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  • il y a 7 mois
Le 30ᵉ rapport d’ArtPrice sur l’analyse du marché de l’art en 2024 met en lumière une baisse de plus de 33 % des ventes aux enchères. Ce ralentissement s’explique principalement par la diminution des ventes d’œuvres haut de gamme, traditionnellement moteur du marché. Il résulte à la fois des incertitudes économiques et géopolitiques, ainsi que d’une offre moins abondante. Les places de marché traditionnelles, comme les États-Unis et la Chine, n'ont pas retrouvé leur dynamisme habituel, tandis que de nouveaux pôles émergent, notamment au Moyen-Orient. Assiste-t-on aux prémices d’une redéfinition géographique du marché de l’art ?

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Transcription
00:00Le 30e rapport annuel d'ArtPrice analyse les dynamiques du marché de l'art 2024 et nous allons dresser les principales conclusions avec Céline Moine qui est directrice de redaction d'artprice.com.
00:15Merci beaucoup d'être avec nous.
00:16Merci, bonjour.
00:17Alors, on l'a vu, est-ce que vous pouvez tout d'abord nous dire quelle est la tendance générale que décèle ce rapport si vraiment on regarde la grande image du marché de l'art ?
00:28La big picture.
00:29Effectivement, on constate tout d'abord qu'il y a, de la même manière que l'année dernière, une tendance qui se confirme avec un chiffre d'affaires qui est en baisse et qui est fortement en baisse sur l'année 2024 puisqu'on perd 5 milliards, c'est-à-dire plus de 33% de chiffre d'affaires en un an.
00:51Ce qui est beaucoup étant donné qu'on avait déjà un marché qui était à la peine en 2023 avec une perte de 7 milliards, qu'il faut remettre ça un petit peu dans le contexte aussi de cette année 2022 avec un effet rebond post-Covid et avec des collections qui étaient majeures qui sont arrivées sur le marché, notamment la collection de Paul Allen, etc.
01:12Et là effectivement le contexte était beaucoup plus bloquant en général et de fait on a eu une contraction, une raréfaction des oeuvres de prestige qui tirent vraiment les chiffres vers le haut.
01:23Ça explique en très grande partie en fait cette baisse de résultat de chiffre d'affaires global.
01:30Oui parce que c'est vraiment les oeuvres millionnaires ou les plus grosses oeuvres qui permettent à ce marché d'avoir les plus grands chiffres.
01:37Oui c'est ça. Ce qu'on a constaté, déjà il y a beaucoup moins d'oeuvres millionnaires mais si on regarde par palier de prix, les oeuvres qui se vendent plus de 100 000 dollars au cours de l'année 2024, elles ont baissé de 17%.
01:51Mais celles qui vont se vendre à 500 000 dollars, donc le palier est vraiment supérieur, ont baissé elles d'un quart.
01:57Donc plus on augmente dans les niveaux de prix et plus on a une contraction finalement du marché global.
02:03Mais à l'inverse, est-ce que plus d'oeuvres d'art à des prix beaucoup plus accessibles ?
02:10Oui ça c'est vrai que c'est un contraste qu'on avait déjà constaté au cours de l'année 2023 et on a cette mise en sommeil en quelque sorte du marché de prestige en ce moment.
02:23La difficulté de trouver des oeuvres et puis moins d'investissement aussi visiblement notamment l'année dernière du côté de la Chine, des acheteurs chinois entre autres.
02:32Et par contre, on arrive à un nouveau record quant au nombre de transactions d'oeuvres d'art vendues aux enchères.
02:40Et l'année dernière sur ce même plateau, j'avais déjà indiqué que c'était un record d'oeuvres d'art.
02:46Il s'est vendu 804 000 oeuvres d'art aux enchères, ce qui est un record absolu dans l'histoire du marché de l'art.
02:56Et effectivement ce qui va animer ce chiffre là, ce sont les oeuvres les plus accessibles et les plus abordables.
03:05Alors si vous voulez je peux donner quelques chiffres pour qu'on se repère.
03:09La part des oeuvres vendues à moins de 10 000 dollars aux enchères représente 90% du marché.
03:19Et si on regarde une petite tranche de prix qui est celle des oeuvres à quelques centaines de dollars, à 600 moins de 600 dollars,
03:25c'est près de la moitié des oeuvres qui ont été vendues au cours de l'année dans le monde en 2024.
03:30C'est-à-dire que 400 000 oeuvres quasiment vont se vendre sous un seuil de prix qui est finalement minime.
03:38Et dans ce seuil de prix là, effectivement il y a beaucoup d'oeuvres multiples, beaucoup d'estampes, etc.
