Jeudi 22 mai 2025, retrouvez Jonathan Salmona (CEO, Shodo) dans MANAGER L'ODYSSÉE, une émission présentée par Alix Nguyen.
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00:00Bienvenue dans Manager l'Odyssée, votre rendez-vous hebdomadaire sur BeSmart for Change.
00:1328 minutes en immersion dans le quotidien d'un manager.
00:16Devenir un bon manager ne s'improvise pas.
00:19Aujourd'hui, je reçois Jonathan Salmona, ancien cadre dans une société de services numériques.
00:25Il a décidé de prendre un virage radical pendant 15 ans.
00:29Il a évolué dans un univers de performance, de croissance, mais aussi de contradiction.
00:35En 2019, il dit stop et fonde Shodo, une entreprise de services IT qui casse les codes.
00:41Transparence totale, confiance comme pilier, salarié à repenser.
00:45Jonathan Salmona nous raconte.
00:51Bonjour Jonathan.
00:53Bonjour.
00:53Bienvenue.
00:54Merci.
00:54Merci d'avoir répondu présent.
00:56Je suis ravi d'être là.
00:57Jonathan, pourquoi avoir mis 15 ans avant de dire stop ?
01:02C'est une belle question.
01:06Spontanément parce que je gagnais trop d'argent, je pense.
01:08Et que le questionnement qui s'est emparé de moi, déjà, il a été vachement progressif.
01:15Et puis, en fait, j'étais dans un confort financier quand même qui, je pense qu'il n'a pas participé à catalyser la décision.
01:25Donc, ça a été un cheminement long.
01:28Et est-ce que malgré tout, il y a eu un élément déclencheur, celui qui vous a fait prendre la décision d'arrêter en tout cas ?
01:34Oui, en fait, il y en a plusieurs des éléments déclencheurs.
01:40C'est quelque chose qui est quand même sous-jacent dans mon parcours.
01:44À un moment donné, je me rends compte que je suis dirigeant salarié.
01:48Et puis, je me rends compte, en fait, que pour toucher mes bonus, je suis obligé de prendre des décisions.
01:54Enfin, je prends des décisions, c'est pas obligé.
01:56Je prends des décisions qui, en fait, sur le moyen terme, voire sur le long terme, ne sont pas des décisions hyper smarts pour l'entreprise.
02:07Grosso modo, je prends des décisions pour maximiser les revenus.
02:12Le corollaire quand on maximise les revenus, c'est qu'on n'augmente pas trop les gens, on ne forme pas trop les gens.
02:16On n'investit pas trop sur les gens.
02:19Et en fait, je suis dans un secteur où la principale richesse sont quand même les salariés, les consultants, les consultantes.
02:26Et ça, c'est quelque chose qui commence à me faire entrer en dissonance.
02:30Et puis, pour aller, je pense, à l'essentiel en 2018, ce qui quand même parachève de me faire switcher, c'est que je perds mon père très, très vite.
02:42Et puis, je me rends compte, en fait, que je n'essaie plus trop de ne pas en perdre dans ma vie.
02:45Donc, vous diriez que c'est essentiellement une sorte de crise de valeur ?
02:49Oui, c'est une crise de valeur.
02:52Enfin, c'est un questionnement, je pense, comme on peut avoir la chance de l'avoir à 40 fiches, la fameuse crise de la quarantaine.
02:59Oui.
02:59C'est une crise de...
03:01Oui, c'est une forme de dissonance, effectivement, sur les valeurs, c'est bien résumé.
03:06Et vous le disiez, quand on a un bon poste, un bon salaire, c'est difficile de tout remettre en question.
03:12Comment votre entourage a réagi ?
03:16Hyper bien, parce que j'étais dans un...
03:19Bon, en fait, j'avais la mère de mes enfants, je suis séparée maintenant à l'époque, elle a été super sportive.
03:27Elle a été m'accompagnée.
03:31Donc, on ne vous a pas pris pour un idéaliste ?
03:33Non, puis après, je dois dire, je ne suis pas, avec tout le respect que j'ai aussi pour le métier de berger,
03:38je n'ai pas tout plaqué pour aller élever des chèvres dans le Larzac.
03:41Et puis, j'ai été plaqué pour monter une entreprise dans la tech, dans un secteur que je maîtrisais parfaitement,
03:47dans lequel j'évoluais depuis plus de 15 ans à l'époque, et en fait, je prenais très peu de risques.
