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00:00Bonjour, il insiste volontiers sur toutes les guerres qu'il serait parvenu à empêcher ou à interrompre,
00:12au point même d'en revendiquer le Nobel de la paix.
00:15Le prix a été remis cette semaine, non pas à lui, mais à la principale figure de l'opposition au Venezuela.
00:21Qu'à cela ne tienne, Donald Trump, qui n'est plus à une contradiction près,
00:24semble de plus en plus susceptible de se renier en déclenchant une guerre avec le Venezuela, justement.
00:30On va en parler avec vous, Jean-Louis Martin, chercheur associé sur l'Amérique latine à l'IFRI.
00:35Mais d'abord, une vingtaine de frappes sur des navires en plus et plus de 80 morts.
00:39Depuis septembre, l'armée américaine n'hésite plus à viser ce que la Maison Blanche désigne comme des trafiquants de drogue,
00:44jusqu'à menacer en des termes à peine voilés le Venezuela d'une guerre au sol. Écoutez.
00:50Ils nous ont maltraités et je suppose que maintenant, nous ne les traitons pas très bien.
00:53Si vous regardez le trafic de drogue, le trafic de drogue par voie maritime a diminué de 92%.
00:59Et personne ne sait d'où viennent les 8% restants, car je n'en ai aucune idée.
01:04Quiconque s'implique dans ce trafic en ce moment ne s'en sort pas bien.
01:06Et nous allons commencer à lutter contre ce trafic sur Terre. Cela va bientôt commencer.
01:11Jean-Louis Martin, vous nous direz si ces menaces sont fondées ou pas.
01:14Mais d'abord, quand on voit les moyens militaires déployés par les États-Unis,
01:1715 000 hommes, 15 navires de guerre, le porte-avions à propulsion nucléaire le plus cher et le plus moderne au monde,
01:23dans l'USS Gérald Ford, on se dit que Washington n'a pas mobilisé cet effort. Pour rien.
01:28C'est vrai. C'est tout à fait inédit.
01:32Après, il y a différents moyens d'utiliser cet instrument.
01:38Effectivement, ça peut être une intervention au sol, ça peut être aussi des bombardements ciblés à distance.
01:46Le champ des possibles est encore très large.
01:48Il y a eu des précédents dans l'histoire récente, que ce soit sous Hugo Chavez,
01:52lors des nationalisations qui ont exproprié Exxon, notamment, ou du coup d'État manqué de 2002,
01:58encore de l'opération Gideon.
01:59C'était en 2020, soutenu par d'ex-militaires américains devenus mercenaires à l'époque pour renverser Maduro, déjà.
02:06Washington a plusieurs fois été soupçonné de vouloir user de la manière forte.
02:11Oui. Alors, pas toujours directement.
02:15Par exemple, vous avez cité l'exemple de 2002.
02:18Je ne sais pas à quel point Washington était impliqué dans la préparation,
02:21mais ce qu'ils ont surtout fait...
02:22Du coup d'État manqué, avorté.
02:24Voilà, coup d'État manqué contre Hugo Chavez.
02:27La principale erreur des États-Unis, ça a été de reconnaître le nouveau pouvoir
02:32qui s'est écroulé deux jours plus tard.
02:34Et le pouvoir vénézuélien s'en rappelle encore, évidemment.
02:39Oui, le Venezuela avec la 50e, 60e budget militaire de la planète,
02:44il est en état de résister à une éventuelle offensive au sol des États-Unis aujourd'hui ?
02:49Alors, 50e ou 60e, je ne sais pas,
02:51parce qu'en fait, on n'a aucun chiffre sur le Venezuela,
02:54si ce n'est à peu de choses...
02:56Enfin, on sait à peu près combien de Vénézuéliens sont partis,
02:59c'est à peu près le seul chiffre sérieux qu'on ait.
03:02Je pense que, vu l'état d'élabrement général du pays,
03:06cette armée n'est pas très bien organisée, pas très bien équipée,
03:09même s'il y a eu des livraisons d'équipements russes au cours des dernières années.
03:15Mais ce qui est vrai, c'est qu'une intervention au sol serait très difficile,
03:20parce qu'il y a non seulement l'armée, mais le pouvoir madouiste a armé aussi une partie de la population.
03:28Tout le monde ne se battrait pas contre des GIs qui débarqueraient.
03:32Mais ça serait quand même très très sanglant.
