Conférence LFF: ce que 18 mois de guerre auront changé en Europe

  • l’année dernière
Deux conférences digitales de deux heures, ponctuées de « keynotes » de speakers prestigieux, de débats et de tables-rondes réunissant des experts de la finance européenne permettront de décrypter les tendances et les défis des prochains mois.

Nous évoquerons les nouveaux équilibres géopolitiques, dans un paysage mondial en totale redéfinition. Nous nous interrogerons sur les conséquences de l’inflation sur la consommation mondiale, sur les marchés obligataires et sur la solidité du système bancaire international. Nous regarderons aussi l’avenir du secteur financier : un avenir qui semble se dessiner « plus vert » et plus « techno ». Mais, concrètement, que faut-il comprendre derrière ces deux évolutions ?

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00:00 Pour passer la parole à Cécile Desjardins, ma conseillère de l'opinion qui va enchaîner
00:11 et animer les premiers débats, avec Muriel Mott, la journaliste également de l'opinion,
00:15 un peu plus tard, je vais vous proposer de regarder maintenant une vidéo sur les dix
00:22 chiffres clés de la conjoncture internationale à date. Selon les dernières prévisions du Fonds
00:29 Monétaire International, l'économie mondiale devrait croître de 3% en 2023 après une baisse
00:35 de 3,5% en 2022. Les incertitudes sont importantes, notamment en raison de la lenteur du redémarrage
00:43 chinois, de la forte volatilité des prix de l'énergie et du durcissement des politiques
00:48 monétaires. La Fed américaine et la BCE ont fortement remonté leur taux directeur au cours
00:53 des derniers mois pour atteindre respectivement 5,5% et 4,25%. Les économistes s'attendent ainsi
01:02 à une récession technique aux Etats-Unis avec une hausse du PIB américain limitée à 1,4% en 2023
01:09 et de 0,4% l'an prochain. En Europe, c'est une croissance molle qui s'annonce avec +0,4% en 2023
01:18 et +0,8% en 2024. La France a affiché 0,5% au deuxième trimestre, un chiffre salué comme
01:27 une performance remarquable par le ministre de l'économie et des finances Bruno Le Maire.
01:32 Mais la situation économique commence à se tendre dans beaucoup d'entreprises. C'est d'ailleurs le
01:37 retour des faillites au niveau européen. D'après les données publiées mi-août par Eurostat,
01:42 les défaillances d'entreprises dans l'Union européenne ont grimpé de 8,4% au deuxième
01:48 trimestre, retrouvant le niveau de 2015. Les secteurs les plus touchés sont ceux de l'hébergement et la
01:53 restauration, puis des transports et du stockage. Enfin, l'éducation et les activités sociales.
01:59 En France, la tendance est moindre, mais la Banque de France relève un rattrapage du nombre de
02:05 faillites après trois ans de suspense. Selon une étude récente du cabinet ARC, près d'une
02:11 entreprise sur trois pense ne pas pouvoir faire face aux remboursements cumulés de ses créances,
02:15 PGE, investissements et factures. Par ailleurs, la hausse des taux d'intérêt est en train de bloquer
02:22 l'activité immobilière. Enfin, la demande intérieure est minée par la baisse du pouvoir
02:28 d'achat. Alexandre Bompart, le PDG de Carrefour, vient de tirer la sonnette d'alarme concernant
02:33 un tsunami de déconsommation face à une inflation alimentaire qui atteint 20% sur deux ans.
02:39 Bonjour à tous, je suis très heureuse de vous retrouver ce matin. Je suis Cécile Desjardins,
02:47 je suis journaliste et rédactrice en chef adjointe à l'Opinion. Et nous allons poursuivre les débats
02:52 de cette matinée avec un point sur la situation géopolitique et économique européenne. Alors,
02:57 je suis en compagnie de Bruno Bajard. Bonjour Bruno. Bonjour. Bruno, vous êtes directeur des
03:01 assurances de spécialité chez Marche France. À vos côtés, Valérie Plagnol. Bonjour Valérie.
03:07 Bonjour. Vous êtes économiste et membre du collège de la commission de régulation de l'énergie.
