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  • il y a 2 jours
L’Opinion poursuit ses entretiens d’experts autour des nouvelles techniques génomiques pour mieux en comprendre les enjeux. Dans ce cadre, Hervé Monconduit, responsable brevets chez Bayer France, s’entretient avec notre journaliste Stéphanie Roy pour évoquer les problématiques liées à la propriété intellectuelle dans ce domaine.

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Transcription
00:00Bonjour à tous, l'Opinion poursuit ses entretiens d'experts autour des nouvelles techniques génomiques pour mieux comprendre les enjeux.
00:11Pour cela, j'ai le plaisir de recevoir aujourd'hui Hervé Monconduit. Bonjour.
00:15Bonjour.
00:15Vous êtes responsable brevet chez Bayer France. Merci beaucoup d'être avec nous.
00:19Nous allons faire un focus ensemble sur les problématiques autour de la propriété intellectuelle.
00:24Deux dispositifs sont utilisés actuellement par les sélectionneurs végétaux.
00:27Le certificat d'obtention végétale, ou COV, et le brevet.
00:32Quelles sont les différences entre ces deux dispositifs ?
00:35Alors, tout d'abord, il faut peut-être rappeler ce que créent les sélectionneurs, finalement.
00:39Ils créent des nouvelles variétés végétales.
00:42C'est le but de leur recherche, finalement, et qu'ils vendent ensuite sous forme de semences en général.
00:47Une variété végétale, c'est quoi ? On en connaît par exemple des variétés de roses, des variétés de pommes, des variétés de salades.
00:54Mais en fait, il existe aussi des variétés de blé ou de maïs pour les grandes cultures, par exemple.
00:58Une variété, en fait, c'est quoi ? C'est un assemblage de caractères au sein d'une même espèce, en fait.
01:03Par caractère, on entend quoi, finalement ?
01:05On entend des... ça peut être, par exemple, la couleur des pétales d'une fleur.
01:10Mais ça peut être les qualités gustatives d'un fruit ou d'un légume.
01:13Ça peut être aussi des résistances à des maladies, des résistances à un stress hydrique,
01:19ou aussi la quantité, simplement, de graines que la plante va générer.
01:22Donc, tout ça, ce sont des caractères.
01:24Et quand on les agrège, différents caractères au sein d'une même plante, en fait, c'est ce qu'on crée une variété, tout simplement.
01:30Les variétés, en Europe, elles sont protégeables uniquement par le COV.
01:33D'ailleurs, partout dans le monde, quasiment, à part dans quelques pays.
01:37Et, par contre, le COV, lui, ne protège pas les caractères spécifiques qui sont à l'intérieur des variétés végétales.
01:45Pour protéger ces caractères, en fait, il n'existe qu'un outil, aujourd'hui, c'est le brevet.
01:50Le brevet permet de protéger les innovations technologiques, et notamment, en l'occurrence, ici, quand on parle de caractères de plantes,
01:57ce sont des caractères qui sont obtenus par des moyens techniques,
01:59comme, par exemple, les moyens dont on parle actuellement, qu'on nomme les NGT, les nouvelles techniques génomiques, par exemple.
02:07Donc, en fait, il s'agit de deux outils qui protègent deux objets différents, finalement.
02:12Le COV pour les variétés végétales, l'objet pour les caractères obtenus par des moyens techniques.
02:17Alors, quitte à être redondant, pour être bien clair, puisque ça fait un peu débat,
02:22le brevet n'est pas une alternative au COV, il ne vient pas se substituer, il est nécessaire et complémentaire.
02:28Tout à fait. Et en fait, comme tous les types de propriétés intellectuelles,
02:32ils servent à, finalement, stimuler l'innovation.
02:37Et quand on dit stimuler l'innovation, en fait, c'est faire des investissements de recherche, finalement, dans un domaine ou dans l'autre.
02:44Donc, le COV sert à stimuler l'innovation dans la recherche variétale, création de nouvelles variétés.
02:48Et en fait, il faut aussi stimuler la création de nouveaux caractères.
02:53Alors, il y a plein de caractères qui sont naturels et que les sélectionneurs utilisent depuis longtemps,
02:56mais notamment avec les nouvelles techniques génomiques, justement, on peut créer des nouveaux caractères
03:01et ça demande quand même des efforts de recherche qui sont significatifs
03:04et qui sont complètement distincts de la recherche variétale, tout simplement.
03:08Et donc, pour stimuler cette recherche-là aussi, finalement, il faut aussi un outil de propriété intellectuelle,
03:13en l'occurrence, c'est le brevet.
