- il y a 10 heures
Le Grand portrait de Sonia Devillers est Benjamin Biolay, pour son album “Disque Bleu” qui sort le 17 octobre. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-grand-portrait/le-grand-portrait-du-lundi-13-octobre-2025-2150374
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00:00France Inter, la grande matinale, Sonia Devillers.
00:07L'humanité se divise en deux catégories, ceux qui sont partis de chez eux et ceux qui sont restés.
00:14Il y a les migrants, les exilés bien sûr, qui ont fui le malheur, pris tous les risques pour une vie meilleure.
00:20Mais partir de chez soi parfois, c'est simplement claquer la porte, quitter ses parents, quitter sa province, quitter son milieu social pour accomplir son destin.
00:28Ça n'a l'air de rien, pourtant ces exilés de l'intérieur, souvent, ils ont vécu l'arrachement.
00:35C'est courageux de se réinventer, libérateur, douloureux aussi.
00:39Nouvel album somptueux de Benjamin Biolet, il se divise en deux parties, les résidents et les visiteurs.
00:45Ça chante avec Maestria, le mélange des influences bien françaises et latino-américaines.
00:51Ça dit quitter Paris et prendre un vol de nuit.
00:53Mais ça dit aussi le passé, les morts, l'enfance, les souvenirs.
00:59Quand ils replongent dans leur histoire, ceux qui sont partis un jour savent qu'ils seront des visiteurs, pour toujours, au mieux des résidents.
01:07Des gens qui ne sont pas nés quelque part, mais qui y habitent et qui n'ont que leurs fantômes pour se sentir chez eux.
01:13Portrait numéro 28.
01:14Et il sourit Benjamin Biolet, c'est déjà pas mal.
01:21Oui, je souris souvent.
01:23Même à cette heure-là, même à 9h25 ?
01:25Normalement pas trop.
01:27Bonjour.
01:28Donc le disque bleu, c'est son titre, sort vendredi prochain, vendredi 17 octobre.
01:34Oui, c'est ça.
01:35Il y a déjà des extraits en boucle sur France Inter et on le trouve absolument magnifique.
01:42Où vous sentez-vous résident ? Où vous sentez-vous visiteur, Benjamin Biolet ?
01:47Moi, je suis très nomade, mais je me sens un peu partout chez moi.
01:51Je ne suis pas un nomade qui cherche un endroit désespérément.
01:53Je ne suis pas le juiférant, je ne cherche pas un endroit qui n'existe pas.
02:03Je suis heureux dans les endroits qui existent vraiment.
02:06Mais c'est vrai que ce que vous avez dit en préambule, c'est vrai, j'ai dû de toute façon faire un premier voyage qui est déterminant.
02:15Quitter sa ville natale, son milieu social.
02:19Moi, je ne l'ai pas vraiment quitté, mon milieu social, c'est-à-dire que même si j'en ai découvert d'autres à la fin,
02:25moi, je vis plutôt comme la manière de mes parents.
02:28Mais c'est vrai que c'est beaucoup de déchireurs.
02:33Parce que le résident, étymologiquement, c'est quelqu'un qui habite quelque part.
02:37Oui, bien sûr.
02:37C'est quelqu'un d'enraciné.
02:38Oui, évidemment.
02:40Donc vous, vous êtes au mieux un résident.
02:42Au mieux un résident.
02:43Et adieu Paris, pourquoi adieu Paris ?
02:49Je parle pendant que je chante ? Non.
02:53Comme vous voulez.
02:55Non, mais pourquoi adieu Paris ?
02:57C'est un peu allégorique.
03:00C'est un certain Paris, on va dire.
03:04Un certain milieu qu'on connaît tous un peu bien et qui est un peu...
03:08Un peu quoi ?
03:10Anthropophage, un peu, je ne sais pas.
03:12Je vois toujours les mêmes gens.
03:14Un peu...
03:14Un peu auto-centré, un peu puant, un peu fermé.
03:19Un peu autoritaire, un peu.