03:12 Et puis malheureusement à distance, bonjour Francis Malige. Bonjour Francis. Bonjour. Francis,
03:21 tu es directeur général des institutions financières de la Banque européenne pour la
03:24 reconstruction et le développement. Alors, je voudrais qu'on reparte peut-être du titre de
03:30 notre table ronde. Ce que 18 mois de guerre auront changé en Europe et tout simplement,
03:36 est-ce que ça a changé des choses ? Est-ce que ces 18 mois de guerre ont changé la donne en
03:42 Europe ? Francis, peut-être pour commencer avec une vision un peu géopolitique européenne. Alors,
03:50 moi je dirais oui, les choses ont changé. D'abord parce que cette guerre, elle marque,
03:56 on peut dire, le retour du risque géopolitique sur le continent européen. C'est un peu la
04:02 fermeture de cette espèce d'aire des bisounours dans laquelle on était rentré en 1991 en disant
04:09 tout va bien, la Russie devient communiste, on a les mêmes valeurs, donc il n'y a plus de risques
04:14 géopolitiques. Et en fait, ça produit plusieurs choses. D'abord, ça produit un rééquilibrage de
04:20 l'Europe au profil, à mon sens, des Est-européens qui peuvent nous dire "on vous l'avait bien dit".
04:24 Et cette clairvoyance, je crois, leur donne un avantage de crédibilité supplémentaire par
04:30 rapport à ce qu'ils étaient auparavant. Après, on constate du coup que la notion d'indépendance
04:37 revient sur le devant de la scène. On n'est plus uniquement sur des problématiques économiques,
04:42 on est sur des problématiques économico-militaires. Et donc le modèle préféré qui consistait à
04:49 déléguer la sécurité aux États-Unis, l'énergie à la Russie, la croissance économique à la Chine et
04:55 la croissance démographique à la Turquie, on se rend compte que ce n'est pas une bonne façon de
04:59 maintenir sa souveraineté. Donc il va falloir penser à investir différemment dans la défense,
05:04 dans l'énergie, dans la sécurité alimentaire. Alors l'un des sujets, je crois, et la ministre
05:09 a parlé de compétitivité, l'un des sujets qui est important, c'est qu'on voit se creuser de façon,
05:15 pour l'instant, qui paraît durable, une différence de prix de l'énergie entre l'Europe et les
05:20 États-Unis. Le prix de l'énergie est d'autant plus important sur la compétitivité qu'il se décale
05:26 entre les régions. Si tout le monde paye son énergie plus cher, c'est moins grave, mais là,
05:31 on a vraiment ce décalage qui doit nous pousser à être encore plus compétitif. On voit aussi,
05:37 mais c'est un peu plus faible à ce stade et très localisé dans les pays d'Asie centrale pour
05:45 l'instant et d'autres pays, un recours naissant, même si pour l'instant mineur, à des monnaies
05:54 alternatives au dollar pour le commerce international. Je pense qu'il y a encore
05:57 beaucoup de chemin avant qu'il y ait une monnaie qui s'impose comme monnaie de réserve à l'opposé
06:03 du dollar parce qu'il ne suffit pas de faire du commerce, il faut aussi avoir un état crédible,
06:06 un état de droit, etc. Et puis une convertibilité accessoirement. Mais enfin, on voit un début de
06:13 phénomène de ce point de vue-là. Et puis enfin, pour revenir sur le changement climatique,
06:19 le dernier point, mais qui est un point, je pense, essentiel qu'on observe, c'est qu'on voit une plus
06:26 grande impatience des pays du Sud sur la question de qui doit financer l'adaptation et le changement
06:32 climatique. Et ça, c'est exacerbé par l'ampleur des financements qu'ils nous ont vu dégagés pour
06:38 le Covid et pour le soutien à la guerre. En clair, ils disent les milliards soient. Donc pourquoi nous,
06:45 on n'y a pas droit alors qu'en fait, on est en train de souffrir d'un changement climatique
06:50 qui est le fait des pays avancés. Et il est de notre faute, du point de vue là, d'investir
06:55 massivement dans la transition et l'adaptation des pays émergents. C'est pour ça que la BIRD
07:02 s'apprête à entrer en Afrique subsaharienne également aussi. Le secteur financier dit qu'il
07:07 n'en a pas les moyens. Je pense que le secteur financier doit aussi faire sa réflexion. On ne
07:11 peut pas uniquement se... Vu les montants en jour, on ne peut pas se reposer uniquement sur les
07:15 financements publics pour financer l'adaptation et la transition énergétique des pays émergents.
