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Transcript
00:00Générique
00:00Bienvenue dans le débat, Donald Trump reçoit MBS, Mohamed Ben Salman, le prince héritier d'Arabie Saoudite à la Maison Blanche avec Fast.
00:12La visite va durer trois jours avec l'objectif de signer un accord de sécurité.
00:17Les Saoudiens souhaitent acheter des F-35 et signer un accord sur des transferts de technologies dans le nucléaire notamment et dans l'intelligence artificielle.
00:25Trump place Riad au cœur de sa stratégie au Moyen-Orient et il veut convaincre MBS de normaliser ses relations avec Israël.
00:33Le président américain souhaite aussi que l'Arabie Saoudite investisse aux Etats-Unis.
00:38Cette visite de MBS a lieu dans un contexte de changement stratégique au Moyen-Orient.
00:43Le coup porté au programme nucléaire iranien, le cessez-le-feu fragile à Gaza ou encore la reconstruction de la Syrie.
00:50Hier, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté le plan de paix de Donald Trump à Gaza avec notamment le projet du déploiement d'une force internationale de stabilisation.
01:00Alors, quelle est la relation entre Donald Trump et MBS ? Quel est le deal entre les Etats-Unis et l'Arabie Saoudite ?
01:06Comment cette visite du prince héritier saoudien s'inscrit-elle dans la redéfinition du Moyen-Orient ?
01:12On va en parler avec mes invités.
01:13Michael Darmon est à mes côtés.
01:14Bonsoir.
01:15Bonsoir.
01:15Éditorialiste à I24, auteur des « Les derniers jours » d'Itzak Rabin aux éditions passées composées.
01:22C'est sorti il y a quelques semaines.
01:25On le voit s'afficher.
01:26Non, on ne le voit pas s'afficher, mais donc « Les derniers jours » d'Itzak Rabin.
01:29Merci d'ĂŞtre lĂ , en tout cas, d'ĂŞtre lĂ , Michael Darmon.
01:31En face de vous, nous avons Karim Émile Bittard.
01:33Bonsoir.
01:34Enseignant à Sciences Po, professeur à l'École Normale Supérieure de Lyon et à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth.
01:40Bienvenue.
01:41David Rigolero est avec nous ce soir.
01:43Bonsoir.
01:43Bonsoir.
01:43Rédacteur en chef de la revue « Orient stratégique », chercheur spécialiste du Moyen-Orient
01:47et rattaché à l'Institut français d'analyse stratégique.
01:51Nous avons Ă  New York Yasmina Asrarghis.
01:54Bonsoir.
01:54Vous êtes chercheuse associée à l'Université de Princeton et également cofondatrice de l'Atlantic Middle East Forum.
02:01Ils viennent de donner une conférence de presse.
02:04MBS et Trump ensemble.
02:06Elles se terminent en ce moment mĂŞme.
02:08Et il y a eu de nombreuses informations sur ce fameux deal.
02:11On retrouve tout de suite Mathieu Mabin qui a suivi cette conférence de presse avec nous.
02:16Mathieu, il a vraiment tenu Donald Trump à dire que l'Arabie saoudite allait investir 1000 milliards de dollars aux États-Unis et non pas 600 milliards de dollars.
02:25Ça, c'est l'une des informations de cette conférence de presse.
02:31Oui, absolument.
02:32Washington et Riyad sellent ce soir une série d'accords commerciaux et stratégiques d'une ampleur absolument exceptionnelle.
02:39Je pense inégalée.
02:40L'Arabie saoudite, vous l'avez dit, s'engage Ă  investir 1000 milliards de dollars.
02:45Donald Trump, afin de croire qu'il s'agissait en réalité de 600 milliards seulement.
02:52Mais bon, ça a été un prétexte pour que les deux hommes se congratulent longuement devant les journalistes,
03:00effectivement, qui étaient réunis dans le bureau Oval pour cette conférence de presse qui voulait faire croire qu'elle était improvisée.
03:071000 milliards de dollars dans l'économie américaine, notamment dans l'intelligence artificielle, les infrastructures numériques et l'énergie.
03:15En contrepartie, les États-Unis ouvrent la voie à une vente d'armement évaluée à près de 140 milliards de dollars,
03:23incluant la possible livraison d'avions furtifs F-35.
03:28Et c'est un sujet ici, puisque cela devra s'opérer sous réserve du feu vert du Congrès.
03:34Un autre volet clé concerne le nucléaire civil.
03:37Évidemment, on s'y attendait.
03:39Washington accepte le principe d'un programme nucléaire saoudien à condition qu'il reste strictement pacifique et placé sous contrôle international.
03:47Derrière ces signatures, un objectif géopolitique absolument clair,
03:51faire resserrer l'alliance américano-saoudienne face à l'influence croissante de la Chine et de la Russie au Moyen-Orient.
03:59L'Arabie saoudite, elle, cherche à diversifier son économie dans le cadre du plan Vision 2030
04:05et à s'acheter une garantie stratégique américaine indispensable à son avenir.
04:10Et cela semble ĂŞtre chose faite, finalement.
04:12Et puis, en toile de fond, pour finir, la Maison Blanche espère aussi favoriser un rapprochement entre Riyad et Israël,
04:19évidemment, avec les accords d'Abraham, au sujet desquels MBS confirme que les deux pays sont proches d'un accord,
04:27ou en tout cas en discutent.
04:28Mais, vous l'avez dit, la visite va durer trois jours.
04:32Il n'y aura probablement pas beaucoup de temps pour évoquer les droits humains,
04:37en tout cas pas au regard de la manière dont Donald Trump a balayé le sujet de Jamal Rashoudji,
04:43d'un revers de la main tout à fait choquant pour ceux qui y ont assisté.
04:49Merci, Mathieu. Mathieu Abin, donc, en direct de Washington.
04:52On va écouter tout de suite Donald Trump, un extrait de cette conférence de presse.
04:55Quand vous regardez le F-35 et que vous me demandez si c'est la mĂŞme chose, je pense que oui, ce sera assez similaire.
05:05C'est un excellent allié, tout comme Israël.
05:08Et je sais qu'ils aimeraient que vous achetiez des avions de calibre réduits.
05:12Je ne pense pas que cela vous réjouisse beaucoup.
05:14Ils ont été de bons alliés.
