- aujourd’hui
George S. Patton reste l’une des figures les plus marquantes – et les plus controversées – de la Seconde Guerre mondiale. Général américain au style tranché, artisan de la guerre mécanisée, il a laissé des écrits personnels d’une rare intensité : carnets de campagne, lettres, notes intimes. Dans cette émission, l’historien Boris Laurent, qui a édité et annoté ces Carnets secrets du général Patton (éditions Nouveau Monde), revient sur le parcours d’un officier hors norme. Qui était vraiment Patton ? Un stratège rigoureux ou un impulsif incontrôlable ? Un croyant mystique ou un homme politique naïf ? Un chef respecté ou redouté par ses propres hommes ? À travers ses propres mots, Patton livre un autoportrait sans fard. L’émission propose un éclairage documenté, loin des clichés, sur un général dont l’ombre plane encore sur l’histoire militaire contemporaine.
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00:00Il reste un peu moins de deux semaines pour mettre TV Liberté à l'abri jusqu'à la prochaine attaque.
00:06Ces derniers jours, vous avez déjà été incroyablement nombreux à nous témoigner votre soutien.
00:11Mais la censure bancaire, ordonnée par un pouvoir politique aux abois, nous a asséné un coup dur.
00:16En nous privant de notre compte bancaire et donc d'une partie des soutiens mensuels que nous recevions,
00:21notre budget prévisionnel a été littéralement amputé.
00:25Aujourd'hui encore, l'équilibre n'est pas rétabli.
00:28Parmi vous, je le sais, certains souffrent aussi de cet extrême centre au pouvoir qui nous appauvrit.
00:34Mais d'autres attendent aussi un peu impassible, un changement qui ne viendra pas sans rien faire.
00:39Pour renverser la table, chacun doit, à sa mesure, se retrousser les manches.
00:44Et renverser la table, c'est avant tout éveiller les consciences.
00:48Mais nous ne pouvons pas continuer cette mission sans vous.
00:51Alors dès à présent, aidez TVL.
00:53Il n'y a pas de petits gestes, chacun d'entre vous peut changer notre destin.
00:57Et nous continuerons, nous, à faire beaucoup avec bien peu.
01:02Alors je compte sur vous.
01:02Sous-titrage Société Radio-Canada
01:08Bonjour à tous.
01:36Il reste dans la mémoire collective comme l'un des généraux américains les plus connus de la Seconde Guerre mondiale.
01:42George Patton, flamboyant pour certains, brutal pour d'autres, est surtout un militaire au style singulier, indissociable de la guerre mécanisée et du front européen.
01:52Mais derrière l'uniforme et les déclarations fracassantes, il y a un homme, un parcours, une pensée que l'on découvre dans ses propres mots.
02:00Ses mots, ce sont ses carnets, ses journaux, ses lettres, des documents rassemblés, présentés et annotés par l'historien Boris Laurent dans un ouvrage intitulé
02:08« Carnet secret du général Patton », récemment réédité chez Nouveau Monde Édition.
02:13Et c'est ce livre que nous allons explorer avec lui.
02:16Boris Laurent, bonjour.
02:18Bonjour.
02:18Alors vous êtes historien, spécialiste des relations internationales et des questions militaires contemporaines.
02:23Vous êtes l'auteur de plusieurs ouvrages dont « La guerre totale à l'Est », 1941-1945 paru en 2014 chez Kronos.
02:31« Le troisième Reich pouvait-il gagner la bataille de l'Atlantique » en 2018 chez Economica.
02:37Et toujours chez Economica en 2020, « Les batailles arctiques » 1941-1945.
02:42Et « Une histoire de l'armée russe des Tsars à Poutine » paru en 2024 chez Nouveau Monde.
02:48Nous en avons parlé la semaine dernière.
02:50Et comme je le disais, vous avez commenté les mémoires du maréchal Paulus, également, toujours publiés chez le même éditeur.
02:56Et enfin, vous avez annoté les carnets du général Patton dans cette édition parue chez Nouveau Monde en 2024.
03:03Ces carnets, ce sont pour l'essentiel les propres écrits du général Patton, des journaux, des lettres, des réflexions, des rapports,
03:09que vous avez contextualisés pour le lecteur d'aujourd'hui.
03:13Alors, on y découvre un homme bien plus riche que l'image parfois figée, donnée par le cinéma, que l'on garde de lui.
03:21Et ce qu'il décrit de lui-même est souvent surprenant.
03:25On voit que c'est un homme enraciné dans une histoire familiale et militaire.
03:31Et dès les premières pages, il revient longuement sur son enfant, ses ancêtres militaires et cette fierté héréditaire.
03:37Il écrit « Je devais être le plus heureux du monde, je l'étais sûrement ».
03:43Alors, quelle fut son enfance de Patton ?
03:46Patton, il a une enfance qui est très heureuse, en réalité.
03:52Donc, il navigue entre la Californie et la Virginie pour l'école, il rejoindra l'école militaire par la suite.
03:59Mais c'est une enfance qui est vraiment très heureuse, très familiale, très entourée.
04:03Et effectivement, vous l'avez dit, il y a cet héritage militaire très prégnant, très fort et très jeune, en fait.
04:16Tout en étant assez loin, finalement, de l'idée de guerre ou de combat.
04:21Il va se tourner vers cet idéal militaire.
