Jeudi 29 mai 2025, retrouvez Nicolas Chartier (Co-fondateur, Aramis Auto) dans MANAGER L'ODYSSÉE, une émission présentée par Alix Nguyen.
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00:00Bienvenue dans Manager l'Odyssée, votre rendez-vous hebdomadaire sur BeSmart for Change.
00:13Un tête-à-tête de 28 minutes en immersion dans le quotidien d'un manager.
00:17Devenir un bon manager ne s'improvise pas.
00:21Aujourd'hui, je reçois Nicolas Chartier, cofondateur et coprésident d'Aramis Group,
00:26leader européen de la vente en ligne de voitures d'occasion.
00:29L'histoire commence en 2001, Internet bad bussy, la vente de voitures en ligne paraît folle.
00:35Le secteur est verrouillé, vieillot, peu transparent.
00:37Et pourtant, Nicolas Chartier et son associé y voient une opportunité de transformation.
00:42Il crée alors Aramis Auto.
00:4420 ans plus tard, son ambition est intacte, remettre l'humain et l'efficacité collective au cœur de la croissance.
00:50Nicolas Chartier ne parle pas seulement de résultats, il parle de méthode, de transmission et d'une conviction.
00:56On ne réussit pas seul, il nous raconte.
00:59BISMART
01:01Bonjour Nicolas.
01:03Bonjour.
01:04Bienvenue.
01:06Merci d'avoir répondu présent.
01:08Pour commencer cet entretien, j'aimerais qu'on reprenne la chronologie des faits.
01:13En 2001, vendre des voitures en ligne, je le disais en introduction, ça ne ressemblait pas vraiment à une idée bankable.
01:19Qu'est-ce qui vous a poussé à y croire à l'époque ?
01:22En fait, on avait devant nous un marché gigantesque, celui de la vente de voitures, un produit et un besoin très important pour les consommateurs, puisque c'est le deuxième budget des ménages.
01:37Et puis, on a 60 ou 70% des gens qui vont tous les jours au bureau en voiture, travailler en voiture.
01:42Un besoin essentiel.
01:46Et enfin, un secteur dans lequel les consommateurs n'étaient pas tellement satisfaits.
01:51Donc, nous, ce qu'on s'est dit à l'époque avec Guillaume Paoli, avec qui nous avons monté Aramis Auto et Aramis Group, c'est qu'il y avait une vraie opportunité d'offrir un nouveau service aux consommateurs, de meilleure qualité, avec un meilleur prix, et d'utiliser Internet pour changer les habitudes de consommation.
02:14Est-ce qu'on vous a pris au sérieux à l'époque ?
02:17Non, mais je pense comme tous les entrepreneurs qui débutent quand on a 25 ans ou 27 ans et qu'on démarre en disant qu'on va créer un grand distributeur automobile et qu'on va changer la manière dont les gens achètent les voitures.
02:29Évidemment, on ne nous prend pas au sérieux.
02:32Bon, c'est normal.
02:33Comment vous avez tenu face à cette décision ?
02:37Alors, d'abord, on était deux, donc je pense que ça aide à tenir.
02:42Dès le départ, on était une équipe.
02:45Et puis, on y croyait.
02:47On y croyait.
02:48Et puis, petit à petit, on a réussi à avoir des victoires quand même assez rapidement.
02:52Ce qui nous a encouragés à continuer.
02:56Mais je pense qu'effectivement, la résilience, c'est un des éléments clés pour être un entrepreneur.
03:02Votre première voiture vendue n'a jamais été livrée.
03:05Qu'est-ce que cette histoire symbolise ?
03:08C'est vrai que c'est une anecdote, je ne sais pas d'où la sortait d'ailleurs.
03:15J'ai une source.
03:15C'est vrai que tout au début, quand on a commencé à vendre des voitures, en fait, on ne savait pas où les acheter.
03:24Donc, ce qu'on s'est dit, c'est pas grave, on va les vendre.
03:27Et si on n'arrive pas à les acheter, on les achètera chez les concurrents et on les vendra au même prix sans gagner d'argent.
03:34Mais au moins, ça nous fera des apprentissages.
03:36Et la première voiture qu'on a vendue, c'était une 206.
03:40Et en fait, on l'a commandé chez un concurrent.
03:43Mais il s'est trouvé que c'était quelqu'un qui n'était pas tellement fiable et qui ne nous l'a jamais livrée.