03:22Qui, par exemple, n'accepte pas le concept de la domination sociale, par exemple.
03:28Qui pense que tout va bien, en fait.
03:29Il y a quelque chose...
03:30Qui ne voit pas à quel point ils sont écrasants pour les autres.
03:32Exactement.
03:33À quel point ils mettent les gens en colère.
03:34C'est possible.
03:35À quel point tant de gens sont exclus de ce tout petit milieu, c'est ça ?
03:39Exactement.
03:39C'est ça.
03:40Et par contre, la capitale de la France, je la trouve toujours très jolie.
03:43Il est fait, certes, un peu frais, mais je...
03:45Et puis, c'est la ville de tous ceux qui sont partis de chez eux, non ?
03:48C'est la ville de tous ceux qui ont quitté un jour.
03:51Je ne connais pas beaucoup.
03:52J'aime beaucoup demander aux gens d'où ils viennent.
03:54C'est quand même très rare.
03:55Et souvent, quand les gens sont d'ici, ils sont de bons lieux, en vérité.
03:58Alors, la couleur bleue, pourquoi est-ce que les idoles de la pop,
04:03elles ont toutes des albums associés à une couleur ?
04:06Les Beatles, du bleu, du blanc, du rouge.
04:09Taylor Swift, un album rouge.
04:12Jay-Z, un album noir.
04:15Miles Davis, un album presque bleu.
04:18A kind of blue.
04:19Un genre de bleu, c'est ça ?
04:20Oui, l'horreur avec Blue Mask aussi.
04:22Oui, c'est un...
04:23Parce que je pense qu'on s'exprime tous beaucoup en couleurs,
04:25même si...
04:26Je connais même des musiciens très, très savants.
04:29Quand j'étais petit, au conservatoire de musique,
04:31on avait eu une masterclass avec Olivier Messian
04:33qui nous décrivait les accords en couleur, vraiment.
04:36Vraiment ?
04:36Oui, en couleur.
04:37Moi, j'avais trouvé ça débile.
04:39Mais j'étais très, très, très, très rebelle.
04:41Non, mais très bête aussi, quoi.
04:42Je trouvais ça complètement con.
04:43Et en fait, il avait parfaitement raison, quoi.
04:46Après, c'est vrai que c'est dur de voir
04:47qu'un accord, il est rose avec une petite nuance de turquoise.
04:52Mais bon, je vois que c'était un homme tellement
04:55savant qu'il n'était pas là pour raconter des bêtises.
04:58La note bleue.
04:59Il faut raconter ce que c'est que la note bleue.
05:01C'est un concept difficile.
05:03On pense que c'est une note qui n'est pas prévue dans la gamme.
05:06Mais en fait, moi, je pense que c'est le moment
05:07où on amène cette note qui crée l'imprévu, quoi.
05:10Après, si on regarde, ça peut être une note
05:12tout à fait banale dans une tonalité.
05:15Moi, j'ai trouvé des définitions extraordinairement savantes
05:18de la note bleue.
05:21La tierce mineure.
05:23La quarte augmentée.
05:26Ou la quinte diminuée.
05:27La septième mineure.
05:29Ça dépend du contexte.
05:31C'est vrai que la quinte diminuée
05:37ou la quarte augmentée,
05:38ça peut vous faire un effet.
05:39Mais pour moi, ce n'est pas la note bleue.
05:41C'est des notes de transition, ça.
05:43Après, on a perdu beaucoup d'auditoires.
05:45Non, pas du tout.
05:45Est-ce que la note...
05:47Non, c'est génial, le jargon.
05:48C'est génial, le jargon.
05:49C'est totalement génial.
05:50C'est pour ça qu'on aime les séries policières.
05:52C'est parce que c'est le bourré de jargon.
05:53Si on était dans une série policière sur la musique,
05:55c'est ce que l'on fait.
05:57Mais est-ce que c'est le moment
05:59où la note fait basculer la musique
06:02et l'oreille de celui qui l'écoute
06:04dans quelque chose de mélancolique ?
