Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 9 mois
La sauce tomate que vous mangez, vous savez vraiment d'où elle vient ? La plupart du temps, elle ne vient pas d'Italie, comme on pourrait le penser, mais d'un endroit beaucoup plus surprenant. C'est ce que je vous raconte dans cet épisode.
Je suis Alexia Duchêne et en tant que cheffe à la télévision ou sur les réseaux sociaux, je me bats pour que l’on sache comment on cuisine et quel impact ça a.

Manger, c’est 8000 milliards de dollars de chiffres d’affaires l’année dernière et dans le monde entier. Ça mérite au moins de se demander à quel prix certaines tendances se font ou se sont faites dans notre histoire…

Dans ce podcast, je vais vous dévoiler l'envers de l'assiette.
Transcription
00:00Moi, j'ai grandi avec la sauce tomate de ma mère.
00:04Quand j'étais petite, elle en faisait des litres pour qu'on puisse manger rapidement
00:08avec ma sœur après l'école.
00:09La sauce tomate, ce n'est pas qu'un souvenir, ça fait encore toute la différence.
00:13On pourrait penser qu'elles se ressemblent toutes, mais en fait, si la tomate est trop
00:17acide, si elle manque de soleil, ce n'est vraiment pas la même chose.
00:20Généralement, quand on descend dans le supermarché, on prend la boîte un peu stylée,
00:27avec une belle tomate juteuse et un drapeau italien.
00:29Et sur l'étiquette, il y a écrit des trucs un peu clichés, comme
00:33« De la vraie sauce bonne tomate, comme en Italie ».
00:37La base.
00:38Donc là, clairement, on y croit tous.
00:41Mais ce qu'on vient d'acheter, et parfois cher, c'est certainement de la sauce tomate,
00:45oui.
00:46Mais il y a plus de chance aujourd'hui que la tomate soit chinoise que vraiment italienne.
00:49Et pour le vérifier, c'est dans les usines de cette sauce tomate chinoise qu'il faut
00:56aller.
00:57C'est pour ça que dans cet épisode, j'ai envie qu'on suive les pas d'un général
01:00de l'armée chinoise qui, sans rien dire, a réussi en 10 ans à faire de la Chine le
01:05nouveau numéro 2 du construit de tomates dans le monde.
01:07Juste en faisant plus de quantité que de qualité, et aujourd'hui, sans qu'on le
01:13sache, on en retrouve partout.
01:15De l'Amérique du Nord jusqu'à la pointe de l'Afrique.
01:19Et c'est ça dont je veux qu'on parle dans cet épisode.
01:27En tant que chef, à la télévision ou sur les réseaux sociaux, je me bats pour que
01:38l'on sache comment cuisine et quel impact ça a.
01:41Manger, c'est 8000 milliards de dollars de chiffre d'affaires l'année dernière
01:45dans le monde entier.
01:46Ça mérite au moins de se demander à quel prix certaines tendances se font ou se sont
01:52faites dans notre histoire.
01:53Je suis Alexia Duchesne et je vais vous montrer l'envers de l'assiette.
02:03D'habitude, la tomate dans notre tête, c'est ça.
02:16Ça sent le soleil, ça sent l'huile d'olive et dans le monde, on aime tellement ça que
02:22pour la sauce tomate, en moyenne, on en mange 5 kilos chaque année par être humain.
02:25Il faut dire que ça va vite.
02:27Pizza, ketchup, bolognaise, il y en a partout.
02:31C'est un marché qui pèse 15 milliards de dollars par an, autrement dit, c'est hyper
02:36convoité.
02:37Ce qu'on ne sait pas forcément, c'est que tous ces dérivés aujourd'hui sont souvent
02:41fabriqués avec des tomates qui ont poussé très loin de la Méditerranée.
02:44En Chine par exemple.
02:47Et pas n'importe où en Chine.
02:52Tout à l'ouest, à côté de la Russie, de l'Inde et de l'Afghanistan, dans la région
02:56du Xinjiang.
02:57Le Xinjiang, c'est une énorme province qu'on connaît surtout en Europe à cause des camps
03:01de travaux forcés et de la persécution des Ouïghours.
03:03C'est une région immense, assez montagneuse, qui va devenir le cœur de la politique agricole
03:08de la Chine au début des années 2000.