03:35Cette menace militaire des États-Unis, elle est perçue comme au sein de la population vénézuélienne.
03:40Alice Campagnol.
03:40Eh bien, c'est étonnant, mais ici, au Venezuela, la vie se déroule normalement.
03:47Les Vénézuéliens continuent d'aller au travail, de faire leurs courses
03:50et même d'aller voir des matchs de baseball au stade monumental.
03:54Leur quotidien n'a pas changé, malgré la menace militaire américaine.
03:59Alors, il faut dire que cela fait des mois que les médias s'alarment,
04:02que Donald Trump lance des ultimatums et affirme que bientôt, il se passera quelque chose.
04:08Donc, c'est un peu comme la fable de Pierre et le loup.
04:11À force d'alerter, eh bien, les gens n'y croient plus.
04:14Cependant, il y a bien quelque chose qui s'y chamboule la vie des Vénézuéliens,
04:18surtout en cette période de Noël.
04:20Ce sont les vols suspendus.
04:22Je le rappelle, après l'annulation de plusieurs liaisons internationales par les compagnies aériennes
04:28pour des raisons de sécurité, eh bien, c'est le gouvernement lui-même
04:32qui a décidé de suspendre les licences de plusieurs compagnies aériennes internationales.
04:38Donc, aujourd'hui, le pays est extrêmement isolé et son plus grand aéroport est quasiment vide.
04:45Jean-Louis Martin, on évoquait à l'instant l'état de l'armée vénézuélienne,
04:49mais le Venezuela dispose aujourd'hui d'alliés éventuellement susceptibles de venir lui prêter assistance ?
04:55– Oui, mais ils sont loin. Vous avez bien sûr la Russie, la Chine beaucoup moins,
05:03parce que la Chine a été proche du Venezuela à un moment, lui a fait beaucoup de crédits.
05:07Ça ne s'est pas très bien passé et la Chine a maintenant d'autres intérêts en Amérique latine.
05:13Et puis, le seul qui soit prêt, bon, je passe sur le Nicaragua, mais c'est Cuba, en fait.
05:19Mais Cuba a aussi d'énormes problèmes économiques et n'est certainement pas en mesure de soutenir militairement.
05:30Il y a des conseillers militaires cubains à Caracas, mais ça n'ira pas beaucoup au-delà.
05:35Et puis, les autres pays latino-américains ne verraient certainement pas très favorablement du tout une intervention américaine.
05:45Mais de là à aider le Venezuela, personne ne bougera.
05:47– Ah oui, moins proche peut-être, mais tout de même, aligné en tout cas politiquement, il y a quoi ?
05:51La Colombie, le Brésil, l'Équateur ?
05:53– Les gouvernements de gauche en ce moment, en Amérique latine,
05:58vous avez le Brésil qui a essayé de jouer le médiateur sans succès,
06:04la Colombie qui a essayé de faire un petit peu la même chose sans succès aussi,
06:09et puis le Chili où ça ne va peut-être pas durer bien longtemps, le gouvernement de gauche.
06:13Donc non, régionalement, pas de succès.
06:15Et puis aucun de ces pays, de toute façon, n'interviendrait pour appuyer militairement le Venezuela.
06:21– Alors vous évoquiez la Russie, le grand allié, mais lointain.
06:24Vladimir Poutine a fini par réagir en apportant son soutien à Nicolas Maduro et son pays,
06:30sa souveraineté, surtout territoriale, au terme d'une conversation téléphonique soutient un minima.
06:34– Oui, bon, il ne pouvait pas faire beaucoup moins.
06:39Cela dit, là aussi, la Russie a d'autres chats à fouetter en ce moment.
06:43Et je… Bon, on peut compter sur des livraisons d'armes, mais ça n'ira pas au-delà.
06:49– Vous imaginez un accord tacite entre Donald Trump et Vladimir Poutine,
06:53chacun dans sa sphère d'influence pour ne pas venir perturber l'autre ?
06:56Là, c'est une interprétation qui tient tout à fait la route.
07:00Cela dit, je n'ai aucun élément concret pour confirmer ça.
07:06Mais c'est tout à fait possible, d'autant qu'on a vu quand même la semaine dernière
07:12ou le week-end précédent, cette déclaration publiée par les États-Unis,
07:17la nouvelle stratégie qui est extrêmement claire sur le fait que l'Amérique latine,
07:22c'est la chasse gardée des États-Unis et qu'ils ne veulent y voir personne d'autre.