06:06Pas forcément.
06:07C'est le moment que certains vont appeler le climax.
06:10C'est le moment où la chanson va rentrer dans votre cœur
06:13et va imprimer
06:13et vous ne la quitterez plus
06:15et vous l'écouterez parfois juste pour ce moment.
06:19Moi, il y a une chanson qui s'appelle
06:20The Boy Is Mine de Brandy et Monica.
06:23Je l'écoute juste pour une vibe à la fin
06:25où l'une des deux fait une note complètement forte.
06:27Qui entre dans votre cœur ?
06:28La note me tue, elle me fait...
06:30Elle est bleue pour moi.
06:31Et elle vous quitte plus.
06:32Et ce double album bleu,
06:34ce double disque bleu,
06:35Résident et Visiteur,
06:37il est plein d'histoires personnelles.
06:39Je le disais, il est plein de retours en arrière.
06:41Ça commence par un 15 octobre 1993.
06:44Pourquoi ?
06:45Je n'en ai aucune idée.
06:46J'avais 20 ans, pardon.
06:49Et quand on a 20 ans ?
06:51Voilà.
06:51Non, mais c'était...
06:52Oui, oui, non.
06:52Je n'en ai aucune idée.
06:53C'est vraiment des...
06:54Il y a des chansons plus thématiques
06:56où on y pense beaucoup avant de les faire.
06:58Et puis d'autres qui vous tombent un peu
07:00tout cuits dans le bec.
07:01Celle-ci, c'en est une.
07:03Et je me suis retrouvé,
07:05j'étais à Buenos Aires en 2023,
07:06mais j'ai eu envie de parler de ça.
07:08Ça valait le coup d'en finir.
07:14Il y en a même certains que ça fera rien.
07:18Et d'autres bien emmerdés,
07:22bien parfumés,
07:24de noir habillé,
07:26belle personne fumée.
07:28J'écris ça juste avant de tomber.
07:31Ça, ça fait partie des gens,
07:49des chansons auxquelles on réfléchit
07:50avant de les écrire.
07:51Non, mais on sait de quoi elle parle,
07:54même si elle n'en parle pas.
07:55Ça, c'est quand même mon état
07:57avant de monter sur scène.
07:58Vous n'allez pas parler du track du chanteur.
08:00C'est complètement éclaté comme sujet.
08:03Mais c'est quand même un peu mon état.
08:05J'ai vraiment l'impression
08:05que c'est juste avant d'aller me casser la gueule.
08:08Encore aujourd'hui ?
08:09Ah oui, j'ai très peur.
08:10C'est peut-être le truc qui me fera
08:12écouter ma carrière en live.
08:16C'est cette impression qu'on va crever.
08:17Ou qu'on va se ridiculiser,
08:19ou qu'on va tomber.
08:21Parce que ça raconte aussi
08:22quelque chose de bien plus universel.
08:24Bien sûr, ce n'est pas une question d'égoïs.
08:25Je n'ai pas peur de chanter faux, moi.
08:27Ça peut m'arriver, même souvent.
08:29J'ai peur d'un truc irrationnel
08:32que je décris dans cette chanson.
08:34Et il y a aussi quelque chose
08:35dans cette chanson qui raconte
08:37que quand on avance dans la vie,
08:39on se rend compte qu'il y a plein de petites choses
08:41qu'on n'avait pas comprises,
08:42qu'on n'avait pas vues,
08:43qu'on n'avait pas savourées.
08:44Qu'on avait négligées.
08:45Qu'on avait négligées,
08:46qu'on n'avait pas savourées.
08:47Et qu'en réalité, vous avez 50 ans passés.
08:50Et il y a plein de moments qui remontent.
08:53Bien sûr.
08:53Et puis, les enfants,
08:55ça crée une espèce de boomerang intergénérationnel.
08:58Ils vivent quelque chose.
