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  • il y a 1 jour
Il y a dix ans, dans la nuit du 13 novembre 2015, les attentats de Paris et de Saint-Denis ont bouleversé des centaines de vies. Parmi elles, celle d’Aurélie Silvestre, qui a perdu son compagnon et père de ses enfants au Bataclan. Dix ans plus tard, elle raconte comment, entre l’absence, la mémoire et la vie qui reprend, elle a réappris à tenir debout.

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Transcription
00:00J'ai accepté assez vite le fait que Mathieu était mort, mais pas qu'il ait été assassiné dans une tuerie de masse.
00:05Je vis à Paris et j'ai deux enfants qui grandissent sans père parce que leur papa est mort pendant les attentats du 13 novembre.
00:15Et voilà, depuis ce moment-là, toute ma vie a évidemment changé, mais aussi ma vie professionnelle.
00:22Si je n'étais pas enceinte, si je n'avais pas un enfant de 3 ans, je serais probablement allée au concert.
00:25Donc à commencer par là, mes enfants m'ont sauvée.
00:27Ensuite, voilà, je sais que j'étais enceinte, j'avais fait deux fausses couches avant, donc j'avais vraiment à cœur de mener à terme cette grossesse.
00:35Donc j'ai tout fait pour que tout ce qui était en ma mesure pour prendre soin de moi, pour accueillir cette petite fille, autant que c'était possible de le faire.
00:44Et j'avais par ailleurs effectivement un enfant de 3 ans à qui il fallait maintenir un quotidien si possible le plus normal.
00:52Donc effectivement, je me suis sauvée pour les sauver et eux, en me demandant de me sauver, ils m'ont sauvée aussi.
00:57En fait, c'est assez joli.
01:00On est très proche de la date anniversaire du 13 novembre.
01:04C'est chaque année un moment qui est compliqué pour moi.
01:07Cette année, ça l'est encore davantage, puisque c'est les 10 ans des attentats et qu'avec cet anniversaire, il y a l'idée du bilan qui n'est pas évident à faire.
01:16Donc voilà, je ne vais pas si mal, mais moins bien qu'il y a un mois et sans doute moins bien que dans trois semaines aussi.
01:25Je ne sais pas où vont les morts.
01:28C'est souvent une question que mes enfants me posent.
01:30Il est où papa ?
01:31En fait, très honnêtement, je ne sais pas.
01:33Ce que je crois, c'est qu'il est assez souvent partout et assez principalement, je pense, dans la musique.
01:40En tout cas, je sais que pour moi, la musique, c'est un lieu de rendez-vous avec lui.
01:45Et c'est quelque chose que j'essaye de dire à mes enfants.
01:48Lui, il avait un iPod à l'époque, dans lequel il y avait, je pense, 2000 chansons, 2000 titres qu'il aimait, qu'il avait pris un temps fou à enregistrer.
02:00Et voilà, il y a quelques années, on a, avec un cousin de Mathieu, transformé ce truc-là pour qu'il soit partageable.
02:06Et je l'ai offert à mon fils en disant, voilà, je ne sais pas où est ton père, mais ça, c'est un rendez-vous.
02:11Donc, si tu as envie de lui parler, d'être avec lui, tu peux te brancher sur à peu près n'importe quelle musique.
02:18Il sera là, quoi.
02:19Assez rapidement, après la mort de Mathieu, j'ai rencontré un homme.
02:23Et j'ai été très heureuse, en fait, de me rendre compte que j'étais très libre d'aller dans ses bras.
02:28Moi, j'ai vécu une séparation sans rupture.
02:31Je suis abîmée par rien.
02:34J'étais encore, et je suis toujours, pleine de l'amour que Mathieu m'a porté.
02:39Et ça me porte, en fait.
02:41Et ça ne m'empêche pas de tomber amoureuse de quelqu'un.
02:43On peut pleurer un amoureux mort et, dans le même moment, vibrer dans les bras d'un amoureux vivant.
02:49C'est possible, en fait.
02:50Je ne profane pas Mathieu ou son amour en tombant amoureuse de quelqu'un d'autre.
02:56Et en faire l'expérience m'a vraiment infiniment soulagée.
03:00Je veux vraiment le raconter parce que ce n'est pas forcément quelque chose qu'on dit, en fait.
03:03De la même façon que quand on vit un deuil, qu'il soit traumatique ou qu'il ne le soit pas,
03:08on peut dans la même journée pleurer, être une serpillière et puis, trois heures après, danser, en fait.
03:15Si vous voyez un endeuillé danser, ne vous dites pas qu'il n'est pas triste.
03:19Ce n'est pas vrai.
03:20J'ai la sensation d'avoir acquis des compétences pendant dix ans que je peux mettre à profit, en fait, maintenant.
03:26Et je me suis dirigée vers une association qui s'appelle l'Association française des victimes de terrorisme,
03:32qui est une association qui regroupe des victimes de tous les attentats.
03:38et échangée avec les élèves et plus récemment, pour moi en tout cas, en prison, pour aller rencontrer des détenus.
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