ABONNEZ-VOUS pour plus de vidéos : http://www.dailymotion.com/Europe1fr Noam Ohana, gestionnaire d’un fonds de Venture Capital et réserviste dans une unité d’élite de commandos parachutistes au sein de Tsahal, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Il témoigne de la réalité de la guerre contre le Hamas. Retrouvez "L'invité actu" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-interview-de-7h40 LE DIRECT : http://www.europe1.fr/direct-video
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00:00 - Les 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le réserviste franco-israélien Noah Moana.
00:06 - Bonjour Noah Moana. - Bonjour.
00:08 - Bienvenue sur Europe 1. Vous avez 45 ans, vous habitez Tel Aviv, dans le civil vous êtes gestionnaire d'un fonds international de capital risque.
00:15 Mais disons que votre métier, vous l'avez mis entre parenthèses, il est assez loin de vos pensées en ce moment depuis 3 mois.
00:21 Parce que le 9 octobre, vous n'avez pas attendu que votre unité vous rappelle, vous l'avez rejointe de vous-même.
00:27 Et ce week-end encore, vous étiez en opération dans la bande de Gaza avec votre unité de commando parachutiste.
00:34 Vous êtes de passage à Paris pour témoigner, pour raconter cette guerre que vous vivez.
00:40 Alors peut-être une première question Noah Moana, de Gaza à Paris en moins de 48 heures, c'est quand même un sacré contraste. Comment vous vivez ça ?
00:49 - Alors on vit ça avec un petit peu de... un choc. Quand on retourne dans un environnement civil, même pas à Paris, même à Tel Aviv, on voit que la vie continue.
01:02 Et on est extrait d'un endroit où il y a des bruits de guerre et des bruits qui sont constants et qui finissent par avoir un impact sur les gens, les militaires mais hélas aussi et surtout les civils.
01:13 Et c'est vrai que quand on voit la normalité, on a toujours un petit choc pendant quelques minutes, on voit des gens qui vaquent à leurs occupations et on se rappelle qu'il y a un autre monde à côté de ça.
01:23 - Alors vous n'êtes pas un inconnu en France, Noah Moana, il y a 15 ans vous aviez publié un journal de guerre,
01:28 relatant votre expérience militaire lors de la deuxième intifada, donc au début des années 2000.
01:34 Vous signez des tribunes dans la presse assez régulièrement.
01:37 Alors, pardonnez-moi de vous poser la question, là vous êtes de passage à Paris, tournez Média, vous êtes dans le Parisien par exemple, dans le journal de Parisien ce matin.
01:45 Est-ce que ce sont les autorités israéliennes qui vous ont demandé de venir à Paris pour raconter la guerre contre le Hamas ?
01:51 D'où parlez-vous Noah Moana ?
01:53 - Alors les autorités israéliennes je pense seraient assez fâchées de ce qu'elles liraient dans le Parisien et de ce que je peux avoir à vous dire aujourd'hui.
02:00 Donc parce que mon message est compliqué et que le gouvernement israélien voudrait que les choses soient plus simples,
02:08 surtout parce que c'est un gouvernement qui a perdu beaucoup de sa légitimité et qui en fait navigue à vue.
02:15 Donc non, pas du tout, ni l'armée, ni le gouvernement, je suis juste un réserviste israélien.
02:21 Et finalement pour les israéliens, ce que je vais vous dire serait très clair, je suis incontrôlable.
02:28 Puisqu'on me demande presque tout, c'est-à-dire d'avoir à mettre ma vie entre parenthèses et à prendre beaucoup de risques.
02:37 Et que je suis un adulte et pas un jeune conscrit, et que donc on peut pas vraiment contrôler ce que je dis,
02:42 à moins d'avoir à divulguer des secrets défense, ça n'arrivera pas ce matin.
02:46 - Bien sûr, mais alors justement, il se trouve qu'Israël nous dit ce matin que la phase intensive de combat dans le sud de Gaza va bientôt se terminer.
02:54 Racontez-nous vous les trois mois que vous avez vécu, précisément cette phase intensive qui serait sur le point de s'achever.
03:01 - Alors c'est des mois qui commencent avec le traumatisme du 7 octobre.
03:07 - Vous êtes où vous ce jour-là ? Qu'est-ce que vous faites ?
03:10 - Je suis à la maison et je me réveille à 6h30 du matin avec mon épouse et mes quatre enfants en courant à Tel Aviv 90 secondes pour arriver dans l'abri.
