- il y a 11 heures
Patrick Martin, président du Medef, était l’invité du Face-à-Face sur BFMTV et RMC de ce jeudi 4 décembre. Il est revenu sur sa réunion avec Sébastien Lecornu à Matignon qui a eu lieu ce mercredi 3 décembre et a été interrogé sur le vote du budget, sur la réforme des retraites ou encore sur la suspension de Shein en France.
Catégorie
📺
TVTranscription
00:00Vous êtes bien sur RMC et BFM TV. Bonjour Patrick Martin.
00:04Bonjour.
00:04Merci de répondre à mes questions ce matin. Vous êtes le président du MEDEF.
00:07Hier, vous étiez avec Sébastien Lecornu, dans ce moment où tout se joue,
00:12où on ne sait toujours pas d'ailleurs si on aura un budget, pas de budget,
00:15est-ce qu'il y aura vraiment dans ce budget ?
00:16Et c'est d'ailleurs ma première question, Patrick Martin, pour vous,
00:18c'est-à-dire pour les entreprises, est-ce qu'il vaut mieux ce budget-là
00:22ou pas de budget du tout ?
00:24C'est un vrai dilemme. Pas ce budget-là.
00:26Pas ce budget-là. Alors on nous prête, derrière des intentions politiques,
00:31non, on ne fait pas de politique, on fait de l'économie,
00:32on prend en compte la situation du monde et un décrochage assez rapide de la France.
00:37Je cite juste un cas.
00:40L'Allemagne, qui était très excédentaire en balance commerciale sur la Chine,
00:43est maintenant déficitaire.
00:44Et nous, en France, on parle de petits sujets, court-termistes, politiciens.
00:49C'est ce que j'ai dit au Premier ministre hier.
00:51Il faut quand même ramener de la raison.
00:52Vous allez me dire s'il vous a répondu ou pas,
00:54mais vous avez surtout répondu à une partie de ma phrase.
00:57Je voudrais juste m'assurer que vous aviez bien compris la question.
00:59Ma question, c'était, est-ce qu'il vaut mieux ce budget ou pas de budget ?
01:04Vous m'avez dit, il ne faut pas ce budget.
01:06Est-ce que ça veut dire que vous vous dites, au fond,
01:08il vaut mieux carrément pas de budget ?
01:10Non. D'abord, l'épreuve n'est pas terminée.
01:15Donc nous, au quotidien...
01:17Il reste quelques jours.
01:17Oui, on discute avec tous les parlementaires.
01:19Et je le redis, on essaie de les ramener à la raison.
01:21On va reculer sur les retraites, vouloir reculer dorénavant.
01:25Ce n'est pas du législatif, mais du réglementaire sur l'assurance chômage.
01:28Je suis envoyé un signal terrible.
01:29Ça veut dire que la France peut se permettre de travailler moins.
01:32Je redis que le monde autour de nous devient très brutal,
01:35y compris sur le plan commercial.
01:36Donc je ne désespère pas que nos parlementaires,
01:39parce que c'est évidemment à l'Assemblée que ça va se jouer,
01:41et dans un éclair de lucidité, un ressaisissement,
01:45et qu'on reprenne en compte la situation économique et sociale réelle du pays.
01:48On détruit des emplois.
01:50La croissance est molassonne dans le meilleur des cas.
01:52Il y a des faillites qui se multiplient.
01:54Il faudrait peut-être, à un moment donné, lever le nez du guidon
01:56et se projeter dans l'avenir.
01:58On va essayer de se projeter ensemble.
02:00Mais ce que je comprends bien, parce que c'est vraiment maintenant que ça se joue,
02:03c'est qu'au fond, vous espérez encore que ce budget revienne à la raison,
02:07pour reprendre votre expression, si ce n'était pas le cas.
02:11Certains disent qu'il ne vaut mieux pas le voter, ce budget.
02:13Et tant pis, il n'y aura pas de budget.
02:15C'est ce que dit Edouard Philippe.
02:17C'est ce que commence à laisser entendre une partie de LR.
02:20Est-ce que, oui ou non, vous vous dites,
02:23moi je préférerais qu'il ne le vote pas, ce budget,
02:25plutôt qu'on se retrouve avec ces taxes dont vous parliez,
02:28avec cette main mise sur une partie des entreprises ?
02:30Écoutez, au risque de vous choquer,
02:31je vais vous dire que les chefs d'entreprise s'en fichent.