03:53Mais au moins, vous avez su repenser le modèle, et ça, on va y venir.
03:57Avec plaisir.
03:58Est-ce que vous avez eu besoin d'accompagnement malgré tout ?
04:01Est-ce que vous avez eu un mentor ?
04:03Vous voulez dire, dans le passage...
04:05Au moment où vous switchez ?
04:06Non, non, non. En fait, j'avais...
04:09Au moment où je switche, j'évolue sur des fonctions de direction depuis déjà plusieurs années.
04:16Donc, en fait, j'ai de l'expérience, voilà, enfin, j'ai de l'expérience de...
04:21Vous n'avez pas eu besoin de vous entourer dans ce cercle d'entrepreneurs ?
04:25Non, non, non. Ah, ça, je l'ai fait après.
04:26Ça, je l'ai fait après, puisque j'ai la chance de rejoindre le club Bootstrap.
04:32Mais j'ai déjà, moi, dans mon entourage professionnel,
04:35je n'ai pas lancé la boîte seule, je n'ai pas créé Chaudo seule.
04:39Je l'ai créée avec Guillaume Ferron, avec qui, du coup, j'ai quand même...
04:43Enfin, c'est vraiment... Je l'ai fait avec un père, PIR,
04:46ce qui me permet d'avoir, je pense, de rester hyper aiguisé
04:51dans la vision entrepreneuriale et puis dans la prise de décision.
04:56Et à ce moment-là, qu'est-ce que vous avez découvert sur vous-même
05:00en quittant un modèle classique ?
05:03Est-ce qu'il y a quelque chose qui vous marque ?
05:06Non, en fait, pour répondre plus exactement, je pense que...
05:11Moi, je le dis souvent, je suis un entrepreneur de gauche.
05:15Ça veut dire quoi ?
05:16Ça veut dire que je mets des visions et des idées politiques, économiques, sociales
05:28dans ma vision de l'entreprise.
05:30Grosso modo, ça veut dire que je considère qu'il faut être rentable, c'est une évidence.
05:35Là, pour le coup, je pense qu'il y a consensus dans l'entrepreneuriat sur le sujet.
05:37En revanche, je considère que maximiser les revenus a un impact, à mon sens,
05:47qui est préjudiciable, puisque moi, je suis dans un secteur
05:51qui connaît un temps de valeur moyen de 25 à 30 %,
05:53parce qu'on prend des décisions qui sont extrêmement court-termistes,
05:58qui sont des décisions qui permettent d'avoir beaucoup de performances économiques
06:01dans l'entrepreneuriat.
06:02Je parle des ESN, mais je pense que ça serait globalement applicable
06:06dans beaucoup d'autres secteurs.
06:08Là où, moi, je pense qu'investir sur le bien-être salarié,
06:11c'est-à-dire mieux payer les gens, investir dans de la formation,
06:16investir dans du temps, dans du bien-être salarial,
06:20ça a un impact sur le moyen terme.
06:24C'est un vrai investissement.
06:25On va y revenir, mais avant ça, j'aimerais quand même vous demander
06:27pourquoi être resté dans ce secteur,
06:31vous auriez pu faire toute autre chose.
06:34Oui, c'est vrai, tout à fait.
06:36Déjà, c'est un secteur que je connais très, très bien,
06:39dans lequel j'ai identifié des points de douleur
06:44pour lesquels on avait le sentiment d'avoir des réponses.
06:50Donc, on voulait apporter.
06:51Il y avait des solutions.
06:52Oui, voilà, ça, c'est la première des réponses.
06:53Puis la seconde, je trouve que c'est un secteur formidable,
06:56parce qu'il permet justement, de par ses caractéristiques naturelles,
07:01c'est un secteur qui est quand même en forte croissance,
07:04même quand ça va moins bien, comme aujourd'hui.
07:07C'est un secteur en forte croissance.
07:08La gouvernance des contrats est très, très, très simple.
07:13On est à 5 ou 10 % près en début d'année.
07:15On est en capacité de savoir quel va être le chiffre d'affaires annuel.
07:18C'est très agréable.
07:19Et donc, ça permet, en fait, nous, ça nous a permis d'aller, justement,
07:23faire de l'innovation sociale, d'aller tester des choses
07:28qu'on n'aurait probablement pas fues faire dans un autre secteur.
07:31Dans un autre secteur.
07:32Vous dites que Chodo veut redonner du sens au salariat.
07:35Oui.