03:47Donc, on n'a jamais pu la livrer à notre cliente.
03:49En fait, ça a duré longtemps et au bout d'un moment, elle a fini par annuler.
03:54Voilà, donc ça nous a fait une bonne leçon, un bon apprentissage.
03:57Et bon, elle ne nous en a pas voulu.
04:00C'était une dame très gentille.
04:03Mais oui, c'est une anecdote.
04:04C'est vrai.
04:06Si vous deviez expliquer à un jeune entrepreneur ce que vous avez appris sur vous-même les premières années,
04:12ce serait quoi, tant qu'entrepreneur ?
04:16Ce qu'on apprend sur soi-même.
04:18Je pense qu'on est obligé d'aller au bout de soi, en fait, quelque part,
04:29parce qu'on n'a pas le choix pour réussir.
04:32On n'a pas de soutien, on n'a pas le choix.
04:34Donc, on apprend beaucoup ses limites, quelque part, et on apprend à repousser ses limites, en fait.
04:39Une forme de solitude éprouvée, peut-être, au début ?
04:42Moi, je ne l'ai pas ressenti parce qu'on était deux, nous.
04:45En fait, dès le départ, on était deux.
04:47On avait, je pense, aussi la chance d'avoir un entourage, que ce soit familial, amical,
04:53avec qui on m'échangeait beaucoup, surtout ceux qui nous soutenaient.
04:57Donc, moi, je n'ai pas du tout de souvenirs de solitude ou de moments vraiment très, très difficiles
05:03où on est complètement perdus.
05:04Et pourtant, au départ, l'entreprise, le premier local, c'était le studio dans lequel j'habitais,
05:11qu'on a transformé du jour au lendemain en bureau,
05:13et dans lequel, en fait, on a vu le garder un matelas qu'une amie m'avait prêté.
05:18Et je dormais sur ce matelas le soir et je le rentrais dans la salle de bain le matin.
05:23Donc, c'est vrai qu'en t'as 28 ans, on a tous ses copains qui sont dans des boîtes,
05:27avec des trucs un peu sympas et tout ça.
05:28Avec nous, on est à vivre comme ça dans un studio sur un matelas.
05:33Il y a des moments où on se dit, bon, est-ce que j'ai fait le bon choix ?
05:38Mais finalement, je ne peux pas vous dire que j'ai des souvenirs difficiles de ça.
05:42C'est plutôt des bons souvenirs que des mauvais souvenirs.
05:44Oui, c'est en détail, on ne l'a pas précisé, mais l'aventure commence à Paris.
05:46Ça commence à Paris, oui.
05:48Vous avez traversé deux décennies de transformation.
05:52Comment on continue d'apprendre quand on est à la tête d'un groupe comme le vôtre ?
05:57Alors, l'apprentissage pour nous, en fait, c'est vraiment au cœur de tout ce qu'on promeut au sein de l'entreprise,
06:04évidemment pour nous et pour nos collaborateurs.
06:09Et on se considère d'ailleurs comme une entreprise apprenante.
06:13Et effectivement, cet apprentissage, c'est avant tout nous qui devons apprendre.
06:18Et en fait, comment on continue d'apprendre ?
06:21Je pense que nous, notre point de départ, c'est les difficultés qu'on rencontre.
06:24Donc, à chaque fois qu'on rencontre une difficulté, à chaque fois que quelque chose résiste,
06:28on se dit qu'il faut apprendre pour mieux faire la fois d'après.
06:34Donc, chaque échec a une source d'apprentissage.
06:37Donc, la question comment on continue d'apprendre, j'ai envie de dire, on continue de pousser les limites.
06:43Et à chaque fois qu'il y a un truc qui résiste, à chaque fois qu'on a un échec,
06:46on essaie de trouver la manière d'apprendre qui peut différer.
06:51Ça peut être de la formation, ça peut être se renseigner auprès de quelqu'un d'autre,
06:55ça peut être tester plusieurs fois.
06:56Il y a des multiples formes d'apprentissage.
06:59Mais je pense que c'est l'échec qui nous pousse à apprendre.
07:03Est-ce que vous avez eu un mentor, ou avez encore un mentor ?
07:07Oui, plusieurs. On a eu à une époque, on avait créé un advisory board avec Guillaume.