04:29Et puis, ça va être pour lui, finalement, son seul avenir.
04:34Pour lui, il n'a que ça à faire.
04:37Ça va être son travail, ça va être sa passion.
04:41Ça sera l'armée.
04:42Et c'est un jeune garçon qui, déjà très jeune, aime les chevaux.
04:47Donc, pour lui, il n'y a aucun doute, ça sera la cavalerie.
04:49Ça sera la cavalerie.
04:50Et il va le démontrer par la suite, puisqu'il fera toute sa carrière dans la cavalerie.
04:54Et donc, et l'arme blindée plus tard.
04:57Donc, oui, la jeunesse de Patton, finalement, c'est un peu un long fleuve tranquille.
05:02Mais son père est militaire ?
05:04Alors, son père, il a toute une série d'aïeux et de…
05:10Son père est un… pas un militaire, mais un industriel, enfin, quelqu'un qui est dans le monde des affaires.
05:19Mais le poids de l'histoire familiale, finalement, va le rattraper.
05:23Et de là va naître cette passion pour la chose militaire, pour, d'abord, l'armée en tant que cadre, cadre de vie,
05:34qui est un cadre vertueux pour lui, fait de traditions, de principes forts.
05:40Et puis, petit à petit, il va développer une sorte de… quelque chose d'assez amusant.
05:45Il va croire ou faire croire qu'il croit en la réincarnation, finalement.
05:51– Oui, c'est ce qu'il dit. Il dit, je pense que j'ai déjà commandé des légions romaines et que j'ai combattu à Sting's.
05:57– Oui.
05:57– Pourtant, il est assez… c'est un sudiste, un sudiste catholique ?
06:00– Oui, c'est un sudiste. Alors, il est très… c'est un univers assez wasp, très… alors, sud, même dans les relations raciales,
06:11entre les Noirs et les Blancs, par exemple.
06:15Mais il va avoir ce côté assez bizarre, ou en tout cas faire croire
06:20que lui-même y croit. Il y a un personnage patone aussi.
06:25Et donc, à Sting's, oui, il était en 1066 à Sting's, il était dans les légions romaines.
06:29Je crois même qu'il parle de batailles napoléoniennes, à certains endroits.
06:33Enfin, c'est assez particulier.
06:35– Et tout ça, ce sont des lectures de jeunesse, parce qu'il lit César, Napoléon, l'Iliade…
06:41– Oui, complètement. Il s'imprègne de cette littérature qui met en… finalement, qui fait du fait d'arme, de l'héroïsme, quelque chose d'important, quoi.
06:51– Oui, on reparlera d'héroïsme, de sa vision de l'héroïsme.
06:53Mais finalement, ce mélange d'idéalisme, voire de mysticisme, est-ce que c'est une clé pour comprendre sa manière de voir la guerre ?
07:01– Oui, alors c'est une clé pour comprendre le personnage et son décalage par rapport à certaines réalités, finalement.
07:12Après, pour comprendre la guerre, il a une vision de la guerre qui est tellement… qui est à la fois très académique et très opérationnelle,
07:21académique par ses études, par les écoles militaires, mais opérationnelle par son expérience du feu.
07:27Il va forger sa propre vision de la guerre, sa propre vision de la bataille, qui sera d'ailleurs très… vraiment brillante.
07:34C'est un vrai penseur, hein, Pâton.
07:35– Et donc, il rentre très tôt, enfin, il suit tout le cursus du jeune officier américain,
07:43donc toujours dans la cavalerie, et même s'il est issu d'une longue tradition sudiste,
07:50c'est pas un conservateur, c'est un novateur aussi, en termes de… il s'intéresse très tôt au blindé.
07:53– Oui, alors, comme beaucoup, finalement, il a le côté, on pourrait dire que politiquement, c'est un conservateur,
08:02ou, on va dire, républicain, mais au niveau de la technique, de la technologie,
08:10il a cette… il s'intéresse beaucoup à la notion de progrès technique et technologique.
08:17Et donc, il va l'appliquer dans la guerre, dans le combat,
08:21et il va faire l'expérience du blindé pendant la Première Guerre mondiale.
08:25– Donc, en 1917, il vient… enfin, il est envoyé en France ?
08:28– Il est envoyé en France avec le corps expéditionnaire américain,
08:31il est sous les ordres de Pershing, et il va connaître le feu avec un blindé, un blindé français.
08:40– Qui est le char… – Qui est le FT-17.
08:42– Le FT-17 de Renault.
08:43Et donc, il va monter au feu avec son blindé, et il va connaître cette expérience du feu,
08:48il va discuter avec des spécialistes de l'arme blindé britannique et français,
08:53et donc vraiment s'intéresser en profondeur à la technique et au mécanisme,
08:58et à toutes les possibilités qu'offre le char.
09:00– Et est-ce qu'il rejoint en cela toute cette génération d'officiers dont fait partie de Gaulle, par exemple,
09:07qui a la prescience de ce que va être l'utilisation du blindé ?
09:11– Oui, complètement. Il anticipe ce que sera la guerre, la prochaine guerre,
09:16avec des forces mécanisées, beaucoup mieux organisées, beaucoup plus structurées,
09:22et donc oui, il voit complètement ce qui va arriver.