03:22 On a, hélas, quand on est plus proche de la bande de Gaza, dans ces kiboutzim, dans ces collectivités agricoles attaquées,
03:30 quelques secondes, moins de 10 secondes pour arriver là-bas.
03:34 Et notre bonne amie qui est un garçon qui est dans mon groupe à l'armée,
03:40 et qui habite un de ces kiboutz, nous fait part de la situation catastrophique,
03:46 et des coups de feu à l'intérieur du kiboutz, et on réalise l'ampleur de l'événement.
03:51 - Alors très vite vous partez de vous-même, racontez-nous Gaza, parce que c'est de la guerre urbaine,
03:56 pour bien comprendre c'est très particulier, c'est pas du tout comme les images qu'on peut avoir de l'Est de l'Ukraine,
04:01 où on a des champs comme ça avec quelques arbres, là c'est un environnement qui est hyper complexe.
04:06 Est-ce qu'on peut avoir des images ? Vous pouvez nous donner quelques images de ce que vous avez vécu, notamment à Khan Younes ?
04:12 - Alors la complexité peut être résumée ainsi, il y a des infrastructures civiles, une ville,
04:19 des gens qui se lèvent le matin, qui vont au travail, et puis en dessous il y a une autre ville,
04:26 une autre ville et des infrastructures militaires qui ont été construites,
04:29 et qui sont proprement hallucinantes quand vous rentrez dans ces tunnels que vous réalisez.
04:35 - Vous êtes rentré vous-même dans les tunnels du Hamas ?
04:37 - Oui, je suis rentré, et de voir le niveau d'ingénierie et toutes les ressources qui ont été utilisées
04:45 pour construire cette infrastructure de mort, c'est assez troublant, parce qu'on se dit qu'autre chose aurait pu être fait avec ces aides.
04:51 Et effectivement, vous avez une école qui peut être à la fois une cible militaire,
04:58 parce qu'elle a tous les éléments d'une cible militaire avec un dépôt d'armes, une batterie de roquettes,
05:04 et à la fois elle reste une école avec ses images de livres, de cartables, voilà, donc les deux choses sont là.
05:12 - Vous me faites un récit un petit peu général de la guerre, dépersonnalisée,
05:17 parce que j'imagine que pour vous ce n'est pas facile non plus à gérer,
05:21 peut-être racontez-nous un peu la vie dans les unités, comment ça se passe ?
05:25 Qu'est-ce qu'on se dit aujourd'hui quand on est soldat, engagé, sur le terrain, face au Hamas,
05:30 qu'on est israélien, qu'on a pris les armes comme vous, comme volontaire en plus, c'est une situation très particulière.
05:35 - On est un peu coupé du monde et on est dans une situation où on a par exemple un officier,
05:43 qui est dans mon cas l'officier supérieur et archéologue au civil,
05:48 il a fini son post-doc à Chicago il y a quelques mois,
05:52 et il doit prendre des gens qui jusqu'à il y a peu étaient un petit peu éloignés du monde militaire
06:02 et en refaire des soldats en quelques jours et les mener au combat et effectivement avoir des discussions difficiles,
06:08 mais c'est vrai que quand on est dans cette dynamique, on a tendance à rentrer dans ce rôle et à s'y mettre pleinement.
06:19 - Avez-vous eu des contacts avec des otages retenus par le Hamas, Noam Oana ?
06:24 - Non, j'ai eu un réserviste de mon unité qui a été tué au combat en allant chercher sur la base d'informations des corps d'otages,
06:37 qui était le fils de l'ancien chef d'état-major Gadi Eisenkot,
06:41 qui peut vous donner une idée du prix que la société israélienne est en train de payer pour cette guerre,
06:46 c'est-à-dire qu'on s'est retrouvé effectivement avec, imaginez, un enterrement avec l'ancien fils d'état-major,
06:53 donc tout l'establishment israélien et voilà.
06:59 Effectivement, il y a hélas beaucoup de victimes,
07:02 mais le prix à payer pour la société israélienne est très important et hélas pour les palestiniens est très important.
07:10 - Merci beaucoup Noam Oana d'être venu au micro d'Europe un ce matin,
07:13 vous aurez bien gardé encore parce que votre témoignage est extrêmement fort et troublant aussi
07:19 pour les civils en paix que nous sommes en France et qui voyons cette démocratie israélienne engagée dans la guerre
07:26 sous le regard aussi réprobateur d'une grande partie du monde.
07:29 Merci d'être venu nous en parler ce matin sur Europe 1.