03:11A partir du moment où le parti communiste chinois va décider de suivre le plan d'une
03:16personne, le général Yue Yi.
03:20Son plan, au début des années 2000, c'est de faire de la Chine la nouvelle puissance
03:26du marché de la tomate.
03:27Ce qu'il faut savoir tout de suite, c'est qu'on l'appelle le général Yue, mais il
03:31n'a jamais vraiment été dans l'armée.
03:34C'est plus un businessman, un cadre qui porte un uniforme, parce qu'il travaille
03:39pour un puissant organisme chinois, le bingquan.
03:42Ça fait 50 ans que le bingquan occupe la région du Xinjiang.
03:46Autant dire que pour avoir un visa à y aller, c'est assez difficile.
03:50Et à part un journaliste, qui a fait une enquête de deux ans sur le marché mondial
03:54de la tomate, il y a un autre français qui a réussi à y aller, un ancien négociateur
03:59de la grande distribution, Christophe Brusset.
04:02Au début des années 2000, ce que Christophe me raconte, c'est qu'il travaille pour
04:06un très gros groupe qui fabrique notamment du ketchup.
04:08La première fois que je suis allé en Chine pour la tomate, je suis allé dans le Xinjiang
04:14à Wumxi.
04:15C'était suite à un problème qualité sur un lot important que j'avais acheté en
04:20Chine.
04:21Donc j'avais acheté, je ne sais plus, peut-être 200 tonnes, 300 tonnes de tomates, je ne sais
04:23plus.
04:24Mais enfin, un lot vraiment important.
04:25Et une grosse partie de ce produit-là est arrivé en France avec une qualité déplorable.
04:30On avait une couleur qui était horrible, qui était marron, c'était brûlé, ce n'était
04:33pas bon.
04:34Dans le produit, il y avait des particules qu'on n'arrivait même pas à identifier.
04:38On ne savait pas si c'était de la rouille, probablement du moisi aussi.
04:40Enfin, c'était un produit vraiment affreux.
04:43On est arrivé à Wumxi, on a été très bien reçus par les représentants de ce fournisseur.
04:47J'ai discuté avec le directeur de l'usine, j'ai discuté avec le responsable export
04:50chinois.
04:51Et puis finalement, j'ai obtenu la ristourne que je souhaitais.
04:54On s'est mis d'accord sur de nouveaux contrats, puisque j'étais sur place, donc on a mis
04:59en place de nouveaux contrats.
05:05Christophe Brusset, il a toujours rêvé d'un monde où les plats industriels pouvaient
05:09être clean.
05:10Moi, c'est exactement pareil.
05:11Quand je réfléchis à des recettes pour les industriels, notamment pour les trains
05:14en ce moment, c'est très important pour moi que les plats soient établis avec des produits
05:19au maximum d'origine française et qu'on n'ait pas à rajouter d'additifs ou des choses
05:23un peu cheloues.
05:24Et Christophe, ça lui tenait tellement à cœur, qu'il a quitté l'agroalimentaire
05:29pour enquêter dessus et publier des livres aujourd'hui.
05:31Mais il se rappelle très bien du Xinjiang et des militaires du Bingtuan.
05:36C'est vraiment une entreprise gérée par des militaires.
05:40C'est-à-dire qu'au départ, l'État chinois avait massé à sa frontière des soldats
05:45pour se prémunir contre une possible invasion de l'URSS à l'époque.
05:48Donc il y avait une masse de soldats qui étaient là, des casernements, etc., et puis un besoin
05:55de développement d'un côté et une main d'œuvre disponible.
05:58Donc je pense qu'ils ont fait assez rapidement la péréquation en se disant « Bon, on a
06:023 millions de soldats qui ne font pas grand-chose, la menace, finalement, elle n'existe plus
06:06puisque la guerre avec la Russie, ce n'est plus d'actualité, ces régions, il faudrait
06:10les développer, les populations locales sont un peu réticentes, elles ne nous aiment pas
06:14beaucoup, elles ont des velléités d'autonomie, donc c'est vrai que ce général a eu l'intelligence
06:19de faire un petit peu ce constat en se disant « J'ai de la main d'œuvre, peut-être
06:22que je pourrais en faire quelque chose, probablement que je pourrais moi m'enrichir personnellement
06:25énormément ».
