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  • 01/06/2024
Nous revenons sur le déferlement de la vague #Metoo dans le cinéma et le théâtre, ainsi que sur le féminisme en général avec Ariane Ascaride, invitée d'"Au Coeur de l'Info. Actrice engagée, membre du collectif 50/50 qui a pour but de promouvoir l'égalité femmes/hommes dans le cinéma, elle est actuellement à l'affiche d'"Une farouche liberté", au théâtre de la Scala à Paris. Une adaptation du livre d'entretiens entre la célèbre avocate et militante féministe Gisèle Halimi et la journaliste Annick Cojean.

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Transcription
00:00Place maintenant à l'invité d'Au Cœur de l'Info.
00:03Retour ce soir sur le déferlement de la vague MeToo dans le cinéma et le théâtre français.
00:08Et réflexion plus générale aussi sur le féminisme avec une actrice engagée,
00:12distinguée à plusieurs reprises pour ses rôles au cinéma comme au théâtre,
00:15César de la Meilleure Actrice en 1998,
00:18Meilleure Interprétation Féminine aussi en 2019 à la Mostra de Venise.
00:22Il s'agit d'Ariane Ascaride.
00:24Bonsoir Ariane Ascaride.
00:25Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation ce soir
00:28sur France 24.
00:30Je précise aussi Ariane Ascaride que vous faites partie du collectif 50-50
00:34qui a pour but de promouvoir l'égalité femmes-hommes dans le cinéma.
00:37Et vous êtes actuellement à l'affiche d'une farouche liberté
00:41au théâtre de la Scala à Paris.
00:43Adaptation du livre d'entretien entre la célèbre avocate et militante féministe
00:47Gisèle Halmy et la journaliste Annick Cogent
00:49et qui raconte ses dizaines d'années de combat
00:52au service de la justice et de la cause des femmes.
00:55On va y revenir en logueur bien évidemment.
00:57J'espérais vous essayer de tout dire.
00:59Voilà, c'est difficile de vous présenter en quelques mots.
01:03Et vous avez une actualité comme toujours chargée Ariane Ascaride.
01:06Vous avez en tout cas dernièrement marqué les esprits.
01:09On l'a vu à la dernière cérémonie des Césars.
01:11Aux côtés d'ailleurs de Bérénice Bégeau,
01:13vous avez pris la suite un peu du discours choc de Judith Gaudrech
01:17en disant il faudrait laisser résonner ses paroles de Judith Gaudrech.
01:21On se doit d'avancer toujours et se réfugier
01:23dans la beauté consolatoire des films.
01:25Voici donc votre courte intervention,
01:27mais qui a quand même marqué aussi aux Césars.
01:30Quel impact a eu chez vous cette prise de parole de Judith Gaudrech ?
01:34D'abord, je pense que c'est une grande...
01:36Ça a été un grand courage, je sais,
01:38puisque j'étais juste derrière dans le backstage,
01:40qu'elle était extrêmement tendue à l'idée de faire ça,
01:44que personne ne savait ce qu'elle allait dire.
01:46Absolument personne.
01:47Moi-même, je ne savais rien.
01:49Et vous savez, c'est quand même une salle un peu incroyable.
01:53La salle des Césars, c'est pas...
01:55Enfin, on est à la fête sans être à la fête.
01:57C'est un truc un peu compliqué.
01:59Mais je l'ai trouvé assez remarquable, quoi.
02:00Et vraiment, vraiment remarquable.
02:04Mais je pense que ce qui est en train de se passer
02:08est essentiel, fondamental.
02:11La seule chose que je ne veux pas,
02:12c'est que nous rentrions après dans de l'Inquisition,
02:15parce que l'Inquisition est une chose qui ne m'intéresse pas.
02:18Je dirais plus tout simplement
02:20que je suis plus proche de Gisèle Halimi,
02:23pour qui les hommes n'étaient pas des ennemis.
02:25C'est ça que je veux dire.
02:26Je crois que ce n'est pas comme ça qu'on va s'en sortir.
02:29Vous savez, alors je sais bien que...
02:30– Il faut en faire des alliés.
02:32– Toute révolution entraîne toujours un peu de la terreur.