07:27C'est un point sur lequel le document revient plusieurs fois.
07:31– Et on va y revenir. Revenons-en d'abord aux accusations portées par Washington.
07:35De quel poids pèse le Venezuela dans le trafic de drogue en direction des États-Unis ?
07:39Maya Anaïsiat-Aguen.
07:40– Alors tout d'abord, il faut définir de quelle drogue on parle.
07:43C'est vrai que l'Amérique latine, c'est le premier fournisseur de cocaïne dans le monde.
07:47Alors essayons de voir si, de ce côté-là, la réponse serait le Venezuela.
07:50Eh bien les chiffres, en réalité, disent que le premier producteur, c'est la Colombie,
07:53suivi par le Pérou à 27% et enfin, loin derrière, la Bolivie.
07:57Alors si le Venezuela ne produit pas en masse de la cocaïne,
08:00peut-être que le Venezuela en distribue.
08:02Alors regardons cette fois-ci la carte des routes empruntées par les trafiquants.
08:06Et là aussi, la réponse, c'est que 8% du trafic qui passe par le Venezuela,
08:11la véritable plaque tournante, elle est ici, c'est l'Équateur.
08:14L'Équateur, 70% du trafic mondial de cocaïne va passer par les ports de l'Équateur.
08:20Mais en réalité, ce qui inquiète en ce moment les autorités américaines,
08:24ce n'est pas tant la cocaïne que le fentanyl.
08:26Vous voyez ici le nombre de décès par surdose.
08:30Et qui produit cet opioïde synthétique ?
08:32Est-ce que c'est le Venezuela ?
08:34Pas du tout.
08:34Le fentanyl, en réalité, si on regarde cette carte,
08:37on découvre que ce sont des précurseurs chimiques importés de Chine
08:41qui sont ensuite transformés par les cartels mexicains
08:44qui ont créé une véritable multinationale du fentanyl.
08:47Donc au final, là aussi, pas grand-chose à voir avec le Venezuela.
08:51Jean-Louis Martin, ni producteur, ni même principal pays de transit
08:54pour la drogue à destination des États-Unis.
08:56Seul 8% de la cocaïne colombienne passe par le Venezuela.
09:00On est loin du narco-terrorisme reproché aujourd'hui au Venezuela.
09:04Tout à fait.
09:08Donald Trump a accusé un peu tout le monde,
09:12enfin tous ceux qui n'étaient pas ses amis, d'être des narcotrafiquants.
09:15Ça a été aussi le cas du président Petro en Colombie.
09:20Je pense que ce n'est pas…
09:22Alors bon, il y a d'abord les excès de langage auxquels il nous habitue.
09:26Mais il y a peut-être aussi un intérêt particulier pour lui.
09:30C'est que déclencher une guerre formelle contre le Venezuela,
09:36ça demanderait l'aval du Congrès.
09:38Alors que lancer des mesures de contre-terrorisme à chaud,
09:43ça, il peut le faire directement.
09:45Donc il y a peut-être une justification ex-sainté
09:47de ce qu'il pensait faire par la suite.
09:50Après, c'est vrai que le Venezuela est totalement marginal
09:55dans le trafic de stupéfiants vis-à-vis des États-Unis.
09:59Alors là aussi, Donald Trump a essayé de l'habiller
10:03en parlant d'un cartel des Lossols.
10:05Les sols, c'est les soleils qui sont sur les uniformes
10:09des généraux vénézuéliens.
10:11Mais il n'y a rien de concret derrière cette accusation.
10:14Oui, d'autant que ce qui invalide, d'une certaine manière,
10:17le discours de Donald Trump, c'est que dans le même temps,
10:19il gracie l'ancien président du Honduras,
10:21Juan Orlando Hernandez, incarcéré aux États-Unis,
10:23précisément pour trafic de drogue.
10:25Oui, mais bon, c'est un de ses amis.
10:27Et c'est ça qui compte, la loyauté.
10:30Plus que la justice, l'autre sujet de contentieux
10:33et qui explique que Washington ne peut pas se permettre
10:35de totalement couper les ponts avec Caracas.
10:38Il s'agit de l'immigration clandestine.
10:40Donald Trump se fait fort de renvoyer chez eux l'immigrant
10:43en situation irrégulière aux États-Unis.