07:17Un de nos mentors pour en citer un, qui est malheureusement décédé depuis,
07:22c'était Pierre Guénant, qu'on était allé chercher,
07:25et qui était le fondateur d'un groupe qui s'appelait PGA Automobiles,
07:29et qui était le plus gros groupe de distribution indépendant européen,
07:35qu'il avait lui-même créé sur la base d'une concession familiale.
07:40Il avait lui-même, quelque part 20 ou 30 ans avant nous,
07:44révolutionné la manière dont la distribution automobile,
07:47et on avait envie de l'avoir auprès de nous,
07:52et de pouvoir bénéficier de ses conseils.
07:56Et on était allé le chercher en lui demandant de nous aider.
08:00Parce qu'il a fallu qu'on règle, parce qu'au début, je ne voulais pas.
08:02Et vous, aujourd'hui, vous tâchez d'en être un, d'un mentor ?
08:08Oui, moi, j'espère être encore un peu jeune pour être un mentor,
08:14mais quand des entrepreneurs nous sollicitent,
08:18nous, on répond toujours positivement.
08:23Quand ils ont envie de discuter, oui, bien sûr.
08:25Et puis, moi, j'aide aussi, oui,
08:28certains, quelques entrepreneurs dans leur développement.
08:33J'ai découvert un concept en me penchant sur votre cas.
08:38Vous évoquez beaucoup le Lean Management,
08:40que vous abordez d'ailleurs dans un de vos livres,
08:43comme levier stratégique.
08:46Est-ce que vous pouvez m'en donner une définition,
08:49selon votre expérience, votre approche ?
08:53Alors, je pense que ce que je peux faire,
08:57c'est vous parler de la démarche qui nous a amené à nous intéresser au Lean.
09:01En fait, le Lean, si on veut le définir,
09:06il y a beaucoup, beaucoup de définitions différentes du Lean.
09:09Pour nous, c'est un modèle de pensée
09:11qui pousse à s'améliorer en permanence
09:15en allant résoudre les problèmes qu'on rencontre
09:18et en capitalisant sur les personnes.
09:22Et nous, la croyance très forte que l'on a,
09:25c'est le développement de l'entreprise
09:27va se faire par le développement des personnes.
09:31Et notre facteur clé de réussite,
09:33ça va être le développement des personnes.
09:35C'est ça qui va créer la croissance de l'entreprise
09:37et créer le succès de l'entreprise.
09:39Et le Lean nous aide à faire ça, en fait.
09:42Après, il y a une pensée Lean,
09:44et puis il y a tout un tas de boîtes à outils,
09:47quelque part, qui permettent de réaliser ça.
09:50Et puis il y a tout un environnement,
09:52un écosystème, quelque part, autour du Lean
09:54qui va permettre à chaque question qu'on se pose,
09:56à chaque problème qu'on se pose,
09:58d'aller chercher des ressources, des idées,
10:00des soutiens, pour pouvoir aider à se développer.
10:03Et vous, ce concept, comment est-ce que vous découvrez ?
10:06La première fois que j'en entends parler,
10:08c'est quand j'étais à l'école,
10:09en fin des années 90, en étudiant.
10:16Et puis c'est quand même un concept qui est connu.
10:20Enfin, je veux dire, on en parle dans tous les...
10:23Enfin, dans des livres de management, dans des revues,
10:25on en entend parler régulièrement.
10:28On en entendait parler régulièrement,
10:29peut-être un peu plus encore aujourd'hui.
10:31Et nous, ce qui s'est passé,
10:33c'est que l'entreprise s'est développée.
10:37Et à un certain moment, au bout d'une dizaine d'années,
10:40en fait, on s'est retrouvé vraiment coincé.
10:44On avait du mal, on n'arrivait plus à générer de croissance.
10:47On n'arrivait plus à générer de performance.
10:52Ce qui avait fonctionné au départ ne fonctionnait plus.
10:54Et notre modèle de management,
10:57en fait, notre modèle de management ne fonctionnait tout simplement plus,
11:00puisqu'on ne manage pas de la même manière une entreprise,
11:04une start-up où il y a 3, 5, 10 ou 50 personnes,
11:08et puis une entreprise qui est à 100, 150 personnes.
11:10Et le moment où on a commencé à être...
11:12Et qu'est-ce qui différend, finalement, alors ?
11:13Qu'est-ce qui pêchait, à ce moment-là ?
11:15Alors, il y a plusieurs choses qui pêchaient.
