Jeudi 11 décembre, la commission d’enquête parlementaire sur la neutralité, le fonctionnement et le financement de l’audiovisuel public a interrogé les directeurs d'écoles de journalisme. Charles Alloncle, député (UDR) et rapporteur de la commission, a notamment demandé les causes de la sous-représentation des intervenants des médias de droite.
00:00Effectivement, vous avez envoyé la liste des intervenants que j'étais en train de regarder. À Sciences Po notamment, vous avez envoyé une liste de 175 intervenants en essayant de les catégoriser.
00:12Sur les 175, les médias apparentés de droite, il n'y en a que deux intervenants du Figaro. J'en vois sept d'RMC, si on peut casser RMC comme étant de droite. Je n'en vois aucun, par exemple, de CNews ou de Valeurs Actuelles.
00:28Et je crois que pour l'ESJ de Lille, c'est la même chose. Comment est-ce que vous pouvez donner un sentiment de pluralisme, d'opinion auprès de vos étudiants ?
00:40Encore sur une liste de 175 intervenants, il n'y en a que deux d'un média de droite et c'est le Figaro.
00:47Merci, monsieur le rapporteur. En effet, vous avez cette liste sous les yeux de 175 intervenants. Au-delà des cas individuels ou autres, ce qui nous paraît extrêmement important, c'est de retrouver chez nos intervenants l'expertise et la rigueur de méthode,
01:12qui est celle que nous souhaitons transmettre à nos étudiants. Et donc, madame la directrice exécutive, vous décrivez tout à l'heure certaines des compétences pour lesquelles nous devons trouver des enseignants
01:25à la fois capables d'aborder des choses parfois très techniques, très précises et puis en même temps de pouvoir rapporter ces choses très techniques, très précises.
01:33On parlait du data journalism, de l'OSINT, mais c'est vrai aussi quand on parle de l'utilisation de l'intelligence artificielle par des journalistes ou dans des rédactions.
01:42Et il faut à la fois faire le grand écart entre ces compétences très précises, très techniques et celles qui sont propres à tous les journalistes,
01:52c'est-à-dire la déontologie, le terrain, la capacité à identifier les sources, à vérifier ces informations, etc.
01:59Ce sont des profils plus difficiles à trouver qu'il ne paraît parfois. Après, nos intervenants sont soit des enseignants, des chargés d'enseignement qui dispensent des cours.
02:14Et là, il faut comprendre que dans la pratique, ils ont face à eux une quinzaine ou une vingtaine d'étudiants. Ils ont rédigé un plan de cours avec des objectifs qui sont revus par nos responsables pédagogiques également.
02:25Donc c'est un travail conséquent. Les séances sont structurées, il y a des critères de notation très précis qui sont établis.
02:32Et en classe, ce chargé d'enseignement réalise des exercices, souvent de façon très répétée, puisque c'est comme ça qu'on apprend par la répétition,
02:40et doit démontrer une progression réelle des étudiants. Donc ça n'est pas une tâche simple ni facile.
02:47Donc il faut concilier beaucoup de choses. C'est ce à quoi je voulais faire allusion. On reçoit aussi des personnalités extérieures en masterclass.
02:55Et je pense que vous aviez également ces noms-là dans votre liste. Et là, l'exercice est un peu différent de celui de l'exercice du chargé d'enseignement.
03:04Mais je vous donne un exemple récent. On a reçu Margot Ben, qui est grand reporter au Figaro, prix Albert Londres 2022.
03:11Elle est diplômée de notre école et nous sommes évidemment fiers de son parcours.
03:16Et Margot Ben, elle, est venue décrire sa méthodologie et le travail qu'elle a déployé pour réaliser des reportages sur la guerre en Ukraine.
03:25Donc là, c'est un exercice différent du chargé d'enseignement.
03:30Mais c'est complémentaire et nos étudiants ont bien entendu ainsi accès à la plus grande diversité des profils,
03:36tout en tentant de concilier ces enjeux de disponibilité, de pédagogie et puis de diversité des profils.