10:45Or, un certain nombre d'entre eux sont vénézuéliens.
10:47Reportage à Chicago, nos confrères à Bogotá,
10:50Herminia Fernandez et Lionel Pousserie.
10:54Sortir les poubelles, un geste quotidien devenu dangereux
10:57pour les migrants aux États-Unis.
10:59Gabriela Perez en est témoin.
11:01Freddy, son mari, un migrant vénézuélien,
11:04a été arrêté un matin par le service de l'immigration
11:07et des douanes des États-Unis devant chez lui.
11:09La DEA a publié sur les réseaux sociaux une photo de Freddy,
11:12l'accusant de faire partie du puissant cartel vénézuélien
11:16Tren de Aragua, transféré dans un centre de détention.
11:19Il nie ces accusations.
11:22C'est le gouvernement qui m'a piégé en me poursuivant.
11:27Ils m'ont arrêté sans enquête.
11:31Freddy, bien qu'ayant un statut de protection temporaire,
11:34n'est pas à l'abri d'une expulsion.
11:36Aujourd'hui, la crainte d'être expulsée
11:38préoccupe toute personne vivant aux États-Unis
11:40sans document légal.
11:41Beaucoup ont peur, comme ce vénézuélien
11:43qui souhaite rester anonyme.
11:46Oui, j'ai peur, mais c'est pour ça que je ne sors plus.
11:49Je ne sors plus vraiment, car où aller dans ma situation ?
11:53Pour cet avocat en affaires migratoires,
11:55les mesures prises par Donald Trump sont illégales
11:57et montrent des signes de discrimination
11:59et de racisme du gouvernement républicain.
12:02Le Congrès a essentiellement cédé aux injonctions de Trump
12:06et n'a rien voulu faire pour essayer de protéger
12:08la communauté latino-américaine ou la communauté migrante,
12:12car la migration, ici, n'est pas seulement latino-américaine.
12:18Alors que la vie sociale des migrants est suspendue
12:21par peur d'être envoyé dans leur pays,
12:23Donald Trump continue sans relâche de tenter d'expulser
12:25plus d'un million de sans-papiers.
12:28Le président américain souhaite également supprimer
12:30les permis de séjour temporaires
12:31pour endiguer toute migration, même légale.
12:34Jean-Louis Martin, c'est le paradoxe de cette crise,
12:39c'est que jusqu'à tout dernièrement,
12:41le Venezuela acceptait de réadmettre sur son territoire
12:44des clandestins expulsés par les États-Unis.
12:47Oui, alors qu'ils ne sont pas si nombreux que ça,
12:49parce qu'il y a eu un peu moins de 8 millions,
12:53l'ordre de grandeur c'est ça,
12:55de Vénézuéliens qui ont quitté le pays
12:57depuis 5 ou 6 ans,
12:59ce qui montre bien l'état de décrépitude de l'économie,
13:02parce que ce sont pour l'essentiel des migrants économiques
13:06et pas, s'il y a quelques dizaines de milliers
13:09d'opposants politiques, c'est à peu près tout,
13:11les gens ne sont pas partis pour ça.
13:13Et le nombre de ceux qui sont partis aux États-Unis,
13:17je crois qu'on est dans l'ordre de 500 000,
13:20c'est-à-dire sur 8 millions.
13:21Sur les 8 millions, il y en a 3 en Colombie,
13:24il y en a 1,7 million au Pérou.
13:28Donc, ce que les Américains ont dû accueillir chez eux,
13:33c'est assez marginal par rapport au total.
13:36La quasi-totalité sont des migrants économiques.
13:39Alors, il est possible qu'il y ait quelques,
13:42comme disait Donald Trump,
13:45bad ambress parmi eux.
13:47– Oui, parce qu'il accuse le Vénézuélien, en réalité,
13:49de vider ses geôles pour envoyer ses reprises de justice
13:52vers les États-Unis.
13:53C'est un fantasme qui fait référence aux Cubains,
13:56on s'en souvient, de la fin des années 70, début 80 ?
13:58– Oui, tout à fait.
13:59Alors, c'est quelque chose que les Cubains avaient fait,
14:01effectivement, à l'époque.
14:02Aujourd'hui, là encore, c'est de l'affirmation de Donald Trump
14:08et rien d'autre.
14:08On n'a pas du tout de preuves.