11:18Et je pense que la première, c'est qu'on avait créé une complexité
11:24à force de faire grandir l'entreprise.
11:28Et en allant vite, on crée des strates de complexité,
11:31quelque part, qui, au bout d'un moment, asphyxient l'entreprise.
11:37C'est le fruit d'une croissance trop rapide.
11:39D'une croissance rapide, d'une manière d'avoir fait la croissance
11:42qui n'était pas forcément réfléchie comme il fallait,
11:45de prise de décision aussi, entre guillemets, court-termiste.
11:49Ce n'est pas parce qu'on avait une vision,
11:52mais quand on fait sa croissance, et quand on n'a pas de moyens,
11:55on prend des décisions...
11:57Et donc, trop de verticalité aussi ?
11:59Beaucoup de verticalité.
12:01Beaucoup de verticalité, parce que c'était la seule chose
12:03qu'on savait faire.
12:07Parce que nous, on avait commencé comme ça.
12:09Au début, on était deux.
12:11On a tout fait, on savait tout faire.
12:12On était ceux qui savaient faire le mieux dans l'entreprise.
12:15Et ça allait toujours plus vite quand on le faisait, nous,
12:16ou quand on donnait une instruction pour faire.
12:19Mais naturellement, à un moment, ça ne fonctionne plus.
12:23Et à un moment, on s'est retrouvés coincés.
12:26Et donc, en cherchant...
12:28Alors nous, évidemment, on a toujours été
12:29à lire des livres de management,
12:32à lire des revues, à regarder des émissions,
12:35même si la vôtre n'existait pas à l'époque.
12:38On a toujours cherché à apprendre.
12:40Et en cherchant, on est tombés là-dessus.
12:44Quelqu'un, en fait, nous a proposé de nous lancer là-dedans.
12:48Et puis, on s'est dit qu'on n'avait rien à perdre.
12:50On y est allé.
12:50Vous avez commencé par quoi ?
12:52Ça se traduit concrètement ?
12:53Alors, déjà, nous, on a eu plusieurs étapes,
12:55puisqu'on a commencé le modèle...
12:59La manière dont on a commencé au départ,
13:01c'était avec des consultants qui n'étaient pas vraiment spécialisés
13:03dans le domaine, mais qui nous ont dit,
13:04vous allez faire du Lean, vous allez voir, ça va être bien.
13:06Et on a commencé par faire des chantiers,
13:09un petit peu des chantiers collaboratifs d'amélioration,
13:11ce qu'on appelle aujourd'hui des Kaizen,
13:12mais c'est des chantiers d'amélioration collaboratifs
13:17où on fait bosser ensemble les personnes de l'entreprise.
13:22Sur des problématiques qui sont...
13:24De manière plus horizontale et moins verticale
13:27sur des problématiques, en général, de problèmes clients.
13:29Donc, pour vous donner un...
13:31On avait à l'époque un sujet sur la rapidité
13:34des dossiers de financement pour nos clients.
13:39Et donc, par exemple, c'était un des types de chantiers qu'il y avait.
13:45Et ça a plutôt bien marché.
13:49Mais ça s'est essoufflé assez rapidement.
13:52Ça, c'était la première phase.
13:53Et puis, la deuxième phase, c'est que j'ai commencé à travailler avec...
13:56Je vous le fais rapidement, mais à partir de 2016,
14:00on a commencé à travailler avec quelqu'un qui est un spécialiste du Lean,
14:07ce qu'on appelle, nous, un Sensei.
14:10Et j'ai commencé à être coaché moi.
14:13C'est-à-dire que, dans la première phase,
14:15on a choisi de...
14:17J'avais choisi, enfin, on l'avait fait avec Guillaume,
14:22de mener des chantiers auprès des...
14:23Sur les collaborateurs, en se disant, bon, ils vont s'améliorer.
14:27C'est eux qui vont s'améliorer,
14:28et c'est eux qui vont améliorer leur manière de travailler.
14:31Il n'y avait pas de remise en cause du dirigeant.
14:33Jusqu'au moment où je rencontre quelqu'un qui me dise,
14:36tu ne vas jamais...
14:37Dans des termes plus durs que ceux-là,
14:39tu ne vas pas y arriver.
14:41Tu n'as pas compris.
14:43Le problème, c'est toi.
14:45Et c'est toi qui dois changer,
14:48et c'est toi qui dois apprendre à faire différemment.
