00:00Il est 7h45, l'invité d'ici matin est le début d'une semaine de commémoration dix ans après les attentats du 13 novembre 2015.
00:07130 morts à Saint-Denis, à Paris et un Iséroi parmi les victimes, Mathieu Giroud tué au Bataclan.
00:13Son père est avec nous ce matin, Soazic Pelé.
00:15Bonjour François Giroud.
00:17Bonjour.
00:18Merci beaucoup d'être avec nous dans ce studio ce matin.
00:21Comment vous avez traversé ces dix dernières années ?
00:25Si vous voulez, ces dix dernières années, elles semblent ne pas exister.
00:30C'est-à-dire que vraiment, j'ai l'impression que ces dix années n'ont pas passé,
00:37que je suis toujours, que nous sommes avec mon épouse toujours, il y a dix ans.
00:42C'est vraiment un phénomène assez particulier.
00:46On n'a pas l'impression que ces dix ans ont existé.
00:50Vous avez toujours l'impression que vous êtes le mi-novembre 2015, au moment où vous apprenez.
00:56Voilà, c'est ça.
00:57C'est-à-dire qu'on n'a pas vu passer ces dix ans.
01:00C'est quelque chose de très étrange.
01:02Moi, le 13 novembre 2020, j'ai commencé à écrire un texte pour,
01:10alors non pas pour publier une œuvre littéraire,
01:13mais pour faire un document avec un témoignage qu'on distribuera à des amis, aux connaissances, à ceux qui le veulent.
01:21Alors, je vous dis ça simplement parce que j'ai réalisé ça le 13 novembre 2020,
01:25en me disant qu'il y a déjà cinq ans de passé, et je ne voulais pas oublier tout ça.
01:30Et là, on est cinq ans après.
01:33Bon, je termine ce texte pour cette période-là.
01:37Et de nouveau, ces cinq ans, je ne les ai pas vus passer.
01:40Donc, c'est un phénomène assez étrange.
01:42Mais tous les gens qui sont touchés par ces attentats disent un peu la même chose.
01:48Parce que la douleur est toujours aussi présente ?
01:50Oui, je pense que c'est ça.
01:51C'est-à-dire, bon, il y a cette fameuse notion du faire son deuil.
01:55Bon, alors, c'est une notion qui existe sûrement, une notion de psychologue.
02:00Enfin, je ne la nie pas.
02:02Mais simplement, quand on l'éprouve soi-même,
02:05eh bien, on ne l'éprouve pas vraiment.
02:08C'est-à-dire que le deuil, enfin, la peine est toujours là.
02:14Elle ne nous quitte pas, elle ne peut pas nous quitter.
02:17Est-ce que cette semaine est particulière pour vous ?
02:22Les commémorations, les cérémonies, les hommages,
02:25est-ce que ça sonne différemment que les autres semaines de l'année ?
02:29Alors, voilà, même réponse.
02:31C'est-à-dire que non.
02:32C'est-à-dire que, bien sûr que c'est un événement particulier,
02:37et on reparle de ça dans la société.
02:39Mais rien n'a changé depuis dix ans, quoi.
02:43C'est la même chose depuis dix ans.
02:45Bon, moi, j'ai la photo de mon fils sur le piano dans la salle de séjour.
02:51Bon, ben, il est tous les jours, j'y pense, quoi.
02:54Oui, il est présent au quotidien.
02:56Voilà, donc c'est...
02:58Alors, bien sûr que c'est très important, cette semaine qui vient, c'est les dix ans.
03:02Bon, à Paris, il va y avoir l'inauguration du Jardin Mémorial derrière la mairie de Paris.
03:08Donc ça, c'est quand même un événement très important.
03:12Donc, effectivement, c'est une semaine particulière.
03:16Mais pour nous, dans le cœur, ça reste comme avant, quoi.
03:22Notre invité ce matin, c'est M. Giroux.
03:25Vous êtes François Giroux, le père de Mathieu Giroux, tué au Bataclan.