03:43Mais aussi des oeuvres qui peuvent être des oeuvres uniques et originales avec notamment des peintures qui sur la gamme de prix très abordables à moins de 1000 euros
03:55ont progressé d'une manière complètement phénoménale sur la décennie.
04:00Elles ont triplé en l'espace de 10 ans.
04:02Donc il y a vraiment un marché qui est de plus en plus alimenté par des oeuvres très abordables d'où qu'elles viennent,
04:08qui viennent de partout dans le monde et quelles que soient les catégories de création.
04:12Oui, je disais le littoral de Thierry Herrmann qui signe aussi ce rapport.
04:17Il dit qu'on passe d'un marché acheteur à un marché vendeur.
04:21Donc ça veut dire que la demande est toujours là finalement.
04:26C'est juste que c'est les prix qui ne sont pas forcément alignés.
04:29La demande est très forte.
04:31Les prix, tout dépend des gammes de prix.
04:33Ils n'ont pas toujours été très alignés sur des gammes de prix très supérieures.
04:39Mais en général, le marché s'est bien tenu.
04:42Ce qui a vraiment manqué, ce sont ces oeuvres très valorisées, très prestigieuses.
04:49Par contre, le marché est de plus en plus alimenté par des oeuvres abordables.
04:57C'est vrai que c'est quelque chose qui marche notamment très bien avec la digitalisation des ventes
05:04qui a été croissante notamment après la crise sanitaire.
05:10L'adjustement avec le Covid, etc.
05:12C'est quelque chose qui a transformé vraiment le marché sur sa base
05:17et qui a permis de le nourrir en oeuvres abordables.
05:20Ce qui continue dans cette voie des heureux millionnaires qui sont moins présentes,
05:28c'est aussi ces places fortes dont on parle souvent,
05:33qui sont New York et la Chine, qui sont beaucoup moins dynamiques qu'avant.
05:38Du coup, ça a forcément un impact sur le marché.
05:40Oui, effectivement, les places de marché les plus qualifiées sur le marché très haut de gamme
05:45sont celles qui ont le plus souffert en termes de chiffre d'affaires.
05:49La Chine perd plus de 60% de résultats en 2024.
05:54Les Etats-Unis, mais aussi la France et l'Allemagne.
05:59Effectivement, parce que c'est Hong Kong, New York qui sont les places de marché les plus prestigieuses
06:06et là, le marché s'est ralenti.
06:08Par contre, tout ne perd pas en dynamique
06:13et on se rend compte que des places de marché qui misent moins sur les oeuvres de prestige
06:18ont maintenu un très bon flux d'activités, voire ont progressé.
06:23C'est quelque chose qu'on peut constater, notamment sur plusieurs places de marché européennes.
06:28En Portugal, aux Pays-Bas, en Pologne, en Autriche.
06:33L'Autriche fait un très bon résultat en 2024.
06:36Et puis en Suisse, avec une performance assez incroyable.
06:39Un chiffre d'affaires qui a progressé de 80% sur le marché de l'art suisse.
06:43Comment est-ce que ça s'explique ?
06:45Est-ce que c'est parce qu'il y a eu moins d'oeuvres phares sur ces places de marché
06:50aux Etats-Unis, Chine, où c'est vraiment une contraction du marché intérieur
06:55avec tout ce dont on parle très régulièrement dans l'actualité, l'économie, la géopolitique
07:00qui pour le coup ne soutiennent pas les acheteurs et ne leur permettent pas d'acheter ?
07:08Alors ces places de marché-là, elles ne reposent pas sur des oeuvres
07:13qui vont être valorisées à plus de 10 millions de dollars.
07:16Contrairement aux places de marché de Hong Kong, de Londres ou de New York.
07:21Et c'est ce segment-là qui s'est fortement contracté avec un manque d'oeuvres général
07:26au cours des années 2023 et 2024.
07:28Par ailleurs, lorsque de très belles oeuvres se présentent sur le marché, ça marche.
07:34Parce que la rareté, il y a un vrai appétit de la part des collectionneurs
07:38pour des oeuvres de qualité.
07:40En l'occurrence, sur le marché de l'art suisse, il y a une très belle collection d'art
07:44qui s'est vendue, qui était celle de Monsieur Kahnfeld,
07:47qui était un grand galeriste, marchand, éditeur, commissaire priseur,
07:51avec des oeuvres qui sont arrivées sur le marché helvétique,
07:54importantes, notamment de Giacometti.