14:51Et là, on a commencé à faire différemment.
14:58Et en fait, en réalité, moi, j'ai été coaché,
15:01et j'ai appris à faire différemment,
15:04pour emmener les équipes différemment.
15:06Et du coup, ça passe par quoi ?
15:08Comment est-ce que vous, à titre personnel,
15:09vous les embarquez ?
15:11Déjà, est-ce qu'ils comprennent ce que vous essayez de construire,
15:13et est-ce qu'à ce moment-là,
15:15le changement opéré a été compris de tous ?
15:18Non.
15:21Déjà, est-ce que ça a été suffisamment radical
15:22pour que les gens s'en aperçoivent ?
15:23Ou est-ce que c'est...
15:24Oui, alors oui, c'est...
15:26Alors, on peut être plus ou moins radical,
15:29selon les entreprises.
15:31En tout cas, visible.
15:32C'était visible, évidemment.
15:34Et il y a eu un changement de la manière dont le manager,
15:37en l'occurrence moi, se positionnait.
15:40Donc, ça passe par avoir des discussions différentes
15:43de celles qu'on avait auparavant.
15:45On avait un mode de management traditionnel,
15:48les responsabilités étaient réparties entre les uns et les autres,
15:51et on faisait des points sur les atteintes des objectifs,
15:55à travers des reportings, présentations PowerPoint,
16:00fichiers Excel et compagnie.
16:03Chacun avait des objectifs bien définis,
16:05on faisait le suivi de tout ça.
16:06Et, évidemment, nous, on avait l'habitude d'aller sur le terrain,
16:14mais on ne mettait pas le terrain au cœur de notre leadership, en fait.
16:20Donc, on avait l'habitude de faire des différents,
16:22puisqu'on en revenait, on était assez à l'aise sur le terrain.
16:24Mais petit à petit, on avait été poussés plutôt vers les salles de réunion
16:28et vers la direction de l'entreprise depuis les salles de réunion.
16:32Donc, une sorte de déconnexion, quelque part ?
16:34Oui, aussi, oui, bien sûr.
16:36Donc, le premier changement, c'est de se dire, on va retourner sur le terrain
16:38et on va changer la manière dont on discute avec les collaborateurs,
16:43et on va commencer par aller discuter avec chacun d'entre eux des problèmes des clients
16:46et de discuter ensemble comment on pourrait résoudre les problèmes,
16:50comment on pourrait d'abord comprendre les problèmes et résoudre les problèmes.
16:54Donc, on va sur le terrain,
16:55on axe notre travail sur la résolution de problèmes.
17:03On va résoudre les problèmes sur le terrain.
17:05Aider les collaborateurs à résoudre les problèmes sur le terrain,
17:07aider à comprendre,
17:09les orienter mieux aussi,
17:10pour mieux expliquer ce qu'on veut faire.
17:14Faire beaucoup plus confiance aux collaborateurs
17:19pour résoudre ces problèmes, justement,
17:21leur donner les moyens de le faire
17:22et de prendre les décisions.
17:24Donc, renvoyer le pouvoir de décision le plus proche du client
17:28et puis travailler à de l'amélioration continue sur cette base-là.
17:35Alors, d'apprendre à déléguer, ça a été, j'imagine...
17:38Alors, je ne dirais pas que c'est un apprendre...
17:41Déléguer, dans un modèle de management traditionnel comme on l'appliquait avant,
17:44on déléguait, puisque les tâches étaient réparties.
17:47Toi, tu es en charge de ça, toi, tu es en charge de ça, toi, tu es en charge de ça.
17:49Tu me dois ça, tu dois faire tel chiffre d'ici la fin du mois,
17:53toi, tel chiffre, toi, tel chiffre.
17:55Et tu résouds tes problèmes.
17:57Je ne vais pas dire que je ne vais pas en entendre parler,
17:58mais chacun doit résoudre ses problèmes dans son point.
18:02Donc, ça, c'est...
18:03La délégation était existante.
18:05Et, attention, pour les décisions,
18:07vous venez me voir et on décidera, je déciderai...
18:10Enfin, tu décides un petit peu,
18:12je décide beaucoup.
18:13Et surtout, quand vous n'êtes pas d'accord, je tranche.
18:15Bon, ça, c'est assez traditionnel, ce qu'on pratiquait.