06:26D'après ce que je sais, c'est un personnage plutôt nationaliste, donc je pense qu'il
06:30avait aussi une vision un peu patriotique, tout ça mis bout à bout, il a dû vouloir
06:34je pense se rendre utile pour son pays et développer la région.
06:36Le général Liu et le Ming Chuan, leur idée dans les années 2000, a aussi un intérêt
06:45politique.
06:46Développer la région, ça permet en fait de garder les frontières intactes et de faire
06:51en sorte que les indépendantistes ouïghours ne prennent pas trop de poids.
06:54Tous les cadres de l'usine étaient des « chinois » qui venaient des zones côtières
06:59de la Chine.
07:00Donc ce n'était pas des ouïghours ou des gens du Xinjiang, pareil de la Mongolie intérieure
07:04ou du Gangzou.
07:05En règle générale, ce sont des chinois de l'ethnie majoritaire qui viennent de Pékin
07:08ou de Shanghai, donc de l'ethnie Han, et c'est une façon effectivement de développer
07:12et de contrôler ces régions.
07:13Vous savez que si sur place les gens ont du travail, ils vont être dans leur routine,
07:17dans leurs habitudes, dans leur vie de famille, et puis ils ne vont pas prendre le risque
07:21physique pour eux ou pour leur famille de demander l'indépendance ou la liberté de
07:26penser, de politique, etc.
07:28C'est une sorte de colonisation intérieure, oui, effectivement, de manière à changer
07:33les mentalités, à contrôler la région et à la pacifier sur la durée.
07:36Et c'est tout le rôle de l'industrie de la tomate.
07:41Ce qui est assez drôle, c'est qu'en Chine, de la tomate, on n'en cuisine quasiment
07:45pas.
07:46Mais le général sait que tout le monde en mange sur le reste de la planète.
07:48Donc c'est assez facile de se dire qu'il y a de l'argent à faire et de convaincre
07:52ses collègues de ne pas faire les choses à moitié.
07:55Le Bingtuan a des filiales spécialisées dans tous les domaines.
07:59Et ils vont en prendre une qui n'a rien à voir avec la tomate, la société Shalkis.
08:03A la base, Shalkis est déjà cotée en bourse.
08:06C'est une société spécialisée dans l'immobilier.
08:08En quelques années, le général va en faire le nouveau numéro 2 mondial de la tomate
08:12transformée.
08:13Et dans le même temps, le nouveau fournisseur de tous les groupes agroalimentaires européens
08:17est donc de Christophe Brusset.
08:24En fait, si vous voulez, la stratégie de Shalkis, c'est exactement la stratégie
08:30de n'importe quelle entreprise chinoise.
08:32Vous avez des conglomérats chinois qui font énormément de produits.
08:35Moi, par exemple, j'ai importé du thé vert d'une entreprise qui faisait aussi du textile,
08:38qui faisait aussi des pièces automobiles, qui faisait des moteurs d'avion, qui faisait...
08:41En fait, ces conglomérats vont dans n'importe quelle industrie qui, pour eux, est profitable.
08:46Donc, ils ont des tas de branches qui n'ont rien à voir entre elles.
08:49Ça peut être de la chimie, de la peinture, de l'alimentaire, etc.
08:52Et en fait, dans ces années-là, c'est peut-être un petit peu moins vrai aujourd'hui, mais
08:55dans ces années-là, pour s'imposer sur les marchés, la Chine arrivait avec des prix
08:59cassés.
09:00Par exemple, entre les zones de production et les ports, vous avez entre 3 000 et 4 000
09:05kilomètres.
09:06Et cette distance-là, ce transport par train était financé par l'État chinois.
09:10Donc, en fait, si vous voulez, les conglomérats chinois, Covco, Shalkis, etc., payaient très
09:14peu la main-d'œuvre, ne payaient pas le transport, ce qui fait qu'en fait, le coût du produit
09:19était extrêmement faible.
09:20Et ça leur permettait effectivement, sur les marchés, d'être moins cher que tout le monde.
09:25Donc, ils nous ont fait des offres qui étaient, à l'époque, je payais, de mémoire, l'équivalent
09:29de 600 euros la tonne peut-être.