05:16Israël a été un excellent allié et nous examinons cela en ce moment même.
05:20Mais en ce qui me concerne, ils sont tous les deux Ă  un niveau oĂą ils devraient obtenir ce qui se fait de mieux.
05:29David Rigoleroz, alors, c'est F-35, c'est vrai que c'était au cœur de cet accord de défense entre MBS et Donald Trump,
05:35avec Israël qui est un peu frappé du poing sur la table, puisque c'était le seul pays de la région,
05:40donc jusqu'à cet accord, à avoir des F-35 américains.
05:45Donc, on est à une sorte de tournant quand même, là, dans les relations entre les États-Unis et l'Arabie saoudite.
05:49– Oui, sans doute, mais effectivement, il y a le problème du passage devant le Congrès, quand même,
05:54qui n'est pas anodin, puisque c'est le Congrès qui doit quand même valider ce type de...
05:59C'est une forme de transfert de technologie.
06:02Et puis, justement, par rapport à Israël, il y a toujours l'idée de maintenir un différentiel qualitatif, stratégique.
06:08Donc là, effectivement, c'est réduire ce différentiel de ce qui explique, évidemment, les réticences israéliennes.
06:13Mais en plus des réticences israéliennes, il y a aussi des réticences par rapport à la Chine.
06:17Ce n'est pas seulement par rapport à Israël, c'est par rapport à la Chine,
06:20puisque Riyad entretient d'excellentes relations avec la Chine,
06:24qui est son premier client pétrolier,
06:26et à qui Riyad a déjà acheté des fournitures militaires.
06:31Et donc, tout ça est quand même très, très compliqué,
06:34mĂŞme si, dans l'enthousiasme trumpien,
06:38il y a effectivement une surenchère de déclarations sur les accords...
06:45Sur un accord de défense, sur un accord économique avec investissement de 1 000 milliards de dollars
06:50de l'Arabie saoudite aux États-Unis,
06:52sur un accord économique, finalement, dont parle l'Arabie saoudite,
06:56parce qu'eux parlent de partenariat sur l'intelligence artificielle,
07:00le nucléaire civil aussi, avec Trump.
07:04C'est ce que souhaite MBS, ça aussi, ces transferts de technologies,
07:09c'est ça ce qu'il souhaite, finalement, le prince héritier.
07:11C'est l'un de ses souhaits.
07:13Le premier intérêt de cette visite, pour lui, est, à mes yeux, symbolique.
07:17Cela vient, effectivement, consacrer son retour en grâce
07:21après des années où les relations ont été tendues en dents de scie.
07:24Joe Biden voulait transformer l'Arabie saoudite en paria de la communauté internationale,
07:29mais c'est quand même Biden qui a fait le premier pas pour réintégrer MBS.
07:33C'est après l'assassinat de Jamal Khashoggi.
07:36Mais lĂ , c'est un retour en force.
07:39Le square Lafayette à Washington, D.C. va être illuminé aux couleurs de l'Arabie saoudite.
07:44C'est une délégation, si j'ai bien compris, qui compte presque 1000 personnes.
07:47Quasiment tous les ministres accompagnent MBS.
07:51Donc, c'est véritablement le retour de l'Arabie saoudite comme partenaire privilégié.
07:56Et ça confirme que cette alliance résiste à tout, même à l'indépendance énergétique.
08:00Ce qu'a dit David est intéressant parce que ça montre la stupéfiante interdépendance de notre époque.
08:06Pendant longtemps, on nous disait, dès que l'Amérique accèdera à l'indépendance énergétique,
08:10n'aura plus besoin des ressources du Golfe, elle va se désengager.
08:13Mais comme la prospérité américaine dépend aussi de la prospérité chinoise,
08:17qui quant à elle est plus que jamais dépendante du gaz et du pétrole en provenance du Golfe,
08:21l'Amérique ne se désengage pas et renforce cette coopération.
08:24Et en plus, il y a du business, Michael Darmond, du business de la famille Trump.
08:28Il en a dit un mot d'ailleurs parce qu'il y a une question d'un journaliste en disant,
08:31mais non, les affaires de ma famille n'ont rien Ă  voir avec ce que je fais ici Ă  la Maison-Blanche.
08:36Mais enfin bon, lĂ , on parle d'un resort aux Maldives avec une compagnie saoudienne,
08:42des investissements de la famille Trump Ă  Deria.
08:45On est aussi dans le mélange des genres.
08:47Oui, de toute façon, c'est la marque de fabrique de Trump et de sa famille de dire et d'assumer un mélange des genres.
08:53Vous savez, ce qu'on dit souvent aux Etats-Unis, c'est que chaque jour, quand il termine sa journée,
08:57le président Trump, il regarde qui lui a donné de l'argent, avec qui il a pu faire business.
09:02Et si en plus, puisqu'il est en situation, il peut faire de la politique et des accords,
09:06pour lui, ça ne pose aucun problème.
09:08C'est vrai que cette visite, elle est absolument fondamentale,
09:10parce que d'abord, c'est la prolongation de son approche dès le premier mandat.
09:14Il en a fait son chouchou dès le début.
09:17Il l'aime bien, MBS. Il l'a dit plusieurs fois.
09:19Au-delà de bien l'aimer, il l'adule complètement.
09:23Et c'est avec lui qu'il veut effectivement construire.
09:25Il lui donne la possibilité de conforter, c'est ce qu'est venu aussi chercher MBS,
09:29sa vision 2030, son projet 2030, en lui donnant un début d'indépendance énergétique avec le nucléaire civil,
09:36et évidemment, la possibilité d'avoir des investissements,
09:40et donc des retours sur investissement aux Etats-Unis,
09:42avec l'armement tel qu'on vient de l'évoquer.
09:45Yasmina Asrarghis, est-ce que cette visite clôt, une fois pour toutes, l'épisode Khashogil ?
09:51Je rappelle l'assassinat du journaliste du Washington Post au consulat d'Arabie Saoudite d'Istanbul.
09:58C'est en 2018.
09:59MBS avait été mis en cause directement par la CIA.
10:03On peut dire que c'est derrière, c'est terminé.
10:05On n'en parle plus ?
10:06Non seulement c'est derrière, mais effectivement, le premier mandat de Donald Trump avait déjà permis de clore quelque part ce dossier,
10:16qui a été réouvert plus tard par l'administration Biden, dans le contexte de la campagne du président Biden.
