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Éric de Riedmatten reçoit un invité dans #LHebdoDeLEco pour approfondir un sujet économique…

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Transcription
00:00On va parler de la dette et des peurs qu'elle soulève.
00:03On en parle avec Philippine Robert.
00:04Merci d'être avec nous, notre conseiller économiste au magazine Le Point.
00:08Vous publiez une étude très précise sur l'ardoise qu'Emmanuel Macron laisse à la France.
00:13C'est aux éditions du Rocher.
00:15Alors, vous êtes jeune.
00:17Est-ce que c'est votre génération qui s'inquiète à ce point ?
00:20Peut-être que ma génération devrait s'inquiéter en effet
00:22parce qu'on a en quelque sorte reçu cette dette qui augmente depuis 50 ans.
00:28Mais ma génération en a aussi profité car ces dernières années,
00:32la dette a tout de même augmenté de 2 000 milliards
00:35depuis le début du quinquennat d'Emmanuel Macron.
00:38Cela dit, quand on regarde un petit peu les enquêtes d'opinion,
00:40ce qu'on voit, c'est que l'inquiétude est tout de même aujourd'hui assez partagée.
00:44Toutes les générations ressentent aujourd'hui une certaine forme d'inquiétude
00:48quand on leur parle du sujet de la dette.
00:50Ce sont les plus de 65 ans qui sont les plus inquiets.
00:53Après, là où il y a absence de consensus,
00:58c'est sur les solutions pour réduire cette dette.
01:00On va en parler.
01:01Chaque Français doit 60 000 euros par tête.
01:04Même un bébé qui naît en ce moment doit 60 000 euros.
01:07Alors ça, c'est un chiffre qui a un peu une valeur pédagogique.
01:10La dette, c'est quelque chose de très abstrait.
01:13On ne peut pas vraiment la voir ni la toucher.
01:14Donc c'est vrai que souvent, on peut ramener la valeur totale de la dette
01:20au nombre de Français.
01:21Mais alors, pour rassurer les téléspectateurs,
01:23personne ne va venir leur mettre une facture demain dans leur boîte aux lettres
01:26pour leur dire qu'il faut rembourser 50 000, 60 000 euros.
01:31Parce que ce qu'il faut savoir, c'est que l'État, ce n'est pas un ménage.
01:36Donc vous, quand vous allez emprunter,
01:38tous les mois, vous allez rembourser votre emprunt plus les intérêts.
01:41Alors que l'État, lui, il se contente de faire rouler la dette.
01:46Oui, c'est un crédit revolving.
01:48Faire rouler la dette, c'est qu'en effet, il l'emprunte sur les marchés
01:51pour rembourser ses anciens emprunts,
01:53car il a une durée de vie a priori illimitée.
01:57L'État n'est pas du tout un ménage.
01:59Et donc ça, c'était une très bonne affaire à l'époque où les taux étaient bas.
02:02Et aujourd'hui, c'est une moins bonne affaire.
02:04Donc ce qu'il faut regarder, ce qui est vraiment important comme chiffre,
02:06c'est surtout celui de la charge de la dette.
02:08Parce que c'est ce qu'on rembourse.
02:09Voilà, ce qu'on rembourse à nos créanciers.
02:12Et donc ce chiffre est en augmentation.
02:14Et il atteint aujourd'hui, on est aux alentours de 60 milliards.
02:16Ça a doublé depuis l'avant-Covid.
02:18Et vous dites dans votre livre que tout l'impôt sur le revenu,
02:20l'IR, payé par 46% des Français, va directement aux intérêts.
02:25Alors ce n'est pas affecté directement, l'impôt sur le revenu n'est pas affecté directement.
02:29En tout cas, c'est le montant.
02:30Mais on arrive, on va bientôt en tout cas arriver dans une zone
02:33où tout ce qu'on paye en impôt sur le revenu
02:37va représenter l'équivalent de la charge de la dette.
02:39C'est aussi quasiment, aujourd'hui, c'est l'équivalent du budget de l'éducation nationale quasiment.
02:44On est dans ces zones-là.
02:45Et ça va encore grimper.
02:46On s'attend, enfin la Cour des comptes s'attend à ce que la charge de la dette
02:50s'approche des 100 milliards d'ici la fin de la décennie.
02:53Alors tous les rapports alertés depuis des années.
02:56On a eu le rapport Pébro, Thierry Breton, Fontanet,
02:59même votre collègue François-Olivier Gisbert en parlait dans ses livres,
03:02ses éditos, ses articles dans Le Point.
03:04Tout ça, ça ne servit à rien ?
03:05C'est peut-être un peu le syndrome de Cassandre.
03:09C'est qu'on ne veut pas entendre les bonnes nouvelles.
03:11Je ne dirais pas que ça ne servit à rien,
03:12parce qu'il y a eu quand même un éveil, je pense, progressif.
03:16Les gens ont pris conscience progressivement du problème.