07:35Ça veut dire quoi ?
07:36Ça veut dire qu'en fait, mon secteur, le principal enjeu de mon secteur aujourd'hui,
07:42c'est de réduire les turn-over, à mon sens.
07:44Puisqu'avec un turn-over de 25 à 30 % en moyenne,
07:48on n'est plus en capacité de bien faire notre travail.
07:51Notre travail, c'est quoi ?
07:53C'est d'apporter de la valeur en clientèle,
07:56d'aller accompagner des clients dans la réalisation de leurs projets informatiques.
08:00Et il se trouve que quand vous avez autant de gens qui partent,
08:05la première conséquence, c'est que celles et ceux qui débutent un projet
08:08sont rarement les personnes qui vont les finir.
08:11Et ça vous pose un gros problème de vision,
08:14de maintien, de savoir-faire, etc.
08:16Donc, c'est hyper frustrant.
08:19Et c'est vraiment cette douleur-là qu'on a cherché à s'attaquer
08:25à travers un modèle qui apporte des réponses, qui fidélisent.
08:30Puisque notre turn-over, par exemple, l'an dernier, en 2024,
08:33est de 5 % seulement.
08:35Donc, c'est beaucoup plus performant que le reste du secteur.
08:40Mais à travers des pratiques de transparence des salaires,
08:45de partage du capital, de mesures aussi d'égalité de genre,
08:48on arrive à redonner du sens au salariat,
08:51parce que c'était ça la question.
08:52Refaire venir les gens dans le salariat, dans un secteur
08:56qui est quand même très, très touché par l'essor du freelancing.
09:02Et il y a la dimension, l'autonomie aussi.
09:06Oui.
09:06Mais est-ce que tout le monde est prêt à gérer autant d'autonomie ?
09:11Non, votre question, c'est de savoir
09:12est-ce que c'est simple tous les jours en tant que...
09:15Oui, est-ce que tout le monde est fait pour ça ?
09:17Alors, moi, je pense que déjà,
09:20les gens qui sont dans votre entreprise,
09:23vous les avez recrutés.
09:24À partir du moment où vous les avez recrutés,
09:26à partir du moment où vous avez confiance
09:27dans votre processus de recrutement,
09:31dans votre manière d'évaluer les gens,
09:33théorie, vous êtes en capacité d'avoir choisi des gens,
09:39parce qu'a priori, ils ont des caractéristiques,
09:41notamment en termes d'intelligence situationnelle,
09:44qui s'y prêtent.
09:44Et moi, je suis persuadé, enfin, on travaille dans un secteur,
09:48en ESN, on est plutôt avec des cadres supérieurs.
09:51Ce sont normalement des gens qui ont fait un minimum d'études
09:56ou en tout cas qui ont une certaine forme de maîtrise.
10:01Et moi, je pense qu'à partir du moment où vous êtes en capacité
10:05de rapporter de la transparence, d'ordonner du contexte,
10:09on est tous en capacité derrière de prendre les meilleures décisions.
10:10Et sur cette notion de transparence, vous le disiez,
10:15les salaires, les marges, le capital, pourquoi c'est déterminant ?
10:20Écoutez, on est dans un secteur qui est effectivement
10:23à la particularité de très bien payer les gens.
10:27Le problème, c'est que la redistribution de la valeur,
10:32elle n'est pas ouf.
10:37Pour le basire inégal.
10:38Oui, elle n'est pas ouf.
10:40Et c'est ce qui fait que depuis 15 ans,
10:42beaucoup, beaucoup se mettent à leur compte.
10:45Après, les gens gagnent bien leur vie.
10:47Il se trouve que, si je vous donne quelques métriques,
10:51si vous prenez, on va dire,
10:54vraiment dans les benches de sociétés concurrentes de showdo,
10:57les marges brutes en moyenne sont de 50 000 euros,
11:02les gens sont très bien payés,
11:03ils prennent des augmentations en général de 3 000, 4 000 euros.
11:05Quand vous chargez ce montant-là,
11:06vous arrivez à 6 000 euros.
11:08En fait, vous vous rendez compte que 6 000 euros sur 50 000,
11:12vous avez une répartition entre l'entreprise et le travail
11:17qui n'est effectivement pas hyper réglible.
11:21Et donc, mettre en place la transparence des salaires
11:23avec une grille et une politique de rémunération
11:26qui soit beaucoup plus faire,
11:30contribue non seulement à faire revenir les gens vers le salariat,
11:36mais surtout à les faire rester.
