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Préface avec Didier van Cauwelaert - "L’impasse des rêves"
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il y a 14 heures
Préface avec Didier van Cauwelaert - "L’impasse des rêves"
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00:00
Musique
00:00
Bonjour et bienvenue pour ce nouveau numéro de Préface, l'actualité du livre.
00:17
Notre invité aujourd'hui, Didier Von Kovlart. Bonjour Didier.
00:20
Bonjour Philippe.
00:20
Merci d'avoir accepté cette invitation.
00:22
Il y a eu un aller simple, bien sûr, ça c'était en 1994.
00:25
Et puis depuis, il y a eu tellement d'autres histoires, tellement d'autres romans, tellement d'autres livres.
00:29
Et puis il y a ce nouveau titre qui sort aux éditions Alba Michel, l'impasse des rêves.
00:34
Avec un charmant jeune homme en photo en noir et blanc sur la couverture qui vous ressemble étrangement.
00:38
Tiens donc, on va faire connaissance avec un narrateur, un narrateur qui est un écrivain.
00:43
Et puis Anaïs.
00:45
Ces deux-là ne se connaissent pas et pourtant le destin va les réunir puisque tous les deux rêvent d'écrire,
00:50
tous les deux envoient des manuscrits.
00:52
Sauf que lorsqu'ils reçoivent chacun le retour d'une maison d'édition,
00:55
la maison d'édition s'est trompée et le narrateur va retrouver le manuscrit de cette jeune femme, Anaïs,
01:00
qu'il ne connaît pas, mais il va décider d'aller lui rendre visite pour lui rapporter.
01:04
D'abord, en toute logique, si l'enveloppe qu'il a reçue, son nom,
01:10
et qui contient le manuscrit d'Anaïs Forge qui s'appelle « Je te tuerai dimanche prochain »,
01:15
si lui il l'a reçue, il pense que c'est une inversion de secrétaire qui s'est trompée.
01:19
Ils ont été refusés au même comité de lecture et donc elle a reçu son manuscrit.
01:24
Alors, comment procéder à l'échange ?
01:27
Par curiosité, il jette un œil et là, il ne peut plus s'arrêter.
01:31
Il est captivé par son histoire et il tombe amoureux de qui ?
01:34
De l'héroïne, de la romancière, de l'alchimie entre les deux,
01:39
de cette sorte d'alter-ego féminin qu'il pressent entre les lignes.
01:44
La même passion d'écrire, le même besoin de corriger la réalité,
01:50
d'avoir une hyper-lucidité et en même temps des illusions dommageables.
02:00
Et il se dit, est-ce que c'est vrai ?
02:02
Oui, puis surtout le suspense terrible, est-ce que c'est vrai ou pas ?
02:05
Ce qu'il y a dans ce livre, est-ce qu'elle invente tout ?
02:07
Est-ce qu'elle invente cette histoire d'une jeune prof de lettres
02:09
qui a une vie idyllique en apparence avec un mari chirurgien,
02:13
mère de leur petite commune, deux petites jumelles adorables
02:16
et derrière tout ça, l'enfer, un prédateur toxique ?
02:21
Comment peut-on écrire une histoire comme ça si on a une vie aussi bien rangée ?
02:24
Voilà, et en même temps, elle domine cette situation d'emprise
02:28
en peaufinant le scénario du crime parfait.
02:31
Est-ce que c'est vrai ce projet ?
02:33
Il est tellement interpellé, il n'y a pas de numéro de téléphone sur le manuscrit,
02:37
il y a juste une adresse, il prend sa voix.
02:39
Nous sommes dans les années 80, en l'occurrence.
02:41
Et donc notre narrateur, ce romancier en herbe,
02:44
prend sa petite voiture pour partir à la rencontre d'Anaïs
02:48
et effectivement, il va y avoir rencontre.
02:50
Et c'est ce que vous allez nous raconter au fil des pages.
02:53
Et alors, la question que forcément le lecteur va se poser
02:56
tout au long de cette intrigue, c'est finalement,
02:58
ce romancier qui parle à la première personne,
03:01
est-il ou n'est-il pas Didier Van Kovlar ?
03:02
Parce que vous brouillez un peu les pistes,
03:04
des fois il y a les titres de vos romans qui apparaissent.
03:06
Voilà, mon nom n'est pas cité, mais les titres de mes livres.