08:59Et d'un coup, vous vous rappelez
09:00que vous-même, vous l'avez vécu,
09:02peut-être pas de manière identique,
09:04mais que vous connaissez les émotions
09:05qui les traversent.
09:06Et avec le penseur, c'est ça.
09:07Le penseur, c'est aussi l'histoire d'un homme
09:10qui regarde la mer,
09:11qui ne sait pas où il va emmener son bateau,
09:13et qui se dit,
09:14je pourrais mourir,
09:14mais en réalité, non, pas tout de suite.
09:16Il faut encore en profiter un tout petit peu.
09:18Il faut mourir,
09:18mais c'est nul, quoi.
09:20Un pastis, c'est dit dans la chanson, ce type.
09:23Mais c'est une chanson, vous voyez,
09:24qui me représente bien.
09:25Et ça, j'aurais pu l'écrire avant, en revanche.
09:27Ah bon ?
09:28Oui, quand on écoute Les Cerves Volants,
09:30qui est une chanson d'il y a très longtemps,
09:32il y a quelque chose de très apaisé,
09:33comme ça aussi,
09:34de quelqu'un dans un parc.
09:35Parce que ça fait très longtemps
09:36que vous êtes apaisé.
09:37Je mesure le temps qu'il faut.
09:39Ou pas, hein.
09:40Non, parce que vous avez eu très longtemps
09:41l'image de quelqu'un pas apaisé du tout.
09:43Et on a l'impression qu'il y a quelque chose.
09:45Le Jean-Luc Mélenchon, de la vérité française.
09:49D'accord.
09:51Et ça va mieux ?
09:52Beaucoup.
09:53Mais c'est aussi...
09:54Parfois, on a une image
09:57qui est vachement dure à endiguer.
09:59Il suffit de 2-3 interviews,
10:00de 3 conneries,
10:01de 3 vannes mal perçues,
10:03de 3...
10:04Et on se retrouve très vite
10:06enfermés dans un...
10:09Ouais, dans un...
10:10Un personnage qui n'est pas tout à fait
10:12à l'accord avec ce que vous êtes vraiment.
10:14Et dont on met des années
10:15à se débarrasser ?
10:16C'est tenté qu'on se débarrasse un jour.
10:18Mais dont on met des années
10:20à se foutre.
10:20Je ne sais pas si je n'étais plus sincère.
10:22Et Morpheus,
10:22c'était qui là ?
10:23Elle raconte quoi, cette chanson ?
10:24C'est un hommage à Serge Gainsbourg.
10:25C'est ça, évidemment.
10:27Totalement Gainsbourg.
10:28Total, assumé.
10:29Pas Gainsbourg, je ne l'aime pas lui.
10:31Moi, j'aime Gainsbourg, vraiment.
10:32Et je suis amoureux de Gainsbourg.
10:34Et ça, c'est vraiment un hommage
10:35à l'album Melody Nelson
10:36de Serge Gainsbourg et Jean-Claude Vanier.
10:38Parce que c'est vraiment
10:39deux personnes
10:40qui ont fait ce disque.
10:42Et j'assume total.
10:43Je ne l'aurais pas sorti
10:44si je parlais sur le titre,
10:45si je faisais du talk-over
10:46comme Serge Gainsbourg.
10:48Mais comme j'ai trouvé une mélodie
10:49et des trucs à raconter,
10:51eh bien, je suis trop content.
10:52Moi, dès la première mesure,
10:54je suis trop content.
10:54Ça me fait un effet de fan, en fait.
10:57C'est ça, de fan.
10:58Il y a plein d'hommages
10:59dans cet album.
11:00Il y a Brassens, évidemment.
11:01Les passantes, réécriture.
11:03Pou, magnifique.
11:10Je veux dédier ce poème
11:17à toutes les femmes qu'on aime
11:20Pendant quelques instants secrets
11:24À celles qu'on connaît à peine
11:29Qu'un destin différent entre elles
11:32Et qu'on ne retrouve jamais
11:36À celles qu'on voit à ta paraitre
11:40C'est très étouffle.