02:34Tout ça, c'est de la tambouille.
02:36Nous, ce qui nous intéresse, c'est de prendre en compte la réalité de la situation économique.
02:40Et on a peu, on a peu dans nos rangs de constitutionnalistes
02:43ou d'agrégés de droits publics
02:46qui sont capables de vous expliquer ce que c'est qu'une loi spéciale,
02:49ce que c'est que des ordonnances, etc.
02:50Mais en tout cas, ça ne vous angoisse pas, cette loi spéciale, ces ordonnances,
02:53cette manière de reconduire le budget précédent ?
02:54On fait confiance à ce gouvernement pour trouver la meilleure voie de passage.
02:59Mais notre sujet n'est pas là.
03:00On voit les carnets de commandes qui se vident,
03:02on voit des emplois supprimés,
03:04on voit des investissements qui sont rapportés
03:06ou carrément supprimés eux aussi.
03:09Et on se désespère que le débat parlementaire
03:13ne prenne pas en compte cette situation.
03:14Après, ça nous dépasse.
03:16Ce n'est pas nous qui soutiendrons ou pas à l'Assemblée le gouvernement.
03:20Vous ne faites pas de politique, dites-vous.
03:22Mais vous êtes quand même angoissé par la politique et par ses conséquences.
03:25C'est-à-dire, ce que vous disent les patrons aujourd'hui,
03:28on en parlait ce matin avec Emmanuel Lechypre,
03:31il dit que c'est comme s'ils avaient presque intégré l'idée
03:35que 2026 était une année pour rien.
03:38C'est pire que ça.
03:39Et je crois que d'ailleurs, l'opinion publique française,
03:41au global, se désespère de ce spectacle politique.
03:44Mais je voudrais attirer votre attention là-dessus.
03:47Au même moment où donc, l'UNEDIC,
03:49l'assurance chômage étant déficitaire,
03:51450 000 emplois n'étant pas pourvus,
03:54les finances publiques étant dans un état d'élabrement avancé,
03:57le gouvernement veut rapporter un projet de réforme de l'assurance chômage,
04:02on nous dit qu'on va réduire les allègements de charges,
04:06donc renchérir le coût du travail à hauteur d'un milliard et demi.
04:09Et nous, on se dit objectivement, respectueusement, républicainement,
04:12ces gens-là marchent sur la tête.
04:14Et là, vous parlez effectivement d'une des propositions,
04:16toutes récentes, on a l'impression qu'effectivement,
04:18elles sont glissées les unes après les autres, jour après jour,
04:21sur l'idée de supprimer les allègements de charges
04:25sur les plus bas salaires.
04:28On est bien d'accord ?
04:28Une partie, et à vrai dire, plutôt sur les salaires intermédiaires,
04:32dans les professions les plus exposées à la concurrence internationale.
04:35Mais je le redis, d'un côté...
04:36Ça aura une conséquence sur l'emploi ?
04:37Ça aura une conséquence sur l'emploi, si ça passe ?
04:39Mais bien sûr, il y a trois mesures qui sont à l'étude.
04:42Je le redis, revenir sur un projet de réforme de l'assurance chômage,
04:46alors même que l'assurance chômage va être déficitaire d'un milliard six l'année prochaine.
04:51Revenir sur les allègements de charges à hauteur d'un milliard et demi,
04:54et revenir sur les aides à l'apprentissage.
04:56On est en train de foutre en l'air ce magnifique succès collectif sur l'apprentissage.
05:00On envoie des signaux qui sont absolument aberrants.
05:03Ça pèsera sur le marché de l'emploi.
05:05Ça pèsera sur la capacité qu'ont les entreprises à revaloriser les salaires.
05:09Et ça envoie un signal terrible, comme la suspension de la réforme des retraites,
05:13à savoir, on peut se permettre de ne pas travailler plus dans ce pays.
05:16Il vous a répondu quoi, Sébastien Lecornu ?
05:18Sébastien Lecornu, il est, je pense, comment dire, philosophiquement d'accord,
05:23mais très gêné aux entournures, de par ce panorama parlementaire.
05:27Et puis, disons les choses, une partie de poker menteur
05:30qui a été gagnée par le Parti Socialiste,
05:32et qui, je le déplore, n'est pas aussi responsable qu'il a pu l'être à certaines époques.