02:35Ça a toujours été comme ça.
02:37Mais essayons de ne pas passer trop par là.
02:41Et essayons, et moi je fais vraiment un appel aux historiennes,
02:43aux psychanalystes, aux philosophes.
02:46Il faut travailler là-dessus.
02:47Il faut travailler sur ce qu'on est en train de vivre.
02:49Parce que si vous voulez, si on est tout le temps au niveau du ressenti,
02:52on ne va pas s'en sortir.
02:54Il faut vraiment avoir une pensée.
02:56Et c'est pour ça que j'aime beaucoup jouer ce spectacle sur Gisèle Halimi,
02:59parce qu'effectivement, elle a un discours.
03:02C'est son discours, on peut ou pas être d'accord,
03:05mais c'est un discours qui se tient.
03:06– On va revenir largement sur ce spectacle,
03:08mais tout d'abord sur ces multiples tribunes
03:12et ces prises d'opposition qui se multiplient,
03:13notamment depuis cette prise de parole de Judith Gaudrech.
03:17Est-ce que vous avez le sentiment que le monde du cinéma
03:19fait réellement corps aujourd'hui derrière elle ?
03:21Et d'ailleurs, ces révélations, est-ce qu'il y a quand même des réticences ?
03:25– Je pense qu'une grande partie du monde du cinéma fait corps avec elle,
03:30et particulièrement toutes les filles, les comédiennes, les techniciennes,
03:33enfin toutes les filles qui travaillent dans le cinéma.
03:35Et je pense qu'il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de garçons aussi qui font corps.
03:39– Il y a le mytho garçon aussi.
03:41– Oui, mais après, que voulez-vous ?
03:43On ne peut pas changer les gens en un simple claquement de doigts.
03:48Il faut que tout le monde, enfin ce que je sais,
03:52c'est que sur les plateaux de tournage, actuellement c'est assez carré,
03:57et que tout le monde se tient à carreau, voilà.
04:00Mais après le truc, comment voulez-vous qu'en 10 ans, 20 ans, même 30 ans,
04:06on arrive à transformer des siècles ?
04:09Tout ça est une histoire de pouvoir, c'est juste une histoire de pouvoir.
04:12– Le Festival de Cannes où vous êtes passée d'ailleurs la semaine dernière,
04:16qui s'est achevée donc le week-end dernier,
04:19on l'a vu, le mouvement MeToo et tout ce déferlement étaient omniprésents.
04:23Il y a beaucoup à faire.
04:25– Oui, il y a beaucoup à faire, parce qu'en même temps, si vous voulez,
04:26le mouvement MeToo est là, il est présent et c'est très bien,
04:29et j'espère qu'il va être toutes les années présent.
04:33Et en même temps, vous avez, comme il y a des mécènes au Festival de Cannes,
04:37il y a des marques, donc on fait monter des filles avec des robes incensées.
04:42– Des marques quoi ?
04:43– Des marques…
04:44– C'est pas féministe, c'est ça ?
04:45– Enfin, c'est-à-dire des trucs…
04:46– Il y a un 6 sur leur beauté.
04:47– C'est pas ça, Laurent, c'est à la recherche, si vous voulez.
04:48Et où, effectivement, on travaille sur la beauté des femmes,
04:51que certaines femmes, d'un certain âge, d'accord, et d'une certaine taille.
04:58Vous voyez ce que je veux dire ?
04:59C'est encore compliqué, ça.
05:00Et tout le monde dit, ah là là, qu'est-ce que c'est beau, ah là là.
05:03– Alors maintenant, il y a des femmes de couleur,
05:04et puis quand même avec certaines rondeurs aussi qui sont mises en valeur
05:07par certaines marques.
05:08Effectivement, ce n'est pas la majorité.
05:10– Ce n'est pas du tout la majorité.
05:11Donc, moi, je ne dis pas qu'il faut qu'il n'y arrive que des filles.
05:15Je voudrais juste que, d'abord, le Festival de Cannes reste un festival de cinéma,
05:19ça c'est la première chose, et qu'on ne s'esbaudisse pas simplement sur les tenues.
05:25Et là, j'avoue sincèrement que cette année, j'ai été un peu fatiguée par ça.
05:29– Vous avez une expérience de plus de 40 ans du monde du cinéma en France.
05:33Pourquoi ce silence jusqu'à présent ?
05:35Pourquoi est-ce que c'était si difficile pour les femmes victimes,
05:39vous en connaissez sans doute, de s'exprimer sur ces violences sexistes et sexuelles,
05:44et de parler aussi de ce phénomène d'emprise que l'on dit d'ailleurs
05:49particulièrement présent dans le cinéma d'auteurs en France ?
05:52– Ce n'est pas particulièrement dans le cinéma d'auteurs,
05:54c'est dans le cinéma tout court.
05:56Alors évidemment, si vous voulez, le problème, c'est que pendant très très très très longtemps,
06:01il faut savoir que quand un réalisateur travaille avec une actrice,
06:04il faut qu'il ait quand même, je suis désolée, je ne peux pas dire autrement,
06:07il faut qu'il ait du désir à la regarder tous les jours sur le plateau.
06:10Mais ça fait partie du travail.
06:13– Mais il faut savoir où est la limite.
06:14– Mais il faut savoir où est la limite, il ne faut pas mélanger son désir de créateur
06:18avec son désir d'homme et ne pas se servir de sa position de pouvoir,
06:22car un réalisateur sur un plateau, c'est Dieu.
06:25Tout le monde est à son service.
06:29Et donc, comme vous savez, c'est très difficile de travailler dans le cinéma,
06:33on s'écrase, même quand on voit des choses qu'on n'a pas tellement envie de voir
06:38et avec lesquelles on n'est pas en accord.
06:41Mais pendant des années, et puis pendant des années et des années et des années,
06:45il n'y a eu que des mecs comme réalisateurs.
06:48Et encore, je vous dis que le cinéma français est un cinéma très étonnant,
06:52parce que c'est là où il y a le plus de réalisatrices dans le monde entier.
06:56Et les choses, elles bougent doucement.
06:59Ça fait 20 ans que, enfin, Agnès Varda n'est pas toute seule,
07:02ça commence, ça bouge et là, maintenant, il y a vraiment un vrai mouvement qui se passe.
07:07Et je pense que les choses, en même temps, vous bougez comme ça.
07:10C'est bien parce qu'il y a des filles qui ont commencé à faire des films que tout ça se passe.
07:13Sinon, ça ne se passerait pas.
07:14Vous avez vous-même été victime d'une expérience, disons, pour le moins malheureuse.
07:18Quand vous étiez très jeune, je crois que vous aviez 20 ans,
07:21à l'issue d'un essai pour une pièce de théâtre.
07:25Donc, qu'est-ce qui s'est passé ?
07:27C'est un truc fou.
07:28Alors bon, moi, personne ne m'a touchée.
07:30J'ai passé une audition pour un très grand metteur en scène international.
07:35Et à la fin de mon audition, je veux travailler avec toi.
07:40C'est formidable, tu es vraiment génial et tout.
07:43Donc, j'étais très, très enthousiaste.
07:45Tu as eu une réponse très vite.
07:46J'ai attendu la réponse deux mois et au bout de deux mois, la réponse est venue.
07:50Je n'étais pas son fantasme sexuel.
07:52Voilà, c'est ça la réponse.
07:54Ça a été juste ça.
07:55Oui, voilà.
07:57Et qu'est-ce que vous faites avec ça ?
07:58Qu'est-ce que vous avez ressenti à l'époque ?
07:59C'était une humiliation absolument totale, mais totale.
08:03Et en plus, vous n'avez aucun pouvoir.
08:06Qu'est-ce que vous voulez faire ?
08:07Oui, j'ai écrit une lettre en disant, monsieur, je ne suis personne.
08:11Vous êtes connu dans le monde entier.
08:14Mais ça, vous n'avez pas le droit de le faire.
08:16Vous n'avez absolument pas le droit de le faire.
08:18Et si je n'avais pas été entourée comme j'étais entourée,
08:21ça peut vraiment vous envoyer dans une dépression absolument épouvantable.
08:25C'est fragile, un comédien et une comédienne.
08:27Ce sont des êtres fragiles et très forts.
08:30C'est ça le truc.
08:31Les temps sont visiblement en train de changer, en tout cas.
08:34J'espère.
08:35Est-ce que vous êtes surprise par l'ampleur de cette troisième vague du MeToo en France
08:38qui concerne désormais non seulement le cinéma, le théâtre,
08:41mais aussi, il y a le MeToo hôpital, le MeToo armé.
08:44Je suis contente.
08:45L'ampleur, en tout cas, de ces révélations.
08:47Mais l'ampleur, enfin, vous savez, ça devient complètement fou
08:50parce que même si vous regardez sur des classes à l'école,
08:57souvent, il y a trois enfants qui ont subi des agressions sexuelles sur une classe.
09:02Voire plus.
09:03Et voire plus, d'accord.
09:04Donc, vous imaginez bien que l'ampleur, elle est juste à son début.
09:08Ça va être quand vous commencez à dire bah oui, moi, il m'est arrivé un truc.
09:12Automatiquement, il y a quelqu'un qui dit ah oui, toi aussi.
09:15Donc, si vous voulez, c'est comme la parole est en train de se libérer.
09:18Les gens vont avoir l'impression d'un tsunami,
09:19mais ce tsunami, c'est juste le résultat de pratiques
09:23qui ont existé depuis des centaines d'années.
09:27Alors, on va continuer à parler des femmes avec une militante féministe
09:31qu'on aurait eu le plaisir d'écouter aujourd'hui.
09:33C'est Gisèle Halimi que vous incarnez donc en ce moment au théâtre.
09:36Par ailleurs, célèbre avocate et femme politique franco-tunisienne.
09:39La pièce dans laquelle vous jouez parle justement de ces combats,
09:42notamment pour le droit à l'avortement.
09:44Gisèle Halimi, je le rappelle, célèbre entre autres pour avoir signé le manifeste
09:48des 343 en 1971 qui réunissait des femmes ayant déjà avorté
09:53et qui réclamaient le libre accès à l'IVG.
09:56On va d'ailleurs visionner une archive de Gisèle Halimi.
09:59On en reparle tout de suite après ensemble.
10:02Je suis mariée, j'ai trois enfants.
10:04Et est-ce que vous auriez pu en avoir d'autres ?
10:07Si j'avais voulu, oui.
10:09Je m'en ai voulu de trois et j'ai avorté trois fois.
10:12Il faut dire la vérité, que le vrai scandale dans l'avortement clandestin
10:16et dans l'oppression des femmes, c'est l'hypocrisie.
10:18C'est ce qu'on dissimule.
10:20La vérité, c'est que toutes les femmes avortent,
10:21y compris les femmes de députés et les maîtresses des ministres
10:26et tout le monde, seulement elles ne le disent pas.
10:30Et là, en quelque sorte, avec ces combats préparés,
10:32on peut le dire, la loi Veil de 1975, on lui doit beaucoup ?
10:36On lui doit énormément.
10:36Et encore une fois, en voyant cette archive, je me dis,
10:38le courage de cette fille est absolument extraordinaire.
10:40Et il y a des filles aujourd'hui aussi.
10:43Mais c'est un courage insensé.
10:45C'est incroyable parce que cette même fille, en 59,
10:49elle est avocate des Félagas pendant la guerre d'Algérie.
10:52Vous voyez, cette dame, toute calme, toute simple.
10:55Et c'est quand Simone de Beauvoir lui a demandé
10:59d'aller chercher des signatures de femmes, pour ce manifeste,
11:02pour l'avortement, elle n'a pas hésité une seconde, elle y est allée.
11:05Simone de Beauvoir lui a dit mais tu vas te faire radier comme avocate.
11:08Elle a dit je m'en fous, on y va.
11:10Donc, si vous voulez, moi, c'est des femmes, une femme comme ça,
11:14elle me porte, elle me porte tous les matins.
11:16Elle m'aide à respirer depuis plusieurs années d'ailleurs,
11:18puisque la pièce...
11:19Oui, ça fait deux ans, même depuis très, très longtemps.
11:21Parce que je connais Gisèle, à la limite, depuis très, très, très longtemps.
11:24C'est quelqu'un qui, moi, m'aide à me lever.
11:27Et il y a d'autres femmes comme ça.
11:30Évidemment, Simone de Beauvoir, mais il n'y a pas que...
11:33Il y en a plein d'autres.
11:34Et ce que je veux dire, c'est qu'effectivement,
11:37il y a encore aujourd'hui des avortements clandestins
11:40parce qu'il y a encore des filles, même si la loi,
11:43même si l'avortement est dans la Constitution,
11:46même si on a le droit de se faire avorter.
11:48Il y a des filles qui, aujourd'hui, dans...
11:50– Et les VG dans la Constitution, depuis cette année.
11:53– Voilà, mais il y a encore des filles qui se retrouvent face à des médecins
11:57qui n'ont pas le temps de les avorter ou qui ne veulent pas les avorter.
12:00Ils ont droit aussi de refuser, d'ailleurs.
12:02Donc, si vous voulez, il y a un endroit où il faut encore se battre, comme ça.
12:05Et puis, il y a des milieux, il y a des...
12:08Enfin, moi, j'habite dans un endroit où, en face de chez moi,
12:11il y a des gens dans une cité.
12:13Je pense que les jeunes filles qui sont dans ma cité,
12:16ce n'est pas si évident pour elles.
12:18Vous voyez ?
12:19Et plein de jeunes filles, et ça, je tiens à le dire,
12:21plein de jeunes filles ne savent pas qu'il existe le planning familial.
12:24Et le planning familial...
12:25– Toujours en 2024.
12:27– Toujours en 2024, et le planning familial
12:29vous donne gratuitement la pilule du lendemain.
12:32– Gisèle Halimi disait que le combat est une dynamique.
12:34Si on s'arrête, on dégringole, on est foutu.
12:37– Si on s'arrête, on est foutu.
12:38– Donc, il faut continuer à se battre, mais il n'y a jamais d'acquis, c'est ça ?
12:42– En tout cas, en ce qui nous concerne, les femmes, il n'y a aucun acquis.
12:46Il faut recommencer toujours.
12:48– On vous décrit souvent comme une actrice engagée.
12:51Alors, je crois que vous n'aimez pas trop ce mot.
12:52En tout cas, une actrice citoyenne, c'est ce que vous dites.
12:55– Oui, parce que je suis née à Comte.
12:56– Vous prenez régulièrement position sur un nombre de sujets.
12:58On se rappelle notamment en 2018, votre appel dans le monde
13:02aux côtés de 200 personnalités pour lutter contre le réchauffement climatique.
13:06Ou encore la nuit suivante, ce discours qui a marqué la Mostra de Venise.
13:10Donc, en 2019, quand vous avez reçu votre prix sur le drame des migrants
13:14en Méditerranée, à qui vous avez donc dédié votre prix.
13:17Quel est le rôle de l'artiste dans la société, selon vous ?
13:22Votre rôle, comment vous le conçuez ?
13:24– Enfin, mon rôle à moi, ce sera toujours de parler, vous voyez ?
13:27Parce que je viens d'un milieu qui n'est pas du tout un milieu privilégié.
13:31Quand on me jetait par la porte, je rentrais par la fenêtre.
13:34Quand on me jetait par la fenêtre, j'essayais de re-rentrer
13:36par la serrure de la porte, parce que sinon, je n'y serais jamais arrivée.
13:39Je suis quelqu'un, je suis un roquet, vous voyez, j'aboie tout le temps.
13:43Même, on dit souvent de moi que je suis une grande gueule,
13:46ce que je n'aime pas vraiment.
13:47Je ne suis pas une grande gueule, je parle, ce n'est pas pareil.
13:50– Ça vous vient d'où, cette capacité d'indignation sur des sujets très variés ?
13:55– Sincèrement, je n'en sais rien.
13:56C'est pour ça que j'adore Gisèle Halimi.
13:58Si vous voulez, quand je joue Gisèle Halimi,
14:01il y a des endroits où je lui ressemble.
14:04Je ne sais pas pourquoi je suis comme ça.
14:06Je ne sais pas, je n'accepte pas.
14:08Je n'accepte pas qu'on décide pour moi.