18:21Donc, c'est moins un sujet de délégation, plus que...
18:25Mais par contre, c'est vrai qu'il y a un certain lâcher-prise en disant,
18:28bon, ben, allez-y, décidez.
18:30Qu'est-ce que vous proposez et qu'est-ce qu'on peut faire ?
18:33On est face à un problème client, par exemple.
18:35Qu'est-ce que vous proposez ?
18:37Quelles sont les options qu'on a ?
18:39Et qu'est-ce qu'on peut faire ?
18:41Donc, on apprend, au lieu de décider, à encadrer une prise de décision
18:46structurée de la part des collaborateurs.
18:50Et une fois que chacun est capable de prendre des décisions, en fait,
18:53dans l'organisation, on va beaucoup plus vite,
18:56puisqu'on n'a plus besoin de remonter les décisions au management.
18:59Évidemment, ce n'était pas uniquement le dirigeant.
19:02Il y avait des membres du comité de direction qui décidaient aussi,
19:05mais c'était assez central, c'était beaucoup plus centralisé que ce qu'on venait aujourd'hui.
19:08Et donc, à votre échelle, vous vous êtes vite aperçu que cette mesure était vertueuse ?
19:12Très vertueuse, oui.
19:13Tout ne marche pas du premier coup.
19:15Est-ce qu'il y a eu des tentatives qui n'ont pas fonctionné ?
19:18Des idées qu'il a fallu abandonner ?
19:23Nous, on est...
19:25Enfin, oui, il y a beaucoup de choses qui ne fonctionnent pas,
19:27et on est en recherche permanente d'améliorer les choses.
19:32Donc, oui, bien sûr.
19:37Alors, dans le...
19:40Une fois qu'on est dans une démarche Lean, en fait,
19:42on est dans une démarche relativement encadrée,
19:44où des choses qu'on peut mettre en place,
19:48elles ont fonctionné ailleurs,
19:50et de toute façon, j'ai envie de dire,
19:51ça fonctionne de manière quasi systématique, si on le fait bien.
19:54Donc, le problème, c'est pas...
19:56C'est plus la manière de le faire,
19:58et parfois, il faut s'y prendre à plusieurs fois,
20:00et essayer plusieurs fois avant de réussir,
20:02plutôt que la méthode qui est en cause.
20:05Et est-ce que cette méthode Lean,
20:07ça implique des rituels de management ?
20:09Ah oui, beaucoup, hein.
20:10Pourquoi, par exemple ?
20:12Qu'est-ce qui fonctionne aujourd'hui chez vous ?
20:16Je peux vous donner un exemple.
20:17Une des choses qu'on fait en comité de direction,
20:20assez élargie d'ailleurs, aujourd'hui,
20:23c'est qu'on partage des résolutions de problèmes.
20:25Donc, une des manières de travailler ensemble...
20:26Donc, c'est vraiment le maire...
20:27Voilà, on partage des résolutions de problèmes.
20:29Donc, l'entreprise...
20:32Finalement, faire grandir une entreprise,
20:36c'est prendre des décisions.
20:37Prendre des décisions, c'est résoudre des problèmes.
20:39Et nous, on apprend à prendre des décisions,
20:41et on apprend à résoudre des problèmes.
20:43Et on a une méthodologie commune de résolution de problèmes.
20:45Donc, il s'agit de transmettre, en fait, en continu.
20:48Voilà.
20:48Et tous les membres de l'entreprise, face à un problème,
20:52sont formés à réagir de la même manière,
20:55et sont capables de se mettre tout de suite en équipe,
20:59avec une méthodologie,
21:01pour parler de ce problème-là,
21:03et aller très vite, finalement, dans la résolution du problème.
21:05Et donc, partout dans l'entreprise,
21:07il y a des résolutions de problèmes,
21:07et ces résolutions de problèmes,
21:09on les partage.
21:10Alors, on ne partage pas tout à tout le monde,
21:11mais on a une organisation pour pouvoir les partager,
21:16les faire remonter.
21:17Donc, une résolution de problèmes qui est faite dans une usine en France,
21:20si elle est super,
21:22elle va être peut-être partagée avec les autres usines,
21:25et si elle est vraiment...
21:27Enfin, la meilleure de toutes les usines va peut-être être partagée
21:29avec le comité de direction du groupe,
21:32pour vous donner un exemple.