11:38Et comment, justement, les équipes l'accueillent,
11:40vous les sondez ?
11:40Vous avez quoi comme autour ?
11:42Par rapport à...
11:42À cette transparence-là ?
11:45Écoutez, déjà, le premier retour que je peux vous donner,
11:47c'est que quand vous avez un temps de voir de 5 % versus 25,
11:50c'est qu'a priori, je ne dis pas que ce n'est pas de problème,
11:54mais ça va plutôt bien.
11:56Le deuxième indicateur qui est super important,
11:58c'est qu'on a recruté 150 personnes en plus de 6 ans
12:04sur Paris, Lyon, Nantes, Rennes et La Réunion,
12:10sans recruteurs, sans s'embaucher de recruteurs,
12:13sans faire ce qu'on appelle de l'approche directe
12:15et sans travailler avec des cabinets de chasse.
12:17Parce qu'en fait, on a...
12:20Donc, vraiment, ils viennent pour ça, en fait.
12:21Exactement.
12:22C'est-à-dire qu'en fait, on a...
12:23Ces moteurs.
12:24À peu près, en rythme de croisière,
12:2570 % de recrutement qui s'effectue sur la base de candidatures entrant.
12:29Et donc, ça, c'est le deuxième feedback que je vous donne
12:31par rapport à votre question.
12:31C'est-à-dire qu'à partir du moment où vous avez des gens
12:35qui viennent spontanément toquer à la porte d'une ESN,
12:39quand la plupart des concurrents investissent massivement
12:43dans du staff, dans des armées de recruteurs, recruteuses,
12:45dans de la marque employeur, etc.,
12:48ça montre qu'à partir du moment où vous mettez en place
12:53de l'innovation sociale, vous avez des résultats.
12:57Et j'ai lu également que vous aviez supprimé la période d'essai.
13:01Oui, on l'a fait, effectivement.
13:01Instauré des congés d'ancienneté illimité.
13:03Oui, ça fait partie des choses...
13:06On y sait plein de choses.
13:07Le fameux learning by doing, en apprend, en marchant, plus exactement.
13:13Et alors ? C'est plutôt effectif, vous êtes satisfait ?
13:15Alors, le congé d'ancienneté illimité, on l'a mis en place l'an dernier.
13:19Donc, à date, les gens nous ont juste pris un an, un jour de congé en plus.
13:24Donc, c'est un peu tôt pour vous le dire.
13:26Il faudrait qu'on se reparle dans au moins cinq ans
13:28pour que j'ai un peu plus de recul.
13:29Mais en revanche, supprimer la période d'essai, c'est pareil.
13:33On l'a fait...
13:35Qu'est-ce que ça change concrètement dans la vie des gens ?
13:36Ça ne change pas grand-chose.
13:37Alors, par rapport à l'entreprise, ça ne change pas grand-chose
13:39parce qu'en fait, on avait déjà une attractivité qui était hyper forte.
13:42Par contre, ce que ça change dans la vie des gens,
13:44et du coup, vous avez raison de poser la question,
13:47ça change qu'on ne précarise plus inutilement.
13:51Alors, après, on parle...
13:53Nous, on embauche des devs, un développeur, développeuse,
13:56essentiellement, qui sont des métiers quand même hyper demandés.
13:59Je pense qu'un dev aujourd'hui, qui est tellement sollicité,
14:05qui retrouve ou elle retrouve un travail en un mois,
14:08payé 20% plus cher, je pense sans aucun souci,
14:12même dans une période extrêmement compliquée comme celle-ci.
14:16Mais en fait, on s'est rendu compte qu'à partir du moment
14:18où on en maîtrise dans un marché qui, quand même...
14:24Le marché du dev, il est quand même beaucoup plus simple.
14:27La période d'essai, en fait, elle précarise inutilement,
14:31parce que notre marge d'erreur, nos solaires recrutements,
14:33elle est très faible.
14:34On se trompe moins de 5% des cas.
14:40Et dans ces rares cas où ça arrive, qu'est-ce que vous faites ?
14:43Alors déjà, je vais quand même répondre pour les cas où ça n'arrive pas.
14:48Et en fait, quand vous avez 5% de marge d'erreur,
14:50ça va dire que vous avez 95% de cas qui se passent sans encombre.
14:55Et donc, imposer une période d'essai à 95% des gens,
15:00alors que ce n'est pas nécessaire, pardon,
15:03on s'est rendu compte que ça n'avait pas forcément d'intérêt.