05:37Ça veut dire qu'il s'est fait avoir, et vous, vous êtes fait avoir du coup ?
05:40Je ne suis pas à sa place.
05:42D'ailleurs, je n'aimerais pas être à sa place, pour tout le dire, j'en serais incapable.
05:45Mais je crois qu'il y a un rapport de force qui s'est instauré,
05:49et qui est très défavorable.
05:50Non pas au Premier ministre lui-même, mais au pays.
05:53On va payer tout ça très cher.
05:55Ce n'est pas innocemment que je vous ai dit ce que faisaient les Allemands.
05:57Les Allemands vont soutenir leurs entreprises.
05:59Ils sont en train, de manière très réactive, de manière très déterminée,
06:04de remuscler leur économie,
06:05parce qu'eux prennent en compte la situation économique,
06:08et notamment cette concurrence très agressive,
06:10à certains égards, déloyale de la Chine.
06:12Vous aimeriez qu'on s'en inspire davantage,
06:14et puisque vous évoquez la Chine,
06:15rencontre cette nuit,
06:17entre Emmanuel Macron et Xi Jinping,
06:19la rencontre, le voyage qui se poursuit,
06:22la concurrence chinoise est-elle aujourd'hui déloyale ?
06:27Elle est en bonne part déloyale.
06:29Elle est en bonne part déloyale.
06:30Enfin, c'est avéré sur l'acier, sur le photovoltaïque,
06:32sur certains produits chimiques.
06:34Ça l'est dorénavant sur le commerce de détail.
06:36Je suis, je crois, le seul en France à avoir rencontré à deux reprises
06:39le CEO, le patron mondial de Chine,
06:43la fameuse place de marché.
06:44Je peux vous dire qu'en industrie, mais également dans le commerce,
06:47c'est un rouleau compresseur
06:49avec des stratégies très prédatrices
06:51qui sont exacerbées par le fait que la Chine,
06:53ne pouvant plus déverser sa production sur les Etats-Unis,
06:56elle la reporte sur l'Europe et sur la France.
06:58On va déstabiliser les pans entiers de notre économie.
07:00Est-il que l'on referme nos frontières ?
07:04C'est presque ce que demande le patron de la BPI, Nicolas Dufourque,
07:07qui dit que l'industrie chinoise va tuer toutes nos PME
07:12de Pologne jusqu'au bout de la Bretagne.
07:14Je redis régulièrement cette phrase parce qu'elle m'a énormément marqué.
07:17Et il invite l'Union européenne à se refermer le temps de se réarmer.
07:21Est-ce que vous l'invitez également à faire cela ?
07:23De prendre des mesures de protection temporaires,
07:26le temps de se réarmer à l'égard des pays qui sont agressifs
07:29et des loyaux, mais pas d'une manière générale.
07:32Il faut que dans le même temps, l'Europe, la France,
07:34s'ouvrent de nouveaux marchés.
07:35Je pense en particulier à l'Amérique latine.
07:37Donc vous êtes favorable au Mercosur ?
07:39Mais bien sûr, avec des mesures d'accompagnement
07:41pour les quelques filières agricoles
07:43qui pourraient souffrir de cet accord.
07:45Est-ce que vous êtes favorable également
07:46à la suspension de Chine au moins temporaire ?
07:50Oui, parce que je le dis quand j'ai discuté
07:53avec M. Donald Tang, le patron de Chine,
07:56très talentueux.
07:57Il a fait mine de s'étonner
07:59que sur sa place de marché,
08:01existent des produits strictement illégaux.
08:03On sait lesquels.
08:04Des produits non conformes à nos réglementations,
08:07y compris sur le plan sanitaire,
08:08qu'il y ait du contournement
08:09de nos réglementations fiscales.
08:13Donc à un moment donné,
08:13il faut rétablir de l'équité.
08:15Sans quoi, de la même manière
08:17qu'on a détruit en bonne part
08:19notre industrie automobile
08:20en laissant les Chinois submerger
08:22le marché européen,
08:23l'Europe a été coupable dans cette affaire.
08:25Demain matin, et c'est parti pour.
08:26On n'aura plus de commerce de centre-ville.
08:28Et en amont de ces commerces
08:30de détail non alimentaire,
08:31il y a l'industrie du jouet,
08:33il y a l'industrie textile,
08:34il y a l'industrie de la cosmétique,
08:35qui par contre-coup vont,
08:37elles aussi, être affaiblies.
