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00:00Le nom KMDS ne vous dit rien ?
00:02Pourtant, derrière ces quatre petites lettres se cache un acteur clé de la défense terrestre européenne.
00:08Une alliance franco-allemande née en 2015 du rapprochement entre le français Nexter,
00:13à l'origine du char Leclerc, et l'allemand KMW, le fabricant du célèbre Léopard 2.
00:18Ensemble, ils produisent des canons César, des blindés Griffon ou encore des chars pour l'armée ukrainienne.
00:24Présenté comme un symbole d'unité européenne, KMDS reste pourtant un mariage fragile,
00:29freiné par les logiques de souveraineté de chaque pays.
00:32Et alors que les budgets de défense explosent partout en Europe, le groupe pourrait bien entrer en bourse.
00:37Tout l'enjeu de ce travail autour de l'actionnariat, c'est de parvenir à faire de cette entreprise davantage un Airbus des blindés.
00:44Ambition industrielle, méfiance politique et lutte d'influence,
00:48vous racontent les coulisses du discret géant de l'armement européen.
00:552015, le contexte militaire international est tendu.
00:58La crise en Ukraine, avec l'annexion de la Crimée et le conflit dans le Donbass,
01:03rappelle la fragilité de la sécurité européenne.
01:05Au Moyen-Orient, la situation est explosive.
01:08Guerre en Syrie, montée de l'État islamique et interventions internationales modifient profondément l'équilibre régional.
01:15Résultat, l'Europe se découvre vulnérable.
01:18Elle veut moderniser ses armées, et vite, mais partout en Europe,
01:21les budgets dédiés à la défense sont en berne.
01:24Le budget de la défense pour 2015 sera, s'il est validé par le Parlement, de 31 milliards 4.
01:32Alors, pour rester dans la course face aux géants américains ou chinois,
01:36un mot s'impose, coopération.
01:3929 juillet 2015, Hôtel de Brienne, Paris,
01:41Tous les grands noms de la défense française et allemande sont réunis
01:45pour célébrer le rapprochement du groupe d'armement terrestre Nexter
01:49et de son concurrent allemand, KMW.
01:51KMDS, c'est vraiment un projet politique avant tout.
01:54Lui, c'est Mathieu Thierry, le chef du service industrie des Echos.
01:58C'est la volonté de l'Allemagne et de la France de rapprocher
02:01leurs deux centres d'expertise dans les blindés.
02:05C'est quand même une entreprise avec un catalogue d'armement très respecté, très reconnu.
02:10Ce sont deux entités qui sont à la pointe de la défense et de la technologie.
02:15L'idée, c'est de former un champion européen
02:17capable de rivaliser avec les gros acteurs mondiaux
02:20en partageant leurs compétences et en réalisant des économies.
02:24Mais pas question de fusionner à la dure.
02:27Nexter et KMW choisissent de créer une holding commune
02:31basée aux Pays-Bas, KNDS.
02:33La construction KNDS autour d'une holding
02:35est deux pieds très séparés,
02:38là en Allemagne et là en France.
02:41C'est vraiment un compromis politique
02:43qui est lié à la volonté de chaque pays de rester souverain
02:46sur les technologies, sur les centres de production.
02:49Et c'est ce qui fait qu'il y a cette structure très curieuse
02:51qui a produit pratiquement aucune synergie jusqu'ici.
02:55Chacun garde la main sur ses marques,
02:57ses usines, ses clients et ses habitudes.
03:00Juridiquement, ce sont toujours deux entreprises distinctes.
03:03La maison mère est détenue à 50% par l'État français via Jet Industries
03:07et à 50% par la famille Wegman, propriétaire jusqu'alors de KMW.
03:13Et pour éviter tout déséquilibre, la gouvernance est verrouillée.
03:16Les décisions stratégiques ne peuvent être prises qu'à l'unanimité.
03:20Côté français, on conserve aussi un Joker.
03:22Une Golden Share, une action spéciale qui donne à l'État un droit de veto
03:26sur les activités d'armes et de munitions de Nexter
03:29pour protéger ses intérêts stratégiques.