15:05Pour les 5% à qui ça arrive,
15:07il faut redéfinir ce que c'est qu'une erreur de recrutement.
15:09Pour moi, une erreur de recrutement,
15:11ce sont des profils pour qui, à partir du moment où on a tout essayé,
15:14c'est-à-dire formé, coaché, accompagné, etc.,
15:17en fait, on n'arrive toujours pas à se remettre dans une dynamique de succès.
15:23Donc là, après, on reste une entreprise française soumise aux droits du travail.
15:27Donc en fait, on peut se séparer à l'arrière.
15:30Via rupture conventionnelle, ou prendre nos responsabilités, oui.
15:34Donc vous y trouvez votre compte.
15:36Comment est-ce que vous assurez, malgré tout, que le cadre tienne ?
15:41Comment est-ce qu'il est prévu de réagir ?
15:45En cas de dérive, par exemple, est-ce qu'il y a...
15:48Est-ce qu'il y a quelqu'un à la barre ?
15:49Un système, un process, des étapes, une charte ?
15:53Oui, non, non, mais donnez-moi peut-être un exemple, je ne sais pas si...
15:55Non, mais justement, je ne sais pas, sur les congés d'ancienneté limitée,
16:01je ne sais pas, est-ce que vous avez prévu de vous vous protéger ?
16:06Vous voulez dire si toute la boîte décide de partir ?
16:10Comment on maintient un cadre ?
16:12Alors, le cadre, il reste quand même...
16:15Il y a quand même un cadre.
16:17C'est vrai que c'est important d'en répondre à cette question,
16:18parce que souvent, quand on parle d'entreprise libérée,
16:20les gens, ils ont l'impression que c'est la fête du site,
16:23mais il n'y a personne à bord.
16:25Donc en fait, il y a quand même des règles.
16:27J'en reviens aux bases.
16:28L'intérêt de la transparence, c'est justement de partager les enjeux avec tout le monde,
16:37parce qu'on passe avec des cadres supérieurs qui sont en capacité de comprendre l'impact de certaines décisions.
16:44Mais donc parce que ce sont des cas, ça veut dire qu'il n'y a jamais de conflit ?
16:47Ah si, ça veut dire qu'il y a du conflit.
16:49Mais ça veut dire que, moi, en tout cas, c'est ma croyance,
16:52à partir du moment où on élève les gens, on les rend autonome,
16:55à partir du moment où on les nourrit,
16:57moi, je suis persuadé qu'on prend des décisions qui sont meilleures.
17:00Ça ne veut pas dire après qu'il n'y a pas des contrevenants, des contrevenants, des abus, etc.
17:04Il y en a toujours.
17:05C'est théorisé par un mec qui s'appelle Gordon Forad,
17:07qui appelle, il a appelé ça la théorie des 3%.
17:09C'est à partir du moment où vous allez libérer une entreprise, etc.,
17:12il y aura toujours 3% des gens qui se comporteront de manière,
17:17comme des contrevenants, quoi.
17:18Et ça ne sera jamais d'ailleurs les mêmes en fonction des situations.
17:20Mais du coup, je réponds à votre question.
17:21Et ça, c'est testé à prouver, vous qui êtes sur le terrain et qui le faites ?
17:24C'est testé à prouver.
17:26Je vous confirme, il y a 3% des gens qui foutent le bordel.
17:32Mais je vous confirme aussi,
17:34parce que c'est le corollaire des 3%,
17:37qu'il y a 97% des gens qui jouent le jeu.
17:40Et en fait, dans mon sens,
17:42c'est des gens qui ne méritent pas d'être impactés
17:47par des mesures qui sont chantes, des mesures de contrôle.
17:52Je réponds aux congés en une seconde, si je peux ?
17:56Oui, une en plus, il y a la souci.
17:57Il y a des règles.
17:58Donc en fait, un employeur peut refuser des congés.
18:01D'accord.
18:01Ça, on en reste là.
18:04D'accord.
18:04Par contre, on le fait en bonne intelligence.
18:05Le fait de donner des congés en grande quantité,
18:09c'est quoi l'intérêt ?
18:10C'est de faire en sorte que celles et ceux qui ont besoin de se reposer
18:12puissent le faire au compte-goût,
18:16ou puissent le faire en posant,
18:17je ne sais pas si vous avez quelqu'un qui a enchaîné 3-4 ans en clientèle,
18:21sans trop prendre de congés,
18:22qui a envie de faire un break de 3-4 mois,
18:23et qu'il a accumulé suffisamment de jours.