14:10Et la plupart des gens, je répète, sont vraiment partis
14:13parce qu'ils n'avaient plus de travail,
14:16ils n'avaient plus de revenus,
14:17ils n'avaient plus rien dans les magasins,
14:21ils n'avaient plus à manger.
14:24Et ces gens, vous les voyez,
14:26je suis allé en Colombie il n'y a pas très longtemps,
14:28vous les voyez à pied le long des routes colombiennes.
14:31Donc, je ne suis pas sûr que le narcotrafiquant
14:35émigre dans ces conditions-là.
14:37– Oui, dans ce niveau de dénuement,
14:39une obsession migratoire et un discours envers l'Amérique latine
14:42qui pourrait bien coûter cher à Donald Trump.
14:44La Colombie, par exemple, un allié traditionnel de Washington,
14:47se tourne de plus en plus vers la Chine
14:49pour ses infrastructures, Lionel Pousserie.
14:51– Alors que Donald Trump multiplie les critiques
14:54et les attaques personnelles contre Gustavo Petro,
14:57le président colombien,
14:58assiste-t-on à un basculement stratégique dans la région ?
15:01La Colombie, alliée historique des États-Unis
15:03sur le plan politique et militaire en Amérique latine,
15:05regarde de plus en plus en direction de la Chine.
15:08Si les États-Unis restent le principal partenaire commercial de Bogota,
15:12le gouvernement de Gustavo Petro,
15:13premier président de gauche du pays andin,
15:16veut augmenter les échanges avec Pékin,
15:18qui est pour l'heure son deuxième partenaire économique.
15:21Symbole de ce rapprochement,
15:23l'intégration officielle en mai dernier de la Colombie
15:25aux nouvelles routes de la soie lancées par Xi Jinping.
15:28Gustavo Petro affirme que cet accord permettra
15:30de développer les exportations de produits colombiens vers la Chine,
15:34grâce notamment à une liaison maritime directe
15:37entre Shanghai et le principal port colombien de Buenaventura.
15:41Avec à terme l'objectif de rééquilibrer une relation commerciale
15:44pour l'heure très favorable à la Chine,
15:46qui exporte chaque année pour plus de 14 milliards de dollars
15:49de ses produits vers la Colombie,
15:51contre seulement 6 milliards dans le sens inverse.
15:55Jean-Louis Martin, la Colombie qui adhère aux nouvelles routes de la soie,
15:58tout cela pourrait changer en cas de victoire de la droite
16:02aux élections en Colombie l'an prochain ?
16:04– Je ne crois pas, je ne crois pas,
16:07parce que je pense que la poussée chinoise en Amérique latine
16:10est inéluctable, quels que soient les gouvernements en place.
16:13Et on a vu par exemple en Argentine,
16:18et on avait vu ça avant avec Bolsonaro au Brésil,
16:23des présidents de droite et même d'extrême droite
16:25qui disent pique-pendre de la Chine communiste
16:29et ce que vous voulez avant leur élection.
16:32et puis quand ils sont en place, ils se rendent compte
16:34qu'économiquement, c'est tout à fait indispensable
16:37de travailler avec la Chine.
16:38Donc si une alternance intervenait en 2026 en Colombie,
16:42ce qui n'est pas encore certain,
16:44mais ce qui est tout à fait dans le possible,
16:46je ne suis pas sûr que ça se traduirait
16:48par une réorientation majeure de l'activité,
16:52enfin de la politique colombienne.
16:54Mais de toute façon, on peut faire partie des routes de la soie,
16:58mais la Colombie n'a pas énormément de ressources primaires
17:01à vendre à la Chine.
17:03Oui, plus stratégique peut-être le canal de Panama,
17:06et on le sait, la présence chinoise irrite fortement les États-Unis.
17:09Oui, alors il y a eu des pressions très très fortes
17:11des États-Unis pour que le gouvernement panaméen
17:18force une compagnie chinoise, enfin hongkongaise,
17:22mais proche de Pékin,
17:23à vendre ses terminaux portuaires à Panamaville
17:28et à Cologne, à l'autre bout du canal.
17:31Il était question que ce soit BlackRock, je crois,
17:33qui achète ça.
17:34Oui, un fond proche de Donald Trump.
17:36Ça, c'est toujours pas fait.
