériger un phare lu
05:54de 36 mètres de hauteur
05:56lors de l'exposition universelle en 1900.
06:00Lu est au top niveau,
06:01mais l'âge d'or va bientôt toucher à sa fin.
06:04Lors de la Première Guerre mondiale,
06:09les usines de l'U sont réquisitionnées
06:11pour produire du pain de guerre
06:12destiné aux soldats sur le front.
06:14Au lendemain du conflit,
06:15l'activité reprend,
06:17mais l'entreprise est vieillissante
06:18et stagne.
06:19On peut vraiment dire
06:20qu'au début des années 20,
06:21après cette Première Guerre,
06:23Louis Lefebvre-Util,
06:23qui était au top en 1900,
06:25quelque part devient très désuet
06:28dans sa démarche,
06:29dans son mode de pensée,
06:30dans la fabrication de ses biscuits.
06:31Les concurrents ont des usines plus modernes
06:34et les biscuits haut de gamme de Lu
06:36n'ont plus la cote.
06:38Son concurrent BN l'a bien compris.
06:40En 1922,
06:41ce rival lance le casse-croûte,
06:43un biscuit peu cher
06:44qui fait un carton.
06:46Le fils de Louis
06:47commence à moderniser l'image
06:48de la marque Lu,
06:50mais en interne,
06:51il a du mal à s'imposer
06:52face à son père.
06:53C'est quand même une famille traditionnelle
06:55où il ne faut absolument pas
06:57contredire le patriarche.
06:59Il va vraiment falloir attendre
07:00le décès de Louis Lefebvre-Util
07:02à la veille de la Seconde Guerre mondiale
07:04pour vraiment que les enfants
07:05reprennent les mains de l'entreprise
07:08à 100%
07:08et puissent commencer à moderniser
07:11et à imposer une patte
07:12beaucoup plus dynamique.
07:16En 1945,
07:18Patrick Lefebvre-Util
07:19prend les commandes de l'entreprise.
07:21C'est la quatrième génération.
07:23Sous son impulsion,
07:24Lu se modernise et redécolle.
07:26Patrick s'inspire des États-Unis,
07:28de sa société de consommation
07:30et de ses supermarchés.
07:31Il impose
07:32de grands changements marketiques.
07:34Sur les paquets,
07:35les photos
07:36remplacent les illustrations
07:37et le designer franco-américain
07:40Raymond Léoui,
07:41qui a notamment modernisé
07:42les logos de Shell
07:43ou encore Canada Dry,
07:45conçoit un tout nouveau logo rouge.
07:48Lu.
07:49Face à la concurrence,
07:50Lu fusionne avec un ex-rival,
07:53Brun.
07:53Mais Patrick Lefebvre-Util
07:55finit par perdre le contrôle
07:56de l'entreprise.
07:58C'est la fin
07:58de l'aventure familiale.
08:00Peu à peu,
08:01Lu se fixe un objectif prioritaire.
08:04Notre politique consiste
08:05petit à petit
08:06à mondialiser,
08:08si je peux me permettre
08:08d'employer cette expression,
08:09la marque Lu.
08:10Pourquoi la marque Lu ?
08:11Parce que toutes les études
08:12que nous avons faites
08:13depuis trois ans
08:14nous ont permis de constater
08:15que ce logo
08:16était le plus attractif
08:18sur le plan international.
08:20Avec le temps,
08:21Lu passe dans le giron de Danone
08:22jusqu'à finir aujourd'hui
08:24chez l'américain mondelaise
08:25qui possède aussi
08:26Oreo et Milka.
08:28En France,
08:29Lu domine le marché
08:30des biscuits,
08:31mais la société
08:31est une citadelle
08:33en état de siège.
08:34Depuis quelques années,
08:36la concurrence
08:36s'intensifie dans les biscuits,
08:38notamment avec Barilla
08:39et ses Bayocchi
08:40ou avec Ferrero
08:42qui multiplie
08:42les biscuits Nutella
08:43avec un succès fou.
08:46Face à eux,
08:47Lu mise
08:47sur ses biscuits phares.
08:49Le véritable petit beurre
08:50n'est plus le best-seller,
08:52mais il reste iconique.
08:53En 2024,
08:55Lu a produit
08:55110 000 tonnes de biscuits,
08:57dont 5 000 tonnes
08:58de véritable petit beurre.
09:01Un coup de maître
09:01pour celui
09:02qui inventa ce biscuit
09:03il y a un siècle et demi.
09:06Sous-titrage Société Radio-Canada

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