08:38Est-ce que l'Union européenne,
08:39vous dites,
08:39elle a été coupable ?
08:40Est-ce qu'elle a encore aujourd'hui
08:41une forte responsabilité ?
08:43Pas seulement dans l'ouverture à la Chine,
08:45mais dans le fait d'avoir imposé,
08:46et c'est ce que disent
08:47un certain nombre de patrons,
08:48notamment dans l'automobile,
08:49d'avoir imposé trop tôt
08:51des normes trop contraignantes
08:52qu'elle n'imposait pas aux autres ?
08:56Et que l'Allemagne se ressaisit,
08:58avec beaucoup de détermination,
08:59l'Europe est en train
09:00de se ressaisir également,
09:01en prenant enfin
09:03un certain nombre de mesures
09:04qui, soit dit en passant,
09:05sont toutes écrites
09:06dans le rapport Draghi,
09:08auquel le MEDEF
09:09a beaucoup contribué.
09:10Et qu'on aurait donc dû lire plus tôt ?
09:12Oui, qu'on aurait dû lire plus tôt.
09:14Et puis j'insiste là-dessus,
09:15ce n'est pas qu'un rapport
09:16ou une stratégie
09:17au-delà du rapport défensif,
09:19c'est au contraire
09:20pour redonner un espoir,
09:22redonner une ambition,
09:23redonner toute sa place à l'Europe
09:24par voie de conséquence à la France.
09:25Demain, première réunion
09:27d'une nouvelle conférence à nouveau
09:29sur emploi, retraite, travail.
09:33Et vous n'y serez pas ?
09:34Non.
09:35Non, nous n'y serons pas
09:36parce que nous considérons
09:37que c'est un exercice de style.
09:38Et on ne peut pas d'un côté
09:39nous attirer, je dirais,
09:42sur un nouveau conclave,
09:43en définitive,
09:44et d'un autre côté
09:45prendre toutes les mesures
09:47que je viens d'évoquer
09:47qui vont pénaliser
09:48la performance économique,
09:50donc la performance sociale
09:51de la France.
09:52Il y a une forme d'urgence,
09:53prenons les choses dans l'ordre,
09:54bien sûr qu'il va falloir
09:55retravailler le sujet
09:56des retraites,
09:57bien sûr qu'il faut s'interroger
09:58sur la qualité de vie au travail,
10:00mais je vais vous dire,
10:01le vrai sujet de la France
10:01en ce moment,
10:02prioritairement,
10:03c'est quoi ?
10:04C'est de préserver l'emploi
10:05et de préserver
10:06le pouvoir d'achat.
10:07Donc,
10:08l'espèce de grand barnum
10:10que serait cette conférence
10:13ne nous paraît pas
10:14être très motivant,
10:15en tout cas très prioritaire.
10:15Vous n'êtes plus très copain
10:16avec vos confrères
10:18avec la CPME
10:20qui, elle, y va ?
10:21J'ai quand même l'impression
10:22que le patronat
10:23est un peu divisé aujourd'hui.
10:24Pas du tout.
10:25Vous ne vous êtes pas mis d'accord
10:26pour ceux qui y vont ?
10:27On a adressé au Premier ministre
10:28et au ministre du Travail
10:30il y a maintenant deux jours
10:31une lettre commune,
10:32précisément.
10:32Oui, parce qu'il vous avait écrit
10:33à vous tous.
10:35Non, il ne nous avait pas écrit
10:36à nous d'ailleurs.
10:37Il a écrit au patron de France.
10:39Ah, le Premier ministre ?
10:40Oui.
10:40Je pense au ministre du Travail.
10:42Bien sûr,
10:44mais le Premier ministre
10:44est parfaitement conscient
10:45qu'à la base,
10:48dans le patronat,
10:48les petits, les grands,
10:50les moyens entrepreneurs
10:51ne comprennent plus
10:52ce qui se passe
10:53et qu'il y a l'apparition
10:54d'un phénomène de colère.
10:55Moi, je peux vous le dire,
10:57je n'ai jamais eu
10:58autant de monde
10:58dans les réunions
10:59que je mène
10:59dans nos territoires,
11:01en province,
11:01je suis provincial,
11:03c'est 1000 personnes,
11:03c'est 1200 personnes,
11:05c'est 1500 personnes.