17:38Je ne suis pas au courant des détails,
17:40des raisons pour lesquelles ça ne se fait pas,
17:44mais ça avance beaucoup moins vite que prévu.
17:46Et il a aussi été question de passages gratuits
17:50des bateaux américains dans le canal, ça non plus.
17:52Donc beaucoup de bruit, et jusqu'ici, pas grand-chose.
17:56Une lutte d'influence dans ce qui a longtemps été considéré
17:59vu de Washington comme l'arrière-cours des États-Unis
18:01au nom de la doctrine Monroe,
18:04qui a servi de base à la politique étrangère américaine.
18:07Expliquez-nous, Maya Neissiataghen.
18:09Et oui, le 2 décembre 1823,
18:11le président américain James Monroe
18:13s'adresse au Congrès et déclare aux Européens
18:16le vieux continent, aux Américains le nouveau monde.
18:19Alors c'est son message clair aux Européens de l'époque.
18:22Nous n'interviendrons pas dans vos affaires,
18:24mais vous, en échange, toute ingérence,
18:26toute colonisation sur le continent américain,
18:29eh bien, vous oubliez.
18:30Et c'est un message qui intervient à un moment
18:33où il y a beaucoup d'indépendances qui sont déclarées
18:35sur le continent du sud américain,
18:38comme par exemple Haïti, le Brésil,
18:40ou encore d'autres pays qui ont été colonisés
18:42par l'Espagne.
18:43Et les États-Unis s'inquiètent à ce moment-là
18:46d'une potentielle répercussion,
18:48intervention militaire des Européens.
18:50Eux-mêmes sont indépendants depuis à peine 50 ans
18:53et ils se positionnent en grands frères protecteurs de la zone.
18:56Mais au fur et à mesure,
18:57eh bien, cette déclaration Monroe va devenir une justification
19:01à l'impérialisme américain.
19:03Et notamment, à partir de 1904,
19:06où Theodore Roosevelt va ajouter son corollaire Roosevelt
19:09à la doctrine Monroe.
19:10Les États-Unis vont à partir de là considérer
19:12qu'ils peuvent intervenir, un peu malgré eux,
19:14dans les affaires d'un autre État américain,
19:17sous prétexte de garantir le bon ordre de la région.
19:20Alors, chaque président va avoir son petit nom pour ça.
19:22Il y a eu la politique du gros bâton,
19:24la diplomatie du dollar,
19:25ou encore les pratiques de bon voisinage.
19:28Certains ont eu plus de succès que d'autres.
19:30On se souvient tous de John Fitzgerald Kennedy
19:33qui a été empêtré dans la crise des missiles à Cuba en 1962.
19:38Eh oui, une doctrine dont la stratégie de sécurité nationale,
19:43dévoilée, vous l'avez dit,
19:44Jean-Louis Martin par Donald Trump récemment,
19:46se veut le corollaire.
19:47Il y a eu un corollaire Roosevelt, désormais le corollaire Trump,
19:50pour restaurer leur prééminence.
19:51Les États-Unis se réservent le droit d'intervenir partout,
19:54ils le jugent nécessaire, sur le continent américain,
19:56encore aujourd'hui.
19:58C'est quand même un peu la première fois.
20:00Enfin, il y a eu dans le passé des déclarations de président,
20:04effectivement, Monroe, puis Teddy Roosevelt.
20:07Il y a eu des interventions, certaines très visibles,
20:11comme par exemple celle de Panama en 1989.
20:14Il y a eu des soutiens à des coups d'État,
20:16par exemple, dans les pays du Côte-Sud,
20:20au Chili, en particulier en 1973.
20:23C'est quand même la première fois où c'est théorisé,
20:26si on peut appeler ça une théorie,
20:28mais enfin, explicité de manière aussi claire,
20:31dans un document officiel.
20:33C'est quand même un petit peu plus clair
20:34qu'une simple déclaration d'un président.
20:36C'est l'Amérique latine nous est réservée.
20:40C'est-à-dire, nous est réservée, ça veut dire deux choses.
20:43Il nous faut des gouvernements amis dans la région.
20:45Et une deuxième chose, nous avons priorité
20:48sur les ressources en matière première de la région.
20:50Oui, justement, parce qu'on s'interroge.
20:51S'agit-il là d'un véritable enjeu de sécurité pour les États-Unis,
20:54comme c'est présenté par Donald Trump lui-même,
20:56ou bien de manière plus prosaïque,
20:58une façon de s'approvisionner en matière première ?
