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  • 25/06/2025
Sans avoir donné son consentement à une hystérectomie, Shirley Dhinn dénonce aujourd’hui des violences gynécologiques subies au CHU. Son témoignage a libéré d’autres paroles.

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Transcription
00:00En août 2016, je me suis retrouvée aux urgences, au CHU Belpiaire,
00:08et on m'a conseillé de rencontrer le professeur Wanteobald par rapport à mes symptômes d'endométriose.
00:14Je l'ai rencontré en septembre, et il m'a expliqué que dans mon cas, au vu des IRM, au vu de mes symptômes,
00:21ce qu'il fallait faire, c'était me retirer les ovaires.
00:25Je lui ai demandé un délai de réflexion, et pendant ce délai, je suis allée voir un autre médecin
00:30qui, lui, m'a expliqué que ce n'était pas forcément la bonne intervention,
00:37et qu'il allait faire une réunion pluridisciplinaire avec le professeur Wanteobald.
00:42Fatigué, usé par les douleurs, j'ai finalement accepté cette ovariectomie, donc ce retrait des ovaires.
00:47Entre-temps, j'ai rencontré l'anesthésiste qui avait prévu une pompe à morphine,
00:54une péridurale pour les douleurs post-opératoires.
00:58Le jour de l'opération, le professeur Wanteobald est venu au moment où on me préparait pour la péridurale,
01:04et a demandé à l'infirmière d'arrêter son geste, en lui disant que j'allais pouvoir gérer la douleur.
01:09Donc, je me réveille dans la salle de réveil, ensuite, on me déplace dans ma chambre,
01:15et le professeur Wanteobald arrive au bout d'à peu près une heure, une heure et demie, avec des élèves,
01:23et il me dit, alors écoutez, j'ai une bonne nouvelle pour vous,
01:27je vous ai laissé vos ovaires et j'ai retiré votre utérus.
01:33Je sortais de l'opération, je me suis dit que je n'avais pas bien compris ce qu'il avait dit,
01:37je ne réalisais pas l'information qu'il venait de me donner.
01:41Donc, j'ai demandé par la suite à des infirmières si c'est bien l'utérus qu'il a retiré,
01:46et ça a été confirmé.
01:47Une fois que j'ai eu le compte-rendu opératoire, je me suis dit, bon, c'est bien ce qu'il a fait.
01:56Et au bout de deux jours, je suis sortie de l'hôpital,
02:03et voilà, il avait cassé quelque chose, des projets dont je lui avais parlé,
02:09le désir d'avoir un enfant un jour.
02:11Je vis avec mon endométriose qui continue à se propager,
02:16je n'ose plus aller voir de gynécologue, j'ai peur.
02:19C'est un peu tout chamboulé dans ma vie.
02:22Mes projets, celles que j'étais avant, qui n'est plus celles que je suis aujourd'hui,
02:25mon avenir professionnel, tout.
02:31Ça m'a littéralement brisée, complètement brisée,
02:34et j'ai quitté la Réunion.
02:36Je me suis dit, bon, je vais partir d'ici.
02:39Je n'ai pas envie d'être au même endroit que lui.
02:42Il faut que je parte.
02:43Il faut que je trouve le moyen de me réparer, de me reconstruire.
02:49Mais finalement, je pense qu'on ne se reconstruit jamais.
02:52Jamais.
02:52Parce que je suis toujours dans cette reconstruction,
02:55en permanence, tout le temps.
02:58Tout le temps, parce que tous les jours, je me vois.
03:01Tous les jours, je vois les cicatrices.
03:03Tous les jours, je pense à ça.
03:05Tous les jours, je pense à lui.
03:06Tous les jours, je pense à ce projet
03:09qui a été complètement anéanti par lui.
03:12Juste lui.
03:13Je suis passée par plein de phases différentes
03:15entre la culpabilité, la honte, la peur.
03:20Je ne savais pas si j'allais faire quelque chose contre lui,
03:24si j'allais oser en parler.
03:25En 2021, je me suis décidée.
03:29Et je suis allée voir un avocat qui m'a conseillé
03:31de m'orienter vers la CCI,
03:34donc la Commission de conciliation et d'indemnisation.
03:37Une procédure qui, normalement, est assez courte,
03:40mais qui a pris finalement quatre ans.
03:43Et c'est cette année que la Commission de conciliation
03:46et d'indemnisation a donné son avis
03:48et a reconnu que le professeur Vantéobald était fautif.
03:52Tout le monde m'entend.
03:53Enfin.
03:54J'ai décidé de médiatiser mon histoire
03:56parce que je me suis dit qu'il fallait
03:58que d'autres femmes soient protégées.
04:00Dans le doute, je me suis dit qu'il fallait qu'on sache.
04:03Qu'on sache que j'ai vécu.
04:06Et puis permettre à d'autres femmes, peut-être,
04:08de venir vers moi, de discuter avec moi
04:10ou en tout cas leur donner la force d'en parler.
04:13J'ai reçu plusieurs témoignages d'autres femmes.
04:17Beaucoup.
04:18D'un coup.
04:18Et chacune a une histoire complètement bouleversante à partager.
04:25Il y en a même qui n'ont pas osé parler pendant des années.
04:28Je me retrouve à être la première à qui elles en parlent.
04:33Et...
04:33C'est complètement bouleversant.
04:35J'écoute.
04:36J'encaisse.
04:38Et je pleure beaucoup.
04:40Honnêtement, je pleure énormément
04:41parce que les histoires sont vraiment, vraiment difficiles à entendre.
04:45On a créé un groupe privé
04:46qui nous permet de...
04:48de s'exprimer, de partager.
04:51De partager notre quotidien.
04:53De partager toutes les phases par lesquelles nous sommes passés.
04:56Partager nos fragilités psychologiques.
05:00Partager tout ce qu'on vit encore aujourd'hui.
05:02Les conséquences liées à nos opérations.
05:05Enfin, elles trouveront un endroit pour pouvoir parler librement.
05:10Sans être jugées.
05:11Même pour celles qui en ont parlé autour d'elles.
05:14À qui on pourrait dire, écoute, t'as vécu ça il y a dix ans.
05:17C'est bon, on passe à autre chose.
05:19Non, on ne passe pas à autre chose.
05:20On ne passe jamais à autre chose.
05:22Non.
05:23Ce n'est pas vrai.
05:24C'est faux.
05:25On a besoin d'en parler.
05:27Et là, on est entre personnes qui se comprennent.
05:31Et je pense qu'il n'y a que nous qui pouvons comprendre.
05:34On passe par tellement d'états
05:35que je pense qu'il n'y a que nous qui pouvons comprendre.
05:40Et c'est pour ça qu'il y a cet espace.
05:43Pour qu'on puisse en discuter entre nous.
05:45Et c'est pour ça qu'il y a cet espace.

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