10:24Ce qui n'avait pas facilité l'attaque de Miblinkan, qui derrière a été institutionnalisé les relations
10:32et joué d'une diplomatie de l'apaisement vis-à-vis de Riyad,
10:38avant de pouvoir discuter de choses plus sérieuses,
10:41ce qui était déjà cette question des accords d'Abraham et de coopération économique et de défense.
10:47La relation entre les États-Unis, en particulier entre Donald Trump et l'Arabie Saoudite,
10:54elle se joue certes depuis six ans et depuis quelques années au devant de la scène,
11:00puisqu'il est maintenant président par deux fois.
11:04Mais cette relation, elle a en réalité plus de 30 ans,
11:06puisque Donald Trump était lui-même très ami avec Hanan Khachoggi, l'oncle du journaliste.
11:15Et il a, depuis des décennies, admiré les Saoudiens et l'Arabie Saoudite,
11:21au point de se faire construire dans la Trump Tower tout un étage qui ressemblait au palais d'Adnan Khachoggi,
11:29à qui il avait également acheté le Nabila.
11:34Donc c'est de proximité, si vous voulez, et Michael a parlé d'adulation.
11:42On est effectivement dans une forme de mimétisme qui, aujourd'hui, se joue au devant de la scène,
11:50mais qui perdure dans le monde du business et des affaires depuis plusieurs décennies maintenant.
11:54David Rigoleroz, on se souvient de la brutalité de MBS, justement, à cette époque, au moment de Khachoggi.
12:00On se souvient qu'il avait aussi enlevé le Premier ministre libanais, Saad Hariri.
12:05Ça, c'était la même époque. En tout cas, il était détenu en Arabie Saoudite.
12:10Il avait détenu aussi au Carlton, dans cet hôtel, ses milliardaires saoudiens.
12:15Il a fait la guerre au Yémen. En fait, il y a eu un MBS 1 et un MBS 2.
12:19Est-ce qu'il a changé ou est-ce que, finalement, ce sont ses priorités qui ont changé ?
12:24Il est pragmatique. C'est-à-dire qu'effectivement, il y a eu une première séquence où il reste brutal dans ses modalités de gestion des affaires.
12:35Mais il avait au début des velléités, effectivement, très proactives au niveau régional.
12:40Vous évoquez le Yémen. Il a lancé une guerre très incertaine.
12:45Il y a eu, effectivement, les scandales de l'assassinat du journaliste.
12:52Et puis, il y a eu un tournant.
12:54Le tournant, en fait, c'est la frappe sur les infrastructures pétrolières, le 14 septembre 2019.
13:01Parce que lĂ , il s'est rendu compte que son plan Vision 2030, qui est son obsession personnelle...
13:07Il y a un plan de modernisation de l'Arabie Saoudite.
13:09Il incarne, au sens propre du terme, ce plan.
13:12Il veut qu'il réussisse.
13:13Et il a compris, avec cette frappe attribuée au Houthi, mais en fait, évidemment,
13:18vraisemblablement plutĂ´t au mandataire pro-iranien, sinon Ă  l'Iran lui-mĂŞme,
13:24qu'il ne pourrait pas réussir ce plan s'il continuait une logique de confrontation.
13:29Et donc, il a ajusté sa posture, au point même d'essayer d'apparaître comme un médiateur, comme un go-between.
13:35On l'a vu avec l'Ukraine par la suite, on l'a vu avec Gaza.
13:40Il a complètement transformé son image.
13:43Il s'est rendu compte que c'était beaucoup plus bankable, d'une certaine manière,
13:47que la posture très agressive qu'il avait pu avoir au début de sa gouvernance.
13:51Mais comment a-t-il réussi à ce que, finalement, la communauté internationale oublie Rachodji ?
13:56Elle n'a pas oublié...
13:57Il était paria et aujourd'hui...
13:59De toute façon, il y a un principe de réelle politique.
14:00L'Arabie Saoudite demeure le premier pays exportateur de pétrole.
14:04Personne ne peut faire l'économie, au sens propre du terme, du royaume saoudien.
14:08Camille Bittard.
14:09C'est aussi le premier pays acheteur d'armes américaines.
14:13On a en foreign military sales près de 140 milliards ouverts.
14:16Donc, à l'époque de l'assassinat Rachodji, Trump avait dit les choses très ouvertement.
14:20Il a dit « ça ne me plaît pas trop qu'on ait charcuté un journaliste ».
14:23Mais face à l'ampleur de ces contrats, à côté de ces 140 milliards dans l'industrie de l'armement,
14:27il y avait déjà 600 milliards en cours, même si les chiffres sont parfois un peu gonflés.
14:31Donc, c'est au nom de la réelle politique des intérêts économiques, bien compris, que l'on a fermé les yeux.
14:36Le temps est passé.
14:37Et comme vous l'avez tout à l'heure suggéré, les droits de l'homme n'ont jamais été la priorité de Donald Trump.
14:41Et d'ailleurs, Donald Trump a dit pendant la conférence de presse, Michael Darmon,
14:44qu'en matière de droits humains, il était très bien, MBS.
14:48Oui, évidemment, c'est une sortie que l'on peut totalement imputer au caractère provocateur de Trump,
14:56sachant qu'il balaye de la main un problème.
14:59Mais il n'est pas le seul Ă  le faire.
15:01Toute la communauté internationale a décidé d'oublier.
15:04Et en particulier, n'oublions pas la France, qui a voté, qui a fait campagne,
15:08et qui a voté pour le fait que l'Arabie saoudite puisse organiser l'exposition universelle en 2030.
15:13Après un long séjour, vous avez eu pratiquement tout le pouvoir saoudien
15:18qui est venu faire une campagne de séduction en France
15:20et qui a emporté ce vote avec le choix de la France exprimé.
15:25Donc, il y a une décision, effectivement, de réelle politique,
15:29de dire que c'est une puissance régionale qui est en train de se mettre en place, d'émerger.
15:35Qui devient mĂŞme un pivot.
15:36Qui devient un pivot, peut-ĂŞtre, effectivement, avec des solutions politiques que l'on attend,
15:41pas simplement économiques,
15:42et de remodelage complet de la région vers, effectivement, une nouvelle ère,
15:49après, en particulier, aussi, le 7 octobre.