03:28Dix ans après, on revient sur toute cette situation avec vous, Soisic Pelé, il est 7h48.
03:33Vous avez parlé des hommages à Paris.
03:35Est-ce qu'il y aura aussi des hommages ici ?
03:38En Isère, pour Mathieu ?
03:39Oui, alors, la mairie de Jarry a...
03:42Vous avez fait une cérémonie, et puis bon, ça n'a pas été tout à fait possible.
03:46Mais pour le jeudi 13 novembre, la mairie de Jarry invite toutes les personnes,
03:53enfin tous les Jarrois ou tous ceux qui ont connu Mathieu,
03:55à venir déposer une fleur, une bougie, un message ou un objet autour d'une stèle en mémoire de Mathieu qui est placée à côté du monument aux morts à Jarry.
04:10Donc voilà, pendant toute la journée jusqu'au soir, les gens qui veulent venir montrer cet hommage,
04:19bon, peuvent venir le faire, quoi.
04:21Au-delà des hommages, il y a aussi des livres qui sont sortis cette année, des séries aussi,
04:26notamment une série sur France Télévisions qui s'appelle « Des vivants » qui raconte l'histoire de rescapés du Bataclan.
04:33Est-ce que vous l'avez vu ?
04:35Alors moi, je l'ai... Oui, oui, j'ai vu les deux premiers épisodes.
04:39Bon, alors c'est...
04:40Et puis je connais personnellement l'un des hommages qui était David,
04:46qui est ami avec Aurélie et Sylvestre, la compagne de Mathieu Giroux.
04:52Donc effectivement, j'ai suivi cette série, les deux premiers épisodes,
04:57et effectivement, ça retrace bien le traumatisme qui a pu avoir lieu auprès de ces personnes, quoi.
05:04Et est-ce que vous trouvez ça important ? Quel regard vous posez sur ces livres, ces séries ?
05:09Alors au début, on a eu un petit peu peur parce que, vous savez,
05:12on a toujours l'impression qu'on fait de la fiction à partir d'un drame,
05:17et ce drame nous touche personnellement.
05:20Mais il se trouve, je crois que cette série est vraiment très, très, très réussie
05:24et retraduit bien ce qui s'est passé au Bataclan.
05:28Oui, parce que c'est toujours compliqué aussi d'en parler.
05:32Est-ce que vous ressentez toujours un décalage ?
05:35Oui, alors il faut... Il y a quand même une chose à dire, c'est qu'il y a deux catégories.
05:38Il y a les endeuillés comme nous, les parents, les frères, les soeurs, etc.
05:43Et puis il y a ceux qui ont vécu directement le drame.
05:47C'est vraiment... Alors je ne dis pas que notre peine n'est pas très grande,
05:51mais elle n'a rien à voir avec les gens qui ont été traumatisés.
05:56Voilà. Je voulais dire une chose tout à l'heure par rapport à...
06:00Vous me demandiez si cette semaine était particulière.
06:04Elle est aussi particulière, je trouve, dans la société,
06:07parce qu'il y a jusqu'à il y a 15 jours, c'est comme si on avait oublié le terrorisme.
06:12On n'en parlait plus.
06:13Et puis alors là, bon, c'est le fonctionnement de l'actualité, je n'ai rien contre,
06:18mais là, on en parle beaucoup et voilà, il ne faut pas oublier que ça continue.
06:24Bon, vous avez entendu, la menace terroriste existe toujours, quoi.
06:29Le ministre de l'Intérieur.
06:30Donc la semaine, elle est particulière aussi pour ça, quoi.
06:32Ça remet en mémoire toutes ces choses-là qu'on oublie,
06:36parce que bien sûr, il y a 100 000 autres actualités.
06:40Bon, en tout cas, on en parle cette semaine.
06:42Merci beaucoup, François Giroud, d'en avoir parlé avec nous ce matin.
06:45Et merci beaucoup de m'avoir invité, c'est toujours important d'en parler un peu.
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