• il y a 4 mois
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Jeudi 13 juin 2024 : le rappeur, comédien et membre du groupe Ministère A.M.E.R, Passi. À l’occasion des 30 ans de leur second album, "95200", il démarre une tournée début octobre avec un passage par La Cigale, le 11.

Category

🎵
Musique
Transcription
00:00Bonjour Bassi. Bonjour. Donc bonjour, le ministère inverse, j'ai bien tout compris.
00:03Rebonjour plutôt, vous avez enfin décidé de revenir.
00:06Alors, il y a déjà eu un premier retour, là, c'est un deuxième retour.
00:09On est quand même 32 ans après la sortie du premier album,
00:1130 ans après la sortie du deuxième album, donc 92-500.
00:1795-200. 95-200, pardon, j'ai tout inversé.
00:21C'est parce que c'est le code postal de Sarcelles, évidemment.
00:24Effectivement, le groupe, il est né à Garges-Sarcelles, dans le Val d'Oise.
00:28C'est quelque chose de très important pour vous, parce que c'est là que vous avez grandi.
00:31C'est là que vous êtes né en tant qu'artiste.
00:33On va préciser quand même qu'au fil du temps, vous avez toujours été une voix
00:37et que vous êtes devenu effectivement les témoins de ce qui se passait dans les cités,
00:41dans des quartiers difficiles, dits difficiles,
00:44et que vous avez réussi à vous exprimer à la place des autres.
00:47Moi, je voulais savoir ce qui vous avait donné envie, là, de revenir.
00:49Alors évidemment, il y a une date anniversaire, mais encore.
00:52Je pense qu'on fait beaucoup encore de shows à droite, à gauche, Stomé de son côté, de mon côté.
00:58La dernière date qu'on avait faite, c'était pour l'anniversaire de cet album, justement,
01:03en 9-5-200, on avait fait un Olympia, date unique.
01:05Donc, on nous a toujours demandé de tourner.
01:07Et on est tombé sur des bons tourneurs qui nous ont donné envie de reprendre la route, en fait.
01:12Parce qu'on n'a jamais vraiment fait de tournée ministère à mer.
01:15Et là, ça nous fait plaisir de repartir sur la route, de repartir.
01:18On est dans un côté où on a peut-être besoin de beaucoup de legacy,
01:22comme on dit, beaucoup d'héritage, de raconter aux nouvelles générations.
01:26Et je pense que cette tournée va permettre aussi de faire découvrir le rap français, la base du rap français.
01:32Le point de départ, Passy, c'est une association, déjà.
01:35C'est l'association à mer.
01:36Alors, il y a plein de traductions, Action Musique Rap,
01:39Agent du ministère, Eléquant, Eradical, Association des malfaiteurs en fond de rap.
01:44Oui, après, ça fait partie du rap.
01:45On prend des démos, on les détourne, on les détourne, on les sample.
01:49L'idée, c'était d'aller vous confronter à cette sphère politique qui posait problème à ce moment-là.
01:54Pas forcément. L'idée, c'était surtout de témoigner, de poser des questions.
01:58Ministère à mer, c'est mon premier groupe.
01:59C'est un cri, en fait.
02:02On a 15 ans, on regarde le monde, on a un avenir incertain.
02:07On regarde la situation de l'Afrique, la situation des quartiers,
02:10on regarde l'égalité, on regarde les problèmes sociaux.
02:12Et on se dit non, on va quand même, au lieu d'écrire sur des bêtises ou sur juste de l'amour,
02:18on va parler de ce qui se passe en bas de chez nous.
02:20On va poser des questions un petit peu à la société, aux gens qui nous entourent.
02:25Donc Ministère à mer, c'est ça à la base.
02:26C'est un cri de jeunes qui se demandent où est leur place dans le monde.
02:31Il y avait le tag, donc le dessin dans les rues.
02:34Vous avez commencé aussi comme ça.
02:36Et pareil pour Stomy, c'est comme ça qu'il a obtenu d'ailleurs son nom de scène.
02:39Oui, Stomy Bee.
02:40Voilà. Et il y avait cette émission de télé qui était incontournable avec Sidney, H-I-P-H-O-P.
02:47Sidney, je l'ai croisé à un dernier concert.
02:50C'était il y a à peu près un mois ou deux et il était tout content.
02:54Il était là, on était en loge avec lui, etc.
02:57Et il est super content de ce qui s'est passé pour le hip-hop.
03:01Je pense que oui, maintenant, on recommence un peu plus à le citer,
03:04mais il fait partie de ces joyeux qu'on ne montre pas assez, de ces joyeux.
03:08Il a quand même réussi à emmener une culture.
03:10Il nous expliquait tous les dimanches.
03:11En plus, c'était sur une grande chaîne télé.