15:51Yasmina Asrarghis, on a un peu l'impression que, pour MBS,
15:55donc, c'est Donald Trump qui a affiché le chiffre de 1 000 milliards d'investissements saoudiens aux États-Unis,
16:01et pas MBS.
16:02En revanche, MBS, lui, a parlé de transfert de technologie, de F-35,
16:07de l'IA, de l'intelligence artificielle.
16:10Donc, on a presque l'impression que, pour MBS, ça devient Saudi Arabia first, en fait.
16:15L'Arabie saoudite, en premier, un peu comme Donald Trump dirait, l'Amérique first.
16:20Est-ce que c'est le cas ?
16:22Alors, par rapport aux chiffres qui ont été donnés,
16:26moi, je ferais extrĂŞmement attention,
16:28parce que ce sont, en général, des chiffres qui sont prénégociés dans les coulisses
16:33pour pouvoir impressionner la communauté internationale
16:36et passer certains messages forts face au journalisme.
16:39En général, l'entièreté de ces budgets ne sont pas nécessairement appliqués comme tels.
16:45Ceci étant dit, ce à quoi on assiste réellement aussi,
16:50c'est une tentative de séduction de la part de Donald Trump,
16:54qui a orchestré une chorégraphie qu'on n'avait pas vue depuis son retour à la Maison-Blanche
17:03et que l'on voit extrĂŞmement rarement.
17:05Donc, un accueil à un niveau chef d'État plus-plus,
17:11avec demain à Washington, une conférence économique entre l'Arabie saoudite
17:17et les businessmen américains,
17:20qui se tiendra à la suite du dîner d'État de ce soir.
17:27Et donc, demain, si vous voulez, sera la grande messe
17:30qui permettra de traduire potentiellement ces annonces
17:35en partage, effectivement, et coopération réelle
17:39avec la Silicon Valley et l'ensemble des acteurs économiques
17:44qui sont par ailleurs extrĂŞmement proches de Trump.
17:48Je pense ici au PIF,
17:49donc le Fonds d'investissement souverain saoudien,
17:54qui travaille régulièrement et qui connaît extrêmement bien
17:58Donald Trump, Jared Kushner et tout l'écosystème américain
18:03de la Silicon Valley Ă  Miami, Ă  New York.
18:06Donc, si vous voulez, aujourd'hui, c'était les annonces
18:09et la phase très diplomatique qui permet aussi à Trump
18:14de montrer son côté très humain, très tactile
18:17et sa façon de faire qui n'est pas celle de Biden,
18:23pour reprendre ses propres mots,
18:24qui n'est restée que 20 heures à Riad,
18:28ce qui avait, à l'époque, été perçu comme une offense.
18:31Et donc, si vous voulez, Trump, aujourd'hui,
18:33a bien appuyé un peu sur toutes les erreurs diplomatiques
18:37qui ont été faites lors de l'ère Biden
18:41pour se présenter en grand allié et meilleur ami d'MBS.
18:45Mais les choses sérieuses se dérouleront véritablement demain.
18:49– Emile Bittard, il n'a pas eu besoin, justement,
18:51d'être obséquieux à MBS, ni de flatter Trump.
18:55On a vu dans cette conférence de presse,
18:56il a été quasiment silencieux.
18:58Et c'est, effectivement, l'opération séduction
18:59venait du côté de Trump. Alors, pourquoi ?
19:02– Parce que, comme le disait Yasmina,
19:03les relations remontent Ă  loin,
19:05parce que les Saoudiens ont parfaitement bien compris
19:07la psychologie de Donald Trump.
19:09Sa première visite à l'étranger après son élection
19:11a été en Arabie saoudite.
19:12Les Saoudiens ont projeté son portrait géant
19:14sur des immenses buildings Ă  Riyad et Ă  Jeddah.
19:18Il était très flatté.
19:19Il a le sentiment d'ĂŞtre un roi
19:21qui est dans un meeting avec un autre roi.
19:23Ça fait partie vraiment de son ADN à Trump.
19:26Ce n'est pas un hasard si les mobilisations de masse
19:28aux États-Unis contre Trump ont pour slogan
19:30« No kings, on ne veut pas de roi ».
19:31Lui aimerait être dans cet état d'esprit-là.
19:34Il serait vrai roi d'Arabie saoudite.
19:36Un mot sur le nucléaire, David Rigolet-Rose.
19:40Cet accord sur le nucléaire,
19:42nous en avons parlé de manière très allusive aujourd'hui.
19:46MBS manifestement y tient et puis il souhaiterait
19:49que son pays, l'Arabie saoudite,
19:51finalement puisse retraiter, enrichir de l'uranium
19:55et aussi retraiter le plutonium.
19:57Or, ça, est-ce que les États-Unis de Trump
19:59pourraient permettre Ă  l'Arabie saoudite,
20:01donc ne seulement de profiter de la technologie nucléaire américaine,
20:04mais en plus de pouvoir enrichir son propre uranium.
20:07Est-ce que c'est ça qui est sur la table aujourd'hui ?
20:08C'est un sujet très sensible.
20:10Ça fait partie des trois points, justement,
20:13qui étaient dans la négociation pour une normalisation avec Israël.
20:16Très sensible pour les Américains,
20:17parce que d'abord, il y a une loi américaine
20:19qui encadre la question du transfert de matériaux nucléaires
20:23et de technologies à l'étranger.
20:26Donc c'est très encadré.
20:27Et puis par ailleurs, il y a évidemment la préoccupation d'Israël
20:31sur la question de la prolifération du nucléaire.
20:35Alors, civile, mais en réalité, le problème,
20:36c'est que quand on maîtrise une technique,
20:38elle est duale, par définition,
20:40même si, évidemment, on ne peut pas faire abstraction
20:42en face, en effet, miroir de la question iranienne
20:46sur le nucléaire, évidemment.
20:48Donc ça fait partie des demandes, effectivement,
20:50de Mohamed Bin Salman,
20:52qui justifie cette requĂŞte
20:54en disant que ça s'inscrit dans son plan
20:56de transition post-pétrolier,
20:59justement, pour assurer une sécurité énergétique
21:01Ă  partir du moment oĂą il se sera extrait
21:03de la dépendance pétrolière,
21:05qui est toujours celle du Royaume.