07:20 Mais il faut y essayer de notre intérêt, de notre sécurité de le faire. Parce que si on ne le fait
07:26 pas, la montée des eaux, elle va toucher tout le monde et les migrations climatiques vont aussi
07:31 toucher tout le monde. On y reviendra. Je vais juste faire réagir Valérie Plagnol sur... Francis a
07:39 déjà abordé l'énergie. Comment est-ce que vous vous analysez ce nouveau monde 18 mois après le début de la guerre ?
07:47 En fait, la crise et la guerre en Ukraine, effectivement, dans sa dimension géopolitique,
07:53 c'est aussi un accélérateur et un révélateur d'une situation qui a commencé à se bâtir
07:58 antérieurement. Alors ça a été dit, effectivement, accélérateur de la hausse des prix, accélérateur
08:06 de la hausse des prix de l'énergie, des matières premières aussi globalement, dans un monde qui
08:13 était déjà en tension sur, effectivement, en ce qui concerne l'Europe, nos dépendances et notre
08:19 demande à un certain nombre de matières premières. On l'a vu aussi au lendemain de la crise du
08:25 Covid, par le rebond de la demande globale, des chaînes de valeur terriblement éclatées et en
08:30 difficulté à cause de la crise de la Covid. L'Europe s'est retrouvée dans une situation où on a vu,
08:37 en fait, les prix d'un certain nombre de produits finis ou semi-finis des matières premières et de
08:43 l'énergie commencer à accélérer à travers cette demande. Révélateur aussi, ça vient d'être dit
08:49 et très justement, et je m'y associe, de véritablement la dépendance de l'Europe, d'une
08:56 part aux matières premières, à l'énergie et particulièrement au gaz russe, dépendance pour
09:01 sa défense, c'est effectivement aussi ce qu'on avait peut-être un peu oublié. Accélérateur
09:07 aussi, plus globalement, mais je reste dans le domaine de l'énergie, mais on voit bien que la
09:12 guerre commerciale, le refermement du monde, la fin de la mondialisation telle qu'on l'a connue,
09:16 qui s'était quand même commencé à se manifester depuis déjà 2016, a pris un tournant supplémentaire
09:24 dans ce contexte particulier. Ce qui m'a intéressée, c'est quand même, je voudrais apporter peut-être
09:30 une note de résilience, c'est-à-dire que l'Europe, dans son organisation, dans son ouverture, dans le
09:37 système énergétique et de marché des interconnections, alors c'est vrai que les prix ont
09:41 fortement augmenté, mais on a vu en fait un renversement très rapide des flux en direction
09:47 de l'Europe, des flux gaziers, cette fois-ci du gaz liquéfié, qui le marché s'est véritablement
09:54 à compenser, et on a passé l'hiver, ce dont on n'était pas sûr l'année dernière, dans des conditions
10:00 extrêmement difficiles. La France a participé à ce changement de flux, notamment parce que tous les
10:09 flux provenant de l'Est étant fermés par la fin des livraisons gazières par les gazoducs, les ports
10:16 métaniers ont été très sollicités, et nous avons cette capacité et ces infrastructures, comme
10:22 l'Espagne, donc tout d'un coup les flux gaziers sont remontés du sud vers le nord, de l'ouest
10:27 vers l'est, on est véritablement dans un changement de paradigme important, dans une reconfiguration
10:32 énergétique, en tout cas à court terme, qui continue d'être marquée par cette énergie et par les
10:38 énergies fossiles, dans une période aussi, je reste un peu sur la France, où nous avons eu des
10:42 difficultés, où nous avons été l'année dernière un portateur net d'électricité, ce qui n'était
10:48 jamais arrivé dans notre système nucléaire, et ça aussi c'est à rebâtir, et c'est ce que nous faisons.