11:41Il est composé au clavier,
11:42me dit Benjamin Biolet.
11:44C'est pour ça que c'est très dur
11:45de chanter à la note près.
11:47Parce que parfois, on a l'impression
11:48qu'on chante une chanson de Brassens.
11:50Et évidemment, c'est ce qu'on est
11:51en train de faire.
11:52Mais si on regarde la façon
11:52dont il la chante,
11:53les notes exactes qui chantent son rythme,
11:56on voit que tout a été fabriqué au clavier
11:58et réappris à la guitare.
11:59Donc c'est un art majeur à Brassens.
12:04C'est vraiment des heures et des heures
12:05de travail sur les textes, la musique.
12:07Et ça, c'est typique de lui.
12:10Il découvre ce poème en 1942
12:12et il le sort en 1972 quand même.
12:15Et entre-temps, il enlève des strophes,
12:16il change la musique, il change le rythme.
12:19On m'a dit, son cousin m'a dit
12:21qu'il y avait une version pas gardée
12:23qui était à peu près dans le tempo
12:25que j'ai fait là.
12:27Puis après, il l'a plus étiré.
12:28Parce que lui, il a plusieurs versions
12:30de chaque chanson à chaque fois.
12:31Oui, souvent, c'est des musiques différentes.
12:35Vous avez retrouvé plein d'archives.
12:36Vous travaillez sur un documentaire sur lui en ce moment.
12:38Oui, on a retrouvé plein de trucs
12:39et puis on est en train d'en chercher.
12:41Donc c'est très intéressant de voir
12:43l'énorme travail.
12:45Et vous vivez à 7 ?
12:47Oui, je peux à 7.
12:48Non, il n'y vivait pas.
12:50Il avait mis à 7 paro chez sa soeur en plus.
12:53À la toute fin, il avait acheté
12:54un petit appart pour Pupchon, sa campagne.
12:56Mais c'est un vrai Paris-Gaud.
12:58On l'écoute parler de poésie, Brassens.
13:02Je me suis demandé si, en lisant les poètes,
13:05je n'arriverais pas à acquérir
13:06sinon leur génie, du moins un petit peu de...
13:09Si je n'arriverais pas à ennementer
13:11un petit peu mon esprit
13:12de manière à écrire des chansons
13:13un peu meilleures que celles
13:14qu'on entendait quotidiennement à la radio.
13:18Même si on écrit des conneries,
13:19il faut quand même le don
13:22de mettre les trois mots qu'il faut
13:25sur les trois notes qu'il faut.
13:27Baudelaire, avec son génie,
13:28peut-être, s'il avait été musicien,
13:30eût été incapable de faire ça.
13:33Et on peut être même dépourvu de talent,
13:36mais avoir celui-là de talent,
13:37celui de dire je t'aime au moment où il faut.
13:41Il est bien cet arché.
13:42Oui, c'est parfait.
13:43De toute façon, il est tellement clair.
13:46Il a une telle structure.
13:48Il connaît tellement bien son artisanat
13:50et comment il est arrivé
13:51qu'évidemment, tout ce qu'il dit est juste.
13:53Ça pourrait paraître choquant,
13:54sa phrase sur Baudelaire,
13:55mais elle est parfaitement vraie.
13:57Parfaitement vraie.
13:58Justement, c'est quelque chose
13:58qui nous fascine tous
13:59et qui nous interroge tous.
14:01C'est comment on écrit une chanson,
14:02comment on casse la grammaire,
14:03comment on casse la syntaxe française
14:05pour que les mots arrivent à coller
14:07à des notes et que ça ait quand même du sens
14:09et qu'à la fin, ça raconte une histoire.
14:11Alors lui avait ce don incroyable
14:13de ne pas casser la syntaxe.
14:14Jamais, jamais.
14:15Vous, vous la cassez.
14:16Oui, je n'ai pas.
14:17Vous, vous la cassez avec une immense liberté.
