Skip to playerSkip to main content
  • 2 months ago

Category

🗞
News
Transcript
00:00Et pour parler de ce bilan de Giorgia Meloni, nous sommes en direct avec Vicenzo Susca.
00:05Bonjour, vous êtes maître de conférences à l'université Paul-Valéry à Montpellier, spécialiste de l'Italie et auteur du livre « À l'ombre » de Berlusconi aux éditions L'Armatan.
00:17Giorgia Meloni est au pouvoir depuis maintenant trois ans. Comment est-ce qu'on peut expliquer cette longévité par rapport à ses prédécesseurs ?
00:26Bonjour, elle a une majorité presque écrescente et elle a réussi à faire quelque chose qui n'est jamais arrivé en Italie dans son histoire,
00:38c'est-à-dire une alliance entre l'extrême droite, la droite traditionnelle et les partis chrétiens catholiques.
00:47Sur le plan économique, les finances publiques vont un petit peu mieux, mais la précarité est de plus en plus importante.
00:55Qu'est-ce que vous pensez de son bilan actuellement ?
00:59Ce sont finalement des améliorations de surface qui ne changent pas les problèmes radicaux du pays d'un point de vue culturel, économique.
01:13Meloni fait quelque chose qui va à l'envers de ce qu'elle avait dit pendant longtemps,
01:18parce qu'elle s'était posée toujours comme anti-système, notamment contre les réformes du gouvernement Draghi et Monti par rapport à l'austérité,
01:29alors qu'elle est en train d'appliquer une politique tout à fait néolibérale d'austérité et de réduction de dépenses publiques
01:36par rapport notamment aux revenus plus faibles et aux classes sociales économiquement pas à l'aise.
01:43Donc c'est un bilan tout à fait mitigé où la stabilité est certes un avantage du pays d'un point de vue financier, économique notamment,
01:53mais où il n'y a pas de croissance et où il y a un sentiment généralisé de précarité.
01:59On vous dit que Georgia Meloni fait finalement quelque chose d'assez différent de ce qu'elle avait promis auparavant sur le plan économique.
02:06C'est le cas aussi sur le plan migratoire, puisqu'on a vu aussi qu'à plusieurs reprises ces dernières années,
02:10les autorités ont autorisé des travailleurs étrangers à venir en Italie pour pallier aux pénuries de main-d'œuvre.
02:19Comment on explique ça ?
02:22Sans doute, nous sommes en face d'un programme bifront qui a deux visages.
02:28Le visage venant de l'extrême droite et le visage venant de la démocratie chrétienne.
02:33Fratelles d'Italie, à son parti, est devenue la nouvelle démocratie chrétienne,
02:37c'est-à-dire le parti conservateur de centre qui a gouverné le pays pendant longtemps.
02:42Donc d'une part, il y a une rhétorique agressive vis-à-vis des immigrés.
02:48Et le plan, comme celui développé avec le président de l'Albanie pour cette camp de réfugiés,
02:54presque une prison qui a été inarchevée, qui était un grand échec,
02:58mais de l'autre, finalement, il n'y a pas un grand changement de la pratique.
03:01Vous voyez, en revanche, d'un point de vue de l'imaginaire collectif,
03:06on est dans un pays où, en fait, la méfiance vis-à-vis des étrangers
03:11et où la méfiance et la stigmatisation des personnes non normalisées,
03:16d'un point de vue d'orientation de genre notamment,
03:19est de plus en plus un problème.
03:21Et cela s'ajoute aussi à la limitation des libertés des manifestations
03:26et à certaines mesures qui sont très dures vis-à-vis, par exemple,
03:30de l'assemblement ou, par exemple, des rave parties.
03:33N'oublions pas qu'une des premières mesures de ce gouvernement
03:35a été penchée contre les rave parties
03:38pour limiter la liberté de cette expression de socialité pure
03:41et non fonctionnelle d'un point de vue économique.
03:45Il y a certains sujets sur certains domaines
03:47sur lesquels c'est toujours une question d'image.
03:50Est-ce qu'on peut toujours considérer aujourd'hui
03:52que Georgia Meloni est une dirigeante d'extrême droite ?
03:56D'un point de vue de sa rhétorique, oui.
04:00Mais c'est une extrême droite maligne
04:02par rapport à l'extrême droite de Donald Trump
04:04ou de Millet en Argentine.
04:06Parce que c'est une droite qui se voit aussi cool,
04:09gentille, jeune, qui fait un clin d'œil à TikTok
04:13et ainsi cachant les aspects un peu plus violents.
04:18C'est un visage marketing-oriented
04:21qui en fait contribue à faire sembler
04:25notamment à l'international
04:27que le gouvernement est modéré
04:29alors qu'il n'est pas vraiment modéré.
04:31Mais ce que j'ai dit tout à l'heure,
04:32cet aspect démocrate-chrétien
04:35relève notamment du fait d'être un peu ambitieux
04:38donc avec l'Union européenne