03:18Mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'on a traversé
03:20pendant quasiment une décennie, une période où ça ne coûtait rien de s'endetter.
03:24Et à l'époque, il faut se souvenir qu'une grande partie des économistes disaient aux États
03:30« mais endettez-vous pour préparer l'avenir, pour investir ».
03:33Le problème, c'est qu'en France, on a continué à s'endetter,
03:35mais pas pour préparer l'avenir.
03:36Alors on a eu 1 000 milliards en peu de temps.
03:39Vous dites « Macron, c'est l'homme aux 1 000 milliards de dettes ».
03:41Ce n'est pas vraiment le Mozart de la finance.
03:44C'est vrai qu'on peut être un petit peu déçus,
03:46parce que pourtant son premier mandat avait bien commencé.
03:49Au début, il y avait une assez bonne gestion,
03:52le déficit commençait à se réduire,
03:54on était dans une période où les taux étaient encore bas,
03:56il y avait de la croissance.
03:57On pensait qu'on allait enfin sortir de ce problème.
04:01Le problème, c'est qu'il y a eu la crise des gilets jaunes.
04:03Derrière, le Covid.
04:06Le Covid, de manière légitime, on a sorti le « quoi qu'il en coûte ».
04:10Oui, il y a eu des raisons, bien sûr.
04:11Mais derrière, le « quoi qu'il en coûte », s'est prolongé.
04:14Les chèques ont continué.
04:15Il y a eu des baisses d'impôts non financées par des baisses de dépenses.
04:18Donc malheureusement, la fin n'est pas aussi glorieuse que le début.
04:22Je reprends une phrase de François Fillon en 2017.
04:24« Je suis à la tête d'un État qui est en situation de faillite sur le plan financier. »
04:28On ne l'a pas écouté.
04:29Alors, il était peut-être beaucoup trop en avance.
04:32On n'était pas et on n'est pas aujourd'hui encore en faillite.
04:35La faillite, c'est le moment où on ne peut plus rembourser ses créanciers.
04:40C'est ce qui est arrivé à la Grèce, par exemple,
04:42qui se retrouvait avec des taux d'intérêt tellement démesurés
04:44qu'elle ne pouvait plus faire face à ces échéances.
04:46Donc la France n'en est pas là.
04:47On paye de plus en plus cher pour s'endetter.
04:51Donc voilà, peut-être qu'on a eu aussi tendance à parfois
04:53avoir un ton trop alarmiste trop tôt.
04:57Et c'est aujourd'hui que la situation devient compliquée vraiment.
05:00Ce n'est pas nouveau la dette.
05:01Les rois de France s'endettaient beaucoup.
05:03Ils ont laissé des beaux châteaux.
05:05Mais malgré tout, Saint-Louis, je crois, avait endetté la France
05:08pour acheter la couronne d'épines du Christ, Louis IX.
05:10Bon, mais ça a été remboursé depuis.
05:15Souvent, les rois, en fait, ils ne remboursaient pas forcément.
05:17Ils annulaient la dette.
05:20Aujourd'hui, ça serait un petit peu compliqué d'utiliser cette solution
05:22parce qu'après, plus personne ne voudrait nous prêter
05:24ou alors à des taux exorbitants.
05:26Si on disait à nos créanciers,
05:27ah non, on ne rembourse pas.
05:28Il faudrait, derrière, faire des réformes difficiles,
05:32d'ajustement, etc., pour qu'on nous refasse confiance.
05:34C'est ce qui est arrivé à la Grèce.
05:35Donc, on ne peut pas...
05:36Nous ne sommes pas les rois de France, aujourd'hui.
05:39Alors, il y a des...
05:40Parfois, on nous parle de solutions magiques,
05:42mais concrètement, les solutions efficaces,
05:44c'est d'agir sur le déficit public,
05:47de réduire le déficit public.
05:48Donc, soit en augmentant les recettes
05:51ou en baissant les dépenses.
05:54Mais le problème, c'est qu'il ne faut pas non plus
05:55le faire de manière trop brusque, trop brutale,
05:58parce qu'il y a un effet, après,
05:59qui peut être récissif sur la croissance.
06:00Donc, il faut le faire progressivement.
06:02Sinon, alors, c'est ma dernière question,
06:03le FMI ou la BCE prendront le relais ?
06:06Cela dit, le FMI,
06:10pas sûr que les Européens laisseront le FMI revenir en Europe
06:12parce que ça avait été très mal vécu à l'époque.
06:14Ils ont créé eux-mêmes leur propre mécanisme,
06:16le mécanisme européen de sauvetage.
06:18Donc, on n'en est pas encore là,
06:20mais on a raison de prendre au sérieux ce sujet aujourd'hui.
06:22Il faut l'espérer, en tout cas.
06:23Merci beaucoup, Philippine Robert, d'être venue sur CNews.
06:26L'actualité continue.
06:28Restez avec nous.
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