14:10Je n'accepte absolument pas qu'on décide pour moi.
14:13Et donc, quand à Venise, j'ai dit ça, mais c'est parce que moi,
14:16mes grands-parents, ils étaient partis d'Amalfi,
14:19ils étaient allés à Marseille.
14:20Dans Marseille, ils avaient pris un bateau, ils étaient allés à New York.
14:22À New York, ils n'étaient pas restés.
14:23Ils étaient revenus et ils s'étaient replantés à Marseille.
14:26Et heureusement que le bateau n'a pas coulé,
14:28comme ça existe pour des tas et des tas de gens aujourd'hui.
14:31Comment on peut accepter ?
14:32Comment puis-je accepter que des enfants meurent noyés ?
14:36Comment puis-je accepter que des enfants meurent en Palestine ?
14:39Que des enfants meurent en tant qu'otages du Hamas ?
14:42Comment je peux accepter que des enfants meurent en Ukraine ?
14:45Enfin, c'est le monde de demain.
14:47J'ai l'impression que, par moments, le monde est fou.
14:52Vous voyez, je ne peux pas.
14:53Comment des enfants arméniens sont obligés de s'en aller,
14:58de laisser leur maison, tout ce qui est le passé familial,
15:03parce que l'Azerbaïdjan a attaqué ?
15:07C'est vrai que j'ai un truc avec les enfants.
15:10Pour moi, c'est très important, mais simplement,
15:11parce que les enfants, c'est le monde de demain aussi.
15:14Et que là, en ce moment, on est en train de fabriquer des monstres.
15:18Tout simplement.
15:19Et le rôle de la France ?
15:20Et le rôle de la France, j'aimerais qu'on y aille tout de suite, là.
15:27Oui, j'aimerais que le président Macron dise
15:29« Allez, allez, tout de suite, les deux États, allez, hop, hop. »
15:33Vous voyez ?
15:34Pour le Proche-Orient.
15:35Une femme résolument de gauche.
15:38Je suis tombée dedans quand j'étais petite, je suis comme Obélix.
15:40On est à une semaine des Européennes,
15:42donc je ne peux pas m'empêcher de vous poser la question.
15:44La gauche, aujourd'hui, vous dites qu'elle vous met en colère.
15:48Mais elle me met très en colère.
15:49Elle me met très en colère, parce que si la gauche était arrivée
15:51à se mettre d'accord, qu'ils arrivent de temps en temps à penser
15:55que ce qui est le plus fondamental, c'est de se mettre d'accord,
15:58parce qu'il y a des tas d'électeurs, des gens qui sont là,
16:01qui, peut-être, effectivement, ne parlent pas, n'élèvent pas la voix,
16:04mais qui auraient bien aimé qu'il y ait un rassemblement.
16:07On n'en serait pas où on en est.
16:08Je dois vous dire que je suis assez inquiète, pour ne pas dire très inquiète.
16:11Et aujourd'hui, ces gens-là ne se sentent plus représentés ?
16:15Mais non, ces gens-là ne savent pas comment voter, surtout.
16:20Il y a plein de gens, allez, parlez dans la rue, vous verrez.
16:22Il y a plein de gens qui ne savent pas comment voter,
16:25parce qu'ils n'arrivent pas à comprendre qu'il y en ait un là,
16:29il y en a un là, il y en a un là, il y en a une là. Pourquoi ?
16:32On peut avoir des pierres d'achoppement,
16:37mais le fondamental de tout ça, c'est que quand même,
16:40on ne se retrouve pas dans une société qui est en régression, non ?
16:43Je ne sais pas, moi.
16:45Merci beaucoup, Ariane Assari.
16:46Merci à vous d'avoir répondu avec fougue à toutes nos questions ce soir.
16:50Merci de nous avoir évoquées.
16:51Je n'aurai jamais un calme bourgeois et bien élevé, je n'y arriverai jamais.
16:54On l'a bien compris. Merci beaucoup d'avoir évoqué vos combats
16:57et ceux aussi de Gisèle Halimi, qui sont parfois les mêmes.
17:00C'est la fin de cet entretien à retrouver sur notre site Internet
17:04et nos réseaux sociaux.
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