00:00Repin, il est 5h42 et votre invité ce matin, Alexandre Lemaire, est Lux Messard, éleveur laitier dans l'Oise et vice-président de la FNSEA, Fédération Nationale des Syndicats d'Exploitants Agricoles.
00:11Bonjour Lux Messard.
00:12Bonjour.
00:13La guerre agricole nous menace. C'est Annie Gennevard, la ministre de l'Agriculture, qui nous le dit, notre souveraineté alimentaire est en danger.
00:22Dire que nous sommes en guerre, c'est une formule qu'on entend beaucoup, à bien des propos d'ailleurs.
00:28Est-ce qu'elle a raison, Annie Gennevard, de parler de guerre agricole ?
00:33Je ne sais pas si on est en guerre. Par contre, on est en pleine capitulation, ça c'est clair, depuis des années,
00:40et il est urgent que la France, notamment la France agricole, puisse avoir les mêmes armes, et là je vais parler en termes guerriers,
00:48pour pouvoir demain réussir ce challenge de nourrir nos Français, de nourrir la population.
00:56Quand on importe, depuis maintenant plusieurs années, plus de 50% de notre alimentation, oui, notre souveraineté alimentaire est en danger.
01:07Oui, aujourd'hui, il y a énormément de pays qui se servent de l'alimentation comme une arme.
01:13Et donc, oui, clairement, quand la Russie a envoyé des cargos, c'est des bateaux de 45 000, 50 000 tonnes de blé dans certains pays africains,
01:27tout ça qui a fait que, notamment, les Français se sont fait mettre dehors, et que les forces Weiner sont arrivées dans certains pays.
01:34C'est stratégique, l'alimentation.
01:36Oui, pour la première fois en quasiment 50 ans, notre balance commerciale pourrait être déficitaire.
01:43Ça veut dire qu'on n'arrive plus à produire tout ce que nous mangeons ?
01:47Ça veut dire qu'on a mis tellement de boulets au pied à l'ensemble des agriculteurs, j'en fais partie,
01:53qu'aujourd'hui, on se pose la question de savoir si on va semer du blé.
01:58On est à l'automne, au début de l'hiver.
02:00On se pose la question si ça vaut encore le coup.
02:04Quand dans un département comme l'Oise, deux années sur cinq, un agriculteur qui sème du blé ne gagne pas d'argent.
02:11Deux années sur cinq.
02:12Vous connaissez, vous, quelqu'un ?
02:13Un artisan, un commerçant, un entrepreneur qui va faire un boulot qui ne rapporte pas deux années sur cinq.
02:19Il y a un problème.
02:21Donc, vous avez raison.
02:23Cette balance commerciale agroalimentaire, elle était une pépite pour la France.
02:28Ça faisait partie de ce qui permettait de mettre un petit peu du beurre dans les épinards dans ce projet de loi de finances.
02:33Et aujourd'hui, c'est l'inverse.
02:35Et quand on devient déficitaire, alors on avait la vigne et la vitie qui cachaient un peu l'arbre qui cachait la forêt.
02:41Mais aujourd'hui, la viticulture est en grande difficulté.
02:44Ça y est, en 2025, depuis 1945, on devient déficitaire.
02:50Mais alors, l'explication, Lux Messart, ces boulets que vous avez au pied et dont vous parlez, lesquels sont-ils ?
02:58Alors, les boulets, c'est d'ordre administratif, c'est d'ordre réglementaire.
03:02Quand vous voyez qu'aujourd'hui, on n'est pas capable de stocker une goutte d'eau en plus, alors qu'il n'a jamais autant plu depuis 18 mois.
03:09Quand on n'est pas capable de construire un bâtiment.
03:13J'étais dans le Finistère.
03:15Il ne se construit plus un bâtiment de volaille ou de porc.
03:17Quand il ne se construit plus un bâtiment.
03:19L'âge de ces bâtiments, aujourd'hui, a plus de 25 ans.
03:23Donc, ils ne sont pas en performance énergétique.
03:26Ils ne sont pas en performance pour le bien-être des animaux.
03:29Donc, il est urgent de réagir.
03:31Je pense que quand la ministre fait son réveil de la souveraineté alimentaire,
03:36il est grand temps de se réveiller.
03:37Il est surtout grand temps que notre président de la République arrête de laisser rentrer en France
03:42tout ce qu'on ne veut pas et tout ce qu'on interdit à nous, agriculteurs.
03:46Oui, dans cette compétition mondiale, justement,
03:49qui est en train de nous la prendre, notre souveraineté agricole, alimentaire ?
03:53Je parlais tout à l'heure de la Russie.
03:55La Russie, qui a été importateur en 2000, ce n'est pas vieux,
03:59aujourd'hui est devenue, par exemple, sur les céréales, premier importateur.
04:03Il produit 80 millions de tonnes.
04:05Nous, en France, on en produit à peu près 35 millions de tonnes.
04:08On a d'autres pays.
04:09On a aujourd'hui, la France est fortement impactée par l'Ukraine.
04:14On est derrière le peuple ukrainien.
04:17Mais qu'on fasse payer aux agriculteurs français le coût de la guerre.
04:21Parce qu'aujourd'hui, comme les ports sont fermés,
04:24l'Ukraine, à elle seule, c'est 40% de l'agriculture européenne.
04:28Donc, elle est en train d'inonder le marché de sucre, de miel,
04:32de tout ce qu'il y a aujourd'hui.
04:34On peut produire chez nous.
04:35Et donc, tous ces éléments-là, avec, bien sûr, un niveau de...