09:25– Alors, son apprentissage de soldat, c'est aussi, on voit ses carnets, révèle un homme qui est obsédé par l'entraînement,
09:33par la discipline, il impose une discipline de faire, des marches forcées, des exercices,
09:40mais en même temps, il est très attaché à la tenue, à la politesse des soldats.
09:43Est-ce que c'est caractéristique de l'officier américain ou de Patton ?
09:47– Je pense que, alors, pour ce qui est de l'entraînement, les marches, le côté opérationnel,
09:53faire en sorte que sa troupe soit toujours à 100%, ça, il y a le côté américain,
09:59je crois que le perfectionnisme américain tourne à plein, là.
10:01– Lui, il injecte en plus le sens de la tradition du Sud, cette espèce de la politesse,
10:09la politesse pour les soldats, parce que lui n'est pas très poli selon les circonstances,
10:14mais il y a ce respect de la tradition, du savoir-vivre,
10:19qui est propre aussi à une certaine classe sociale du Sud des États-Unis.
10:23Donc, il injecte un peu des deux, mais c'est vrai qu'il est intransigeant,
10:27il est parfois impitoyable avec sa troupe, comme il l'est avec lui-même.
10:30Et ça, je pense que c'est une constante chez Patton,
10:33et c'est ça qui est intéressant chez le personnage,
10:35ce n'est pas quelqu'un qui fait payer à sa troupe quelque chose,
10:41ou qui marque un décalage entre l'officier et la troupe.
10:45Il est avec ses hommes, et ce qui endure sa troupe, lui-même l'endure.
10:49Ça, c'est constant chez lui.
10:50– Alors, on parlait de l'héroïsme, donc il connaît le feu en 17-18,
10:57et il revient un peu sur cette vision idéalisée qu'il avait de l'héroïsme.
11:03Il dit que l'héroïsme est futile, sans discipline,
11:06mais en même temps, il dit que le rôle de Soda,
11:08ce n'est pas de mourir finalement, héroïquement,
11:10mais d'aller tuer le salaud qui est en face, pour reprendre ces termes.
11:14Est-ce que là aussi, on est dans une façon américaine
11:16de voir l'héroïsme qui finalement n'est pas efficace ?
11:19– Alors, oui, peut-être, mais c'est vraiment…
11:23Là, on est vraiment sur le personnage Patton.
11:25Et son expression, ses carnets, finalement, c'est son intimité.
11:30C'est être dans la part d'intimité de Patton, au fond de sa pensée.
11:34Et c'est assez brutal, quoi.
11:37Le fait de dire effectivement que le but du travail,
11:39ce n'est pas de mourir pour sa patrie,
11:41mais de faire en sorte que le salaud en face meurt pour la sienne,
11:44je crois que ça résume très bien la mentalité de Patton.
11:46L'efficacité et la brutalité.
11:49C'est quelqu'un qui est vraiment brutal sur le champ de bataille.
11:52On ne fait pas de quartier, pas de cadeau.
11:54– Voir pas de prisonnier, comme on l'a vu en Italie, d'ailleurs.
11:56– Voir pas de prisonnier, effectivement.
11:58Donc, ça fait partie de la guerre, ça fait partie du boulot.
12:01Donc, ils ne s'embarrassent pas de considérations éthiques ou morales là-dessus.
12:05La morale, elle est du côté…
12:07Elle est dans le camp des États-Unis, donc à partir de là…
12:10– Il a le sentiment de faire partie du camp du bien ?
12:12– Oui, je pense, oui. Oui, complètement.
12:14Surtout qu'au fur et à mesure que la guerre va…
12:16Quand on va arriver vers la fin de la guerre,
12:18il va d'autant plus croire qu'il est dans le camp du bien
12:20que face à lui, il va rencontrer ses homologues soviétiques.
12:25Et à partir de là, il sera persuadé d'être dans le camp du bien, oui.
12:28– Alors justement, on va parler de son style de commandement au quotidien.
12:34Donc, il débarque en Afri du Nord, en Sicile et en France.
12:39Donc, il commande des troupes nombreuses dans des conditions difficiles.
12:43Donc, il semble très directif, très proche de ses hommes, vous l'avez dit.
12:46Mais quel était son style de commandement au quotidien ?
12:50– C'est le commandement de l'avant.
12:51C'est Patton, il est toujours dans les véhicules de tête.
12:58Il est au milieu de ses hommes et toujours de l'avant.
13:01Il commande de l'avant, jamais de l'arrière.
13:03Donc, c'est quelqu'un qui imprime une marque très offensive.
13:09C'est tout pour l'attaque.
13:12Ça ressemble un petit peu au type de commandement allemand
13:14qu'on a pu voir en France en 40
13:18ou au début de l'opération Barbarossa en URSS en 41.
13:23C'est l'arme blindée, là, pour vraiment progresser le plus loin possible,
13:28à charge de l'infanterie, de s'occuper du reste.
13:29Mais lui, il est dans cet état d'esprit.
13:32Foncer le plus loin possible.
13:34Et il a une vision qui est vraiment intéressante par rapport à d'autres.
13:38C'est qu'il a une vision qui est très, très, très large
13:40et très profonde du champ de bataille.
13:43Patton, il voit le champ de bataille par la vue aérienne,
13:46par les avions, par voir le plus loin possible dans le dispositif ennemi.
13:51C'est pour ça que j'explique dans mon livre
13:52qu'il touche du doigt ce que les soviétiques font avec l'art opératif.