14:19Je me suis enrichi de poésie,
14:21de récits, de choses comme ça,
14:22mais je n'ai pas la culture
14:23d'Odurge Brassens
14:25qui ouvrait le lit très
14:27toutes les 20 minutes chez lui.
14:28C'est vrai.
14:29Ah bah oui, bien sûr.
14:31Qu'elle devrait parler à l'imparfait du sublime.
14:33Sauf que vous jouez,
14:34vous écrivez dans le disque bleu
14:37une chanson qui s'intitule
14:38« Le Testament ».
14:39Alors là aussi, il y a Brassens
14:40qui a écrit « Le Testament ».
14:42Mais là, vous jouez.
14:43Vous jouez en alexandrin.
14:44Oui, il y en a trois.
14:45Oui, bah oui, les alexandrins,
14:46c'est très, très musical.
14:48Les musiciens sont quand même assez...
14:51Sans le savoir,
14:52les chanteurs ont chanté
14:53une centaine d'alexandrins.
14:54On ne se rend pas compte,
14:55mais le nombre de chansons
14:56qui sont en octocouplet
14:57ou en alexandrin, c'est...
14:59Vous l'avez en tête ?
14:59Vous pourriez encore la réciter ?
15:01Moi, je l'ai, je crois.
15:02Laquelle ?
15:02Bah...
15:02Votre testament à vous.
15:04Non, je pourrais la chanter,
15:05je ne peux pas la réciter
15:06parce que je n'ai pas du tout
15:08ce rythme-là,
15:09mais j'ai bien sûr
15:09la musique en tête.
15:10À défaut de rentrer,
15:11je ne pars pas vraiment,
15:13je suis le caillou bleu
15:14ou l'oiseau dans la cour,
15:15je suis la larme qui coule
15:16quand tu prêtes serment,
15:17car tu sais que tu mens
15:18quand tu dis pour toujours.
15:21Ah bah, c'est des chansons,
15:22il y a des rimes et tout.
15:23Mais après, oui, c'est...
15:24Ouais, c'est bien.
15:27On parle de politique
15:28ou on ne parle pas de politique ?
15:29Il est très, très peu politique,
15:30cet album.
15:32Il y a une chanson,
15:33il y a une chanson
15:35qui est à la fois très drôle,
15:37très potache,
15:38très politique,
15:39beaucoup moins intime
15:41que les autres,
15:43avec un refrain hilarant.
15:48Pauline est là partout,
15:50mais Justine jamais nulle part.
15:52Pauline est là partout,
15:52mais Justine jamais nulle part.
15:55Jacqui super sardou,
15:56mais Michel de moins en moins rocard.
15:59C'est vrai.
16:00Ça veut dire quoi ?
16:01Pauline est là partout,
16:02mais Justine jamais nulle part.
16:03Ça veut dire ce que ça veut dire.
16:05C'est un vieux slogan de mai 68
16:08qui, d'après vos informations,
16:11est de Victor Hugo.
16:12C'est tiré d'un discours
16:13de Victor Hugo
16:14à l'Assemblée nationale.
16:15Justice est partout.
16:16Non, non.
16:17Police partout,
16:18justice nulle part.
16:19Pauline est partout,
16:20justice nulle part.
16:20Et un jour,
16:21dans un chiotte en Suisse,
16:22j'ai vu écrit
16:24Pauline partout.
16:25Donc je me suis dit,
16:25évidemment,
16:26Justine nulle part.
16:27C'est né dans un chiotte en Suisse.
16:29Oui, mais il y a très longtemps
16:29on est dans un chiotte en Suisse.
16:31Mais je l'ai écrit en Argentine.
16:32Là-bas, vraiment,
16:33c'est très impressionnant
16:34ce qu'on vit.
16:34C'est vraiment...
16:35Alors racontez.
16:36C'est une vraie simulation
16:37de ce qui peut nous arriver.
16:38Racontez que vous vivez
16:39en Argentine depuis des années.
16:41Oui, je n'y vis pas beaucoup.
16:42J'y vis quelques mois par an.