18:25En fait, c'est OK.
18:26On va le faire.
18:26Alors évidemment, si tout le monde part 3-4 mois en même moment,
18:29possiblement que la boîte a meurt.
18:30Parce qu'en fait, il va y avoir une sortie de cash qui va être trop importante.
18:34Donc en fait, on va mettre des règles.
18:37Ça n'est jamais arrivé.
18:38Le jour où ça arrivait,
18:39on est en capacité d'expliquer pourquoi.
18:42En fait, on ne peut pas, comment dirais-je, accepter.
18:47Et quels sont les champs où vous gardez le contrôle ?
18:51C'est-à-dire ?
18:52Dans la boîte, j'imagine, en termes de recrutement bien sûr.
18:55Mais puisque c'est un peu le champ des possibles sur papier,
18:58est-ce qu'il y a quand même néanmoins des précarés, des choses ?
19:02Oui, en fait, encore une fois,
19:04c'est parce qu'on est une entreprise libérée
19:06que tout le monde a le droit de tout faire.
19:07Le but, c'est de définir des périmètres d'action
19:13dans lesquels les gens savent qu'ils peuvent prendre des décisions seules.
19:16Mais il y a des prérogatives qui ne sont pas partagées entre toutes et tous.
19:22Et vous, à titre personnel, vous venez d'un modèle classique.
19:24Est-ce que ça a été difficile de déléguer au début ?
19:28Non, mais en fait, ça n'a vraiment pas été difficile
19:31parce que moi, j'ai vécu en tant que manager.
19:34Par exemple, moi, j'ai passé des années à relire des notes de frais
19:37et en fait, je pense que ça fait partie des choses
19:42qui sont en relire des notes de frais.
19:44C'est une logique de contrôle.
19:47Une des mesures qu'on a prises, nous, quand on a lancé Chodeau,
19:49on a donné la CV de l'entreprise à tous nos membres.
19:53De sorte, en fait, on bosse avec une banque qui s'appelle Compto.
19:58Vous faites une dépense, vous la scannez,
19:59vous scannez le justificatif, ça devient des pièces comptables.
20:02En fait, on gagne un temps fou.
20:04Il n'y a pas besoin d'aller contrôler des dépenses.
20:08Enfin, je veux dire de l'abus.
20:09On contrôle les dépenses, pourquoi ?
20:11Parce qu'on veut s'assurer qu'il n'y a pas d'abus dans la dépense.
20:14Mais si vous parlez à des gens, vous voulez expliquer
20:15qu'avec la carte d'entreprise, ils peuvent faire tel ou tel type de dépense.
20:22Nous, on s'en sert pour quoi ?
20:23On s'en sert pour la logistique,
20:25quand on doit se déplacer en clientèle.
20:27Donc, les billets de train, l'hôtel, l'achat du matériel, etc.
20:30En fait, dans toutes ces catégories-là,
20:33il y a des règles qui sont encadées par leur salle.
20:35Après, je pense que tout le monde a conscience
20:37qu'a priori, on va essayer de prendre le billet à 200 balles
20:41plutôt que celui à 300, pour commencer.
20:43Vous l'avez dit, le modèle chaudeau est pensé
20:46pour des profils très autonomes.
20:48Oui.
20:48Ça veut dire qu'il n'y a pas de juniors ?
20:50Il y a des juniors qui peuvent être autonomes.
20:52Mais donc, ça veut dire qu'ils ne sont pas chapeautés ?
20:56Non, mais en fait, ça veut dire que...
20:58Non, vous avez raison, c'était plus pour relever la question.
21:05Mais on a plutôt une pyramide, vous avez raison, de senior.
21:07Parce qu'en fait, on est une entreprise qui est positionnée
21:13sur une niche d'expertise.
21:15Et l'expertise, elle est quand même statistiquement détenue
21:19majoritairement par des seniors.
21:21Maintenant, ça ne nous empêche pas de prendre des profils
21:23qui sont moins seniors ou plus juniors
21:26quand on considère qu'ils ont le profil pour rentrer chaînes.
21:30et surtout quand ils passent les tests de sélection technique
21:35qui sont quand même très exigeants.
21:38Mais globalement, oui, en fait, je pense que la culture d'entreprise...