09:31Les Chinois sont arrivés à 400, donc c'était impossible de ne pas leur acheter puisque
09:35j'aurais été, par rapport à mes concurrents, complètement déconnant en prix.
09:38Et une fois transformé dans un pot européen, on n'a pas besoin d'expliquer que cette tomate
09:42n'a pas poussé en Amérique du Sud ou au bord de la Méditerranée.
09:45Pour l'anecdote, c'est comme ça que ce business va amener notre général en France
09:50quelques mois plus tard.
09:51En Provence même, dans le village de Camaray, entre Avignon et Montélimar.
09:55Parce que depuis quelques mois, une entreprise très connue dans le Sud, le Cabanon de Provence,
10:00est devenue chinoise.
10:01Et c'est l'occasion idéale pour le général de produire la sauce tomate provençale, mais
10:07en mettant dedans ses tomates chinoises.
10:12C'est ça l'idée.
10:14Bon, je vous spoil un peu, cette tentative sera un échec.
10:17En 2014, le Cabanon est revendu à des Portugais qui, depuis, remettent de la tomate européenne
10:24dans leur pot de sauce.
10:25Alors oui, européenne, c'est vague, mais bon, c'est déjà ça.
10:29Revenons au général.
10:35Je rappelle le plan.
10:361.
10:37Faire pousser de la tomate en Chine.
10:392.
10:40La transformer ailleurs.
10:41Et justement, peu de temps après avoir commencé à faire pousser de la tomate au Xinjiang,
10:47le Bingtuan, l'organisme militaire chinois du général, voit débarquer chez lui un certain
10:52Armando Gandolfi.
10:53Le Marco Polo de la tomate.
10:56C'est même comme ça que la télé italienne l'appelle.
11:02C'est un négociant en tomates de père en fils depuis trois générations.
11:05C'est le plus gros trader de concentrés de tomates au monde.
11:12Et avec des producteurs napolitains, ils vont penser à un système où tout le monde est
11:16gagnant.
11:17L'idée des Italiens, c'est d'équiper les Chinois et la région de Xinjiang de
11:22ces premières usines pour transformer les tomates.
11:25Ce qui ne surprend pas Christophe Brucet, c'est que tout ça est bien évidemment livré
11:29gratuitement.
11:41C'est assez facile dans le principe, mais pour en faire beaucoup et de qualité, il
11:46faut des équipements très performants et l'industrie italienne est la meilleure au
11:50monde aujourd'hui.
11:51Vous avez des marques comme Rossi, Catelli, si vous voulez, c'est la Ferrari, des évaporateurs
11:56pour faire de la tomate.
11:57Donc, il faut faire du jus de tomate et ensuite, il faut évaporer l'eau.
11:59C'est comme ça qu'on fait du concentré et les Italiens ont le meilleur matériel
12:02au monde.
12:03Donc, c'est du matériel tout inox, c'est de très, très grosses installations parce
12:06qu'on ne parle pas de faire quelques kilos, mais une usine de concentré va faire plusieurs
12:10milliers de tonnes de concentré dans l'année.
12:12Donc, il fallait que quelqu'un leur apprenne et ça a été les Italiens.
12:15Le deal est simple.
12:20En gros, les industriels italiens se chargent de la plantation des tomates, de la construction
12:24des usines et de la formation de la main d'œuvre en Chine.
12:27Et de leur côté, les Chinois remboursent leur dette en expédiant vers l'Italie
12:31des conteneurs remplis de triples concentrés de tomates.
12:34Parce que c'est comme en cuisine, du triple concentré sur un bateau, c'est trois fois
12:39moins de poids sur la balance et qui dit trois fois moins de poids sur la balance dit
12:43des coûts de transport inférieurs.
12:44Une fois qu'ils ont passé quelques semaines en mer, les conteneurs de purée débarquent
12:50à Salerno, dans le sud de l'Italie.
12:52Là, les industriels du coin récupèrent la marchandise et l'emmènent vers leurs
12:55usines pour un petit tour de passe-passe.
12:57Pour faire simple, ils retransforment le concentré made in China, ils y ajoutent un peu d'eau
13:03et un peu de sel et il ne reste plus qu'à emballer, aux couleurs de l'Italie par exemple.
13:07Et c'est ça qu'on retrouve dans nos supermarchés.
13:13Pour Christophe, c'est un système qui est toujours un peu limite.