16:43Mais une partie de ma famille y vit.
16:46Et j'ai vu l'arrivée
16:48du président Millet.
16:49J'ai vu surtout la préparation
16:51de l'arrivée du populisme.
16:53Et ça ressemble beaucoup
16:54à ce qu'on vit en ce moment.
16:56la valse des cadres politiques,
17:02enfin, les nominations
17:03qui ont...
17:04L'ancien Premier ministre,
17:05il a mis 26 jours,
17:06je ne sais pas quoi,
17:07à nommer un gouvernement
17:08qui était exactement
17:09celui d'avant.
17:11Et là, en 4 jours,
17:11il nous fait un gouvernement
17:12parfaitement macroniste.
17:14Enfin, je veux dire,
17:14c'est des trucs...
17:15Après, moi,
17:16je discute même plus
17:17ce qui se passe.
17:18Et ça me paraît
17:18totalement aberrant, sidérant.
17:20J'ai l'impression
17:20que tout ce qui était
17:21un peu institutionnel,
17:22tout ce qui était un peu...
17:23Tous les usages,
17:24tous les usicoutumes
17:25de la République
17:26ont sauté en Europe.
17:26Tout ce qui était...
17:29Tous les garde-fous,
17:30tout ce qui permettait
17:30que ça marche,
17:31cette espèce de système
17:32un peu précaire
17:32de constitution
17:34de la Ve République
17:35est en train d'exploser.
17:36Et ça me rappelle
17:37beaucoup l'Argentine.
17:38Vraiment, beaucoup, beaucoup.
17:39Et là, ça va comment,
17:40l'Argentine ?
17:41C'est un désastre.
17:42Après, il va y avoir
17:43l'équivalent
17:44des midterms américains,
17:45des élections législatives.
17:48Donc, le président Milley
17:49fait une campagne
17:50de forcenés.
17:51Il y a 3 jours,
17:51il a fait un concert
17:52de hard-rock
17:53devant 13 000 personnes.
17:55Il hurlait
17:55des insanités
17:56dans un micro.
17:58Bon, il va nous sortir
17:58une tronçonneuse,
17:59un truc.
18:01Mais j'ai l'impression
18:01que ça ne va pas forcément
18:02bien se passer pour lui.
18:04Parce que les chiffres
18:05macroéconomiques
18:06sont pas mal.
18:06Parfois, en France,
18:07j'entends Oudli
18:08des choses choquantes
18:09sur l'Argentine.
18:10Si on prend juste
18:10les chiffres macro,
18:11c'est correct.
18:12Si on regarde
18:13le taux de pauvreté,
18:14ça c'est un cauchemar.
18:14Et si on voit même
18:15les perspectives d'entrée
18:17fiscale, etc.,
18:19dans le budget de l'État,
18:21c'est nul.
18:22Sans parler du fait
18:22qu'il a fermé
18:23l'équivalent de l'AFP direct,
18:25c'est une des premières mesures.
18:26Il a abrogé un décret
18:30qui empêchait
18:31d'avoir un membre
18:31de sa famille
18:32comme secrétaire général
18:33de la Casa Rosada.
18:34Boum, c'est sa sœur,
18:35etc.
18:36Et puis,
18:37chaque jour,
18:38c'est pire en fait.
18:39Quand on est là-bas,
18:39c'est hyper dur
18:41à décrire
18:41parce que chaque jour,
18:42on se dit
18:42putain,
18:42c'est un peu pire qu'hier.
18:43On écoute Le Penseur ?
18:46Le Penseur,
18:48elle est magnifique.
18:49C'est une des plus belles
18:50chansons de l'album.
18:51Le disque bleu
18:52de Benjamin Biolet,
18:54moitié résident,
18:55moitié visiteur,
18:56sort vendredi.
18:57Et sur France Inter,
18:59là,
18:59vous allez écouter
18:59Le Penseur.
19:00Merci Benjamin Biolet.
19:01Merci, finalement.
19:02Merci.
19:02Merci.
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