03:42Merci.
03:43Au bout de la question du rapporteur, parce que je ne suis pas sûr qu'il a eu totalement sa réponse,
03:45est-ce que vous diriez par exemple qu'on regarde les audiences de CNews,
03:48il faudrait que des journalistes de cette chaîne puissent intervenir à Sciences Po au regard du pluralisme ?
03:53Est-ce que vous considérez que c'est important ?
03:55On regarde la place qu'occupent aujourd'hui CNews dans le paysage médiatique ou non ?
04:00Et je voudrais juste dire, parce que j'essaie d'être le plus impartial possible,
04:02quand j'ai dit qu'il fallait soutenir les journalistes, quels que soient les médias ou les journaux au sein desquels ils travaillent.
04:09Je veux dire qu'effectivement, on a vu devant Sciences Po Paris en avril 2024,
04:12des étudiants s'en prendre à des journalistes de CNews et de BFM en disant « BFM dégagez CNews pareil ».
04:18Je voulais dire ici que quand on défend les journalistes, on les défend quels que soient les médias dans lesquels ils travaillent
04:23et qu'on ne peut pas accepter que des étudiants ou des citoyens s'en prennent à des journalistes,
04:28quels que soient leurs médias.
04:31Merci Monsieur le Président, et je vous remercie pour ces mots de soutien aux journalistes qui sont importants.
04:40Je vous remercie pour cela.
04:42Quand on sélectionne, et je ne l'ai peut-être pas dit assez clairement,
04:45quand on sélectionne les intervenants extérieurs qui forment une partie de notre corps enseignant,
04:52ce n'est pas leurs médias d'activité qui nous intéressent.
04:55D'ailleurs, certains d'entre eux sont pigistes ou journalistes indépendants, ou plusieurs donneurs d'ordre.
05:01La plupart des journalistes vont avoir 3, 4, 5 employeurs qui sont des médias différents au cours de leur carrière.
05:07Ce n'est pas tant cet aspect-là qui nous intéresse que celui d'une transmission de compétences très précises,
05:15entre ce que nous impose la reconnaissance des cursus, ce qui reflète le projet pédagogique de Sciences Po,
05:22et ce que demande le métier en termes de compétences, et face aux enjeux que vous évoquiez sur la crise de confiance, etc.,
05:29mais également des enjeux technologiques extrêmement importants, et à l'échelle internationale.
05:35Face à tout ça, notre guide est plutôt celui des compétences et des expertises.
05:41Ce n'est pas tant la rédaction d'origine qui nous intéresse. Merci.
05:46Merci Madame la Doyenne.
05:48Je vois que vous mettez l'accent sur la diversité, le pluralisme des intervenants.
05:55Mais bon, à nouveau, je vois que sur les 175 intervenants, il n'y en a que 2 ou 3 du Figaro,
06:02aucun du JDD, de CNews, de Europe 1, de Valeurs Actuelles, et d'un ensemble d'autres médias pouvant être catégorisés de droite.
06:08Donc j'ai du mal à voir la diversité et le pluralisme parmi vos intervenants.
06:13Vous expliquez aussi que vous les choisissez selon des compétences techniques assez pointues.
06:17Vous parlez de data journalism, d'IA.
06:20Ma question est simple. Est-ce que dans ces rédactions que je vous ai citées,
06:24JDD, CNews, Europe 1, Valeurs Actuelles, vous ne trouvez aucun intervenant qui dispose de ces compétences pratiques ?
06:33Merci Monsieur le rapporteur.
06:35Peut-être que je n'ai pas été suffisamment claire.
06:39C'est à la fois l'expertise, mais également la disponibilité des journalistes.
06:43On est parfois confronté au fait que certaines personnes aimeraient bien enseigner,
06:48puisque l'exercice de transmission est extrêmement intéressant et riche.
