00:00Il y a 50 ans aujourd'hui, le 20 novembre 1975, Franco, le dernier dictateur d'Europe de l'Ouest,
00:06disparaissait à l'âge de 82 ans.
00:08Fin d'un régime autoritaire qui aura duré près de 40 ans, qui aura marqué évidemment aussi l'histoire du Pays Basque.
00:13Notre invité ce matin, Mathieu El Goyen, professeur d'histoire géo au lycée Villapia de Bayonne
00:18et auteur aussi du livre « Franco et le Pays Basque » aux éditions Elkart.
00:22C'est vous Yves Tussaud qui le recevez.
00:23Un ouvrage Mathieu El Goyen publié il y a 10 ans maintenant. Bonjour.
00:27Bonjour.
00:27Merci d'avoir accepté notre invitation. Franco au coup d'État en 1936, guerre civile jusqu'en 1939
00:32et son décès le 20 novembre 1975 à 82 ans, après pratiquement 40 ans de dictature.
00:39Aujourd'hui, 50 ans plus tard, est-ce que l'Espagne en a fini avec Franco ?
00:45Écoutez, si on suit de près ce qui se passe encore aujourd'hui en Espagne, je dirais que non.
00:49Je dirais que non, que les blessures sont encore ouvertes, malgré le vote de deux lois ces 20 dernières années.
00:56Une première loi votée par le gouvernement socialiste de Sapatello en 2007, la loi dite de mémoire historique.
01:01Une deuxième votée 15 ans plus tard en 2022, la loi dite de mémoire démocratique qui reconnaît aux victimes du franquisme le fameux statut de victime.
01:10Mais encore aujourd'hui, des symboles du franquisme divers et variés demeurent encore dans l'espace.
01:19Je lisais avec étonnement le fait qu'il en restait à peu près 6 000 identifiés sur tout le territoire espagnol.
01:24C'est considérable et ça explique pourquoi encore aujourd'hui les blessures demeurent ouvertes.
01:28Est-ce que l'Espagne en a fini avec le franquisme ?
01:31Est-ce que l'Espagne en a fini avec le franquisme ?
01:32Un sujet compliqué également.
01:35Je dirais que là on s'éloigne un petit peu de la perspective historique pour aborder un sujet plus politique,
01:40auquel il est difficile de répondre.
01:42En revanche, on constate quand même aujourd'hui certaines mouvances politiques
01:48se déclarant assez ouvertement nostalgiques de ce type de régime.
01:51On l'a encore entendu en France avec une messe pour le maréchal Pétain.
01:56Donc effectivement, on a fini, je dirais que pas tout à fait dans le sens où effectivement
02:03il y a encore des personnes qui considèrent qu'on vivait mieux.
02:08Je lisais encore un sondage qui tend à montrer que les jeunes de 25 ans
02:12pensent, avec un pourcentage que je n'ai plus en tête mais relativement conséquent,
02:17qu'ils pensent qu'on vivait mieux du temps de Franco.
02:18Et certains historiens disent que c'est un personnage à multiples facettes
02:23mais qu'il a permis de moderniser l'Espagne.
02:28Alors effectivement, là aussi c'est un sujet intéressant parce qu'on sent une volonté
02:33de la part de certains historiens aujourd'hui de refaire un petit peu l'histoire
02:36et de redorer l'image de certaines personnes.
02:39Je reprends mon exemple du maréchal Pétain.
02:40Tout le monde garde en tête, j'imagine, les écrits, notamment d'Éric Zemmour sur Pétain.
02:46C'est un petit peu pareil en Espagne.
02:49Disons par contre qu'effectivement, Franco c'est un personnage, vous l'avez dit,
02:54en multiples facettes, un personnage un petit peu complexe
02:56mais qui effectivement a fait, on peut le dire en partie, en tout cas économiquement,
03:00fait évoluer l'Espagne dans le sens où, après la guerre civile,
03:04c'était un pays considérablement affaibli dans lequel il y avait de multiples privations
03:08et un développement économique extrêmement faible.