21:33Et donc, régulièrement dans le comité de direction,
21:35en fait, toutes les semaines,
21:37on partage des résolutions de problèmes qui remontent des pays,
21:39ce qui nous permet de parler de ce qui se passe en vrai
21:45auprès des clients,
21:47et de développer notre propre connaissance
21:48de la manière dont fonctionne le business.
21:50Et toujours pour rester sur cette notion de transmission,
21:53vous avez donc eu lieu « Réussir en équipe ».
21:55Pourquoi ce besoin de transmettre, vous, personnellement ?
22:01Alors, je pense que dans l'apprentissage,
22:05ce qu'on dit, c'est qu'il y a la théorie,
22:06la pratique et la restitution.
22:08Donc, assez rapidement, on a commencé,
22:14sous l'impulsion d'ailleurs de Michael Ballet,
22:16avec qui on travaille, et avec qui on a écrit le livre,
22:19on a commencé à écrire,
22:24partager l'expérience,
22:29pour pouvoir le partager, en fait,
22:33essentiellement en interne avec nos collaborateurs.
22:35Donc, on publie souvent en externe,
22:36mais notre public, c'est l'interne.
22:40Le livre, ça a été l'occasion,
22:42à un moment où le groupe grossissait,
22:43et où on est passé assez rapidement
22:45de 1 à 6 pays.
22:47Ça a été combien aujourd'hui ?
22:49Il y a 6 pays aujourd'hui,
22:51et 2500 collaborateurs,
22:53et entre 2017 et 2021,
22:58en fait, on est passé de 1 à 6.
22:59C'est à ce moment-là qu'on a publié le livre.
23:03C'était l'occasion d'écrire,
23:06enfin, oui, effectivement,
23:07d'expliquer ce qui nous était arrivé
23:10avant 2016, après 2016,
23:13et dans les 5 ans, finalement,
23:14qu'on suivit 2016,
23:16et de pouvoir avoir, quelque part,
23:19une référence pour discuter ensuite
23:21avec nos équipes.
23:25Et est-ce que vous,
23:27qui, donc, avez commencé en 2001,
23:30vous sentez une nouvelle génération
23:31de managers émerger ?
23:34Est-ce qu'ils sont différents ?
23:35Est-ce qu'ils sont plus lucides ?
23:36Est-ce qu'ils sont...
23:38Comment vous pourriez les qualifier ?
23:41Alors, une nouvelle génération,
23:42oui, c'est certain.
23:43J'étais hier dans un point de vente
23:47dans le sud de la France,
23:48et à l'usine aussi.
23:51On a des jeunes,
23:52des managers,
23:53pendant une trentaine d'années,
23:55et qui prennent en charge
23:56une partie du business.
23:57Oui, bien sûr, mais je veux dire,
23:59en termes de philosophie naturelle,
24:01d'approche,
24:02est-ce que, fondamentalement,
24:03vous voyiez les choses changer ?
24:05Je ne peux pas dire ça, non.
24:06Non ?
24:06Non, je...
24:08Mais je pense que je n'ai pas...
24:10Je ne le vois pas, moi,
24:12je ne pense pas être capable
24:15de le comparer,
24:16donc je ne peux pas vous dire
24:16que je le vois changer.
24:18Pourquoi ?
24:19Parce que je ne voyais pas
24:20les managers...
24:21Enfin, là, j'en faisais partie
24:22de la génération des managers
24:24de 30 ans, il y a 20 ans,
24:26donc je pense que je n'ai pas
24:27le même regard dessus, donc...
24:28Comment on garde le cap
24:33quand le marché change,
24:34les attentes des clients évoluent ?
24:38Comment on gardait le cap ?
24:41Alors...
24:43Je pense que nous, on a...
24:47Alors, là encore, c'est important
24:49parce qu'on est deux,
24:50et puis maintenant, on n'est plus deux,
24:51on est d'autres,
24:52parce qu'on a, trouve nous,
24:54un comité de direction
24:54avec des patrons de pays,
24:56avec une équipe au groupe
24:57qui est là pour soutenir les pays.
25:01On est aussi un conseil d'administration,
25:03donc...
25:05Et on a une vision...
25:09Enfin, nous, on a...
25:10Comme beaucoup de chefs d'entreprise,
25:12on a un travail régulier
25:14sur...
25:15Réfléchir à la vision,
25:17est-ce que c'est toujours...
25:19Et je pense qu'elle a assez...