03:09
Et alors on s'est dit, finalement, Didier Van Kovlar,
03:11
est-il vraiment vécu cette histoire ?
03:14
Où est-ce né de l'imagination du romancier fait qu'on qu'il est ?
03:17
C'est à vous de décider.
03:19
Je ne vais surtout pas mettre des photos indicateurs.
03:20
C'est au lecteur de décider.
03:21
Ah oui, et j'adore quand les gens me disent,
03:24
ce passage-là, on sent que vous l'avez vécu, ça ne peut pas s'inventer.
03:28
Et vous savez, vous, si vous l'avez vécu.
03:29
Et juste, ils mettent le doigt sur quelque chose qui le produit de mon imaginaire.
03:33
Inversement, quand ils me disent, quelle imagination vous avez,
03:37
et qu'ils me le disent sur une scène qui, justement,
03:40
c'est la réalité qui est cette imagination-là.
03:43
Parce que justement, c'est tout l'intérêt de cet ouvrage,
03:45
c'est qu'il y a cette intrigue, il y a cette rencontre entre Anaïs et le narrateur,
03:49
et puis ce manuscrit qui raconte le crime parfait, aura-t-il lieu ou pas ?
03:53
Et puis l'autre lecture...
03:54
Et les conséquences du manuscrit sur elle, sur lui, sur leur relation.
03:58
Quand il arrive chez elle, il découvre qu'il est dans le décor du livre.
04:01
Il reconnaît absolument toute la maison.
04:04
Elle, il la reconnaît, elle n'a pas raté sa description.
04:07
Il y a un mari dans la cuisine, il y a les jumelles à l'étage.
04:09
Est-ce que le reste est vrai ?
04:11
Un mari qui a une forte personnalité,
04:13
qui, effectivement, pourrait être le genre de personnage qui soumet un peu sa femme.
04:17
Et là, tout à coup, le voilà sur le vif,
04:19
avec les créatures, la situation du roman,
04:22
en train de se dire c'est vrai ou c'est pas vrai.
04:24
Un peu la question que vous venez de me poser.
04:26
Et en plus, il découvre que le mari ne savait absolument pas
04:29
que sa femme avait écrit un livre,
04:30
à force dure qu'elle l'avait renvoyé à un éditeur.
04:33
Et il se dit, mais qu'est-ce que j'ai déclenché là ?
04:36
Donc, il est obligé de s'adapter à la situation.
04:39
Et le mari dit, vous êtes venu de Paris pour rendre ce manuscrit,
04:43
vous allez rester dîner.
04:44
Il y a une sorte de piège qui se referme aussi sur le narrateur.
04:49
Mais, en fait, qui a les clés du piège ?
04:51
Qui domine l'autre ?
04:52
Là, tout à coup, il n'arrête pas de changer de point de vue,
04:56
de sentiment, d'analyse.
05:00
Est-ce que c'est lui qui a la main sur elle ou est-ce que c'est elle ?
05:04
Est-ce qu'il est vraiment son bourreau ?
05:06
En tout cas, elle en a fait son sujet.
05:07
Donc, on a l'impression par moment que c'est elle qui met en scène tout ça.
05:13
Comme un romancier, une romancière met en scène le personnage du livre.
05:16
Donc, il est complètement paumé par ses allers-retours,
05:19
de ses incertitudes,
05:21
mêlés à une émotion sensuelle qui ne fait que se décupler
05:25
à mesure que la situation se tend.
05:29
Et voilà, on ne va pas en dire plus,
05:31
mais toutes les conséquences de ce moment-là sur dix ans,
05:34
c'est ce qu'on va découvrir.
05:36
Et pour finir de répondre à votre question,
05:38
la vérité du romancier n'a rien à voir avec l'exactitude des faits.
05:42
Ce qui compte, c'est de retrouver la justesse des émotions.
05:45
C'est de comprendre ce qu'on n'a pas vraiment compris dans la réalité,
05:52
les éléments dont on manque, les incertitudes.
05:55
Le romancier a le privilège de pouvoir repasser sur les choses
05:59
ou bien qu'il a un peu raté dans le réel
06:02
ou qu'il a compris de travers ses hésitations,
06:08
ses lâchetés, ses défis, tout ça,
06:14
repasser au tamis de l'écriture,
06:17
c'est-à-dire du souvenir plus de la reconstruction,
06:20
de l'imaginaire et du devoir de mémoire.