10:54 Bruno Bajard, peut-être avec une vision un peu plus micro, qu'est-ce que vous voyez chez vos
11:00 clients, qu'est-ce que vous voyez dans les entreprises, comment est-ce que les entreprises
11:04 ont peut-être elles aussi connu un moment de basculement ? Alors s'agissant du secteur de
11:11 l'assurance et de la gestion des risques, je pense qu'il faut commencer par rappeler que les risques
11:16 de guerre des pays impliqués sont en principe exclus par les compagnies d'assurance, parce que
11:21 tout simplement le risque de guerre n'est pas un risque qui est mutualisable, pour des raisons
11:24 qu'on comprend, pour autant ça ne veut pas dire que les assureurs et que les différentes branches
11:30 d'assurance ne sont pas impactées, et même assez profondément par ce secteur, si vous voulez bien
11:34 prendre quelques exemples pour vous l'illustrer, peut-être par haute croissance de gravité,
11:39 vous avez d'abord un certain nombre de branches d'assurance qui sont touchées tout simplement par
11:43 perte d'opportunités, perte de matières assurables, par exemple l'oil and gaz qui n'est plus assurable
11:51 pour des raisons de sanctions, le secteur du shipping, le petit secteur du spatial aussi,
11:55 qui est un secteur qui a besoin des risques, un tout petit secteur, et qui a donc besoin des
12:00 risques russes pour pouvoir, si vous voulez, avoir un spread de risques important, notez que
12:05 c'est pas seulement un problème pour les assureurs, c'est peut-être aussi un problème pour l'Europe,
12:07 puisqu'on avait confié le déploiement de notre constellation de souveraineté au lanceur Soyuz,
12:11 qui n'est plus disponible, donc c'est aussi un problème au-delà de l'assurance. Vous avez aussi
12:15 des branches d'assurance qui sont déstabilisées en termes de garanties, de nature des garanties,
12:21 je pense à la branche d'assurance la plus en croissance, qui est la branche des risques cyber,
12:24 qui est non seulement confrontée à une croissance des actions russes, mais surtout qui cherche,
12:30 les assureurs maintenant, et on y comprend, cherchent à clarifier et à exclure les événements cyber
12:36 qui sont d'origine militaire et qui impactent un très grand nombre d'assurés, et ça, ça pose
12:40 une question de caractérisation du risque militaire. C'est très difficile, effectivement,
12:46 c'est très difficile, et on voit bien que ça pose la question de l'efficacité de la garantie,
12:49 et donc du "coverage certainty" comme on dit en anglais. Donc c'est effectivement déstabilisant
12:54 pour cette branche. Vous avez également des branches qui sont directement au cœur du conflit,
12:59 je pense à la branche marine, quand il s'agit en ce moment d'assurer les navires qui permettent
13:05 aux grains et aux céréales de sortir d'Ukraine. Alors c'était faisable, encore quand on assurait
13:10 le risque de guerre fortuitement, parce qu'une mine pouvait flotter ou il pouvait y avoir un tir
13:15 perdu, mais quand les bateaux deviennent une cible déclarée suite à la remise en cause de la
13:20 cœur du grain par Poutine, c'est autre chose, parce que là on a vraiment un risque d'hostilité
13:25 et un challenge d'assurance, que d'ailleurs le groupe Marsh McClennan a essayé de relever en
13:31 mettant en place pour le gouvernement ukrainien une solution d'assurance pour permettre à ces
13:34 bateaux d'être néanmoins assurés. Vous avez aussi des branches qui sont impactées de façon
13:41 inattendue, indirecte et dans des montants très importants, je pense à la branche aviation,
13:45 c'est pas parce qu'il y a eu des crashs, il n'y a pas eu des crashs en Syrie, mais vous avez eu en
13:50 revanche cette situation d'expropriation en bloc de centaines d'avions, on parle de 500 avions,
13:57 qui créent en fait pour les loueurs occidentaux, donc particulièrement les laisseurs européens,
14:01 une perte. Concrètement c'était les 500 avions qui étaient sur sol russe au moment précis du
14:06 démarrage des hostilités. C'est ça, qui étaient les avions opérés par des airlines russes, la
14:11 Russie est un grand pays qui a besoin d'aviation, c'est un pays d'aéronautique, mais c'est un pays
14:16 qui pour son aéronautique civil s'appuie sur des avions occidentaux loués par des grands laisseurs,
14:20 et du jour au lendemain, suite aux sanctions, effectivement ces contrats de l'ISSE ont été
14:24 résiliés et les avions ont donc été expropriés avec un sinistre potentiel qui dépasse les 10
14:32 milliards, donc c'est le plus gros sinistre historique de la branche aéronautique, probablement
14:35 plus gros de plusieurs ordres de grandeur que le World Trade Center, même si, on pourrait parler
14:39 des heures de ceci, c'est passionnant, même si c'est en train un petit peu de se simplifier,
14:42 ça restera le plus gros sinistre aéronautique, donc voyez, un peu de façon surprenante.