11:06Alors, on ne descend pas
11:06dans la rue,
11:07ce n'est pas violent,
11:08mais quand même,
11:09il y a l'expression
11:10au moins d'une incompréhension
11:12et progressivement
11:13d'une forme de colère.
11:14On ne comprend pas
11:15sur quel terrain
11:16jouent les politiques.
11:17Mais vous dites
11:18on ne descend pas dans la rue,
11:19on ne manifeste pas,
11:19vous avez failli ?
11:20On a failli,
11:21on a failli,
11:21mais comme il n'y a plus
11:22de gouvernement à ce moment-là,
11:23on ne savait pas
11:23à qui parler.
11:24Cette idée
11:25d'un grand meeting
11:26des patrons,
11:28elle n'est toujours pas d'actualité,
11:29enfin, elle n'est plus d'actualité.
11:31Ou vous pourriez la réveiller ?
11:32J'espère qu'on n'aura pas
11:33à la réveiller.
11:34Et je pense qu'on n'aura pas
11:35à la réveiller
11:36parce que quand même,
11:36l'entretien depuis
11:37deux heures et demie
11:38que nous avons eu hier
11:39avec le Premier ministre,
11:40tout le bureau exécutif
11:42du MEDEF,
11:42donc toutes les filières
11:43représentées,
11:44était un discours,
11:46enfin, du moins,
11:46une discussion
11:47à certains égards
11:49rassurante,
11:51sauf sur le social.
11:52Je reviens sur ce que
11:53je viens de vous dire.
11:54Après la suspension
11:55de la réforme des retraites,
11:56suspendre la réforme
11:57de l'assurance chômage,
11:59vouloir rogner encore
12:00les allègements de charges
12:01pour les entreprises
12:02et revenir sur l'apprentissage,
12:03ça nous paraît aberrant.
12:04Et on l'a dit avec énergie.
12:06Patrick Martin,
12:07Sophie Binet,
12:08vous cible dans un entretien
12:09qu'elle accorde au journal
12:10Le Monde cet après-midi.
12:11Elle dit,
12:12on a l'impression
12:12que le MEDEF
12:13a eu l'impression
12:14d'avoir tous les droits.
12:16Nous sommes face
12:16à des caprices
12:17d'enfants gâtés
12:18et nous sommes face
12:19à une radicalisation
12:20du patronat.
12:22Alors,
12:23si par enfant gâté,
12:24elle vise
12:25les 70 000 chefs d'entreprise
12:27qui, cette année,
12:28vont déposer le bilan
12:29perdre leurs salariés,
12:31perdre leur patrimoine,
12:32je trouve que c'est
12:33particulièrement malvenu.
12:35Si, disant ça,
12:37elle vise
12:37tous ces chefs d'entreprise,
12:39toutes ces entreprises,
12:40à vrai dire,
12:40au-delà de leurs responsables,
12:41qui sont confrontés
12:42à la concurrence,
12:43dont chinoise,
12:44je pense qu'elle fait
12:45une lourde erreur
12:46d'analyse.
12:47Donc voilà,
12:47moi je ne veux pas polémique
12:48avec elle,
12:49je prends connaissance.
12:50C'est quand même
12:51en train de virer
12:51au bras de fer.
12:52Non, non, non.
12:53Elle parle de votre radicalisation,
12:55de votre caprice d'enfant.
12:57Mais, moi, je ne rentre pas
13:00dans des querelles personnelles,
13:01surtout avec Sophie Binet,
13:02que j'estime comme
13:03toutes ces homologues.
13:04Bien, ça n'est pas la question.
13:06Ce n'est pas un caprice d'enfant,
13:08ce n'est pas une radicalisation
13:09du MEDEF,
13:10c'est une radicalisation
13:11de la situation économique
13:13et par voie de conséquences sociales.
13:15Que je sache,
13:16que je sache,
13:17on est en train
13:18de détruire des emplois.
13:19Dans le secteur privé,
13:20en l'espace d'un an,
13:21c'est plus de 100 000 emplois.
13:22Et ça s'accélère.
13:23C'est ça, notre souci,
13:25et ça devrait être le sien aussi.
13:27Sophie Binet,
13:27qui hier disait
13:29à propos de LVMH,
13:31je cite,
13:32que l'essentiel des emplois
13:34du géant du luxe
13:34est à l'international,
13:36que finalement,
13:37LVMH n'est pas un point fort
13:40de l'économie française,
13:42voire même que c'est un handicap
13:44pour la France.