13:55– Il fait de l'art opératif sans le savoir, finalement.
13:57– C'est ça. C'est exactement ça.
14:00Donc, il est très agressif, tout pour l'attaque, aller le plus vite possible.
14:06C'est pour ça qu'il se fâche souvent avec les Britanniques,
14:09qu'il trouve beaucoup trop timide et précautionneux.
14:12Et avec ces hommes, est-ce qu'il cherche à être aimé ou juste respecté ?
14:17Il y a cet épisode de la gifle qu'il porte, un soldat hospitalisé.
14:22Est-ce que ça, ça l'a marqué ?
14:23Il en parle peu, il n'assume pas vraiment ?
14:25Est-ce qu'il a le sentiment d'avoir franchi une ligne quand même ?
14:28– Oui, il sent qu'il a quand même dépassé les bornes sur ce coup-là.
14:31Mais au fond, l'acte de la gifle révèle le personnage.
14:38C'est quelqu'un qui ne…
14:39La faiblesse pour ce type de mission, donc faire la guerre,
14:44la faiblesse est interdite.
14:47C'est donner plus de force à l'ennemi en étant faible soi-même.
14:53Et donc, comme lui s'impose du camp une discipline de fer,
14:56qu'il est un modèle pour ses hommes,
14:59il ne supporte pas que cet effet miroir ne soit pas évident.
15:03Donc là, le coup de la gifle, après il le regrettera quand même.
15:05Il a demi-mot, bien sûr, c'est pas tonne.
15:08Mais il va être réprimandé par sa hiérarchie pour ça.
15:14– Et alors justement, il en parle peu,
15:17on sent qu'il assume la moitié.
15:18Je voudrais venir sur le style qu'il employe,
15:20son style épistolaire ou littéraire dans ses rapports.
15:23Donc il écrit à qui ? À sa femme principalement ?
15:25– Alors il écrit à lui-même.
15:27Il écrit ses carnets pour lui.
15:29Pour la postérité, probablement,
15:31parce que certaines phrases sont assez croustillantes.
15:33Enfin, il y a un style d'écriture de Patton.
15:37Il écrit beaucoup à sa femme, énormément.
15:40Là, on est vraiment dans l'intimité du soldat,
15:44de l'homme sur le champ de bataille,
15:46qui raconte réellement ce qui se passe.
15:48On voit aussi son regard sur les autres,
15:52où il explique à sa femme un tel pénible.
15:58Donc c'est vraiment intéressant, je trouve,
16:00cette correspondance avec son épouse.
16:03Donc c'est essentiellement ça, oui.
16:05– Mais ces lettres n'étaient pas destinées à être publiées ?
16:08Comment sont-elles venues jusqu'à nous ?
16:09– Les lettres, tout a été réuni par la famille,
16:14qui a, à un moment donné,
16:17alors je ne sais pas s'il y a eu une volonté de les publier
16:20ou si ça a été confié à certaines archives
16:24et s'est tombé dans le domaine public.
16:26Donc c'est toujours, là, il y a un flou.
16:28Je ne sais pas si c'était la volonté de la famille
16:30de les faire publier, en tout cas.
16:32– Je veux en venir sur le terrain,
16:34notamment Patton, on entend beaucoup parler de lui
16:37au moment de la bataille des Ardennes.
16:42Il réussit un coup de génie, un coup de génie militaire.
16:48Donc est-ce que c'était vraiment un bon tacticien
16:51ou est-ce qu'il avait une vision stratégique également du combat ?
16:55– C'est un général, c'est un militaire qui est assez complet.
16:59Il a le sens tactique, donc du local, de la bataille.
17:04Et il a le sens même opératif à la soviétique,
17:07c'est-à-dire qu'il va voir loin sur le champ de bataille.
17:10Il a une vision qui est très globale.
17:12– Oui.
17:12– Et le sens stratégique, alors la stratégie,
17:16il la laisse plutôt à Eisenhower, vous voyez,
17:19ou peut-être même à Bradley, mais surtout à Eisenhower.
17:23Eisenhower fixe les objectifs.
17:25Lui, il fait le job, il va remplir l'objectif,
17:27mais avec un sens tout à fait assez fin du tactique et de l'opératif.
17:34– Racontez-nous ce qui se passe dans la bataille des Ardennes.
17:38– Sur les Ardennes, on a les Allemands qui déclenchent
17:40une contre-offensive au mois de décembre 1944,
17:45dont l'objectif est de couper les lignes de ravitaillement alliées
17:49et d'aller pousser jusqu'au port d'Anvers.
17:54Donc l'offensive, les alliés sont pris par surprise,
17:59et l'offensive dans les premiers jours fonctionne.
18:02C'est un peu le chaos, il y a beaucoup de prisonniers américains.
18:05Donc Eisenhower demande à Patton d'aller prêter main forte,
18:10notamment à la 101ème division aéroportée américaine,
18:12qui est encerclée à Bastogne.
18:17Et donc Patton mène une manœuvre en tenaille,
18:21où il va en fait pincer la base ou le centre de la contre-offensive allemande.
18:28Il va couper finalement une partie des forces allemandes
18:31du reste de leur armée.
18:34Donc la partie à l'est va devoir se replier vers l'Allemagne,
18:38mais la partie qui est coincée à l'ouest,
18:39elle va être prise dans une nasse finalement.