06:24
Tout cet assemblage-là, c'est ça qui fait un roman
06:27
et c'est ça qui a construit moi-même.
06:29
Aujourd'hui, en toute sincérité, on pose la question sur un passage.
06:35
Et je me dis, est-ce que celui-là, il s'est vraiment passé comme ça
06:36
ou est-ce que je l'ai inventé ?
06:38
Pour vous-même, ça devient aussi confus parfois.
06:41
Telle qu'elle est écrite là, c'est la vraie histoire.
06:45
D'ailleurs, sans dévoiler la fin,
06:47
mais le diapason du livre, c'est un mot que celle qui m'a inspiré Anaïs
06:51
m'a écrit un jour.
06:53
Notre histoire est à toi, invente ce qui te paraîtra le plus vrai.
06:57
Il y a donc la première lecture, ce que je disais en préambule,
07:00
à savoir cette intrigue diablement bien ficelée que vous avez conçue
07:04
qui se lit un peu comme un thriller,
07:06
parce que va-t-on aller vers le crime parfait.
07:08
Et puis l'autre lecture, c'est la mise en abyme de la littérature,
07:12
de la vie d'un écrivain, parce que c'est aussi ce que vous racontez.
07:14
Et ce, sur plusieurs années, parce qu'on remonte un peu le fil du temps.
07:17
Il y a de nombreux détails qui sont très chronologiques
07:20
et qui racontent en parallèle aussi la vie
07:22
que vous avez peut-être menée en tant que jeune romancier.
07:24
Oui, et puis l'influence de la littérature sur nos destins.
07:27
C'est vrai que je suis le produit de mes rêves,
07:29
mais de mes rêves actifs, qui étaient l'écriture,
07:33
le besoin d'être publié, de toucher des gens comme elle.
07:38
Et les conséquences de tout cela, à la fois sur nos destins
07:40
et sur la manière dont, quand les deux destins se croisent,
07:45
on réagit, on part à l'aveuglette,
07:50
ou on recule par lucidité.
07:54
Tout cela, ce que vivent toutes les personnes,
08:01
fortiori les amoureux, les passionnés,
08:02
mais c'est encore multiplié par le positionnement
08:06
et l'énergie du romancier qui, à la fois, a besoin de contrôler
08:10
la forme et le fond, et en même temps,
08:13
qui a l'impression que c'est le fruit de son imagination,
08:16
de ses rêves, de ses fantasmes,
08:18
qui le contrôle lui-même.
08:20
Vous écrivez en ouverture,
08:22
« Quand le passé nous rattrape,
08:23
c'est parfois pour redonner un sens au présent ».
08:26
Pourquoi ce livre, dans lequel vous êtes,
08:29
sans être complètement, puisque ça reste un roman,
08:32
mais il y a quand même votre photo sur la couverture,
08:33
pourquoi ce roman, maintenant, dans votre parcours d'auteur,
08:36
sachant que le prix Goncourt, c'était il y a 30 ans,
08:39
pourquoi cette envie d'emmener par la main votre lecteur
08:42
pour revivre certains moments de votre vie de romancier ?
08:45
Ce n'est pas moi qui ai décidé,
08:46
c'est vraiment les personnages, la situation,
08:48
qui, à un moment donné,
08:49
d'ailleurs, la réponse est contenue
08:52
dans la première phrase que vous avez lue,
08:54
le besoin, justement, de redonner un sens au présent,
08:57
de faire à la fois un retour en arrière
08:59
afin d'aller de l'avant,
09:00
que ce soit une œuvre de fiction ou une œuvre un peu hybride,
09:04
comme celle-ci, fiction pure ou fiction hybride,
09:08
ce sont les personnages qui, à un moment donné,
09:10
vous réclament de naître,
09:13
vous réclament l'accouchement,
09:14
vous réclament d'être partagés avec les autres,
09:17
de venir au monde.
09:18
Voilà un roman qui pourrait se lire comme un thriller,
09:20
mais qui est bien plus que cela,
09:21
parce que c'est un livre d'une très grande sensibilité,
09:23
et puis dans lequel vous vous dévoilez,
09:25
peut-être aussi, d'une certaine façon.
09:27
C'est votre actualité, dit David Kovlart,
09:28
ça s'appelle L'impasse des rêves,
09:30
vous êtes publié chez Albin Michel.
09:32
Merci beaucoup.
09:32
Merci à vous.
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