03:14Voilà. Donc, les deux permettent, sont complémentaires en ce qu'ils permettent de protéger toutes les innovations
03:21dans le domaine de la sélection variétale.
03:23Quels sont les critères d'obtention d'un brevet ? Est-ce que c'est facile ?
03:26Sur les innovations qui, elles, vont pouvoir potentiellement avoir un titre de brevet,
03:32s'appliquent des critères.
03:33Le premier d'entre eux, c'est un critère de nouveauté.
03:36En fait, on ne peut simplement pas protéger, quelle que soit une propriété intellectuelle,
03:39quelque chose qui existait déjà avant.
03:41Il faut que ce soit nouveau par rapport à tout ce qui existait avant.
03:44Donc, il ne faut pas que ce soit décrit quelque part.
03:46Voilà.
03:46Si on se place, par exemple, dans le domaine de la semence et des caractères, justement,
03:50ce n'est pas parce qu'on va créer un nouveau caractère qui peut être notamment une mutation dans un gène
03:57avec des techniques LGT que ce caractère va être nouveau
04:02s'il existait déjà, tout simplement, cette mutation existait déjà, il était déjà connu, finalement.
04:07Il ne sera simplement pas nouvelle.
04:10Ensuite, il y a un deuxième critère qui s'applique, qui est tout aussi important,
04:13parce qu'en fait, il ne suffit pas d'être juste nouveau.
04:16On ne donne des brevets que pour les choses qui sont véritablement inventives.
04:19Et justement, c'est un critère d'inventivité.
04:21C'est-à-dire qu'en fait, il ne suffira pas qu'une innovation.
04:27Donc, par exemple, je reprends toujours l'exemple des semences et des NGT.
04:30Donc, une mutation dans un gène qui va former un caractère particulier de plante.
04:36Il ne suffit pas qu'il soit juste nouveau.
04:38Il faut aussi qu'il ne soit pas évident à des personnes qui sont dans ce milieu, notamment.
04:43Il y a un troisième critère qui est aussi important,
04:45mais qui est peut-être plus évident à mettre en œuvre.
04:48En fait, il faut décrire dans une demande de brevets l'invention de manière suffisamment complète
04:53pour permettre à d'autres de la reproduire, finalement,
04:56et de la tester, de voir si elle fonctionne.
04:59Donc, voilà l'ensemble des critères qui sont impliqués.
05:05Avec quel niveau de réussite quand on postule sur tous les demandes de brevets déposées sur l'année ?
05:10Il y a une base sur l'ensemble des technologies.
05:13Et là, je parle hors des plantes dans tous les domaines confondus.
05:16Donc, on a des brevets sur tout type de choses, dans les voitures, dans le téléphonie, etc.
05:21Là, on tombe à peu près un petit moment à l'office européen des brevets.
05:24On est autour de 60% des livrances d'un nouveau brevet.
05:27Et dans le domaine des plantes, en fait, on est à un niveau un peu plus bas, finalement.
05:32On est quasiment à la moitié, à 30%.
05:33Il y a peut-être une raison à ça, en fait.
05:36C'est qu'il se publie énormément de choses sur les gènes et les mutations de gènes
05:41pour obtenir des caractères.
05:42Et en fait, toutes ces publications qui s'accumulent d'année après année,
05:45finalement, font qu'il y a moins de choses qui sont nouvelles et inventives.
05:48C'est logiquement.
05:50Alors, vous l'avez expliqué un peu plus en amont dans notre échange.
05:53Les brevets, c'est aussi une stimulation à l'innovation,
05:55puisque c'est aussi des investissements assez importants, ces innovations.
05:59Il faut pouvoir être protégé.
06:03Est-ce que ce n'est pas un frein en termes d'accessibilité pour les plus petits acteurs, justement ?
06:07Le secteur de la semence, en fait, opère selon un modèle d'innovation ouverte, depuis toujours, en fait.
06:13Ce modèle d'innovation ouverte, en fait, permet à tout sélectionneur d'utiliser une variété
06:19qui va être commercialisée par d'autres, qui pourrait être protégée par un COV, par exemple.
06:26Donc, un autre sélectionneur peut l'utiliser, cette variété, par exemple,
06:30parce qu'elle contient des caractères qui sont d'intérêt,
06:33faire des croisements avec ses propres variétés à lui pour créer une nouvelle variété
06:36qui peut contenir éventuellement des caractères de cette autre variété.
06:41Ce mécanisme, en fait, s'appelle...