21:02– Alors, les considérations de sécurité,
21:07il n'y a aucun État latino-américain
21:08qui envisage, même dans ses rêves,
21:11d'attaquer les États-Unis.
21:12– Mais il pourrait servir de base arrière,
21:14comme ça a été le cas pour Cuba notamment,
21:16à l'Union soviétique du temps de la guerre froide.
21:19– Oui, du point de vue des Cubains,
21:21c'était purement défensif.
21:23Après, il peut y avoir d'autres préoccupations de sécurité.
21:26Par exemple, on en a parlé, la drogue, les migrations.
21:30– Mais bon, ma conviction personnelle,
21:34c'est peut-être un biais parce que je suis économiste,
21:37c'est que c'est l'accès aux ressources
21:38qui intéresse les États-Unis.
21:41Et de ce point de vue-là,
21:42le Venezuela est un cas particulier,
21:45tout à fait intéressant,
21:47parce que dans la plupart des pays,
21:49les jeux sont déjà faits,
21:51c'est-à-dire les États-Unis
21:53ne peuvent plus mettre la main aussi brutalement
21:55sur les ressources, par exemple sur le fer
21:57et les métaux au Brésil,
21:59parce qu'il y a une grande compagnie privée,
22:01enfin anciennement étatique, mais privatisée,
22:03Valet, qui est l'acteur dominant sur ce secteur.
22:07Même chose au Chili avec le cuivre,
22:09Codelco ne va pas être privatisé
22:12pour les beaux yeux des États-Unis,
22:13parce que c'est tout à fait central
22:14dans la politique économique chilienne.
22:17Au Pérou, là aussi, ce sont des acteurs privés.
22:21Bon, on peut avoir des Américains
22:23qui entrent dans le jeu, il y en a déjà,
22:25il y a des Mexicains qui sont là aussi,
22:28mais les deux pays qui me paraissent
22:30particulièrement intéressants,
22:31parce que le jeu, il reste ouvert,
22:33alors j'écarte le Mexique,
22:35parce que Pemex est dans un État calamiteux,
22:38pas très attractif en ce moment,
22:40mais ça va prendre du temps
22:42avant que les Mexicains acceptent
22:43d'ouvrir le secteur pétrolier,
22:46enfin des hydrocarbures aux étrangers.
22:48Il reste qui ?
22:49Il reste le Venezuela
22:50avec ses énormes ressources pétrolières
22:52qui sont les principales réserves au monde.
22:55Et en plus, c'est du pétrole lourd
22:57qui convient assez bien
22:59pour compléter le shale oil extrait aux États-Unis
23:02qui, lui, est un pétrole léger.
23:03Le pétrole de schiste, oui.
23:04Voilà.
23:04Et donc, les raffineries aux États-Unis
23:09ont besoin de traiter les deux.
23:11Et puis, l'autre pays
23:12qui est aussi où le jeu est ouvert,
23:14c'est l'Argentine,
23:15où vous avez un secteur minier
23:16qui a été complètement négligé.
23:18Et vous avez vu aussi,
23:21il y a à peu près un mois,
23:24cet accord commercial
23:25totalement déséquilibré
23:27entre les États-Unis et l'Argentine
23:29qui, là aussi,
23:30ouvre la porte
23:31aux investissements américains
23:32dans le secteur.
23:33S'accaparer les réserves,
23:35les premières réserves pétrolières au monde,
23:38c'est ainsi que vous analysez
23:40la saisie par Washington
23:41d'un pétrolier vénézuélien
23:42et la mise sous sanction
23:44de six compagnies
23:46et six pétroliers au passage ?
23:47– Non, je pense que la capture
23:50de ce pétrolier,
23:52qu'il faut appeler piraterie,
23:54le mot existe pour ça.
23:57– Au jeu du droit maritime international.
23:59– Au jeu du droit maritime.
24:00C'est à peu près du...
24:03Sauf que là, il n'y a pas de mort,
24:05mais c'est comme les bombardements
24:06de petits bateaux.
24:07C'est une pression supplémentaire
24:10sur le Venezuela.
24:12Après, s'accaparer,
24:15il n'est pas impossible quand même
24:16que les Américains
24:18laissent quelques miettes aux autres.