13:45C'est lamentable.
13:46C'est lamentable de dire ça.
13:48Je pense qu'on devrait se réjouir.
13:49En tout cas, moi,
13:50je me réjouis
13:50qu'on ait des grands groupes,
13:51dont LVMH,
13:53qui se projettent
13:53à l'international.
13:55Que je sache,
13:55on a encore une balance
13:56commerciale déficitaire
13:57de 80 milliards d'euros par an.
13:59Je crois que ça devrait
14:00nous réunir au contraire
14:01pour qu'ensemble,
14:02on travaille sur le modèle productif,
14:04organisation syndicale,
14:05organisation patronale.
14:06En tout cas,
14:06c'est la demande du MEDEF
14:07pour qu'ensemble,
14:09on identifie
14:10les voies et moyens
14:10de se redresser.
14:12Le fossé est en train
14:13de se creuser davantage ?
14:15Non, mais si vous voulez,
14:17certains font de la politique.
14:18Le MEDEF ne fait pas de politique.
14:20Moi, je ne vais pas aller faire
14:20des numéros de claquettes.
14:21Je ne prends pas parti
14:22pour un tel ou un tel.
14:23On sait très bien
14:24qu'une élection présidentielle
14:25qui se rapproche
14:26et que ça nous met tous sous pression.
14:27Elle fait de la politique,
14:28la CGT.
14:28Mais bien sûr.
14:29Moi, ce qui m'intéresse,
14:30c'est de savoir
14:31comment on pourra
14:32sainement, je dirais,
14:34redistribuer du pouvoir d'achat
14:35en créant de la richesse
14:37dans ce pays.
14:37Un mot quand même aussi
14:38sur ces prises de position
14:40et les phrases utilisées.
14:41Elle l'avait dit
14:42à propos des patrons
14:43qui pouvaient être tentés
14:45d'investir aux Etats-Unis.
14:47« Les rats quittent le navire ».
14:48Cette phrase,
14:49elle a été attaquée
14:50par une patronne,
14:52Sophie de Menton.
14:53Et pour l'instant,
14:54la justice la suit
14:54puisqu'elle a décidé
14:55de mettre en examen
14:56Sophie Binet.
14:57Quand on est un patron syndical
14:59du côté du patronat,
15:01du côté des travailleurs
15:03de la CGT,
15:04est-ce qu'on doit avoir
15:05le droit de pouvoir dire
15:07une phrase comme
15:07« Les rats quittent le navire ».
15:08Est-ce que vous regrettez
15:09cette judiciarisation
15:10ou est-ce qu'on comprenait ?
15:10Vous comprenez ?
15:11Non, c'est une question de droit,
15:13c'est une question de bon sens.
15:14Ce n'est pas à nous,
15:15je pense,
15:15partenaires sociaux,
15:16en tout cas,
15:16le MEDEF ne le fera pas.
15:17Ce n'est pas à nous
15:18de remettre de l'huile
15:18sur le feu.
15:19Le pays est assez inflammable
15:21comme ça.
15:21Et ce que j'observe,
15:22avec beaucoup de prudence,
15:24c'est que pour l'instant,
15:24l'entreprise reste
15:25un des derniers lieux
15:26de cohésion sociale,
15:27un des derniers lieux
15:28d'inclusion.
15:29Donc c'est un bien précieux.
15:30Ce n'est pas un bien précieux
15:31que pour les chefs d'entreprise.
15:33Vous avez 80% des salariés
15:34qui disent être bien
15:35dans leur entreprise.
15:36Et je pense qu'il y a
15:37beaucoup de bon sens
15:38chez les Français.
15:39Donc ne nous laissons pas
15:40impressionner par les postures,
15:42par les diatribes,
15:43par les anathèmes.
15:45Ce qui nous importe,
15:46c'est les faits.
15:46Mais je n'ai pas compris.
15:47Vous condamnez ces propos
15:48ou vous condamnez le fait
15:50que ça soit judiciarisé ?
15:52Non, je ne condamne pas
15:53le fait que ce soit judiciarisé.
15:55Vous trouvez que c'est fond ?
15:56Ça imposera que le dialogue
15:58soit plus court.
15:59Je ne veux pas tomber
16:00dans ce panneau-là.
16:01Je ne veux pas tomber
16:02dans ce panneau-là.