03:31Bref, tout est fait pour garantir la coopération
03:34tout en conservant une souveraineté nationale solide.
03:37Un équilibre fragile qui freine le développement de KNDS
03:41car en réalité, cette union est plus politique qu'industrielle.
03:46Chacun continue de vendre ses blindés à son armée nationale,
03:49chacun continue ses projets.
03:50Et même sur le projet phare censé incarner cette coopération,
03:54c'est la guerre froide.
03:55Le MGCS, c'est vraiment le programme qui doit remplacer à terme
03:59les Charles-Claire après 2040 en France,
04:02le Léopard en Allemagne.
04:04Il y a un marché pour ce programme.
04:07Il y a des savoir-faire incroyables des deux côtés.
04:10Donc tout devrait concourir au succès d'un tel projet.
04:12Sauf qu'il y a tellement de tiraillements de part et d'autre,
04:16il y a tellement d'enjeux de souveraineté
04:19que le programme a beaucoup de mal.
04:21Pourtant, le projet de départ était simple.
04:23KNDS France et KNDS Allemagne devaient se partager
04:27à part égale la charge de travail.
04:29Sauf qu'en 2019, Berlin impose Rennes Métal,
04:32un mastodonte allemand de l'armement terrestre, dans le projet.
04:36Officiellement, pour équilibrer les tâches,
04:38en réalité, pour reprendre la main
04:40et mieux répartir les retombées économiques
04:42sur le territoire allemand.
04:43Résultat, l'équipe franco-allemande vole en éclats
04:46et le programme s'enlise.
04:48Il faut attendre 2024 pour que Paris réponde
04:51en intégrant Thales au projet, histoire de rétablir un peu la balance.
04:54Il s'agit désormais de relancer la machine.
04:57Alors, il y a quand même une prise de conscience
04:59qu'il faut faire avancer ce monstre à deux têtes,
05:03ce monstre qui pourrait devenir en plus une belle entreprise.
05:06Il y a quelques mois, ils ont nommé un nouveau patron
05:08qui doit présenter une stratégie
05:11avec l'idée quand même de parvenir à créer
05:14une entité plus cohérente,
05:17avec plus de synergie des deux côtés.
05:19Autre enjeu pour le groupe, celui de l'actionnariat.
05:22Depuis 2015, le chiffre d'affaires de l'entreprise a doublé.
05:25Alors, des deux côtés du Rhin ont réfléchi à valoriser ses actifs.
05:29Et on parle notamment d'une mise en bourse
05:31qui pourrait être une solution pour rendre la boîte plus dynamique,
05:35avec plus de moyens, plus de capitaux.
05:38Et c'est un chantier qui va probablement progresser
05:41d'ici la fin de l'année.
05:43Pour que KNDS entre en bourse, pas question de déséquilibre.
05:46Les deux actionnaires, l'État français et la famille Wegmann,
05:49devraient céder exactement le même pourcentage de parts.
05:53Le mot d'ordre est clair.
05:55Pas question qu'un des deux bords du Rhin domine.
05:57Mais attention, Renmetal observe tout ça de très près.
06:01Si le groupe entre en bourse,
06:02le géant allemand pourrait sauter sur l'occasion
06:04pour rentrer au capital.
06:06Maintenant, le problème, c'est que Renmetal a quand même
06:08un positionnement qui heurte beaucoup les Français
06:10parce qu'ils jouent beaucoup la carte américaine.
06:13C'est très très mal vu en France.
06:14Je vois mal les Français ouvrir la porte comme ça
06:18à Renmetal sans contrepartie, vraiment très ferme.
06:21Bref, toute cette histoire pourrait relancer
06:23les tensions franco-allemandes sur fond de défiance
06:26et de rapports de force.
06:28Merci d'avoir suivi cette vidéo.
06:30On espère qu'elle vous a plu.
06:31Dites-nous en commentaire quel sujet
06:33vous aimeriez voir sur notre chaîne.
06:35Et à bientôt pour une prochaine vidéo.

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