21:43Enfin, on en revient toujours aux mêmes logiques de fraude
21:48ou de contrôle.
21:53Je pense que c'est dans l'intérêt de personne,
21:55c'est dans l'intérêt d'aucun senior ou d'aucun junior
21:57d'aller abîmer un modèle qui est cool.
22:00Pour en revenir à cette démarche
22:03qui est de réinventer le salariat,
22:05est-ce qu'il y a des expérimentations qui n'ont pas marché ?
22:09Des expérimentations...
22:13Des choses sur lesquelles vous êtes revenus,
22:14des mesures prises qui vous semblent être bonnes ?
22:16Non, il n'y a pas de mesures
22:19sur lesquelles on est revenus.
22:22Par contre, il y a effectivement...
22:26J'ai deux épisodes qui me reviennent spontanément.
22:31Le premier, donc...
22:34On avait...
22:36Quand on s'est développé,
22:37on a fait le choix de se développer à travers des filiales.
22:41Et donc, grosso modo, la deuxième entreprise
22:43qu'on a montée à Paris,
22:45aujourd'hui, ça s'appelle Shadow Studio.
22:46Mais quand on l'a lancée,
22:48quand on l'a lancée, en fait,
22:50par paresse intellectuelle,
22:51on avait fait le choix de l'appeler Shadow Paris.
22:54Et en fait,
22:57quand on...
22:58C'est 3-4 ans en arrière,
22:59quand on communique
23:00aux salariés
23:03qu'on lance une autre filiale à Paris, etc.
23:06En fait, on fait une comme aux petits oignons, etc.
23:08Et en fait, on prend une volée de bois vert.
23:11En fait, on prend des retours
23:12de quelques anciens
23:14qui, au lieu d'être hyper enthousiastes,
23:18sont très sévères.
23:21Et sur le moment, on ne comprend pas.
23:23On ne comprend pas.
23:25Et je pense que ça fait partie des choses
23:28qui sont hyper intéressantes
23:29quand on analyse le feedback salarié.
23:31C'est que très souvent,
23:32c'est du feedback qui est donné
23:33par des gens qui aiment la boîte.
23:36Alors qu'on évolue plutôt
23:38dans le monde de l'entreprise,
23:40dans des schémas plutôt de préservation.
23:43donc on va plutôt avoir tendance
23:45à flatter son manager.
23:48Et en fait,
23:50quand on a décortiqué
23:52les feedbacks,
23:56ce qui remontait,
23:57c'était qu'il n'y avait pas du tout
23:58de cohérence dans les périmètres.
24:01Il y avait des risques
24:01de cannibalisation, etc.
24:03Et en fait, ça nous a forcé
24:03à retravailler notre positionnement.
24:06Ce qu'on a fait, etc.
24:07Donc ça, c'est vraiment
24:08pour illustrer le fait
24:09que le feedback salarié,
24:11il est hyper cool.
24:14Après, ce qu'on...
24:15Ce n'est pas des choses
24:16qu'on a changées,
24:17mais c'est plutôt...
24:19C'est ce qu'on fait cette année-là.
24:22On a vraiment retravaillé
24:24la performance du modèle.
24:28Je parle de performance,
24:29je devrais plutôt parler
24:30de robustesse, d'ailleurs.
24:30On avait pensé,
24:33donc je vous donne cet exemple-là,
24:34quand on s'est fondé en 2019,
24:36la particularité de Chodo,
24:37c'est d'aller capter
24:38par salarié
24:40une marche forfaitaire.
24:44Donc qui était à Paris
24:45de 25 000 euros par an,
24:48en province de 20 000 euros par an,
24:50et en faisant en sorte
24:51que toute la marge excédentaire
24:52soit intégralement redistribuée
24:54à celles et ceux
24:55qui apportent la valeur.
24:57Sauf que les seuils de 25
24:59et les seuils de 20,
25:00avaient été pensés en 2019
25:01dans un marché
25:01qui était hyper simple.
25:05Et à partir du moment
25:06où le marché commençait
25:08à se tendre,
25:09en 2024 notamment,
25:11on s'est rendu compte
25:12que ce seuil-là
25:12ne servait plus,
25:15n'était plus suffisant
25:16pour permettre à l'entreprise
25:18de développer ce règne.
25:19Donc en fait,
25:20on a augmenté...
25:23On s'est plus des réajustements.
25:25Oui, mais du coup,
25:26c'est un réajustement.