21:06Donc c'est très habile, évidemment,
21:08mais c'est un sujet particulièrement sensible
21:09qui est scruté, évidemment, par les Israéliens.
21:12Et Donald Trump sera obligé de tenir compte,
21:15évidemment, de ses préoccupations israéliennes.
21:18– Mais il pourrait céder là-dessus ?
21:20– Pas évident.
21:21– En tout cas, ça dépend sur quel point.
21:23Il pourra accepter un certain nombre de choses
21:26pour des réacteurs, pour l'enrichissement civil.
21:29Le plutonium, c'est une autre affaire,
21:30parce que le plutonium, on est d'emblée
21:32dans un registre potentiellement militaire.
21:36– MBS, Trump, vous vouliez ajouter quelque chose ?
21:37– Oui, parce qu'en fait, avec tout l'encadrement
21:40que l'on entend, effectivement,
21:42autour de cette question très sensible,
21:44ça pourrait aussi faire partie de la négociation
21:46beaucoup moins faciale, beaucoup moins visible
21:49vis-à-vis de la normalisation avec Israël.
21:52Parce que si, effectivement, les Israéliens finissent par accepter,
21:56finissent par envisager la possibilité
21:58qu'il y ait du nucléaire civil chez les Iraniens,
22:00avec tout ce que, effectivement, on comprend…
22:02– Chez les Saoudiens.
22:03– Pardon, excusez-moi, chez les Saoudiens,
22:05avec tout ce que l'on comprend de sensibilité,
22:08il pourrait, effectivement, exiger en contrepartie
22:10qu'il y ait une normalisation avec Israël,
22:13en disant qu'on accepte.
22:14Et ce serait une question qui serait peut-ĂŞtre
22:15beaucoup plus déterminante que la question palestinienne,
22:18dont on sait que, pour Ben Salmane,
22:22elle est plus de la logique de, on va dire,
22:24de faire attention Ă  son opinion qui est sensible Ă  ce sujet
22:28qu'une réelle implication à l'égard de la Palestine.
22:33– Donc là, on voit bien qu'il y a une négociation business politique,
22:37puisque toute cette rencontre a lieu au moment
22:40où il y a une redéfinition des cartes,
22:43en tout cas au Moyen-Orient,
22:44avec le Conseil de sécurité des Nations Unies,
22:46qui a adopté le plan, justement, le plan de paix de Trump pour Gaza
22:49Ă  13 votes favorables.
22:51Ça, c'était dans la nuit, l'année dernière, à New York,
22:54et la Russie et la Chine se sont abstenues.
22:56Mais l'Arabie Saoudite, le Qatar, l'Égypte, les Émirats,
22:59la Jordanie, le Pakistan, la Turquie,
23:00et même la France, donc, ont salué cette dynamique politique
23:04de ce plan Trump ?
23:06Est-ce que Yasmina Asrarghis, ils en ont parlé, en tout cas,
23:10de ces accords d'Abraham pendant cette conférence de presse ?
23:14Et Mohamed Ben Salman a dit que lui, il souhaiterait, effectivement,
23:17faire partie de ces accords, mais à condition qu'il y ait deux États,
23:21donc qu'il faut une reconnaissance d'un État palestinien.
23:24Donc ça va rester la condition de MBS pour, justement,
23:27rentrer dans les accords d'Abraham ?
23:29Alors, suite Ă  deux ans de guerre, effectivement,
23:34c'est le point fondamental pour la diplomatie saoudienne
23:39qui est cette idée d'aller vers une souveraineté
23:43et un État palestinien.
23:47À un moment, au cours des négociations,
23:49plusieurs acteurs, côté israéliens, mais même certains aux États-Unis,
23:53ont essayé d'interpréter de manière un peu plus floue ce concept,
23:57mais le ministre des Affaires étrangères saoudien n'a eu de cesse de répéter
24:02qu'il n'y avait pas d'autre alternative à la solution à deux États
24:06et que, pour eux, cette idée d'État de Palestine était importante.
24:10Donc, de toute évidence, ils ont abordé le sujet,
24:13puisqu'il est…
24:15C'est les accords d'Abraham et la résolution du conflit
24:19et du moins l'apaisement, puis la reconstruction de la bande de Gaza
24:23sont des dossiers fondamentaux pour la Cour royale saoudienne
24:28et en particulier MBS,
24:30puisque, à la différence des Émirats arabes unis,
24:33lui a une véritable démographie qui ne le laisserait pas avancer,
24:37si vous voulez, vers des accords d'Abraham
24:41sans avoir certaines garanties pour les Palestiniens.
24:46Puis, la question également qui se pose et qui est importante maintenant que,
24:51si vous voulez, il y a eu un certain nombre de négociations
24:54avant le 7 octobre et moins de 24 heures avant l'attaque du Hamas,
25:02des sénateurs et des deux partis,
25:05donc bipartisans américains et Tariad,
25:09avaient eu des meetings avec MBS
25:11et ils avaient eu la confirmation effective
25:15que l'Arabie saoudite allait normaliser.
25:20Suite Ă  l'attaque et les deux ans de guerre,
25:24nous en sommes un peu plus loin,
25:26mais les intérêts stratégiques restent les mêmes,
25:30à savoir l'Arabie saoudite veut aller vers un deal sécuritaire
25:35qui leur permettrait d'avoir non seulement une proximité,
25:42si vous voulez, avec les États-Unis,
25:45mais ça permettrait aussi aux États-Unis d'hypothéquer quelque part
25:48la sécurité de l'Arabie saoudite
25:52et de se présenter comme les gardiens de cette région
25:56avec le US-CENTCOM,
25:59donc le centre de commandement pour la région,
26:01qui montrait en puissance et qui montrait en gamme,
26:03puisqu'ils ne se limiteraient plus à leur présence,
26:09si vous voulez, au Qatar et au BahreĂŻn,
26:10mais l'Arabie saoudite deviendrait le pivot face Ă  l'Iran
26:15qui ne lâchera pas, sur le plan idéologique,
26:19son axe de la résistance.
26:21Donc, pour les Américains et pour les Saoudiens,
26:24il y a un alignement des intérêts.