03:13C'était sur la première chaîne télé en France.
03:15Jusqu'à aujourd'hui, plusieurs millions d'albums vendus.
03:18Et tout le monde y était.
03:19On n'a pas une émission comme ça encore sur les grandes chaînes.
03:22Donc un petit pic, ce n'est pas normal.
03:25On a eu du mal à voir les flammes et ainsi de suite.
03:28Mais Sidney, quand on le croise, on doit lui remettre un peu ses lettres de noblesse.
03:33Il a réussi à emmener une culture de dingue.
03:35Je voudrais qu'on parle du titre qui a été interdit par...
03:38Que Pasqua, Charles Pasqua, ministre de l'Intérieur,
03:41à ce moment-là, avait tenté de faire interdire.
03:46Elle représente quoi cette chanson alors, Brigitte, femme de flic, dans ce parcours ?
03:49Brigitte, femme de flic, c'est une ironie.
03:51C'est une histoire de tromperie à la base.
03:54C'est la femme d'un flic qui vit sa double vie.
03:59Et nous, on raconte ça justement pour piquer, pour embêter un petit peu.
04:02Que le ministère à maire s'est vu d'un petit canard aussi.
04:05Oui, c'est vrai qu'on a bien titillé, embêté.
04:07Totalement assumé.
04:08Oui, non, mais c'est assumé parce qu'il y a des choses sur lesquelles
04:10on n'était pas d'accord aussi politiquement parlant.
04:12Il y avait des choses qu'on voyait.
04:14Aujourd'hui, on ne peut pas dire qu'au niveau du racisme,
04:17au niveau de ces histoires d'immigration, etc.,
04:20ça soit très clair et très juste pour l'immigré qui veut s'insérer
04:26ou qui veut montrer pas de blanche ou qui veut avancer.
04:29Est-ce qu'aujourd'hui, vous avez l'impression que ça a changé,
04:31justement, dans les cités, dans les quartiers difficiles ?
04:36Moi, ce que je critique, je trouve qu'on ne met pas assez le doigt sur l'éducation.
04:43L'éducation dans les quartiers difficiles, on y perd en France à cause de ça.
04:46L'éducation, le vivre ensemble.
04:49Je pense qu'on devrait pousser les professeurs,
04:53déjà avoir de meilleures formations,
04:55pousser les meilleurs professeurs à aller dans les quartiers difficiles,
04:59quitte à leur donner des primes.
05:00L'éducation, c'est super important et on y perd là vachement dans les quartiers.
05:03Je vois ce qui se passe.
05:05Ça devient de plus en plus difficile partout en France, dans les quartiers difficiles.
05:08Donc, je ne trouve pas ça normal.
05:10On devrait tous, ensemble, d'un commun accord, pousser,
05:14même le gouvernement, pousser les meilleurs professeurs
05:18à aller dans les quartiers les plus difficiles et les accompagner,
05:20leur donner des primes pour ça, etc.
05:22Moi, c'est mon point de vue.
05:24Sur la police aussi, la formation des policiers,
05:28elle devrait être un petit peu plus longue, plus assidue, un petit peu plus profonde.
05:34Quand tu prends un policier du Sud, tu le balances dans le 93,
05:37il n'a pas des codes pour parler aux jeunes.
05:39Je ne sais pas, il y a un travail à faire sur le vivre ensemble.
05:41On ne peut pas vivre dans un monde anarchique sans police,
05:43même si on a critiqué la police, etc.
05:45C'est normal, on critique.
05:47Tu peux être d'accord ou pas d'accord avec certains agissements et certaines lois.
05:51Mais voilà, on ne travaille pas assez sur le vivre ensemble.
05:54La police de proximité, je trouve que ça a été une grave erreur de l'enlever.
05:59– Pour terminer, Pasi, qu'est-ce qui a le plus changé entre vos débuts,
06:02quand vous étiez du haut de vos 15 ans à créer cette association AMER
06:06et aujourd'hui, 35 ans plus tard ?
06:08– Moins d'innocence, parce que quand vous n'êtes plus connu,
06:11on vous attend plus au tournant.
06:12Tandis qu'à l'époque, on s'en fichait, on venait, on le faisait,
06:15on faisait ce qu'on sentait, on y allait comme ça.
06:17Mais voilà, plus vous êtes connu, plus vous avancez,
06:20plus on vous attend au tournant, plus vous cherchez.
06:22Et il y a l'âge aussi, on cherche à faire des choses un petit peu plus fortes.
06:27– Plus sages ou pas aujourd'hui ?
06:28– Plus sages, bien sûr, obligatoirement.
06:30Sinon, mes petits, mes neveux vont me dire,
06:32« Tonton, papa », bien sûr, obligatoirement plus sages.
06:35Mais en extérieur, mais à l'intérieur, il y a toujours le feu qui brûle,
06:40ce feu de création, ce feu pour dénoncer, chanter, parler,
06:44il y a toujours ce feu qui est là.

Recommandations