14:46 Si on globalise, c'est juste le paysage des risques qui a explosé.
14:49 Alors tout à fait, merci, vous me tournez la perche pour parler de la dernière branche dont
14:52 je voulais parler, qui est cette branche des risques des 50, à peu près la cinquantaine
14:57 d'assureurs spécialistes en risques politiques et de crédit, ce sont des assureurs qui assurent
15:03 les investissements et les contrats de nos entreprises à l'étranger, et donc ils sont
15:09 un peu moins exposés sur l'Ukraine, puisque depuis la crise de la Crémé en 2014, ils
15:15 avaient largement réduit leurs expositions. Pour autant, ces assureurs, ce qui est intéressant,
15:19 c'est qu'ils notent, vous savez, ils notent l'ensemble des pays dans lesquels nos entreprises
15:23 exportent, à une centaine de pays à peu près, et si l'on regarde comment les notations,
15:27 c'était votre question d'origine, comment les choses ont évolué, comment les notations de
15:31 cette centaine de pays ont évolué depuis un an, on voit que les trois quarts des pays,
15:35 75% des pays, ont effectivement été dégradés, on note donc un risque qui est perçu comme
15:40 étant aggravé, et de façon très significative, parce qu'en pourcentage, je crois, c'est 67%,
15:45 donc presque 70% de l'aggravation de risque sur les trois quarts des pays, donc je pense que c'est
15:49 un bon thermomètre de l'aggravation des risques tels qu'elle est perçue par le secteur des
15:53 assurances. Peut-être une réaction, Francis Malige, cette augmentation du risque dans une
15:59 centaine de pays, pour vous, à la Bird, ça a des conséquences directes ? Oui, enfin dans un sens
16:09 oui, dans un sens non, c'est-à-dire, d'abord je voudrais rebondir sur l'Ukraine, c'est vrai qu'on
16:15 assure pas le risque de guerre, moi ce que je constate c'est qu'on assure plus l'Ukraine aujourd'hui,
16:18 c'est-à-dire qu'en fait, et ça c'est un sujet, peut-être qu'il faudrait qu'on s'en parle offline,
16:23 mais les assureurs ont complètement coupé la couverture du risque, quel qu'il soit en fait en
16:30 Ukraine, et donc aujourd'hui quand vous êtes un entrepreneur ukrainien, vous n'arrivez pas à vous
16:34 assurer pour un risque bêtement IARD de base, sans parler du risque d'être détruit par un
16:39 bombardement de monsieur Poutine, et ça c'est un vrai sujet parce que la reconstruction de l'Ukraine
16:44 ça commence maintenant, et on n'attend pas un accord de paix, je rappelle que la paix entre
16:50 l'Allemagne et la Russie a été signée en 1991, donc si on attend l'accord de paix ça va faire un
16:54 grand grand moment, et donc c'est important je crois de différencier, je pense que l'industrie
17:01 de l'assurance a puni de la même façon l'agresseur et l'agressé, et je crois qu'il y a peut-être une
17:06 inflexion à mener au delà du risque de guerre là-dessus. Après la Bird investit, moi mon
17:12 portefeuille moyen il est coté single bill à la Bird, donc on investit quand même dans des pays
17:17 qui sont au delà de l'appétit pour le risque de la plupart des investisseurs, on voit effectivement
17:23 une montée du risque, on voit une plus grande complexité du risque, mais ce qu'on voit aussi
17:28 en ce moment c'est quand même aussi une montée des taux d'intérêt, et donc j'ai envie de dire
17:32 un peu comme toutes les banques en ce moment, ça va plutôt bien d'un point de vue de rentabilité
17:37 pour nous, parce que quand il y a du risque il y a plus de choses à faire pour une banque,
17:44 en particulier pour une banque de développement, encore une fois comme nous, dont le métier est
17:49 de prendre du risque sur des endroits où le secteur privé ne va pas forcément.
17:52 Juste quand on voit ce paysage plus risqué, plus incertain, est-ce que ce n'est pas aussi
18:03 le bon moment pour changer les choses, pour redéfinir des nouveaux cadres ? Alors peut-être
18:09 Valérie sur l'énergie c'est particulièrement évident. Ah oui c'est complètement évident,
18:14 alors moi j'aurais deux mots, c'est résilience et sobriété, parce que là à court terme ce sont
18:20 quand même les points forts de ce qui nous est arrivé en Europe, en Europe de l'Ouest,
18:25 d'une part la résilience à travers le marché de l'énergie et cette capacité effectivement à
18:31 passer l'hiver, et on sent bien que cette année modulons le risque climatique, c'est-à-dire
18:37 qu'on n'est pas quand même à l'abri d'un hiver très froid et très long, mais les opérateurs sont
18:42 un peu plus assurés et un peu mieux préparés en fait à cette saison. Ça c'est un premier point,
18:50 la sobriété on le voit d'un point de vue économique, ça a été dit aussi par la ministre des finances
18:55 du Luxembourg, c'est-à-dire que la dette commence à peser, on sort aussi de la crise de Covid,
19:02 moi j'ai du mal à détacher la crise d'une crise de l'autre, il faut quand même les prendre dans
19:06 cette continuité, et aujourd'hui les états sont confrontés au retour des politiques monétaires
19:12 plus sobres pour dire le moins, et la remontée des taux d'intérêt, et au risque effectivement lié en
19:19 fait à la dépense tous azimuts. L'autre point effectivement, c'est la grande leçon, et on se
19:25 tourne maintenant vers ces sujets, beaucoup plus, de manière beaucoup plus aiguë, c'est tenir nos
19:31 engagements en matière climatique, les échéances c'est 2030, c'est 2050, là encore l'Europe a été
19:38 très réactive, beaucoup d'initiatives ont été prises, Next Generation, Fit for 55, on est dans
19:46 cette logique à la fois de la décarbonation, de repenser le mix énergétique, de reconsidérer en
19:53 fait la hiérarchie et l'organisation dans ce mix énergétique, avec probablement aujourd'hui une
20:00 réaccélération des investissements, je parle un peu pour la France, on était un peu en retard, sur
20:06 les énergies alternatives, et aussi nous repensons le programme nucléaire, vous le savez ça a été
20:13 dit, donc tout ça est en train de se remettre en place, on regarde vers cet avenir avec la contrainte
20:19 de la décarbonation, certains disent défossilisation pour être plus clair, réintroduit aussi la notion
20:26 de capture du carbone, et puis bien sûr l'hydrogène qui revient. La hausse des prix rend plus
20:31 compétitif d'autres énergies et d'autres mix, c'est aussi important de souligner. On voit l'économiste
20:37 qui parle quand vous évoquez la hausse des prix, ça peut se réguler tout seul par la hausse des
20:42 prix ? Aujourd'hui l'économiste que je suis vous dirait que oui, alors attention, ça c'est le marché
20:48 de gros, c'est la recherche de compétitivité, c'est la réorientation du mix énergétique vers
20:54 effectivement une énergie décarbonée, la transition climatique. Il faut aussi penser aux particuliers,
21:01 aux entreprises et au choc à court terme. Aujourd'hui la plupart des états européens ont mis en place
21:07 d'une manière ou d'une autre des boucliers pour véritablement parer ce choc parce qu'à court terme
21:11 il est insupportable, il faut bien le dire, et c'est effectivement ce moment, ce tournant que
21:17 nous sommes en train de prendre, d'abord parce que nous avons fait preuve de grande sobriété,
21:22 rappelez-vous l'hiver dernier la consommation domestique a baissé d'à peu près de 10%.