13:16Ce n'est pas pour rien qu'il a écrit un livre qui s'appelle
13:18« Vous êtes fous d'avaler ça ! »
13:20Mais en fait, c'est un système qui est complètement légal.
13:22Ce que moi j'ai vu au début, c'est qu'on savait qu'il y avait beaucoup de concentrés
13:26de tomates chinois qui arrivaient en Italie, mais on n'en voyait jamais ressortir.
13:29Donc, il était assez clair pour tous les professionnels que les Italiens recevaient
13:33du concentré chinois et qu'ils le reconditionnaient en Italie et le réexportaient comme du concentré italien.
13:38Donc ça, c'était quelque chose d'assez évident.
13:40Si dans le pays, vous n'avez pas indiqué l'origine du produit,
13:44ce n'est pas illégal d'avoir une marque commerciale qui s'appelle, je ne sais pas moi, Bella Italia par exemple.
13:50Mais on vous dit juste que c'est une marque commerciale, ce n'est pas une indication d'origine.
13:54La législation sur les produits transformés est assez compliquée.
13:58C'est vraiment tout récemment que les professionnels ont l'obligation d'indiquer l'origine des viandes.
14:03Par exemple, dans les plats préparés ou dans les cantines ou restaurants.
14:07Mais sur la tomate et la sauce tomate, non, aujourd'hui,
14:10il n'y a pas d'obligation sur une pizza, par exemple, de vous dire d'où vient la tomate.
14:16En fait, si vous voulez, les industriels n'ont pas forcément intérêt à être très transparents par rapport à ça.
14:21Moi, en tant qu'acheteur, j'ai toujours acheté en Chine pour des raisons de prix.
14:26La qualité, en général, est meilleure en Europe, les produits sont meilleurs, les goûts sont meilleurs,
14:30les entreprises sont souvent plus sérieuses, enfin...
14:34J'aurais tous les avantages du monde à acheter local.
14:37Sauf le prix.
14:40On a eu la même chose pour le miel, par exemple.
14:41C'est-à-dire qu'on sait que la plus grosse origine de miel aujourd'hui vendue en supermarché, c'est l'origine chine.
14:46Par contre, sur aucun pot, vous ne verrez miel de Chine.
14:49Parce que ce n'est pas vendeur, parce qu'on sait que la grosse majorité du miel de Chine, c'est du miel froidé.
14:54On sait que c'est bourré de sucre, on sait que c'est trafiqué, enfin...
14:57Donc, en fait, ce n'est pas du tout une origine valorisante.
15:00C'est pour ça qu'on trouve sur les produits origines UE et non UE.
15:05Le truc, c'est que le système du général lieu, il ne s'arrête pas aux frontières de l'Europe.
15:10Quelques années après l'Italie et les conteneurs, après le cabanon de Provence et les cigales,
15:17on se retrouve très loin du soleil méridional.
15:20Après avoir perdu son cabanon du sud de la France, le général a décidé de décoller pour l'Afrique
15:25et de s'arrêter au Ghana.
15:27Toujours en uniforme, mais toujours businessman.
15:30Et le marché africain, ça l'intéresse beaucoup.
15:35Sur le continent, Christophe Brussier raconte que le concentré de tomates, ça se vend très bien.
15:40C'est même l'endroit où on consomme le plus dans le monde par habitant.
15:44Et en Afrique, le général n'a pas besoin des Italiens longtemps pour ramener ses conteneurs.
15:51Le marché africain était tenu à l'origine par les Italiens.
15:55Quand les Italiens ont commencé à acheter du produit chinois moins cher,
15:58bien entendu, ce produit se retrouvait à être écoulé en Afrique.
16:02Donc ça, ça a été la première étape.
16:03Ce sont les Italiens qui ont écoulé le produit chinois en Afrique.
16:06Ensuite, les Chinois se sont dit, finalement, on pourrait le faire nous directement.
16:10Et à ce moment-là, les Chinois ont commencé à proposer leurs propres produits,
16:14conditionnés directement en Chine et livrés en Afrique.
16:18Un des principaux problèmes avec l'Afrique, c'est le pouvoir d'achat.
16:21C'est-à-dire qu'on sait très bien que l'Afrique est un continent pauvre.