06:53Mais simplement l'actualité, leur travail du quotidien en tant que journaliste professionnel ne leur laisse pas la disponibilité
07:02et la marge de manœuvre forcément pour pouvoir se rendre disponible auprès de ces étudiants.
07:07Il faut vraiment ramener les choses sur le quotidien et se rendre compte de ce que doit déployer un chargé d'enseignement
07:14face à un groupe d'étudiants qui est l'avenir du journalisme.
07:19Et chaque journaliste, je pense, face à ce groupe-là, a envie de transmettre ce métier dans ce qu'il a de plus beau et de plus riche,
07:30c'est-à-dire dans sa responsabilité très lourde vis-à-vis du citoyen.
07:35Et donc au quotidien, c'est un travail qui n'est pas si simple et qui demande une très grande disponibilité,
07:43en plus de tout ce que je vous ai décrit, l'expertise, la conciliation de la technique, des technologies.
07:50Et finalement, c'est au reflet du métier de journaliste qui devient de plus en plus exigeant.
07:55Merci.
07:55Je vous remercie de votre réponse pour rebondir et ce sera ma dernière question.
08:01Pour rebondir sur la dernière question du président, je vais vous prendre une question simple et un cas pratique.
08:07Notamment, vous parliez de masterclass et d'invités que vous avez pu convier et ma question s'adresse à l'ensemble des écoles.
08:15Très concrètement, est-ce que vous pourriez recevoir en masterclass des journalistes comme Geoffroy Lejeune,
08:20Sonia Mabrouk, Laurence Ferrari, Eugénie Basquiez, Christine Kelly ou Charlotte Dornelas ?
08:25Oui ou non ? Et si oui, lequel ? Et je pense que l'invitation sera passée s'il nous écoute.
08:30Monsieur le rapporteur, je vous indique que vos questions sont tout à fait légitimes et je considère que nous ne sommes pas allés au bout des questions sur la formation, sur l'enseignement.
08:45Vous avez posé des questions très précises.
08:46Je poursuivrai la séance quelques minutes. Je crois que vous devez aller sur Europe 1, on vous laissera quitter la salle.
08:53Mais quelques questions supplémentaires pour essayer d'élargir le cadre, parce que je pense que notre commission d'enquête doit aussi être en capacité d'avoir des réponses sur la formation des étudiants, des enseignants,
09:02au-delà de sujets très précis sur les intervenants et leur affiliation politique.
09:07Je vous laisse répondre à la question. Donc le rapporteur vous a interrogé, chacune et chacun, sur l'invitation.
09:12Je n'ai pas compris si c'était pour des masterclass ou pour des cours.
09:14C'est plutôt des masterclass dans vos écoles.
09:20Monsieur Savary, peut-être pour commencer ?
09:23Et peut-être pour être précis dans la réponse, est-ce que vous avez eu des demandes, des propositions ?
09:27Vous disiez même à Mawad qu'il n'y a pas souvent de disponibilité des journalistes.
09:32Mais est-ce que vous avez eu des journalistes de ces médias d'opinion, de ces médias qui vous auraient proposé d'enseigner
09:38et auxquels vous n'auriez peut-être pas répondu favorablement ?
09:41Est-ce que vous avez eu des demandes ? On sait que ça se fait aussi comme ça.
09:43Parfois, les interventions des journalistes peuvent vous solliciter.
09:46Est-ce que vous avez eu des sollicitations de journalistes qui appartiennent aux rédactions, aux médias que le rapporteur vient de citer ?
09:52Est-ce qu'ils accepteraient ?
09:53Savary, je vous laisse répondre.
09:59Pardon.
10:01D'abord, est-ce qu'on a eu des sollicitations des gens ou de journalistes ou des médias que vous venez de citer ?
10:06Je n'en ai pas de souvenirs récents.
10:09Et je vais redire ici que le choix d'une masterclass, ce n'est pas le choix d'une personne que l'on met face à des étudiants.
10:18Si on décide à un moment de faire une masterclass sur une thématique, d'illustrer un sujet, on va rechercher les compétences sur le sujet de la masterclass.
