Ce lundi 21 juillet, dans son édito, Raphaël Legendre est revenu sur un débat sans vote qui aura lieu à l'Assemblée sur le texte qui vise à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur. Cette chronique est à voir ou écouter du lundi au vendredi dans Good Morning Business, présentée par Sandra Gandoin sur BFM Business.
00:00C'est incroyable cette pétition, c'est 1 200 000 signatures quasiment ce matin Raphaël Legendre, c'est une première, un débat sans vote aura lieu à la rentrée à l'Assemblée sur ce texte
00:10qui à la base vise à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur tout simplement.
00:13Bah oui absolument Sandra, 500 000 signatures samedi, 1 million dimanche et ce matin le compteur est autour des 1 200 000 signatures.
00:23C'est spectaculaire, un véritable raz-de-marée citoyen et surtout une première dans l'histoire de l'Assemblée nationale.
00:29Alors tout est parti d'une pétition déposée sur le site de l'Assemblée le 10 juillet dernier par une jeune étudiante de 23 ans en master qualité sécurité environnement RSE,
00:38désormais fer de lance d'une contestation nationale, elle s'appelle Eleonore Pateri, on peut citer son nom,
00:44et pour elle la loi du plomb est une aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire.
00:51Elle dénonce un poison, une menace pour l'humanité entière.
00:55Et point incoupable, l'acétamipride, un néonicotinoïde que le texte de loi autorise sous condition et visiblement,
01:03elle a trouvé un certain écho dans la population.
01:04L'acétamipride, c'est dangereux donc ?
01:07Bah pas si on s'en tient en fait, au fait en réalité.
01:10C'est un néonicotinoïde certes, mais c'est le seul encore autorisé dans l'Union Européenne.
01:16Pourquoi ? Parce qu'il est 2300 fois moins toxique que les autres,
01:21comme l'ont confirmé l'EFSA et l'ANSES, les deux autorités sanitaires européennes et françaises.
01:28Pas d'effet nocif pour la santé humaine, des études ont été menées en 2016-2017.
01:34Pas de preuves concluantes sur la dangerosité pour les abeilles,
01:38alors que les apiculteurs, il faut les écouter aussi, dénoncent de longue date
01:41ces néonicotinoïdes comme des tueurs d'abeilles.
01:45Pourquoi cette émotion autour de ce sujet ?
01:48Parce qu'on a encore une fois un fossé béant entre science et politique,
01:53entre l'expertise et la pétition,
01:56entre les besoins concrets des agriculteurs, producteurs de betteraves et de noisettes en tête
02:01qui réclament l'autorisation de ce produit,
02:03et un débat emporté par les réseaux sociaux et les chaînes d'info.
02:07Le débat parlementaire, lui, n'a jamais eu lieu.
02:10La gauche a passé des milliers d'admendements pour faire obstruction au texte.
02:16Tant est si bien que le rapporteur LR du texte, Julien Dive,
02:20a lui-même dû déposer une motion de rejet contre son texte
02:24pour l'envoyer directement en commission mixte paritaire
02:27et la faire adopter avec l'aide du Sénat.
02:30Voilà comment un sujet aussi sensible est passé en force.
02:35On marche un peu sur la tête.
02:36La présidente de l'Assemblée nationale, Yael Brunpivé,
02:39a annoncé hier un débat sans vote à la rentrée.
02:43Tant mieux.
02:44L'occasion de rappeler quelques vérités.
02:47D'abord, que l'ANSES a évalué toutes les alternatives chimiques et non chimiques
02:53existantes face à ce cinquième néonicotinoïde.
02:57Résultat, dans six cas sur six, aucune alternative efficace ni opérationnelle.
03:03Et au-delà de la molécule, Sandra, il y a aussi la réalité économique.
03:09L'agriculture française souffre.
03:11Notre excédent agricole s'effrite chaque année.
03:15On avait un excédent de 6 milliards en 2010.
03:18Il est tombé à 1,2 milliard en 2023 et seulement 500 millions.
03:24L'année dernière, il est temps de tirer la sonnette d'alarme.
03:27Et comme le dit Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA,
03:29si on impose à nos agriculteurs des normes plus strictes chez nos voisins,
03:35ils disparaîtront.
03:36Ce qui est totalement insensé, c'est qu'on importe des produits européens
03:41qui sont traités avec ce néonicotinoïde, mais qu'on se l'interdit en France.
03:45Et que si l'agriculture française disparaît,
03:48notre souveraineté alimentaire disparaît avec elle.
03:51Il est peut-être là le vrai poison.
03:53Pas celui qu'on accuse sans preuve,
03:57mais celui qu'on ne voit pas.
03:59Le poison du dogmatisme, de la désinformation