26:26Maintenant, la question qui se pose aussi à Jérusalem
26:29est de savoir que l'Arabie saoudite n'est pas un pays
26:33où le pouvoir passe, si vous voulez, de père en fils.
26:39Et donc, la question de l'héritier et du prince d'héritier
26:41se pose déjà aujourd'hui,
26:43notamment lorsqu'il s'agit de défense et de nucléaire.
26:48Karim Hibita, pour rebondir lĂ -dessus,
26:50donc ça voudrait dire qu'effectivement,
26:51il pourrait y avoir une entrée dans ces accords d'Abraham
26:53ou pas, d'après ce qu'a dit Yasmina Asfragis ?
26:57Moi, je reste persuadé que le timing qu'a choisi le Hamas
27:00le 7 octobre était directement lié aux inquiétudes
27:04qu'ils avaient de voir cette normalisation aboutir très vite.
27:09Les Saoudiens n'avaient aucun obstacle de principe.
27:12L'entretien auquel Michael a fait allusion tout Ă  l'heure,
27:14MBS disait très franchement que lui ne se sentait pas
27:17d'affinité particulière avec la question palestinienne,
27:21mais il devait prendre en considération son opinion publique,
27:23la jeunesse, comme dans tous les pays de la région,
27:25il y a un véritable clivage horizontal
27:27entre les opinions publiques et les leaderships.
27:30Les leaderships sont prĂŞts Ă  aller au-delĂ  de la normalisation
27:34vers une paix totale, mais l'opinion publique en Arabie
27:37reste très attachée aux droits nationaux du peuple palestinien.
27:41Lorsque Trump a reconnu Jérusalem comme capitale d'Israël,
27:45le hashtag le plus populaire chez les Saoudiens
27:47qui utilisent beaucoup Twitter, c'était
27:49« Jérusalem est la capitale éternelle de la Palestine ».
27:51Donc il y a un véritable risque d'assassinat.
27:54MBS l'a dit lui-même, « Je crains pour ma propre vie
27:56si je vais trop vite. »
27:58Donc il faut me ménager.
27:59Et les Américains ont compris cela et sont en train de le ménager.
28:02Ils sont en train de le ménager,
28:03mais Benjamin Netanyahou a dit « Pas d'État palestinien ».
28:05Il l'a encore redit juste avant la résolution des Nations Unies.
28:10Oui, lui, il fait son métier, Netanyahou.
28:12C'est normal qu'il dise ça, parce qu'il ne peut pas se déjuger.
28:15Mais tout le monde connaît aussi le biorhythme politique en Israël.
28:19Il va y avoir des élections.
28:20Tout le monde sait qu'il ne sera pas éternellement en poste
28:24et qu'on compte aussi, j'imagine dans la région,
28:26sur une évolution politique à l'intérieur d'Israël
28:29pour avoir aussi une autre approche.
28:32Et puis Netanyahou, il peut aussi tout simplement
28:34céder aux arguments de Trump.
28:36On l'a vu.
28:36Là, encore une fois, il est amené à ranger son frein,
28:41Ă  admettre que les Saoudiens auront des avions
28:45comme les Israéliens, même s'il y a une différence
28:47un peu technologique.
28:49Et il peut aussi contre cette normalisation.
28:50Donc ça, ça fait pression sur Israël,
28:51le fait que le DF-35 soit aussi exporteur d'armée saoudite ?
28:55Très clairement, on sent bien que, quelque part,
28:57Trump dit que s'il a à choisir entre l'Arabie saoudite et Israël,
29:01en ce moment, il choisit l'Arabie saoudite.
29:03Ça, c'est très clair.
29:04Et que si, effectivement,
29:06Netanyahou veut avoir son accord de normalisation
29:10pendant qu'il est au pouvoir,
29:11mais il a aussi Ă  faire ce qu'il y a Ă  faire.
29:13Et de ce point de vue-là, le message est parfaitement passé.
29:16Mais reconnaître un État palestinien pour Netanyahou,
29:18pour l'instant, ce n'est pas du tout...
29:20Ah non, ce n'est pas du tout...
29:21Ă€ l'ordre du jour, il l'a mĂŞme...
29:22Il a toujours dit qu'il s'était toujours opposé,
29:24qu'il n'avait pas changé de posture là-dessus.
29:27Mais effectivement...
29:27Donc lĂ , on a une divergence entre MBS et Netanyahou,
29:30très claire.
29:31Ce qui est intéressant, c'est la résolution de l'ONU qui a été présentée.
29:33C'est pour ça que Netanyahou était furieux,
29:35mĂŞme s'il ne l'a pas reconnu publiquement.
29:37C'est qu'il a été mentionné explicitement
29:40l'horizon d'une autodétermination palestinienne.
29:43Un chemin crédible vers une autodétermination
29:45et un statut d'État palestinien.
29:46Oui, mais les mots sont lourds de sens, quand mĂŞme.
29:49Et donc ça, c'était des demandes des États arabes, alliés.
29:52Et c'est pour rejoindre ce que vous disiez.
29:54Justement sur le poids, l'équilibre qui est en ce moment fait par Trump,
30:01au profit, en tout cas ponctuellement en ce moment,
30:03plutôt des États arabes dont il a besoin pour assurer la réussite de son plan sur Gaza.
30:08Donc c'est très compliqué.
30:10Il y a des arbitrages qui sont en fait parfois contradictoires.
30:14Et lui, il essaie de faire converger des alliés
30:18qui n'ont pas forcément le même agenda ou les mêmes intérêts.
30:22Alors l'autre pays, c'est bien sûr l'Iran.
30:24Et l'Iran et MBS, finalement, il y avait une normalisation.
30:28Après la guerre au Yémen, qui les a finalement opposés sur le terrain,
30:33MBS était dit qu'il allait se rapprocher de Téhéran.
30:35C'est ce qu'il a fait tout de même récemment.
30:38Donc lĂ , on n'est plus du tout sur la mĂŞme ligne que Donald Trump
30:41lorsqu'il s'agit des relations avec l'Iran.
30:43LĂ  aussi, je pense qu'il y a un MBS 2.0, comme vous disiez tout Ă  l'heure.
30:47Il a mis de l'eau dans son coca.
30:51Il y a eu l'accord sponsorisé par les Chinois
30:53entre l'Iran et l'Arabie saoudite.
30:57Il n'y a plus de velléité dans des groupes.
30:58Parce qu'il travaille aussi avec les Chinois.
31:00Absolument.
31:01Les Chinois ont réussi le plus beaucoup diplomatique de leur histoire
31:04avec ce rapprochement irano-saoudien.
31:06Ça n'a pas encore été entièrement concrétisé.
31:09L'Arabie saoudite reste déterminée à rogner les ailes de Téhéran
31:12un peu partout dans la région.
31:13Mais il n'y a plus ce risque de clivage, ce risque d'escalade.
31:20Cela dit, moi, je suis assez pessimiste sur ce plan de Gaza.
31:23Il y a encore énormément d'ambiguïté.
31:26M. Ben Guir a menacé d'assassiner des leaders palestiniens,
31:30d'emprisonner Mahmoud Abbas.
31:32Même la gauche israélienne n'est plus aujourd'hui favorable
31:35à un État palestinien.
31:36Donc, dans le meilleur des cas, ce que les Saoudiens pourraient obtenir,
31:39c'est quelques assurances verbales qu'il y aurait une voie, un passway
31:43vers une sorte d'État croupion démilitarisé.
31:46Mais sur le terrain, je ne vois pas comment un État palestinien viable
31:50pourrait voir le jour.
31:52Il faudra donc habiller cela pour permettre Ă  MBS d'aller de l'avant.
31:56– Yasmina Asrarghis, ils ont dit pendant la conférence de presse,
31:59MBS a dit qu'ils étaient en train de négocier un chiffre
32:02sur l'aide qu'ils pourraient apporter justement Ă  Gaza.
32:06Donc, les Saoudiens, que pourraient proposer ?
32:09Qu'est-ce qu'ils veulent jouer comme rĂ´le finalement MBS dans le dossier Gaza ?
32:13– Alors, ça reste à intervenir en fonction des négociations
32:20qui vont avoir lieu avec, évidemment, Jared Kochner et Steve Witkoff
32:25qui sont Ă  la tĂŞte, si vous voulez, de ce processus,
32:30et Tony Blair qui va également chapeauter l'ensemble de l'opération à Gaza.
32:36La question qui se pose de la même manière pour l'Arabie saoudite et les Émirats,
32:41c'est que ces pays, bien qu'ils soient extrĂŞmement riches,
32:43comme le dit le président Trump,
32:45ils ne souhaitent pas, si vous voulez, investir sans avoir la garantie
32:54que leur investissement paye.
32:56Donc, les conversations sur les investissements aujourd'hui
33:00sont en cours sur le dossier de Gaza, mais également en Syrie.
33:05Et je pense que ce qui va être négocié aujourd'hui,
33:10c'est réellement l'engagement des Saoudiens aux côtés des Américains
33:14sur une recomposition régionale beaucoup plus large.
33:18Et donc, Gaza et la Syrie seront discutés peut-être de la même manière
33:22puisque lĂ  aussi, vous avez des enjeux de reconstruction
33:25et d'infrastructures extrĂŞmement importants.
33:28La Syrie, le premier navire portant un certain nombre de containers
33:34de pétrole saoudien, est arrivé hier en Syrie.
33:39David Rigoulet-Rose, on a l'image d'ailleurs, c'était une information
33:43de Reuters, je n'ai plus exactement le chiffre du tonnage,
33:48mais enfin bon, c'est quand mĂŞme assez important.
33:50Et cette image, pour le moment, on voit que c'est ce qui est dit
33:52dans la presse, c'est que c'est un don des Saoudiens,
33:55un don en pétrole à la Syrie.
33:58On sait que MBS a eu un rôle important pour que Trump reçoive,
34:01il l'a reçu il y a quelques jours, Al-Shara,
34:04donc le président intérimaire syrien.
34:07Est-ce que c'est pour MBS aussi une façon de pacifier
34:09l'ensemble du Golfe et de pouvoir exporter son pétrole
34:12finalement Ă  la Syrie ?
34:13C'est de pouvoir réussir son plan, parce que la Syrie
34:16est une pièce importante et il veut absolument
34:19la stabilisation de la Syrie.
34:21Et lĂ -dessus, il retrouve Trump.
34:23Et d'ailleurs, on a retrouvé les tensions avec Israël
34:25sur la question syrienne, justement.
34:27Quand il y a eu les bombards, les frappes justement Ă  Damas, etc.
34:30Puisqu'il y a l'envoyé Trump, Tom Barak,
34:31qui a négocié justement une cessation avec putativement
34:34un accord entre Jérusalem et Damas, justement,
34:38pour éviter qu'elle se dégénère,
34:41parce qu'il y a le souhait d'une stabilisation de la Syrie
34:44post-Bachar.
34:46Et il se trouve que Moabed Bin Salman se veut
34:50un acteur central sur la Syrie.
34:54– De quelle manière, justement ?
34:55Avec le pétrole ?
34:57En permettant une stabilisation économique,
35:00il faut dire que la population, il y a 80% quasiment
35:02sous le seuil de pauvreté.
35:04Le redémarrage de l'économie, ça passe par effectivement
35:06des contrats.
35:08Et donc il y a une articulation qui va ĂŞtre faite
35:10avec la Turquie, le Qatar, pour que justement
35:12la Syrie ne retombe pas dans l'orbite iranienne,
35:16et qu'elle puisse repartir, redémarrer,
35:20et donc d'une certaine manière assurer une stabilisation
35:23régionale au niveau du Moyen-Orient
35:26pour favoriser, pour ce qui est de MBS,
35:30la réussite de son plan Vision 2030.
35:32Il sait que ça ne peut pas marcher s'il y a un chaos régional.
35:34– Pour revenir sur ce plan, oui, Michael.
35:37– Oui, en fait, pour plonger, il y a le plan 2030 de MBS,
35:42et puis il y a le fameux projet de méga-deal,
35:45qui est au-delà du deal du siècle,
35:47qui était les accords d'Abraham, le premier mandat de Trump.
35:49Maintenant, le méga-deal qu'il a en tête,
35:51c'est effectivement de réunir l'Arabie saoudite,
35:54la Syrie, l'Indonésie, voire on entend même le Liban,
35:58qui pourrait venir un peu plus tard,
36:00pour montrer Ă  quel point justement toute la matrice nouvelle
36:03de ce Moyen-Orient nouveau se fait autour
36:07d'une normalisation avec Israël,
36:09et surtout d'une capacité de pouvoir créer
36:11de l'échange économique et de l'attractivité économique.
36:14– Parce que ça, ça voudrait dire qu'il rentre dans les accords d'Abraham,
36:16mais pour l'instant, on n'y est pas.
36:17– Non, avant la lettre.
36:18– Avant la lettre, mais c'est ce qui a été proposé aussi
36:21aux responsables syriens, en disant lever des sanctions,
36:23rentrer dans les accords d'Abraham
36:25et normalisation économique pour pouvoir reconstruire le pays,
36:28parce que tout le monde a bien compris
36:30que le projet du président syrien est de reconstruire son pays
36:33et de quitter, on va dire, le djihad planétaire
36:36qu'il a adopté pendant un temps.
36:38– Est-ce que ça veut dire, Yasmina Asrarghis,
36:40que l'Arabie saoudite est une sorte de pivot
36:44dans cette redéfinition du Moyen-Orient en ce moment ?
36:48– On assiste très certainement à une montée en puissance historique
36:53de la relation entre les États-Unis et l'Arabie saoudite,
36:59une relation qui n'aurait pas pu, si vous voulez,
37:02atteindre son niveau de maturité avec une administration démocrate.
37:07et ce à quoi nous assistons, c'est quelque part le pari réussi
37:13de Jared Kushner, qui, rappelons-le,
37:16lors de la première arrivée de Trump à la Maison-Blanche,
37:22globalement, l'État profond américain ne voulait pas entendre parler d'MBS
37:26qui n'était pas le prince héritier que l'Arabie saoudite
37:32et certaines instances de gouvernance américaine souhaitées.
37:38Et donc, c'est Jared Kushner et Trump qui ont véritablement poussé, soutenu
37:45et permis à MBS de maintenir son pouvoir sur la première administration Trump.
37:55Et aujourd'hui, il vient, si vous voulez, récolter quelque part
37:58les fruits de ce soutien politique
38:01qu'il espère convertir, avant la fin de son mandat,
38:06dans l'élargissement et l'extension des accords d'Abraham,
38:10non pas comme on a pu le voir il y a quelques jours
38:12avec des pays comme le Kazakhstan,
38:14globalement des pays, certes musulmans, mais non arabes,
38:18mais ajouter, si vous voulez, l'Arabie saoudite
38:21qui est le bastion des musulmans avec la Mecque et Médine.
38:30Et donc, sur le plan symbolique et diplomatique,
38:33ce serait une victoire, certes, pour le premier ministre israélien,
38:39mais aussi pour Donald Trump.
38:42Et donc, MBS en a parfaitement conscience
38:44et il espère tirer le maximum de cette relation
38:50avant de s'avancer vers ce chemin
38:54qui, par ailleurs, est déjà en train de se dessiner
38:58puisque vous avez quotidiennement des vols
39:02qui passent d'Israël à Abu Dhabi ou à Dubaï
39:07en traversant le ciel saoudien.
39:10Donc, vous avez déjà ce que j'appelle
39:11une normalisation silencieuse
39:14qui dure depuis maintenant quelques années
39:16et que l'Arabie saoudite n'a pas interrompu.
39:19Donc, ce que nous pourrions voir
39:20sur les prochaines années, même les prochains mois,
39:23c'est une accélération de cette coopération silencieuse
39:28qui ne se donne pas Ă  voir face aux photographes
39:31Ă  la Maison-Blanche
39:32et on n'aura certainement pas une grande cérémonie,
39:35une grande signature avec un premier ministre israélien
39:37et l'Arabie saoudite et la photo que tout le monde attend
39:44et qui rappelle quelque part celle d'Idzak Rabin
39:46Ă  la Maison-Blanche avec Arafat.
39:52Mais nous verrons dans ce silence qui est très Moyen-Oriental
39:57l'accélération des conversations entre israéliens et saoudiens,
40:01entre israéliens et qataris, entre israéliens et d'autres parties prenantes
40:06de ce nouveau Moyen-Orient que Donald Trump continue de dessiner.
40:12Vous ĂŞtes d'accord, Karim Wittor ?
40:13Il est incontestable que le centre de gravité du monde arabe s'est déplacé.
40:17Dans les années 60, sous Nasser, c'était le Caire, l'Égypte.
40:20Aujourd'hui, c'est le Golfe et plus précisément Riyad.
40:23Mais il y a des divergences qui peuvent encore apparaître
40:25entre israéliens et l'Arabie saoudite sur d'autres sujets.
40:27Autant l'Arabie saoudite est en faveur d'une intégration économique très large,
40:31autant elle est également très attachée à l'intégrité territoriale de chaque pays,
40:36à l'intangibilité des frontières,
40:38alors qu'Israël pourrait être tentée par le jeu d'une alliance des minorités,
40:42d'aider les Kurdes, de manipuler les angoisses existentielles des druzes en Syrie, etc.
40:47L'Arabie saoudite, du fait de son histoire,
40:50est très attachée à l'unité, à l'intégrité territoriale de la Syrie et du Liban.
40:55Et là, il faudra qu'Israël soit très prudente,
40:57car si la politique d'Israël en Syrie conduit à réouvrir ses guerres par procuration
41:03avec la Turquie, le retour de la Russie, les Iraniens, etc.,
41:07il y a un vrai risque de fragmentation de tout le levant,
41:10et ce ne serait pas du tout dans l'intérêt saoudien.
41:12On n'a plus le temps.
41:13Merci beaucoup, en tout cas, d'avoir participé à cette émission.
41:16Yasmina Asrarghis, Michael Darmon, on montre la couverture de votre livre.
41:20En plus, on vient d'en parler.
41:21Les derniers jours dits Ă  Krabine, et on la voit, cette fameuse photo,
41:24elle est Ă  la une de votre livre.
41:26C'est aux éditions Passé Composé.
41:27Voilà, on le voit en fin d'émission,
41:29parce qu'on ne l'avait pas vue au début.
41:29Merci, Karim Emile Bittard, David Rigoulet-Rose.
41:33Merci à vous tous d'avoir suivi cette émission.
41:34Vous retrouvez sur les réseaux sociaux, sur YouTube, et je vous dis à demain.
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