18:44– Et ce qui fait le succès, c'est la rapidité de l'opération ?
18:47– Oui, il y va avec, je crois,
18:49il a une division blindée et deux divisions d'infanterie.
18:54Et donc ce qui fait le succès de cette manœuvre,
18:59pour venir vraiment trancher dans le saillant,
19:02c'est la rapidité d'exécution.
19:04Et donc Patton qui a un style très agressif
19:06et qui ne pense que par la rapidité.
19:08Donc il fonce à travers le saillant,
19:11et il le coupe en quelques jours.
19:13– Et son état-major suit ?
19:14Est-ce qu'il s'entoure d'hommes qui sont dans la même logique que lui ?
19:18– Oui, il choisit, alors il a toujours, il sait s'entourer.
19:22Donc il a une cohérence dans l'état-major de l'armée de Patton,
19:26parce que lui-même, quand il donne ses ordres,
19:30il sait très bien qu'ils seront à la fois exécutés,
19:33et avec la liberté d'action aussi qui fait la qualité de l'armée américaine à ce moment-là.
19:39Il y a un sens de la liberté d'action, alors pas autant que chez les Allemands,
19:43ça sera copié après par les États-Unis, par les pays de l'OTAN plus tard,
19:47mais déjà, on a chez les officiers et sous-officiers,
19:52cette manière de mener l'opération.
19:56On donne l'objectif, mais on laisse l'officier ou le sous-officier libre de la mener comme il le souhaite.
20:01– Donc après la bataille des Ardennes, donc des nouvelles défaites allemandes,
20:08il rentre en Allemagne, est-ce qu'il se comporte différemment lorsqu'il est en Allemagne
20:14par rapport à ce qu'il a connu en Afrique du Nord ou en Italie ?
20:17– Alors en Allemagne, il se comporte différemment par rapport à la troupe adverse,
20:25c'est-à-dire qu'en Italie, il méprisait les Italiens,
20:27il y avait une espèce de racisme quand même bien ancré chez Patton
20:32sur l'armée italienne et les Italiens en général, pas très sympathique.
20:36Quand il va en Allemagne, ou même il tient quand même en estime l'armée allemande,
20:41il voit la combativité de son adversaire, son sens de la discipline,
20:48donc ça, ça lui parle, c'est quelque chose qui l'affecte, qui le touche.
20:51Donc il n'a pas la même attitude vis-à-vis des gens en Allemagne qu'en Italie, ça c'est sûr.
20:57Après, il a toujours le même style de commandement, il fonce, c'est un fonceur,
21:02Eisenhower le met en garde à un moment donné pour prendre trêve,
21:06lui intime l'ordre d'attendre d'avoir des renforts,
21:08et Patton lui dit que ça y est, il a déjà pris trêve,
21:10et il lui demande mais qu'est-ce que je dois faire ?
21:12Est-ce que je dois rendre la ville aux Allemands pour la reprendre avec plus d'unité ?
21:16Donc il est assez provocateur aussi, il a fait coup en Italie où les ordres ont soi-disant été perdus,
21:23puisqu'on lui intime l'ordre d'attendre les Britanniques et de ralentir le rythme,
21:28donc les ordres ont été perdus, et Patton ne ralentit pas, au contraire accélère.
21:32Donc ça fait partie aussi de son style, de contourner un peu la hiérarchie pour arriver à ses familles.
21:38– Et ça, il se confie à sa femme sur ce genre de choses ?
21:42– Oui, alors il le dit sans le dire, c'est…
21:47Alors pour la ville de Trèves, là, on sait, il y a la conversation de Patton avec ses supérieurs et Eisenhower,
21:58où il explique, c'est là qu'il dit à Eisenhower, est-ce que je dois rendre la ville ?
22:02– Ça, c'est connu parce qu'il y a eu la communication.
22:06Après, sur l'Italie, par exemple, il y a dans le rapport, un officier de Patton explique que malheureusement,
22:15les ordres ont été perdus.
22:16– Les ordres ont été perdus, classique.
22:18Alors vous dites qu'il est très aimé de ses hommes, véritablement, malgré la dureté, malgré la discipline.
22:24Vous en dites, par exemple, qu'il donne, lorsque les hommes sont au repos, à l'arrière,
22:28il faut qu'ils soient toujours impeccables, ils ont des amendes, si les chaussures ne sont pas bien cirées,
22:33les boutons lustrés, ça, ça ne pose pas, parce que j'ai reçu Pierre de Taillac,
22:37il y a quelques semaines, sur l'édition française du livre de Bill Moulding, sur le front,
22:43où on voit Bill Moulding, d'ailleurs, qui se heurte à Patton,
22:46parce qu'il montre des soldats complètement débraillés, crevés, barbus, mal rasés.
22:51Donc là, ce n'est pas du tout la vision qu'a Patton,
22:53ce n'est pas du tout la vision que veut imposer Patton à ses soldats.
22:55Non, il a cette vision, lui-même est toujours tiré à quatre épingles,
23:00et en plus dans un style qui n'y a que lui, le casque lustré,
23:06les coltes en crosse d'ivoire, les bottes de cavalier ciré, c'est assez incroyable.
23:13Donc il attend de sa troupe que sa troupe soit comme lui, impeccable.
23:16Donc le bouton est fermé, la cravate est mise, et puis quasiment.