25:22Elle change assez peu,
25:23et on est assez clair là-dessus.
25:26Et nous, on a une étoile du Nord,
25:31quelque part,
25:31qui est apporter de la valeur à nos clients.
25:35Donc, on est en permanence
25:38en train de...
25:40Toujours de se reposer cette question,
25:41qu'est-ce qui est bon pour nos clients ?
25:43Qu'est-ce qui est bon pour nos collaborateurs ?
25:45Et comment on est...
25:46Est-ce qu'on est en train de créer de la valeur ?
25:48Je vais vous donner un exemple,
25:50parce que c'est un moment très, très perturbé.
25:52Évidemment, des moments perturbés,
25:54on en a plein avec la variation du marché d'automobiles,
25:57avec ce qui se passe en temps avec les constructeurs,
26:00avec les véhicules électriques.
26:03Mais un moment extrêmement complexe et inattendu,
26:10c'est la crise du Covid,
26:12où pour une entreprise comme la nôtre,
26:13on a été obligé de fermer du jour au lendemain,
26:15on ne peut plus livrer,
26:16enfin, on a...
26:18Et c'est typiquement le genre de situation
26:21dans laquelle on se retrouve en se disant,
26:22OK, qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse pour nos clients ?
26:25Nous, on ne s'est pas dit, on va fermer.
26:26On s'est dit, qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse pour nos clients ?
26:28Et comment on fait pour que nos collaborateurs
26:32puissent travailler dans des conditions en sécurité ?
26:37Donc, ça nous a amené à dire, en fait,
26:40on ne ferme pas, on n'a pas fermé.
26:41Parce que nos clients, il y en avait une partie
26:43qui avait besoin de voiture.
26:44Parce qu'on servait des infirmiers, des infirmières,
26:47des gens qui travaillaient dans des supermarchés,
26:48localement, d'ailleurs, des services d'aide,
26:52pompiers et compagnie qui avaient besoin de voiture.
26:54Donc, on s'est dit, on ne peut pas fermer,
26:58il faut qu'on continue.
26:59Par contre, il faut qu'on continue
26:59en ayant des collaborateurs qui sont en sécurité.
27:03Donc, comment on fait pour organiser les choses
27:04de manière à ce qu'ils puissent opérer en sécurité
27:06pour servir les clients ?
27:08Donc, l'étoile du Nord, en fait, c'est toujours, toujours ça.
27:12Là, le véhicule électrique qui arrive,
27:14qui devient quelque chose d'important,
27:16qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse
27:17pour satisfaire nos clients,
27:18avec le véhicule électrique ?
27:21Donc, il faut qu'on leur apporte
27:21des informations différentes
27:24sur l'autonomie,
27:25sur la capacité de la batterie,
27:28sur comment je vais recharger mon véhicule.
27:32Donc, on est en...
27:34L'étoile du Nord, c'est ça.
27:36Et ça marche plutôt pas mal.
27:38C'est déjà la fin.
27:39Mais j'ai une dernière question.
27:40Si vous deviez résumer votre philosophie
27:43en termes de management,
27:45quelle serait-elle ?
27:48Alors, on a deux manières de le dire.
27:55Nous, on dit qu'on a un management
27:57qui est orient and support.
27:58Donc, on oriente et on donne du support
28:01pour que les collaborateurs puissent réaliser,
28:03qu'on oppose aux commandes and controls.
28:05Voilà.
28:05C'est pour le concept.
28:07Et vous, à titre personnel.
28:09Et on a aussi...
28:10Oui, mais c'est un concept
28:12qu'on a lancé, nous, quelque part.
28:14Et on a aussi
28:14People are the solution.
28:16en disant que c'est par les people
28:21qu'on va...
28:21Par les collaborateurs
28:22qu'on va développer l'entreprise.
28:23Donc, moi, ma philosophie personnelle,
28:29c'est que le rôle du manager,
28:30c'est de s'occuper de ses collaborateurs
28:33et de développer ses collaborateurs.
28:34Et c'est comme ça
28:35qu'il va développer son activité.
28:38Merci beaucoup.
28:39Merci Nicolas.
28:40Nicolas Chartier,
28:42cofondateur et coprésident
28:44d'Aramis Group.
28:45Quant à moi,
28:46je vous dis à la semaine prochaine
28:48pour un nouvel épisode
28:49de Manager l'Odyssée.