24:20C'est-à-dire,
24:20il ne s'agit pas forcément
24:21de tout prendre,
24:22mais d'avoir une position dominante
24:24sur le marché pétrolier vénézuélien.
24:26– Et ce conflit,
24:27il ne date pas d'hier,
24:28dès la fin des années 90.
24:29Hugo Chavez prend les règnes du pays
24:31qu'il entend transformer radicalement
24:33par une révolution bolivarienne.
24:35Pas du goût des États-Unis,
24:36dirigée par George W. Bush à l'époque.
24:38Retour en images.
24:41Les stades ont deux visages
24:42et deux sortes de héros
24:43en Amérique du Sud.
24:45On y fait du sport
24:46et de la politique.
24:47Et quand la foule bouge,
24:49ces héros bougent avec.
24:53Chavez, emberré de parachutiste,
24:55président vénézuélien anti-Bush,
24:57avait hier sa botte secrète.
24:59Des crampondeurs en retraite,
25:00ceux de Diego Maradona.
25:04Virons Bush.
25:04Deux hors-Bush répètent la banderole
25:07car après les populistes
25:09se sont engouffrés dans la brèche
25:10les altères mondialistes.
25:12Et les plus radicaux
25:13ont brillamment dénoncé
25:15l'impérialisme des États-Unis
25:17qui s'exerce d'abord
25:18sur le continent sud-américain.
25:21Au même moment,
25:22à quelques kilomètres
25:23dans les palais huppés
25:24des grands de ce monde,
25:26changeant de costume
25:27et de manière,
25:28mais toujours sans béret militaire,
25:30sa tenue favorite,
25:30Chavez rejoignait
25:32ses 34 homologues
25:33et chefs d'État
25:34du quatrième sommet
25:36des Amériques.
25:37Une certitude,
25:38le duel Bush-Chavez
25:39n'a pas eu lieu.
25:40Pour la photo de famille
25:41qui de famille n'a que le nom,
25:43on a pris soin
25:44de les séparer.
25:45Au menu des débats,
25:46la zone de libre-échange
25:47des Amériques.
25:49Un vieux projet
25:49que condamne Hugo Chavez
25:51aux grands dames
25:52de George W. Bush.
25:53Jean-Louis Martin,
25:57on a longtemps cru
25:58Hugo Chavez
25:58sur un siège éjectable.
26:00Aujourd'hui,
26:00son successeur,
26:01lui, est toujours là.
26:03D'après vous,
26:03est-il vrai que
26:04Nicolas Maduro
26:05aurait ou serait en train
26:06de négocier
26:07les conditions
26:07d'un éventuel départ
26:08avec les États-Unis ?
26:10C'est possible,
26:12mais ça a été privé.
26:13C'est-à-dire qu'il y a eu
26:14une conversation
26:15entre Maduro et Trump.
26:20Les versions des deux parties
26:22ne collent pas vraiment.
26:25Maduro a même parlé
26:26d'une invitation
26:27qu'il aurait reçue
26:28de la part de Trump
26:29pour aller à Washington,
26:31ce qui paraît quand même
26:32difficilement cohérent
26:34avec la promesse
26:35de je ne sais plus
26:36combien de millions de dollars
26:37promise à qui aiderait
26:39à l'arrêter.
26:41Bon, il est possible
26:43que Maduro cherche une sortie.
26:47Cela dit, il me semble
26:48que le problème
26:51vénézuélien
26:52est loin de s'arrêter
26:53à Maduro.
26:54C'est tout un système.
26:55C'est-à-dire que
26:56l'armée trempe
26:57jusqu'aux yeux
26:58dans ce clan
27:00qui contrôle le pays.
27:03Une Anna Corrida Machado,
27:05la prix Nobel de la paix
27:05au pouvoir,
27:06serait plus docile
27:06pour les États-Unis ?
27:07Évidemment.
27:08On verra en tout cas
27:09de quoi l'avenir sera fait.
27:10Merci d'avoir été
27:11avec nous à nouveau,
27:13Jean-Louis Martin.
27:14C'était Le Monde
27:15dans tous ses États.
27:16Merci d'avoir suivi
27:17cette émission.
27:18Vous pouvez retrouver
27:18sur notre site internet
27:19france24.com
27:20et la semaine prochaine
27:21pour un nouveau numéro.
27:22Sous-titrage Société Radio-Canada
27:25Sous-titrage Société Radio-Canada
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