23:20Et donc l'aspect vestimentaire impeccable, c'est une armée qui se respecte,
23:27une armée qui sait se tenir, et l'entraînement, vous l'avez mentionné tout à l'heure,
23:32effectivement, il va faire subir des entraînements, notamment en Afrique du Nord,
23:36sur des troupes plutôt indisciplinées, qui va recadrer,
23:40et qui vont retrouver énormément de combativité pour la suite des opérations.
23:44– Il leur transmet son moral, il dit le moral, c'est 90% le moral d'un chef.
23:52Alors justement, c'est chef à lui, quelle vision a-t-il de sa hiérarchie,
23:56et sa hiérarchie, qu'est-ce qu'elle pense de Patton ?
23:58– Alors, il respecte malgré tout, malgré les nombreux désaccords.
24:03– Est-ce qu'il a des petits mots sévères de temps en temps, ou croustillants,
24:05que vous pourriez nous dire, sur Montgomery ou sur…
24:08– Alors, sur Montgomery, c'est certain, il ne l'aime pas du tout.
24:13D'abord, il n'aime pas vraiment les Anglais.
24:16Et Montgomery, en particulier, c'est la cible numéro un.
24:19Et parce que Montgomery, c'est un officier qui est très prudent,
24:23qui pèse beaucoup la décision avant d'agir.
24:26Et donc, lui, ça ne lui convient pas du tout, comme c'est le commandement.
24:29Il pense qu'il aurait pu gagner la guerre plus vite
24:31si les Anglais n'avaient pas freiné tout ça.
24:34Donc, il en veut un petit peu aussi au commandement suprême,
24:37donc à Eisenhower.
24:38Il y a une dispute, notamment en Italie, en Sicile,
24:43sur l'attribution de carburant pour les Britanniques ou les Américains.
24:49Donc, Patton estime que le carburant doit lui revenir,
24:51parce que comme il est moins frileux dans les opérations
24:55que son homologue britannique, il gagnera la partie plus vite.
24:58Et donc, il y a une course qui s'opère entre les Britanniques.
25:01Et finalement, pour des raisons politiques,
25:03Eisenhower va favoriser les Britanniques.
25:05Tout ça pour toujours concilier l'allié britannique,
25:10pour éviter qu'il y ait des tensions trop grandes.
25:12Et ça, Patton, il en veut beaucoup à Eisenhower
25:15d'être trop conciliant, d'être trop sympa avec les Britanniques.
25:19Mais bon, il y a quand même cette forme de respect,
25:22parce qu'Eisenhower, c'est un sacré personnage aussi.
25:24Et puis qu'il y a une vraie vision,
25:25qu'il y a les idées claires et qu'il y a une vraie vision stratégique.
25:28Et ça, Patton, il affectionne ce genre de...
25:31Cette droiture et cette vision clé.
25:32Et vis-à-vis de Bradley ?
25:34– Alors, Bradley, ça se passe plutôt bien.
25:37Il n'y a pas de heurts particuliers entre les deux hommes.
25:41Les deux hommes s'apprécient.
25:43Bradley, bien sûr, comme la plupart des généraux,
25:48craint Patton.
25:49Enfin, craint, c'est les débordements de Patton,
25:51puisque Patton lui-même.
25:53Mais il a toujours peur.
25:54Il joue un peu sur du velours,
25:56parce qu'on ne sait jamais.
25:57L'étincelle peut enflammer Patton très vite
26:00sur une idée fixe ou une lubie.
26:04C'est quelqu'un qui peut être dangereux au niveau politique.
26:07– C'est ça.
26:07Il a un mépris, les politiques, ou... ?
26:09– Oui, il n'aime pas trop ça.
26:11– Enfin bon, il meurt juste après la guerre,
26:13mais on ne lui sent pas d'ambition politique.
26:16– Non, aucune.
26:17Il a d'ailleurs, lui-même reconnaît que Eisenhower,
26:21finalement, est à sa place.
26:23Parce que lui, c'est un fin politique,
26:25même en tant que militaire.
26:26D'ailleurs, ça lui réussira,
26:27puisqu'il ne sera pas élu président.
26:29Mais il sait gérer tout ça,
26:31ce côté politique des rapports
26:33entre les nations et entre les hommes.
26:35Lui, Patton, pas du tout.
26:36– Pas du tout.
26:37– Pas du tout, non, non.
26:37La preuve, c'est qu'à la fin de la guerre,
26:38ça tourne au vinet.
26:39– On va justement en parler.
26:43Il rentre en Allemagne.
26:45Il va jusqu'où en Allemagne ?
26:46– Il va jusqu'en Bavière.
26:54Et puis après, lui, il voulait aller jusqu'à Berlin.
26:57– Oui.
26:58– Mais on lui a dit, ce n'est pas possible.
26:59– Donc, il fait une jonction avec les…
27:01– Il fait une jonction avec les troupes soviétiques.
27:04– Oui.
27:04– Et là, il rencontre ses homologues.
27:06– Qu'est-ce qu'il raconte sur cette rencontre ?
27:08– Alors là, il n'est pas du tout…
27:10Là, c'est le choc pour lui.
27:12Tout de suite, il sent que ça va dégénérer,
27:15cette histoire avec les soviétiques.
27:16Et que le prochain ennemi, ça sera l'armée.
27:18– Mais qu'est-ce qui lui fait sentir ça ?