04:39Ce n'est pas du tout les mêmes tailles d'exploitation.
04:42C'est ça qui ne va pas.
04:43La Chine, les États-Unis, également, sent-tu de menaces ?
04:46En tout cas, la Chine s'est armée, si on veut parler en méthode de guerre,
04:50sur son agriculture.
04:52L'Inde également.
04:53On a aussi, bien sûr, les pays d'Amérique du Sud.
04:57C'est le fameux accord du Mercosur,
04:59sur lequel c'est toute l'incohérence de notre président de la République,
05:04puisque la semaine prochaine, ils s'apprêtent à dire,
05:07finalement, on va finir par le signer,
05:08alors que nous, on dit non.
05:10On ne peut pas laisser se réveiller,
05:12se dire qu'on est en guerre alimentaire,
05:15et puis laisser entrer de l'autre bout de la planète.
05:17Aujourd'hui, on est en bons échanges avec ces pays du Brésil, d'Argentine.
05:24Mais si demain, ils auront, finalement, le choix de décider le prix,
05:28est-ce qu'ils acceptent de nous envoyer cette alimentation ?
05:31Je parlais d'une arme, l'alimentation est devenue une vraie arme,
05:35aujourd'hui, stratégique, géopolitique.
05:37Alors, pas précision, effectivement, pour les auditeurs d'Europe 1,
05:40Luc Messard, ce que vous parlez, effectivement,
05:42de cet accord entre l'Union Européenne et le Mercosur,
05:44puisque nous sommes à quelques jours, en effet,
05:46d'un vote décisif des 27 pour ou contre cet accord commercial
05:50avec les pays d'Amérique du Sud.
05:51Vous nous dites votre crainte que la France,
05:53qui jusqu'ici a redit son opposition à cet accord,
05:57lâche l'affaire, pour parler trivialement.
06:00En tout cas, il manque surtout, aujourd'hui, de vraies volontés.
06:04À chaque fois que la France a dit non,
06:06quand on a dit non à l'Irak,
06:07quand on a dit non à certains, je veux dire,
06:10des moments forts de l'histoire,
06:11là, ce 18 décembre prochain,
06:14il faut qu'Emmanuel Macron dise non,
06:17cet accord en l'État, il n'est pas acceptable.
06:19C'est ce qu'il a dit à Toulouse.
06:20Mais quand il était au Brésil, à Belém,
06:23il a dit que finalement, l'accord devenait acceptable.
06:25Non, ce n'est pas possible.
06:27Donc ne laissons pas rentrer ce que nous,
06:29on est capable de produire.
06:30Parce que derrière les hommes et les femmes,
06:31chez nous, moi, je peux vous dire,
06:33il y a des gens qui ont envie,
06:33il y a des jeunes qui veulent faire ce métier,
06:35mais c'est aussi l'industrie agroalimentaire.
06:37C'est de l'emploi, c'est du social,
06:39c'est de l'entretien du territoire,
06:41et ça, on en a besoin.
06:42Puisque l'on parle de ce que l'on met dans notre assiette,
06:45est-ce que ça veut dire qu'il faut aussi,
06:47pour changer la donne, se tourner vers le consommateur ?
06:49Je reprends la formule d'Annie Gennevar,
06:51arriver à ce grand réveil alimentaire, justement.
06:55Moi, je remercie tous les Français,
06:57tous les auditeurs qui, globalement,
06:59et là encore plus pendant les périodes de fêtes,
07:01vont acheter du français, du produit en France,
07:03transformer en France.
07:04Et ça, ça parle aux gens,
07:06parce qu'il y a de la transparence,
07:08il y a la garantie alimentaire derrière,
07:10et ça, c'est important.
07:11Et puis, je pense que derrière le consommateur,
07:14il y a surtout un citoyen.
07:15Et moi, j'en appelle à tous les citoyens,
07:17à tous les auditeurs,
07:19levez-vous, soyez derrière nous pour dire,
07:21il faut protéger nos agriculteurs,
07:23il faut leur donner les moyens de produire.
07:26Et c'est pour ça qu'on ira en masse à Bruxelles
07:28la semaine prochaine.
07:29On va y aller en tracteur,
07:30on va y aller en car,
07:31on va y aller en train.
07:32Les manifestations d'agriculteurs sont prévues à Bruxelles, oui.
07:33La semaine prochaine, jeudi prochain.
07:35Dès mercredi prochain,
07:36on va partir en tracteur la veille.
07:39On va rejoindre quelqu'un qui arrive d'Irlande,
07:43parce que c'est important.
07:45On y sera avec l'ensemble des pays.
07:46Et ça montre aussi que les chefs d'État,
07:49ils ne peuvent pas être sourds à ce peuple
07:51qui dit à un moment donné,
07:52la France, réveille-toi, c'est le moment.
07:55Moi, en tout cas, je suis persuadé
07:57qu'il y a encore des espoirs.
07:58On a des capacités,
07:59parce que l'agriculture,
08:00on doit la retrouver demain,
08:03dans nos cantines,
08:04parce que l'alimentation qu'on va importer,
08:06c'est celle-là qu'on retrouve dans nos hôpitaux,
08:07qu'on retrouve dans nos EHPAD.
08:09Et je pense qu'aujourd'hui,
08:10on a besoin de retrouver une alimentation de qualité,
08:13qui en même temps respecte l'environnement,
08:15et ça, c'est essentiel.
08:16Eh bien, écoutez, nous avons entendu votre message
08:18ce matin sur Europe 1.
08:19Lux Messart, merci.
08:20Je rappelle que vous êtes éleveur laitier dans l'Oise
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