Qu'est ce qui ne fonctionne pas dans l'orientation des élèves ? La ministre de l'Éducation nationale Elisabeth Borne a présenté sur RTL un plan. Destiné à améliorer cette période cruciale et souvent stressante pour les familles, il sera mis en œuvre dès la rentrée prochaine. Écoutez le sentiment de Éric Charbonnier, spécialiste des questions d'éducation au sein de l'Ocde, l'Organisation de coopération et de développement économique.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 05 juin 2025.
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00:00Yves Calvi et Agnès Bonfillon, RTL Soir.
00:04Il est 18h46, qu'est-ce qui ne fonctionne pas dans l'orientation des élèves ?
00:08La ministre de l'éducation, Elisabeth Borne, a présenté ce matin sur RTL un plan.
00:12Il sera mis en oeuvre dès la rentrée prochaine et destiné à améliorer cette période cruciale et souvent stressante pour les familles.
00:19Bonsoir Eric Charbonnier.
00:21Bonsoir.
00:22Vous êtes spécialiste des questions d'éducation au sein de l'OCDE, l'Organisation de Coopération et de Développement Économique.
00:28L'orientation des élèves est un facteur de reproduction des inégalités.
00:34Voilà ce que déclarait ce matin sur notre antenne la ministre de l'éducation.
00:37Faites-vous le même constat ?
00:39Ah oui, c'est clair qu'à l'OCDE, on dit depuis longtemps que la France est un des systèmes les plus inégalitaires de l'OCDE.
00:45Donc il y a des vraies inégalités sociales.
00:48Récemment, il y a des études qui ont montré qu'il y a quatre fois plus d'enfants de cadre que d'enfants d'ouvriers à l'université.
00:55Et on sait que les enfants défavorisés sont surreprésentés dans les filières professionnelles.
01:01On a un système très scolaire qui sélectionne les élèves par les notes.
01:04Et quand on vient d'un milieu défavorisé, on a beaucoup moins de chances de réussir en France qu'ailleurs.
01:09Inégalité sociale et inégalité territoriale, si je vous comprends bien.
01:12Complètement, c'est très important à prendre en compte.
01:17On sait que quand on vient d'une zone rurale, on a moins de possibilités d'orientation.
01:21On a moins confiance en soi.
01:22Les élèves des zones rurales, des petits villages n'ont pas forcément la même croyance dans la capacité à réussir dans les études.
01:29On a aussi des inégalités de genre.
01:31Alors les inégalités de genre, c'est un petit peu partout dans le monde.
01:34Mais on sait qu'il n'y a pas suffisamment de filles dans les filières scientifiques.
01:38Un chiffre, juste pour mettre ça en avant, parmi toutes les filles qui vont dans l'enseignement supérieur,
01:44il y a 16% qui choisissent des filières scientifiques.
01:47Parmi tous les garçons qui vont dans l'enseignement supérieur, il y a 40% qui choisissent des filières scientifiques.
01:53En disant ça, on comprend bien qu'il faut créer vraiment des vocations
01:57et permettre aux filles aussi de prendre confiance par rapport à leur possibilité de réussite dans les filières scientifiques.
02:03Mais comment expliquer que l'on n'arrive pas à réduire ces inégalités ?
02:08Ces inégalités, souvent, on s'est trompé de levier.
02:12C'est-à-dire que les inégalités qu'on voit en France, nous on les mesure dans l'étude PISA à l'âge de 15 ans,
02:16mais elles commencent dès le plus jeune âge.
02:18Et quand on regarde la dépense d'éducation, par exemple,
02:21on a sous-investi dans les premiers niveaux d'éducation en France.
02:25La dépense par élève est 10% inférieure à la moyenne des pays de l'OCDE dans les écoles élémentaires.
02:30Elle est 30% supérieure à la moyenne des pays de l'OCDE au lycée.
02:34C'est vraiment dans ces premiers niveaux d'éducation qu'il faut investir.
02:38Et on a un vrai souci de formation des enseignants.
02:41La formation des enseignants en France est très académique,
02:44alors qu'on a besoin d'enseignants mieux préparés sur le volet pédagogique
02:47pour justement aider les élèves en difficulté à rattraper leur retard.
02:52Est-ce que le fait que notre système scolaire sacralise la filière générale joue un rôle dans tout ça ?
02:56Oui, complètement. Dans des pays comme l'Allemagne, les Pays-Bas, la Suisse, l'Autriche,
03:02pour prendre des pays voisins, les filières professionnelles sont vraiment valorisées.
03:06Donc, il y a un intérêt pour les élèves à y aller.
03:09Il y a une exigence aussi dans ces filières.
03:11Il y a des passerelles pour rattraper des filières générales quand les élèves le souhaitent.
03:16Et aussi pour aller dans des filières professionnelles jusqu'au niveau master.
03:20C'est vraiment un enjeu et un levier aujourd'hui de renforcer, de revaloriser ces filières
03:25parce qu'on a besoin de techniciens dans le monde dans lequel on vit aujourd'hui.
03:30La ministre de l'Éducation a annoncé ce matin sur RTL que les professeurs principaux
03:35allaient désormais être formés à ces questions.
03:38Ça veut dire quoi ? Qu'ils ne l'étaient pas jusqu'ici ?
03:41Alors, normalement, il y avait des heures obligatoires.
03:44Il y avait des heures qui étaient proposées pour l'orientation des élèves.
03:47Mais je crois qu'on a un déficit aujourd'hui et c'est vrai qu'il faut aider les enseignants
03:51à être mieux préparés sur ces questions.
03:53Parce que souvent, quand on arrive sur Parcoursup, la fameuse plateforme au niveau du lycée,
03:58par exemple, la lettre des motivations, c'est souvent la lettre de motivation des parents
04:03plus que des élèves.
04:04Donc, il faut aider les élèves justement à préparer leur dossier,
04:08à mieux comprendre les enjeux de l'orientation.
04:10Et les enseignants ont un rôle à jouer, mais on leur demande beaucoup aujourd'hui.
04:14Et c'est peut-être un souci. Il faudrait vraiment budgétiser ce type de réforme.
04:19Alors justement, autre proposition envisagée, faciliter une année de césure après le bac
04:24pour que les jeunes puissent s'ouvrir à d'autres univers, mener un engagement associatif ou voyager.
04:29Ça vous paraît utopique ou envisageable ?
04:34Disons que c'est toujours compliqué dans notre système où on note les élèves,
04:38où il y a une notation, où il n'y a finalement pas suffisamment de flexibilité.
04:42Aujourd'hui, un élève qui décide de faire une année de césure,
04:45il risque de perdre les opportunités qu'il a avec ses résultats au bac à lauréat d'orientation.
04:51Donc, il faut, dans ce cas-là, si on veut aller dans cette direction,
04:54il va falloir offrir de la flexibilité aux élèves pour pouvoir après rentrer facilement
04:59dans les filières universitaires.
05:00Alors, ça existe dans les pays nordiques, dans un grand nombre de pays anglo-saxons.
05:05Donc, on a des bons exemples à l'international qu'il faudrait suivre.
05:08Merci beaucoup Éric Charbonnier, spécialiste des questions d'éducation au sein de l'OCDE,
05:15l'Organisation de Coopération et de Développement Économique.
05:18Merci d'avoir été l'invité de RTL Soir.
05:20Dans un instant, un homme qui n'a qu'une orientation, l'allégresse, l'humour,
05:24avec une pointe de tendresse, Marc-Antoine Lebray, c'est le Breaking News.