04:40et à la fois avec Trump.
04:43Georgia Meloni réussit en ce moment
04:47à être suspendue entre ces deux réalités,
04:49entre même ces deux visages.
04:51Et pour l'instant, elle résiste
04:53à la charge et à la tête du gouvernement.
04:56Est-ce qu'elle joue un petit peu sur son rôle
04:58sur le fait d'être une femme ?
05:02Pour adoucir peut-être son image ?
05:05Sans doute, c'est une femme
05:07qui joue le rôle de la femme
05:08mais qui se dit non féministe.
05:11C'est une femme qui interprète
05:13la femme traditionnelle
05:15même si elle veut être contemporaine.
05:19Nous voyons toute l'ambiguïté de sa position
05:22alors qu'il y a quelques jours,
05:24Trump lui a dit,
05:25on la présentait en public,
05:27dans un événement public,
05:28que c'est une belle femme.
05:29C'était lors de la signature
05:31effectivement de l'accord
05:33de cesser le feu à Gaza, au Caire.
05:35Exactement.
05:37Vous voyez en même temps,
05:38elle qui veut être copine avec Trump,
05:41qui est copine avec lui,
05:42mais en même temps,
05:43elle est gênée.
05:44Parce qu'en tant que femme,
05:45elle sait que c'est un geste sexiste.
05:48Elle a une réaction controversée
05:50par rapport à ce geste.
05:52Et cette controverse
05:53est au cœur de Fratelli d'Italie,
05:56de son gouvernement en ce moment.
05:57Il n'a pas encore exactement
06:00choisi sa direction.
06:02Justement, vous parliez
06:03de ce rapprochement
06:03entre Georgia Meloni et Donald Trump.
06:07Comment elle est perçue
06:08finalement à l'international ?
06:12À l'international ?
06:14Je crois qu'en ce moment,
06:16elle est arrivée à bien passer
06:18un message d'une femme modérée
06:20qui arrive à nuancer
06:23ses aspects les plus radicaux.
06:26mais en même temps,
06:29elle révèle aussi ses faiblesses,
06:31qui sont d'ailleurs les faiblesses
06:33des gouvernements italiens
06:34pendant longtemps,
06:36c'est-à-dire un gouvernement
06:37qui dépend directement
06:39des États-Unis,
06:40de ses politiques,
06:41de ses économies.
06:42Moi, je trouve quand même fondamental
06:44le fait que son livre,
06:46qui vient de paraître aux États-Unis,
06:48« Io sono Georgia »,
06:49« I am Georgia »,
06:49« Je suis Georgia »,
06:50à la préface de Donald Trump.
06:53Et que Meloni,
06:54avec ses collègues de gouvernement,
06:57elle a défendu M. Kirk.
07:00Elle a défendu les propos de M. Kirk.
07:03Donc, derrière cette apparence
07:05modérée et gentille,
07:08et jeune,
07:09il y a une adhésion de fonds
07:11aux valeurs les plus austères
07:14et graves du conservatisme culturel.
07:17Pourtant, au sein de l'Union européenne,
07:18elle a acquis une certaine crédibilité
07:19vis-à-vis de ses partenaires.
07:22Oui, parce que dans un cadre
07:23d'instabilité, de précarité,
07:26comme celui de l'Union européenne,
07:28le fait d'avoir choisi
07:30de participer à des mesures,
07:33par exemple,
07:34en soutien de l'Ukraine,
07:35a été vu comme un geste positif.
07:37Et c'est un geste positif.
07:39C'est un geste positif,
07:40en même temps qu'elle n'arrive pas
07:41à assumer jusqu'au fond.
07:42Parce qu'elle n'a jamais
07:45véritablement critiqué Trump
07:48par rapport aux droits de douane,
07:49par exemple,
07:50ou par rapport à ses positions
07:51vis-à-vis de la Palestine
07:53et notamment vis-à-vis de l'Ukraine.
07:56Là encore, vous la voyez héciter.
07:59Et cette hécitation,
08:00certes, en ce moment,
08:02lui profite en termes de soutien,
08:05mais à long terme,
08:07elle est dangereuse.
08:09Justement, si on se projette un petit peu,
08:11est-ce que vous pensez
08:11qu'étant donné son bilan
08:13à l'heure actuelle,
08:14étant donné son image,
08:16est-ce qu'elle peut être en mesure
08:17d'effectuer un second mandat ?
08:19Je crois,
08:21et je l'exprime de manière personnelle,
08:24que ce gouvernement est destiné
08:26à durer longtemps.
08:27Est-ce destiné à durer longtemps
08:28parce qu'en Italie comme en France,
08:31en France comme aux États-Unis,
08:33les gauches et les centres-gauches
08:35ne sont pas capables
08:36d'intégrer et d'assumer
08:38les problématiques sociales et économiques
08:40qui soutiennent la victoire
08:42des populistes contemporains.
08:43Et le centre-gauche italien,
08:46malgré la puissance,
08:47la force,
08:48la sagesse
08:49de Elie Schlein,
08:51la secrétaire du Parti démocratique,
08:53n'a pas encore réussi
08:55à proposer une réponse claire,
08:57nette,
08:58par rapport à ce gouvernement.
08:59Merci beaucoup
09:00pour toutes ces explications,
09:02Vicenzo Souska.
09:03Merci à vous.
09:04Merci à vous.
Be the first to comment
Add your comment

Recommended