16:26Et en règle générale, malheureusement pour les gens en situation précaire,
16:29c'est que c'est très difficile de vous offrir des produits de qualité.
16:33Et qu'il y a souvent des produits fraudés qui vont en Afrique.
16:37Donc pour la tomate, oui, on sait très bien qu'il y a eu beaucoup d'ajouts de produits
16:40qui n'étaient pas de la tomate.
16:41On sait qu'il y a eu beaucoup d'ajouts d'amidon,
16:43qu'il y a eu beaucoup de dilutions de produits, de manière à en faire baisser le coût.
16:51Il commence à virer un peu amer ce constrait de tomate, non ?
16:55Et je rappelle que le Bingtuan chinois du général Liu a créé le numéro 2 du secteur,
16:59Shalkis.
17:00Et que la plupart des géants de l'agroalimentaire,
17:02comme Heinz, Unilever, McCormick ou encore Nesté,
17:07ne se privent pas pour se fournir en Chine.
17:10Vous connaissez Heinz ?
17:12Heinz ?
17:13Oui, c'est notre plus grand client.
17:16On fournit notre matière première à Heinz,
17:19et Heinz l'utilise pour produire la peau quatre coins du monde.
17:23Je sais, ça fait bizarre.
17:25Le ketchup, symbole de l'Amérique, et donc lui aussi chinois.
17:29Et avec le plan du général Liu, le triple concentré, les conteneurs, le bateau,
17:33la transformation en Europe,
17:35tout ça, ça rend impossible le traçage de toutes ces sauces.
17:39Bref, avec Christophe Rousset, on a eu beau chercher,
17:41impossible de trouver une liste détaillée de tous les produits qui font pareil.
17:46En fait, si vous voulez, le triple concentré, c'est le produit de base de tomate de l'industrie.
17:51On en trouve dans les pizzas, surtout les premiers prix,
17:54et on en trouve dans tous les produits à base de tomate,
17:56et surtout les produits les moins qualitatifs.
17:59Parce que pour faire du concentré de tomate, on doit évaporer l'eau,
18:02et cette opération d'évaporation d'eau dénature le produit.
18:05Même si on le fait dans ce qu'on appelle les évaporateurs à triple effet,
18:08c'est-à-dire qu'on fait le vide, et sous vide, on évapore l'eau,
18:12et on le fait trois fois, de manière à ce qu'à chaque fois, on concentre davantage,
18:16malgré tout, le produit est dénaturé.
18:18Donc, à la fin, le triple concentré a un goût assez caractéristique de tomate cuite,
18:23et quelques fois de tomate brûlée si c'est mal fait.
18:2520 ans après avoir mis son plan tomate à exécution,
18:28la Chine produit aujourd'hui 60 millions de tonnes.
18:31En gros, la moitié de la production mondiale.
18:33Et cette marchandise, chaque année, il faut continuer à l'écouler,
18:37et pour ça, il faut trouver de nouveaux marchés.
18:39Et là, le général n'a pas fini de nous surprendre.
18:44Il pense déjà à un nouveau marché gigantesque.
18:47Un grand pays où on n'a pas encore l'habitude de manger de la tomate,
18:50et où on n'a pas encore l'habitude de manger de l'eau.
18:52Un grand pays où on n'a pas encore l'habitude de manger de la tomate,
18:55il suffit juste de créer des recettes pour que ce soit le cas.
18:59Et dans quelques années, le général a décidé,
19:02c'est en Chine qu'il veut vendre une partie de ses tomates.
19:09Manger, c'est 8000 milliards de dollars de chiffre d'affaires l'année dernière
19:12dans le monde entier.
19:14Ça mérite au moins de se demander à quel prix certaines tendances se font,
19:18ou se sont faites dans notre histoire.
19:23Je suis Alexia Duchesne, et je vous ai montré L'Envers de l'Assiette.
19:32L'Envers de l'Assiette est un podcast de Brut,
19:36produit par Paradiso Media et écrit par Florian Domergue.
19:39Retrouvez-nous sur toutes les plateformes d'écoute
19:41et découvrez nos autres podcasts originaux,
19:44bruits et sonores.
19:45Et n'oubliez pas de vous abonner à notre chaîne pour ne pas rater les prochaines vidéos.
19:49A bientôt pour un nouvel épisode.
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations