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C’était il y a dix ans. Le 13 novembre 2015, Aurélie Silvestre a perdu son compagnon, Matthieu, le père de ses enfants, tué par des terroristes au Bataclan. Aujourd’hui, elle sort un livre fort, dans lequel elle raconte son chemin, depuis le procès des attentats en 2021-2022 jusqu’à ses interventions dans les classes et auprès de détenus radicalisés.

#13novembre #bataclan #témoignage #victimes

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Transcription
00:00J'ai compris qu'en fait c'était le père d'un des terroristes du Bataclan.
00:04J'ai regardé cet homme en me disant il y a une chance sur trois pour que son fils ait tué Mathieu.
00:08Et en même temps j'ai eu une grande empathie de me dire que cet homme a aussi perdu son fils.
00:13Et donc ça a été un moment d'audience très douloureux pour moi.
00:16Bonjour Marie-Claire, je suis Aurélie Sylvestre.
00:24Si je dois convoquer des souvenirs, je pense que je me vois avec une main sur mon gros ventre
00:29et tenant la main de mon fils en fait.
00:32Cette drôle d'équipe qu'on a formée tous les trois en fait dès le départ.
00:37On ne sait pas qui a sauvé qui mais on a eu un trio très rapidement qui s'est mis en place
00:41et qui a fait que moi j'ai pu continuer à vivre parce qu'il fallait que je fasse des choses
00:45et eux évidemment ils se sont pluggés à mon énergie pour qu'on continue et c'est vraiment l'image que j'ai.
00:51Moi je suis arrivée au procès, je ne connaissais rien comme je l'ai dit, de la procédure, des accusés,
00:55je n'avais vraiment absolument rien suivi, je m'étais juste recroquevillée sur mon chagrin.
01:00Et donc au tout début du procès, je me suis installée au fond de la salle
01:03et je me suis mise à noter des dates, des lieux, des heures.
01:05Et un jour je suis arrivée dans la salle d'audience, il y avait un homme à la barre, un peu fébrile
01:11et j'ai compris qu'en fait c'était le père d'un des terroristes du Bataclan.
01:16J'ai regardé cet homme en me disant il y a une chance sur trois pour que son fils ait tué Mathieu
01:19et en même temps j'ai eu une grande empathie de me dire que cet homme a aussi perdu son fils.
01:25Et donc ça a été un moment d'audience très douloureux pour moi
01:27parce qu'à la fois j'étais balottée dans des émotions très contradictoires
01:30et surtout j'ai compris que ça ne servait à rien de noter des dates, des lieux et des heures,
01:35qu'en fait c'était une histoire d'homme et que les histoires d'homme c'est infiniment compliqué
01:39et surtout c'est infini en fait.
01:41Donc j'ai brûlé mon cahier.
01:43Je me suis rendu compte récemment que mes enfants parlent pas mal entre eux
01:48mais du deuil en plus que de leur histoire.
01:50Je pense qu'ils ne se sont pas encore totalement emparés de cette histoire
01:54qui est de toute façon trop grosse pour nous.
01:56Je veux dire déjà accéder à l'information selon laquelle leur père est mort,
02:01c'est déjà une énormité se dire il a été assassiné dans une tuerie de masse.
02:04Je pense qu'il faut beaucoup de temps pour y aller
02:06et je leur laisse le temps qu'il leur faut pour y aller.
02:10Mais quand ils seront prêts, quand ils auront des questions précises,
02:15je serai là pour leur répondre.
02:16C'est aussi la raison pour laquelle je suis allée au procès
02:18pour pouvoir avoir des choses à dire sur tout ça, sur toute cette folie.
02:24Je n'ai pas ressenti de culpabilité, elle est venue de l'extérieur en fait.
02:27On a quelque chose à dire du comportement des femmes, quoi qu'il arrive.
02:30On imagine que si on retombe amoureuse, c'est qu'on a peu aimé l'homme avec lequel on était
02:35ou qu'on l'a vite oublié, ça n'a rien à voir.
02:37Et moi, je l'ai vécu dans ma chair et donc maintenant, je suis contente de pouvoir le raconter.
02:40En fait, pas du tout.
02:42Moi, Mathieu, c'est l'homme de ma vie.
02:44Enfin, c'est le père de mes enfants.
02:45L'amour que je lui porte ne cessera jamais.
02:49Mais il ne m'empêche pas, par ailleurs, d'avoir d'autres histoires.
02:52C'est un peu compliqué parfois, mais en tout cas, c'est tout à fait possible.
02:56Je ne le trompe pas, en fait.
02:58C'est-à-dire que je ne profane pas.
02:59Au contraire, je continue à vivre et je ne le fais jamais parler.
03:04Mais je pense que c'est ce qu'il aurait souhaité pour moi, évidemment.
03:07Être victime d'un attentat, ça change tout, en fait.
03:11Ça change la femme qu'on est.
03:13Ça change la position dans la famille.
03:17Ça change le réseau social.
03:18Je suis assez contente de me dire que 10 ans après, je vais bien.
03:21Mes enfants vont bien aussi.
03:22Tout a à peu près été restructuré.
03:24J'ai métabolisé mon histoire.
03:26Il faut faire avec ces nouvelles données.
03:28Et je crois qu'on n'y arrive pas si mal.
03:34Je crois qu'on n'y arrive pas si mal.
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