Elisabeth Lévy  : "Faire aimer la lecture et le livre devrait être l’obsession de l'Éducation nationale" - Vidéo Dailymotion

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Transcript

00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h10h, Patrick Roger.

00:07Avec Elisabeth Lévy, bonjour Elisabeth.

00:09Bonjour Patrick, bonjour à tous.

00:11Et alors vous, vous poussez un coup de gueule en quelque sorte,

00:13parce que vous craignez que les manuels scolaires ne disparaissent,

00:18parce que c'est la région, Île-de-France notamment,

00:21qui voudrait finalement passer au tout numérique pour les livres scolaires dans les lycées.

00:26Alors vous conservez sûrement au grenier vos vieux lagardes et michards, cher Patrick.

00:30Vous vous rappelez ces manuels de littérature absolument merveilleux

00:34et dont la qualité résume aujourd'hui, par contraste, le désastre actuel.

00:39Mais pour les bureaucrates, les pédagogues de l'éducation nationale

00:42et qui visiblement sévissent aussi à la région Île-de-France,

00:47eh bien le livre sert un garde du passé, des passés.

00:50La région Île-de-France, donc qui finance ces livres pour les lycéens,

00:54a donc la brillante idée de supprimer les manuels dans leur version papier et numérique.

01:0110 000 cobayes n'auront plus de livres à proprement parler,

01:05mais un accès à la plateforme Pearl Tree, ce qui est évidemment américaine.

01:09Alors j'ai testé la version publique.

01:11C'est un kaléidoscope, un pot pourri, complètement foutraque,

01:16sans hiérarchie ni logique.

01:18Vous avez les outils pour les maths, les repères pour l'histoire.

01:21Enfin bon, tout se vaut.

01:23C'est exactement comme ça qu'Alain Finkielkraut définissait la défaite de la pensée.

01:28Alors il y a des protestations des éditeurs,

01:30beaucoup vivent, il est vrai, du livre scolaire.

01:33Et aussi cette tribune de professeurs,

01:35d'écrivains de personnalités comme Stéphane Bern,

01:38qui dénonce dans le monde une erreur pédagogique,

01:41sociale et démocratique.

01:42« Le livre écriptible est un socle, pas une relique ».

01:46Alors pourquoi, Elisabeth, le livre serait supérieur à l'écran ?

01:52À l'écran, à l'ordinateur aujourd'hui ?

01:54D'abord, en l'occurrence, le problème, ce n'est pas le support,

01:57parce qu'on supprime aussi le livre numérique.

02:01On supprime le livre papier, mais aussi le livre numérique,

02:04c'est le même livre que vous voyez sur votre écran.

02:06Donc le problème, ce n'est pas ça,

02:07c'est ce que Léonard de Vinci appelait la « causa mentale »

02:10et la « chose mentale ».

02:13Lire un livre, ce n'est pas picorer des contenus.

02:16Un empilement de ressources numériques

02:18ne remplace pas un ouvrage structurant

02:20conçu dans sa globalité par des professionnels.

02:23Résume encore cette pétition.

02:24Qu'il s'agisse d'un roman, d'un livre de maths, d'un livre d'histoire,

02:28dans un livre, il y a une progression.

02:30Une progression narrative, une progression logique,

02:32une progression aussi dans la difficulté.

02:35On peut, par exemple, regarder les leçons suivantes.

02:38On peut revenir sur les leçons passées,

02:40ce qu'on n'a pas compris.

02:41Et puis, au-delà même des manuels scolaires,

02:44le livre, c'est quand même quelque chose d'important.

02:47Le livre, c'est un colloque singulier

02:48entre le lecteur et l'auteur.

02:50La revanche de l'effort, la revanche de la durée sur le zapping.

02:54Faire aimer la lecture et le livre,

02:55ça devrait être l'obsession de l'éducation nationale.

02:58Eh bien, au contraire, on dirait que tous ces pédagos,

03:02tous ces bureaucrates, veulent faire disparaître avec le livre

03:05la vieille culture humaniste.

03:07Pourquoi ?

03:08Évidemment, toujours la même chose.

03:09Parce que, comme tous les élèves n'y ont pas un accès égal,

03:12eh bien, tous doivent en être privés au nom de l'égalité.

03:16Alors, le plus absurde, Patrick, quand même,

03:18c'est que ça se passe au moment même

03:20où l'éducation nationale, ça ne vous a pas échappé,

03:23mais, enfin, est supposé mener la guerre

03:26contre les téléphones portables.

03:28Et puis, c'est aussi le moment où tous les spécialistes

03:30observent les effets désastreux de l'abus d'écran.

03:33Et d'ailleurs, beaucoup de pays en reviennent,

03:36comme la Suède notamment.

03:37Mais nous, nos pédagos, on a toujours de la chance chez nous.

03:40C'est un conservatoire.

03:41Nos pédagos, ce sera les derniers ravis de la crèche numérique.

03:45Pourquoi ?

03:46Eh bien, à cause de leur croyance bêtassonne dans la technologie.

03:50Il faut être absolument moderne.

03:52Cet impératif révolté.

03:55Déjà Rimbaud, même s'il y a une curelle d'interprétation,

03:57moi, je crois qu'il le dénonçait.

03:59Il faut être absolument moderne.

04:00Eh bien, non.

04:01Mais qui se soucie d'un poète mort

04:03qui n'a même pas de compte Instagram.

04:05Allez, merci Elisabeth Lévy.

04:07Si vous êtes d'accord ou pas d'accord avec Elisabeth Lévy,

04:090826 300 300.

04:11Dans un instant, le président de la CPME,

04:14des PME, Amir Reza Tofighi,

04:16invité de Jean-François Kili sur Sud Radio.

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