07:57Plusieurs oeuvres de Giacometti et sculptures se sont vendues entre 5 et 8 millions de dollars.
08:01Donc on voit bien qu'on est sur du marché de prestige
08:04et qui marche bien avec des oeuvres fortes, d'une belle provenance, etc.
08:09Et de même sur le marché français, finalement,
08:11parce qu'on a eu cette très belle vente de l'oeuvre de Jean-Simon Chardin.
08:16Le melon entamé qui s'est vendu au seuil des 29 millions de dollars,
08:21alors que l'estimation la donnait à 13 millions.
08:24Donc lorsque des oeuvres vraiment exceptionnelles arrivent sur le marché,
08:28les acheteurs sont présents et sont prêts à les soutenir.
08:32Mais on voit quand même que les maisons de vente nous enchèrent,
08:36et même il y a beaucoup d'expositions, etc.
08:39qui tentent à explorer ces nouveaux pôles.
08:43Et même des artistes aussi, dont on ne parlait pas trop,
08:47des artistes indiens, des artistes vietnamiens, etc.
08:50Donc on sent qu'il y a une attirance, un regard nouveau sur certaines zones,
08:56certaines places, certains artistes d'autres nationalités.
08:59Moins de polarisation entre Etats-Unis et Chine comme avant.
09:03Oui, c'est vrai. C'est quelque chose que l'on remarque.
09:06Et c'est même intéressant de constater que,
09:09parallèlement à ce déploiement digital du marché de l'art,
09:13qui va très vite et très fort depuis quelques années,
09:16il y a également une expansion géographique.
09:19Du côté de l'Asie, depuis une vingtaine d'années,
09:24très fortement à Hong Kong, notamment,
09:27avec des investissements très forts des grands acteurs internationaux,
09:31Christie, Sotheby's, qui ont inauguré de superbes nouveaux locaux
09:35en 2024, Philips, Bonan, qui aussi ont renforcé leurs structures sur place.
09:42Et on a le marché de la Corée du Sud, qui est intéressant.
09:47Beaucoup de places de marché en Asie.
09:50Et là, il se passe des choses aussi du côté de l'Arabie Saoudite, notamment.
09:55Alors le Qatar, les Émirats Arabes Unis et l'Arabie Saoudite
09:59sont actifs sur le marché international depuis très longtemps.
10:02Ça fait partie du développement de leur soft power.
10:05Il y a vraiment des investissements stratégiques très importants
10:09depuis des années dans l'industrie culturelle et dans les acquisitions d'oeuvres majeures.
10:14Là, ce qui s'est passé en 2024, c'est qu'effectivement,
10:17Christie's et Sotheby's ont obtenu des licences commerciales
10:20pour pouvoir opérer des ventes aux enchères sur place
10:23et que Sotheby's a réalisé sa première vente aux enchères en février dernier,
10:27en février 2025, avec des résultats qui sont très prometteurs.
10:32Oui, très encourageants.
10:34Et pour terminer cette interview, est-ce qu'on peut faire un petit point sur la France ?
10:38Est-ce qu'on suit ces mêmes dynamiques ?
10:42Est-ce qu'il y a une régression aussi ? Comment est-ce qu'on se porte ?
10:45Alors le chiffre d'affaires est redescendu de 17% tout de même sur l'année 2024 en France.
10:53Par contre, ce que je trouve vraiment intéressant de constater,
10:56c'est de voir l'évolution du marché français sur les dix dernières années.
11:00Sur dix ans, il progresse de presque 50%. On n'est pas loin des 50%.
11:05Et il est la deuxième place de marché, enfin Paris,
11:09qui représente vraiment le cœur du marché français, 88%.
11:12Paris, devant cette année Pékin et Shanghai.
11:15C'est-à-dire que dans un contexte difficile, la place du marché parisien affirme vraiment sa place
11:22sur l'échiquier mondial.
11:24La deuxième chose, c'est le dynamisme des achats qui sont réalisés en France.
11:30Puisque le nombre d'oeuvres vendues a doublé en dix ans.
11:35Et qu'aujourd'hui la France est juste derrière les Etats-Unis
11:38en termes de nombre de transactions pour ce qui est de la vente d'oeuvres d'art aux enchères.
11:43Donc un marché français encore très dynamique.
11:45Merci beaucoup Céline Moine. Je rappelle que vous êtes directrice de rédaction d'Artprice.
11:50Merci de nous avoir présenté ce 30e rapport annuel d'Artprice,
11:53analyse du marché de l'art 2024.
11:55Et merci à vous toutes et tous de nous avoir suivis.
11:57C'était Arrémarché.
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