27:20– Oh, c'est la…
27:21Il les voit…
27:22D'abord, il y a le communisme.
27:23Pour lui, c'est…
27:25– C'est l'ennemi.
27:26– Oui, en plus, c'est un gars du Sud.
27:28Donc, la vision WASP, ça ne marche pas.
27:31Donc, il y a cette vision idéologique, le communisme.
27:34Et puis, il voit l'attitude assez brutale,
27:38presque sauvage.
27:41Ce qu'il considère que ce sont des sauvages, quand même.
27:44Et là, il…
27:45– L'aspect brutal, ce n'est pas forcément pour lui déplaire.
27:47– Non.
27:49Mais c'est vrai qu'il y a ce côté plus sauvage
27:51de sortir des limites de la civilisation, quelque part.
27:56Et là, ça déraille un peu, quoi.
27:59– Donc, il dit, ce sont eux les vrais ennemis.
28:02Et alors, il propose carrément,
28:05il le propose à qui, vous venez de nous le dire,
28:07d'utiliser d'anciens soldats allemands,
28:08de ce qui reste de l'armée allemande,
28:11pour aller casser du rouge.
28:12– Oui, c'est ça.
28:12– Mais alors, est-ce qu'il a un plan
28:14ou c'est juste une idée comme ça en l'air ?
28:15– Oh, c'est une idée.
28:16Le plan n'est pas établi,
28:18parce qu'en plus, on lui fait comprendre très vite
28:20qu'il faut qu'il arrête tout de suite.
28:23Et donc, non, c'est une idée.
28:25C'est une idée.
28:27Enrôler dans l'armée américaine
28:29tous les soldats,
28:31tous les prisonniers de guerre de la Wehrmacht.
28:34Enfin, j'imagine qu'ils ne regardent pas non plus
28:37sur la couleur de l'uniforme.
28:38Donc, il peut y avoir de tout.
28:40De la Vafan SS, enfin.
28:41L'objectif pour lui,
28:43c'est de faire barrage au communisme
28:45et à l'armée rouge,
28:46qu'il voit comme l'ennemi numéro un du monde libre.
28:50– Et est-ce que cette position tranchée,
28:52c'est ce qui a conduit à sa mise à l'écart ?
28:53Comment ça se passe, cette mise à l'écart ?
28:55Sans quelle année ?
28:57– On est en 45,
28:59et puis on va lui confier,
29:01on va lui retirer son commandement.
29:04Donc là, déjà, c'est un coup très dur pour Patton,
29:07parce que lui n'aime vivre que sur le terrain
29:09et en première ligne.
29:11Mais bon, déjà, la fin de la guerre en Europe
29:13l'avait diminuée moralement.
29:17Déjà, le fait qu'il pue de combat…
29:19– Oui, c'est une dépression post-bellum.
29:23– Oui, c'est un peu ça.
29:25Patton, sans opération, sans guerre, sans action,
29:28il s'ennuie.
29:29Et puis surtout, il trouve qu'il n'a plus de rôle à jouer.
29:31Donc on lui confie un commandement politique
29:35d'un territoire en Allemagne,
29:38où il doit gérer, en fait, la dénazification de son secteur.
29:43On lui reproche d'ailleurs de laisser en place
29:45des dignitaires nazis dans les administrations.
29:51Lui, il ne voit aucun inconvénient,
29:52étant donné que ce sont des gens compétents
29:54qui ont fait tourner l'administration nazie
29:57pendant quelques années.
29:58Donc plutôt que de livrer l'Allemagne au chaos
30:01et son secteur en particulier,
30:03il préfère les garder dans l'administration.
30:05– Mais il est quand même très amère.
30:06Il écrit « Cette armée n'est plus la mienne ».
30:10– Oui, il se sent dépossédé de quelque chose.
30:15Le fait de ne plus avoir de commandement en direct,
30:19le fait que la guerre s'arrête,
30:21le fait qu'on le punisse en lui confiant
30:24cette dénazification,
30:25ça fait beaucoup d'ingrédients
30:27pour un personnage comme lui.
30:29Donc je considère que, oui,
30:32tout part un peu n'importe comment.
30:34– Alors, en relisant ces carnets,
30:38on découvre quand même un nombre très différent
30:40du portrait public.
30:42Il est cultivé, il est organisé.
30:45Vous qui l'avez lu et relu attentivement,
30:47j'imagine qu'il est rentré dans son intimité,
30:50quelle est finalement votre vision ?
30:53Est-ce que c'est un homme auquel vous êtes attaché ?
30:57Ou est-ce que c'est parfait ?
31:00– On ne peut pas rester indifférent, déjà,
31:02aux écrits de Patton, à sa personnalité,
31:05puisqu'on rentre vraiment dans son intimité,
31:07notamment avec les correspondances avec sa femme.
31:08Mais je trouve que c'est quelqu'un qui est, oui,
31:11qui est droit, qui impose le respect,
31:14qui est un vrai penseur militaire,
31:18qui apporte beaucoup de choses, je trouve,
31:20à l'armée américaine, en temps de paix,
31:24mais surtout en temps de guerre,
31:25dans le feu de l'action.
31:26C'est quelqu'un qui est, je trouve,
31:28qui peut être assez touchant aussi,
31:31notamment dans la correspondance avec son épouse.
31:33Je trouve que cette intimité-là est touchante.
31:36Et il y a quelque chose qui vient adoucir la vision,
31:39c'est vrai qu'on a, qui est biaisée aussi,
31:41notamment par le cinéma,
31:43et même par ses propres écrits.
31:46Donc c'est quelqu'un qui…
31:48C'est la complexité de l'homme, au fond.
31:49C'est quelqu'un qui est complexe,
31:50comme beaucoup de gens,
31:52et comme la plupart des gens, d'ailleurs.
31:55Et en cela, c'est quelqu'un qui est très humain.
31:58Et donc c'est ça qui est intéressant en lisant ses carnets.
32:02C'est de voir comment cet humain-là évolue
32:05dans un univers qui est quand même…
32:10C'est le chaos, quoi.
32:11C'est le chaos de la guerre,
32:12c'est l'horreur de la guerre.
32:14Et il a cette ligne, il n'en dévie pas.
32:17Il est très intègre,
32:19il ne dévie pas de sa morale.
32:23Il a son éthique du combat aussi,
32:24son éthique de ses rapports avec les autres.
32:27Il n'en dévie jamais.
32:28Il ne se trompe pas, finalement.
32:31Et c'est en cela qu'il est intéressant
32:32et qu'il faut lire ses carnets.
32:33– Bien, écoutez, c'est ce que nous allons faire.
32:35Donc les carnets du Général Pazone,
32:37annotés par vos soins,
32:40c'est paru aux éditions du Nouveau Monde.
32:41C'est au format poche aujourd'hui.
32:44Boris Laurent, merci beaucoup
32:45d'avoir répondu à notre invitation.
32:48Je rappelle que vous avez également annoté
32:50les mémoires du maréchal Paulus,
32:54toujours pour Nouveau Monde.
32:55et il y a également, mais ce n'est pas vous
32:57qui les avez notés,
32:58Rommel et…
32:59– Eisenhower.
32:59– Eisenhower.
33:01Voilà, avant de nous quitter,
33:03je vous propose de prendre la direction
33:05de Saint-Germain-en-Laye,
33:07où le musée d'archéologie nationale
33:09propose une remarquable exposition
33:11intitulée « Les maîtres du feu ».
33:13Elle est consacrée à l'âge du bronze,
33:15cette période clé de la proto-histoire
33:16s'étendante entre 2300 et 800 avant notre ère.
33:20Moins d'une simple galerie d'objets anciens,
33:22l'exposition offre un récit clair et documenté
33:25de ce que fut cette véritable révolution
33:27technologique et sociale.
33:29L'apparition du bronze,
33:30alliage de cuivre et d'étain,
33:32marque un tournant dans l'histoire humaine.
33:34On entre alors dans une ère
33:34de transformation des sociétés,
33:36production en série,
33:38premier réseau d'échanges à longue distance,
33:40élévation du statut du guerrier
33:41et même premier signe de territorialisation.
33:44Le parcours de l'exposition,
33:45riche de plus de 500 pièces,
33:47se structure autour de grands thèmes.
33:49D'abord la production,
33:50on découvre les gestes des bronziers,
33:52le rôle des forges,
33:53les outils, les moules
33:54et l'ingéniosité derrière des objets
33:56aussi divers que des épées,
33:57des parures ou des haches standardisées.
34:00Viennent ensuite les échanges.
34:01Le territoire de la France actuelle
34:02devient un carrefour.
34:04Des bateaux cousus
34:04traversent la Manche et la Méditerranée.
34:07Les lingots d'étain circulent
34:08tout comme les savoir-faire.
34:10Cette circulation s'accompagne aussi
34:11d'un monde symbolique qui évolue.
34:13Le soleil devient un élément central,
34:16les rituels se complexifient,
34:17l'image du chef et du guerrier
34:18s'impose dans l'imaginaire collectif.
34:21Mais ce qui distingue cette exposition,
34:22c'est aussi sa capacité
34:23à évoquer les modes de vie.
34:25Habitat reconstitué,
34:26objets du quotidien,
34:27banquets communautaires,
34:28pratiques funéraires.
34:30À travers eux,
34:31c'est toute une société
34:31qu'on voit apparaître,
34:33organisée, mobile,
34:34ancrée dans des croyances puissantes.
34:36Scénographie soignée,
34:37dispositif immersif,
34:38jardin cultivé à l'image
34:40de ceux de l'époque,
34:41Les Maîtres du Feu
34:41est une exposition dense
34:43mais accessible,
34:44rigoureuse,
34:45sans être aride
34:45et surtout éclairante.
34:47Elle démontre que l'âge du bronze
34:48n'est pas une simple parenthèse
34:50entre la pierre et le fer
34:52mais une matrice,
34:53un moment fondateur
34:54de notre modernité.
34:56C'est à voir jusqu'au 9 mars 2026
34:58au musée d'archéologie nationale
35:01de Saint-Germain-en-Laye.
35:02C'était Passé-présent,
35:04l'émission historique de TVL
35:05présentée en partenariat
35:07avec la revue d'Histoire européenne.
35:10Avant de nous quitter,
35:10vous n'oubliez bien évidemment pas
35:11de cliquer sur le pouce levé
35:12sous la vidéo
35:13et de vous abonner
35:15à notre chaîne YouTube.
35:16Merci et à bientôt.
35:17Sous-titrage Société Radio-Canada
35:19Sous-titrage Société Radio-Canada
35:22Merci.
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