10:29Le sujet que nous voulons illustrer, que l'on veut traiter avec des étudiants.
10:35Vous pourriez me citer à peu près n'importe quel journaliste.
10:39Est-ce que vous feriez une masterclass avec lui ?
10:41J'ai la même réponse.
10:43Le choix ne se fait pas en fonction de tel ou tel, et encore moins, je l'ai déjà dit, de telle ou telle appartenance réelle ou supposée à telle ligne politique idéologique.
10:52Mais à un moment, si la masterclass est sur ce domaine-là, on va aller rechercher une compétence dans ce domaine-là.
10:59Donc, je n'ai pas d'autres réponses à apporter sur le cas précis que vous citez.
11:09Pour l'école de journalisme de Sciences Po, c'est vrai que là, par exemple, ce qu'on a prévu, c'est de célébrer les 200 ans du Figaro avec des archives.
11:19Donc, ça, c'est une intervention qui est calée.
11:22Un autre exemple très récent, Marianne Getty, qui a reçu le prix Bayeux, qui est un prix vraiment remarquable pour son travail sur le viol à Tigré.
11:36Ça s'appelle Filmer l'indicible, la masterclass qu'on a effectuée.
11:40Et puis, évidemment, pendant les questions sur le vote du budget, on a fait venir Delphine Thillot, qui est chef de service à la rubrique Investir,
11:48pour expliquer ce que c'était que le vote du budget et comment ça se structurait.
11:54Donc, voilà quelques-uns des exemples qui ont eu lieu très, très récemment.
11:58Donc, sans doute que ça ne couvre pas l'intégralité des 35 000 cartes de presse qui sont délivrées par an.
12:04Je rappelle que les masterclass, sur une année, c'est une vingtaine d'invitations.
12:08Sur 35 000 cartes de presse, c'est vrai qu'on va couvrir certains sujets et certains champs d'expertise, et sans doute moins d'autres.
12:18Mais néanmoins, voilà, c'est ouvert.
12:20On n'a pas reçu, et pour répondre à votre question, M. le Président, nous n'avons pas reçu de proposition.
12:28Particulièrement, en tout cas, nous n'avons pas eu besoin de...
12:31Nous n'avons pas refusé qui que ce soit, ni une proposition en particulier.
12:36Nous n'avons pas eu de proposition en ce sens.
12:38Et pour le reste, j'ai essayé de décrire au plus près et de façon la plus détaillée ce qui avait lieu en ce moment.
12:44Oui, M. le Directeur.
12:47Oui, M. le Président, je n'ajouterai pas aux arguments déjà évoqués et abordés par mes collègues, par économie de notre temps, si j'ai bien compris.
12:58Simplement, voilà, nous n'avons jamais aussi reçu de sollicitations.
13:03Je dirais juste que l'idée, à travers ces rencontres, ces masterclass, etc., c'est vraiment de permettre à nos étudiants de pouvoir,
13:12comme le disait Pierre Savary à l'instant, s'attacher en profondeur à la compréhension d'un enjeu particulier à un moment donné.
13:22Voilà, et nous n'avons pas pour démarche de considérer les choses d'un point de vue partisan ou de catégoriser les médias d'une manière ou d'une autre.
13:32Ce que nous cherchons, en effet, ce sont des compétences à transmettre à nos étudiants.
13:37Merci.
13:38Je peux peut-être compléter par rapport à...
13:40Vous n'avez pas entendu encore.
13:41En fait, les questions tournent autour de la classification à droite, à gauche des journalistes.
13:47Dans la liste qu'on vous a envoyée de médias qui étaient représentés à l'école,
13:50notamment pour présenter leur dispositif d'apprentissage, qu'on fait tous les ans,
13:54il y a beaucoup de médias qui sont des médias généralistes et qu'on ne peut pas classer à gauche ou à droite,
13:59en fait, et à l'intérieur desquels il y a des journalistes de gauche et de droite, sans doute, j'imagine.
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