Nous vivons dans une société qui a fait de la différence un marqueur fort : il faut savoir être différent, il faut faire la différence, il faut marquer sa différence … Ces injonctions nous accompagnent dès le plus jeune âge, nous faisant entrer dans un monde de compétition et de comparaisons permanentes. Nous regardons l’autre et nous l’évaluons dans un jeu trop souvent « perdant-perdant », car épuisant voire angoissant, qui conduit au syndrome de la « fatigue d’être soi » mise au jour par le sociologue Michel Ehrenberg. [...]
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00:00 [Musique]
00:08 Nous vivons dans une société qui a fait de la différence un marqueur fort.
00:13 Il faut savoir être différent, il faut faire la différence, il faut marquer sa différence.
00:18 Ces injonctions nous accompagnent dès le plus jeune âge,
00:21 nous faisant entrer dans un monde de compétition et de comparaison permanente.
00:27 Nous regardons l'autre et nous l'évaluons dans un jeu trop souvent perdant-perdant,
00:31 car épuisant voire angoissant,
00:34 qui conduit au syndrome de la fatigue d'être soi,
00:37 mis au jour par le sociologue Michel Ehrenberg.
00:40 L'erreur est de vouloir mettre en avant sa différence
00:43 sur le mode de la performance et de la compétition.
00:46 Cette attitude conduit à des dérives très courantes.
00:49 La mise en scène de son intimité ou celle de ses proches.
00:52 Les jeunes gens font actuellement des procès à leurs parents
00:55 pour qu'ils retirent des photos d'eux nus, bébés ou enfants sur les réseaux sociaux.
01:00 L'exhibitionnisme de son corps, de sa richesse, de ses amours.
01:04 La perte de repères, avec l'estime de soi mesurée au nombre de likes.
01:09 Le mensonge, avec l'invention d'une vie sociale.
01:12 La question est importante, car nous vivons dans un monde hyper moderne
01:17 qui se caractérise par une montée en puissance de l'individualisme.
01:21 Un monde où chacun, chacune, est sa petite entreprise, comme le chantait Alain Bachung.
01:27 La prise de conscience que nous sommes responsables de qui nous sommes
01:31 se développe très tôt avec la fréquentation des réseaux sociaux,
01:35 présentiels ou virtuels.
01:38 Elle ne fait que croître avec les attentes d'un monde professionnel hautement compétitif
01:43 qui résonne en termes de portefeuille de compétence ou d'employabilité.
01:48 On peut chercher à s'en affranchir, mais on comprend bien que pour être
01:52 dans cette vaste conversation qui est devenue le monde, il faut accepter cette règle.
01:58 Alors, comment résoudre cette tension ?
02:00 Il ne faut pas chercher à être différent, mais apprendre à être distinctif.
02:06 Ce qui signifie qu'on maîtrise cette nouvelle façon d'être en société
02:11 et que l'on ne la subit pas.
02:14 Pour être distinctif, il faut 1) bien se connaître
02:18 et mettre au jour ces caractéristiques qui font de nous une personne unique,
02:23 2) les apprivoiser et apprendre à les aimer,
02:27 3) les assumer vis-à-vis des autres en toute sérénité.
02:33 Assumer d'être trop ou pas assez, trop grand, trop handicapé, trop riche, trop belle,
02:40 pas assez dynamique, pas assez ambitieux, pas assez sociable, il s'agit de faire.
02:46 De ces caractéristiques, des éléments distinctifs de qui nous sommes.
02:51 Être distinctif, ce n'est pas vouloir marquer la différence
02:55 ou l'utiliser comme élément de performance, non.
02:59 C'est l'assumer tranquillement.
03:01 C'est aussi avancer dans l'idée que la société riche de sa diversité
03:07 et que le vivre ensemble n'est pas une compétition à tout crin,
03:11 mais de la reconnaissance et du respect.
03:14 Chacun peut alors assumer sa place et son rôle
03:17 sans se fondre pour autant dans l'homogénéité.
03:23 [Musique entraînante diminuant jusqu'au silence]