03:10et il y a eu un virage à la fin des années 50, au début des années 60,
03:14un moment où Franco a confié la gestion économique du pays à l'Opus Dei
03:19et tout cela s'est accompagné d'une ouverture aux capitaux étrangers
03:24et cette ouverture aux capitaux étrangers a entraîné une certaine modernisation économique,
03:27un développement industriel, notamment en Pays Basque,
03:31qui avait déjà eu un premier développement industriel à la fin du XIXe siècle
03:33mais là, il y a eu une deuxième phase et c'est vrai qu'il y a eu un développement
03:38mais sur le plan économique, j'insiste.
03:40Il est 8h moins 10 sur ICI Pays Basque.
03:41Ce matin, nous sommes avec Mathieu El-Goyen, professeur d'histoire géo à Bayonne.
03:46On revient sur la mort de Franco, c'était il y a 50 ans, jour pour jour, en 1975.
03:50Histoire liée avec l'histoire du Pays Basque,
03:521959, l'opposition à Franco se matérialise avec, entre autres, la création d'ETA.
03:59C'est l'histoire dans l'histoire ?
04:01Et ce sera l'histoire qui marquera peut-être en partie la fin de Franco ?
04:06Ah oui, totalement, j'ai même envie de dire.
04:09Effectivement, l'ETA, né à la fin des années 50,
04:13fait véritablement le choix de la lutte armée au milieu des années 60
04:17avec très vite un conflit qui s'intensifie.
04:21Et vous l'avez évoqué, on peut dire qu'ETA a porté un coup fatal au régime.
04:25Vous l'avez évoqué au début, le régime franquiste est un régime autoritaire
04:30avec même quelques caractéristiques d'un régime totalitaire,
04:32le culte de la personnalité, partie unique, un régime liberticide.
04:35Toutes les libertés individuelles et collectives ont été supprimées.
04:38C'est en réaction à cela, mais aussi, bien sûr, dans le cadre d'un combat vers Salé que ETA n'est.
04:43ETA.
04:44Voilà.
04:45Et effectivement, je parlais de coup fatal, parce que par contre, idéologiquement,
04:48pour reprendre les propos d'un historien,
04:51le franquisme est un conglomérat assez confus,
04:53dans le sens où c'est un régime qui associe des branches extrêmement variées,
05:01qui d'ailleurs s'entendent relativement peu et qui n'ont pas la même vision du pays.
05:06Et que Franco arrive à tenir.
05:07Et que Franco arrive à fédérer autour de lui.
05:10Les carlistes, par exemple, qui sont des monarchistes conservateurs, traditionnalistes,
05:14de l'autre les phalangistes, qui sont des fascistes,
05:17et il est celui qui les fédère.
05:19Et le seul à même derrière lui de les fédérer, c'est l'amiral Carrero-Blanco.
05:24C'est en ça qu'il est le successeur désigné de Franco.
05:26Et effectivement, lorsqu'ETA tue l'amiral Carrero-Blanco le 20 décembre 1973 à Madrid,
05:33on peut dire que l'organisation porte un coup fatal au régime.
05:35En un mot, Mathieu El-Goyen, le 20 novembre 1975,
05:40de ce côté-ci, c'était la fête.
05:42Ah, c'était la fête. Le mot, c'est fête, clairement.
05:44Oui, il faut imaginer que, il y avait quand même,
05:50bien qu'historiquement, on sait que le Pays-Basque-Nord est une terre plutôt conservatrice,
05:54il se trouve qu'il y avait quand même des forces qui, d'ici, combattaient le franquisme.
05:59Il faut se rappeler qu'il y avait un grand nombre de réfugiés qui vivaient sur notre territoire.
06:05Et effectivement, cette date-là a été une grande fête pour ces gens-là qui espéraient beaucoup.
06:10Merci à Mathieu El-Goyen d'avoir accepté notre invitation.
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