06:43C'est un droit qui est dans le domaine de la semence, dans le domaine du COV.
06:49Il vient de là, il s'appelle l'exemption du sélectionneur,
06:51qui permet au sélectionneur, depuis toujours, de faire ça malgré l'existence d'un COV.
06:57Ce droit existe aussi en droit des brevins.
07:00Il a été introduit depuis pas mal d'années.
07:03Il y est en France, il y est dans beaucoup de pays européens,
07:05pas tous encore, mais dans un grand nombre,
07:08et dans pas mal de pays dans le monde.
07:11Et il existe en France depuis 20 ans déjà, finalement.
07:16Et il permet justement de donner un accès, finalement, à d'autres
07:21pour recréer de la nouvelle variété,
07:24même si cette nouvelle variété contient un caractère breveté.
07:28Donc on comprend bien cette possibilité de recréer des variétés,
07:32mais qu'en est-il ensuite de la possibilité de les commercialiser ?
07:35Alors, vous avez raison.
07:37En fait, l'exemption du sélectionneur permet juste de faire le travail de recherche,
07:42finalement, jusqu'à la création d'une nouvelle variété.
07:45Il manque peut-être, en effet, deux éléments
07:47qui permettent au sélectionneur d'avoir un accès complet,
07:51de faire des choix éclairés aussi sur les variétés qu'ils veulent utiliser,
07:54finalement, dans leur programme de sélection.
07:55Le premier, c'est une transparence sur les caractères qui sont brevetés,
08:01qui sont contenus dans les variétés commerciales, en fait.
08:04L'industrie a déjà créé une base de données, il y a quelques années,
08:08qui s'appelle Pinto,
08:10qui permet de dévoiler, justement, dans toutes les variétés commerciales,
08:14celles qui contiennent un caractère breveté de celles qui n'en contiennent pas,
08:16de manière à ce que les sélectionneurs puissent faire un choix éclairé
08:18s'ils veulent utiliser une variété qui contient un caractère breveté
08:21ou qui n'en contient pas.
08:22Ça, c'est un premier élément.
08:23Le deuxième élément, en fait, en effet, va vers la commercialisation, ensuite.
08:27Et donc, on l'a, c'est pareil, l'industrie s'est organisée
08:31pour, encore une fois, maintenir ce modèle d'innovation ouverte
08:35et permettre aux sélectionneurs qui ont utilisé l'exception du sélectionneur
08:41de commercialiser leur nouvelle variété,
08:44même si elle contient un caractère breveté.
08:45Ce sont les plateformes de licence.
08:48Une licence, il y en a pour tous les domaines de compétence intellectuelle.
08:51C'est un moyen de donner un droit à des tiers sur quelque chose qui est protégé
08:56par un droit de propriété intellectuelle.
08:58Et donc, ces plateformes de licence permettent de donner ce droit.
09:03Et dans ces plateformes, en fait, tous les membres peuvent demander à un titulaire
09:08d'un brevet un accès.
09:10Et ce titulaire s'engage à le fournir.
09:12Il ne peut pas le restreindre à nouveau.
09:15Il s'engage à le fournir.
09:16La compensation, c'est une compensation financière qu'on appelle des redevances
09:20ou des royalties.
09:22Il n'y a que ça à négocier.
09:23En fait, le contrat, lui, est standard.
09:25Il est même public.
09:25Ce n'est qu'un peut le consulter à l'avance.
09:27Il est le plus simple possible.
09:28Et il n'y a que les royalties à négocier.
09:31Ces royalties, d'ailleurs, il y a un mécanisme dans ces plateformes
09:34qui permet de dissuader, d'avoir des royalties qui soient déraisonnables.
09:40Parce que souvent, en effet, il peut y avoir des grosses entreprises, des plus petites.
09:43Et l'idée, c'est de les protéger tout le monde.
09:45Et il y a une des plateformes qui existe depuis dix ans, d'ailleurs.
09:47Et ce mécanisme, en fait, est tellement dissuasif qu'il n'a jamais été mis en œuvre
09:51depuis dix ans.
09:52Voilà.
09:52Donc ça, c'est des mécanismes qui permettent, donc, du coup, à la fois de maintenir
09:56les droits de propriété intellectuelle, comme le COV et le brevet, donc de stimuler
09:59l'innovation dans ces domaines-là.
10:01Et en même temps, de donner accès à tous les acteurs, finalement, de la sélection
10:05variétale, qu'ils soient gros, moyens ou petits.
10:08Merci beaucoup.
10:09Je vous en prie.
10:09Merci.
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