16:03Au MEDEF,
16:04nous sommes des gens raisonnables,
16:05nous sommes des gens
16:05qui travaillent,
16:06nous sommes des gens
16:06qui réfléchissent
16:07et nous sommes des gens
16:08qui proposent.
16:09Donc tout ça,
16:10c'est l'écume des choses
16:11et ce n'est pas le MEDEF
16:12qui ira hystériser
16:13le débat public.
16:14Vous parlez avec le RN ?
16:16On ne parle pas plus
16:16avec le RN qu'avec LFI,
16:18donc pas beaucoup.
16:20Et pour nous,
16:20ça n'est toujours pas
16:21le sujet du moment.
16:22Mais ce que je veux dire,
16:23c'est est-ce que vous estimez,
16:24puisque je vous pose
16:24la question sur le RN,
16:25vous répondez LFI,
16:26est-ce que vous mettez
16:27les deux sur un plan d'égalité ?
16:29Mais non, on n'en est plus là.
16:30C'est terrible à dire,
16:31on n'en est plus là.
16:32Nous, on se déconnecte,
16:33c'est terrible à dire,
16:34on se déconnecte
16:36de ces débats parlementaires,
16:38de ces postures parlementaires
16:39qui sont indéchiffrables.
16:41Mais est-ce que vous refusez
16:42de les voir
16:42ou est-ce que juste
16:43vous ne les voyez pas ?
16:44On ne refuse pas de les voir,
16:45mais on veut,
16:46comment dire,
16:47s'extraire,
16:48s'extraire
16:49de ces postures
16:51politiciennes,
16:52court-termistes,
16:53qui peuvent être
16:53celles du RN,
16:54quand on regarde
16:55comme d'un vote à l'autre,
16:56ils peuvent changer de posture,
16:57mais ça s'applique
16:59à d'autres formations politiques.
17:01On ne veut pas
17:02se laisser embarquer là-dedans.
17:03Quand vous voyez
17:03que, effectivement,
17:04le RN, pour certains,
17:06est devenu communiste,
17:07c'est la critique
17:08que lui envoient
17:08notamment les partis de droite,
17:11pour d'autres,
17:11il serait au contraire
17:12devenu trop libéral.
17:13Est-ce que le rapport
17:14aux entreprises du RN
17:15s'est normalisé ?
17:17Je ne sais pas
17:18vous répondre.
17:19Je ne sais pas
17:19vous répondre.
17:20Et pardon,
17:21ça n'est pas mon problème.
17:22Ça n'est pas le problème
17:23des chefs d'entreprise.
17:24Beaucoup de chefs d'entreprise
17:25sont le dos au mur.
17:26Beaucoup de chefs d'entreprise
17:26ont des problèmes...
17:27Mais je m'ai dit
17:27que vous avez regardé
17:27leur programme économique.
17:28Mais j'avoue
17:29que je ne le comprends pas toujours.
17:31En tout cas,
17:32vous n'êtes au minimum
17:33pas du tout convaincu.
17:34Non, mais pardon,
17:35nous, notre problème,
17:36c'est de savoir
17:36si on va rentrer des commandes,
17:38si on va pouvoir préserver
17:39des emplois
17:39et si possible en créer,
17:41si on va pouvoir tenir tête
17:42à la concurrence internationale.
17:44Et je redis
17:44que le débat parlementaire
17:46en ce moment
17:46nous éloigne tellement
17:48de ces préoccupations
17:49existentielles
17:50pour les entreprises
17:51et pour le pays
17:52que finalement,
17:53on prend le parti
17:53de ne même plus chercher
17:55à suivre l'actualité politicienne
17:57au quotidien.
17:57Vous lancez
17:58une véritable alerte,
17:58je le sens.
17:59Je lance une véritable alerte.
18:00La France n'est pas
18:01un monde à part.
18:03Mais la France politique,
18:04actuellement,
18:05est un monde à part.
18:06Eh bien, écoutez,
18:07un moment ou un autre,
18:08on va le payer
18:08et nous,
18:09on veut absolument éviter ça.
18:11Il faut un ressaisissement,
18:12il faut de la lucidité,
18:13il faut du courage.
18:14Merci Patrick Martin
18:15d'avoir répondu
18:16à mes questions ce matin.
18:17Président du MEDEF
18:18sur RMC et BFM TV.
18:20Il est 8h47.
18:21Sous-titrage Société Radio-Canada
Écris le tout premier commentaire