00:00Comme tous les week-ends, l'archive Sud Radio et l'archive ce matin est salutaire.
00:05Il faut reconnaître que le spectacle offert par certaines forces politiques cette semaine n'a pas été forcément, forcément à la hauteur des événements.
00:12Entre les fillettes voilées aperçues dans les tribunes de l'Assemblée Nationale et les réactions hallucinées d'une partie de la gauche
00:18criant à l'islamophobie d'État, au jeu de l'extrême droite, au réclamant qu'on lâche la grappe aux femmes.
00:24Mais de quelles femmes parle-t-on quand il s'agit d'enfants d'à peine 10 ans soumises à un voile qu'elles ne comprennent pas encore ?
00:29Même la lutte contre l'évidence semble devenue compliquée.
00:32Et comme si cela ne suffisait pas, cette semaine, et vous l'avez entendu hier matin sur Sud Radio,
00:36des activistes ont interrompu le concert de l'orchestre philharmonique d'Israël à Paris.
00:41Quatre personnes ont été interpellées, dont une fichesse.
00:43Dans les rangs politiques, à gauche, Manon Aubry ne nous condamne pas.
00:46Et Jean-Luc Mélenchon ne peut, je cite, pas empêcher les gens de protester contre un génocide.
00:51Mais que n'aurait-on pas entendu si, à l'inverse, un événement de gauche avait été empêché par des militants de droite ?
00:57Et c'est précisément cette complaisance, cette dérive d'une certaine gauche devenue aveugle,
01:01que je veux rappeler ce matin, grâce à une archive d'une force rare.
01:04Nous sommes le 3 janvier 1984.
01:20À la télévision est diffusé les dossiers de l'écran.
01:23L'émission culte, suivie par des millions de téléspectateurs, déroge à sa formule habituelle.
01:27Pas de film thématique cette fois-ci, mais une rencontre,
01:30une vedette unique installée face à Alain Jérôme pour répondre aux questions des Français.
01:35Cette vedette, c'est Yves Montand, l'acteur, l'icône, l'homme de gauche,
01:39mais un homme lucide, désormais libre,
01:4010 ans après l'apparition de l'archipel du Goulag.
01:43Montand revient sur les illusions, les aveuglements, les compromissions du siècle,
01:46auxquelles il a totalement participé avec sa compagne, Simone Signoret.
01:50Quand je parle des compromissions du siècle, j'évoque évidemment
01:52l'éloge du communisme de façon intempestive.
01:55Peut-on réellement juger sévernant un homme qui retourne sa veste
01:58quand il s'agit de dénoncer un système ?
02:00Reconnaître que l'on s'est trompé n'est pas si commun.
02:02Sa voix tremble, parfois vous allez l'entendre,
02:04sa colère déborde, même si le verbe est théâtreux par moments,
02:07la sincérité semble de mise.
02:09Il dénonce alors ce qu'on pourrait reprocher aujourd'hui à une partie de la gauche.
02:12Sa détestation du capitalisme,
02:14sa peur de dire du bien, sous prétexte que certains arguments seraient droites,
02:18sa fascination morbide pour les utopies sanglantes.
02:21Ce soir-là, c'est près de 20 millions de Français qui regardent la télévision.
02:24Après minuit, une fois le générique de fin qui est terminé,
02:27ce sont près de 13 millions de personnes qui sont encore devant leur téléviseur.
02:31Nous sommes le 3 janvier 1984.
02:34Yves Montand face à Alain Jérôme dans les dossiers de l'écran,
02:36une archive salutaire.
02:38À quel moment alors les yeux d'Yves Montand s'ouvrent ?
02:40À quel moment il ne se fait plus un devoir de dire que tout ce qui se passe à l'Est
02:43et en tant qu'il y a Moscou, c'est formidable ?
02:45C'est pas bon, il me dit c'est bon.
02:47Pourquoi vous dites c'est bon ?
02:48Je ne veux pas faire le jeu de la droite, non ?
02:51Avec cette cochonnerie de ne pas vouloir faire le jeu de la droite,
02:55des hommes se sont avilés, des femmes se sont avilés sur des choses qui sont inacceptables
03:00et que tu peux voir et que tu peux toucher du doigt.
03:03Quand je parle du goulag, ils m'ont dit
03:04« Mais comment ça se fait que tu parles sans arrêt du goulag ? »
03:06Mais le goulag est une chose qui est là, qui est là.
03:09Je veux dire que le goulag est là, il a été admis, reconnu,
03:11y compris par le comité central, y compris par les responsables du comité central d'Urs.
03:15Ils oublient que Chalabov qui a écrit Colima, la Colima,
03:19lisez la Colima, c'est ce que je demande aux jeunes chants de 20 ans,
03:22c'est ce qu'ils sont des îles de gauche, lisez ses livres,
03:24lisez Le Vertige de Gensbourg, lisez, je ne sais pas, Zinoviev, lisez Pliuch,
03:29lisez Sol Jeliti, ils savent de quoi, ils parlent mieux que nous
03:33qui vivons ici, au chaud, dans un pays fantastique, quand même,
03:37où il y a la démocratie, où il y a vraiment cette chose prodigieuse,
03:40et c'est ça qu'il faut défendre.
03:42Nous étions convaincus qu'il n'y avait qu'un seul ennemi, c'était le capitalisme.
03:45On s'aperçoit également que la gauche elle-même peut apporter la pire des repressions,
03:50la pire tyrannie, avec des sentiments parfaitement généreux.
03:55Vous ne pouvez pas le nier, vous ne pouvez pas le dire, c'est comme ça.
03:58Bon, alors je veux dire, il y a des choses qui ont changé,
04:00nous étions convaincus que les choses s'arrangeraient,
04:02si on pouvait éliminer le capitalisme.
04:04Je suis contre le capitalisme sauvage, il n'est pas bougé,
04:06mais je suis pour le capitalisme libéral.
04:08Parce qu'ils savent, ils savent faire des affaires.
04:11C'est comme ce matin, dans un journal que je n'aimerais pas parce que je vais être gentil,
04:16où on me dit, non, vous ne nous empêcherez pas de croire dans nos rêves,
04:20mais vous pouvez croire dans vos rêves, mais ne me les imposez pas.
04:23C'est ça, croyez ce que vous voulez, mais ne nous imposez pas.
04:26Vous comprenez ?
04:27Si les gens ont envie d'envoyer leurs enfants à l'école libre,
04:29laissez-les envoyer les enfants à l'école libre.
04:32Prouvez que l'école laïque est mieux que la libre.
04:35Mais ne les attaquez pas.
04:38Si j'ai envie d'envoyer mes enfants à l'école libre,
04:39qu'est-ce que ça peut vous foutre ?
04:41C'est formidable quand même, ça.
04:43Oui, c'est formidable, notamment Yves Montand a réécouté sur Sud Radio en 1984.
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