25:27Vous allez quand même expliquer
25:27à des gens qui vont gagner moins.
25:28Puisqu'automatiquement,
25:29quand vous prenez plus,
25:29c'est des basse communicants.
25:31Donc oui,
25:32on l'a fait.
25:32En fait,
25:33on reste quand même
25:34ouvert au changement
25:35à partir du moment
25:36où on se rend compte
25:37que c'est nécessaire.
25:39Chaudot est passé
25:40de zéro
25:41à 150 personnes
25:42à 6 ans.
25:44Comment on garde
25:45une culture forte
25:46avec une croissance
25:48aussi rapide ?
25:50Comment on tient le cap ?
25:51Vous avez des garde-fous ?
25:52Oui,
25:52on en a un majeur.
25:53C'est qu'on est passé
25:54de l'oral
25:55à une culture
25:55de l'écrit.
25:57On a tout basculé
25:57à toute une culture
25:59à l'écrit
26:00via un outil
26:01qui s'appelle Notion.
26:01On aurait pu le faire
26:02sur plein d'autres choses
26:03d'ailleurs.
26:04Mais l'idée,
26:04c'est effectivement...
26:06Alors en plus,
26:07on est dans une organisation
26:08qui est distribuée.
26:08Ça veut dire qu'on n'est pas
26:09à 150 personnes
26:10à Paris.
26:10On est 150 personnes
26:11à Paris,
26:12Lille,
26:12Lyon,
26:12Nantes,
26:13Rennes et La Réunion.
26:14Donc en fait,
26:14il faut qu'on soit en capacité
26:15d'avoir une culture
26:17qui soit comprise
26:19partout
26:20et qui soit incarnée
26:21partout.
26:23Donc on l'a fait
26:24en basculant
26:25vers une culture
26:26de l'écrit.
26:28On l'a fait
26:29en nommant
26:29un binôme
26:31de directeurs généraux
26:32au sein de la secte
26:33filiale,
26:34donc qui sont aussi
26:34des mandataires sociaux,
26:36qu'on recrute
26:37ou qu'on fait monter
26:38à dessein
26:39parce qu'ils ont
26:40la capacité
26:41et les valeurs
26:42pour porter
26:44le mandat de chose.
26:45Jonathan,
26:46on se rapproche déjà
26:47de la fin
26:47de cet entretien.
26:48Néanmoins,
26:49parce qu'on est en concret,
26:50une petite question.
26:52Quel conseil
26:53vous donneriez
26:53à un manager
26:54qui n'ose pas
26:55remettre en question
26:57le modèle
26:58dans lequel il se trouve
26:59et il évolue ?
27:01Déjà,
27:03je pense que
27:03quand vous êtes prêts
27:04à remettre en question
27:05un modèle,
27:06c'est que vous avez
27:07des douleurs
27:07et je pense qu'il faut
27:09être en capacité
27:09de savoir
27:09si ces douleurs-là
27:10sont très fortes
27:13et si elles peuvent
27:13être effectivement
27:14améliorées
27:16en changeant la culture
27:17mais le conseil
27:18que je donnerais
27:19le premier
27:19c'est de ne pas avoir
27:20peur d'équité
27:20parce qu'en fait
27:22à partir du moment
27:22où vous allez
27:23changer la culture
27:24vous allez forcément
27:25déplaire à des gens
27:26qui sont sur place
27:26mais en fait
27:27il faut se dire
27:28que la place
27:29que ces personnes-là
27:30vont laisser
27:30elle va être occupée
27:31par d'autres
27:34qui vont venir
27:34parce qu'il va y avoir
27:37une conformité
27:38de valeur
27:40et c'est ça
27:40la culture
27:42d'entreprise
27:42c'est ce qui permet
27:44une entreprise
27:45de devenir remarquable
27:46et donc
27:47d'attirer à soi
27:48toutes celles
27:49et ceux
27:49qui lui ressemblent
27:52et dans l'idéal
27:53de faire fuir
27:54les autres
27:54et pour finir
27:55votre philosophie
27:56du management
27:57si vous deviez
27:57la résumer
27:58votre vision
28:00à vous
28:00confiance
28:03supérieure à contrôle
28:06très bien
28:07ce sera le mot
28:08de la fin
28:09merci beaucoup
28:10merci Jonathan Salmona
28:11fondateur de Chodo
28:14quant à moi
28:14je vous dis
28:15à la semaine prochaine
28:16pour un nouvel épisode