21:26 Donc c'est quand même quelque chose qu'on peut achever à court terme et face à un choc d'offres
21:32 on est bien obligé aussi d'en passer par une réduction de la demande, c'est important de le
21:37 faire sans sacrifier les plus fragiles et en les protégeant. Vous pensez que sur ce choc d'offres
21:43 on a encore une marge de manœuvre, qu'on peut encore être sobre cet hiver ou que finalement
21:47 les habitudes reviennent aussi vite que... Alors je crois que c'est important parce qu'on y travaille
21:53 et effectivement la sobriété, alors dans le cadre aussi de la loi de programmation climatique,
21:57 la sobriété à sa place, on parle d'efficience énergétique mais on parle aussi de sobriété
22:03 et c'est une sobriété qu'il convient d'intégrer dans ses comportements et dans ses usages plus
22:10 que de la subir, il ne s'agit pas d'être dans la contrainte et il ne s'agit pas non plus d'être
22:15 dans la précarité et c'est véritablement effectivement un autre monde qu'on a connu
22:20 à d'autres époques mais vers lequel je pense on s'oriente, vous savez qu'un certain nombre
22:26 d'outils ont été mis en place aussi autour des indicateurs qui nous permettent de faire face à
22:31 ces moments de tension et puis encore une fois ça se passe à la maille européenne avec des
22:36 interconnexions avec une grande solidarité. Bruno Bajard, qu'est-ce qu'on doit refonder
22:42 dans ce, quand on parlait changement de cadre et poser les bases d'un nouveau monde peut-être,
22:50 qu'est-ce que vous voulez changer ? Je ne sais pas si c'est une opportunité,
22:56 est-ce que le mot est un peu positif, en tout cas peut-être une occasion de se penser sur un sujet
23:00 de façon un peu urgente qui est révélé par cette crise, si on a dit tout à l'heure que les risques
23:05 de guerre des parties impliquées n'étaient effectivement pas couverts, reste en fait que
23:11 ce qu'on appelle les risques de guerre, les risques d'être fortuitement victimes du conflit par une
23:16 mine qui flotte, par un missile qui vole, par des terroristes, les risques de guerre sont quand
23:21 même aujourd'hui font l'objet de rachats d'exclusions, ce qu'on appelle dans tout un tas de
23:25 secteurs et que c'est même souvent légalement obligatoire pour une compagnie aérienne, pour une
23:30 société, pour un armateur d'acheter aujourd'hui ses garanties, dans la chaîne contractuelle c'est
23:38 souvent aussi contractuellement obligatoire. Or ces garanties telles qu'elles sont écrites,
23:42 selon des standards d'assurance, elles font l'objet de clauses de résiliation automatique dans deux
23:48 cas, qui sont aujourd'hui à mon avis qui méritent de se pencher dessus. Le premier cas c'est
23:55 l'implication de deux pays du Conseil de sécurité des Nations Unies dans le conflit directement,
24:00 et le deuxième cas c'est le cas de détonation nucléaire hostile. Or les assureurs eux-mêmes
24:07 font le constat que dans la situation actuelle, quelle que soit la façon dont on essaie de
24:12 prévoir les choses, si effectivement c'est l'Ukraine et l'Occident qui prévalent dans le
24:18 conflit, on peut craindre que la Russie en a fait la menace plusieurs fois qu'ils appliquent la
24:23 doctrine de guerre froide et qu'à ce moment-là ils fassent effectivement l'usage de l'arme
24:28 nucléaire. Et donc là c'est le deuxième trigger qui pourrait être déclenché. Et inversement,
24:33 si c'est la Russie qui prévaut, on peut imaginer une réaction soit de la Pologne, soit de l'OTAN,
24:39 et là aussi à ce moment-là c'est le premier trigger qui pourrait se faire. Et donc on voit
24:43 qu'on a sans doute, même si ces clauses fort heureusement ne sont jamais appliquées, on voit
24:46 qu'on n'est peut-être jamais été aussi prêts de déclencher ces clauses, et du coup pas ricochet
24:52 d'avoir une suspension de ces garanties qui pourraient entraîner un blocage finalement
24:57 d'un certain nombre de l'économie. Donc les assureurs y réfléchissent avec les clients et
25:04 avec les courtiers, à justement prendre en compte cette nouvelle situation géopolitique. Et donc
25:09 je pense que ça c'est un sujet actuellement... Est-ce que comme dans des sujets terroristes ou
25:14 catastrophes naturelles, vous attendriez que l'État se penche aussi sur la question ? Je
25:19 pense qu'on peut, les précédents du 11 septembre ont montré qu'effectivement le rôle de l'État
25:25 avait été clé dans la résolution d'une crise qui ressemble un petit peu, et je pense qu'effectivement
25:29 c'est une discussion qui doit se faire avec je pense toutes les parties prenantes, et
25:35 effectivement aussi les pouvoirs publics. Pour l'instant c'est surtout une
25:39 discussion entre professionnels. Francis Maliche, qu'est-ce qu'il faut changer selon toi ?
25:45 Tu évoquais déjà tout à l'heure des nouveaux projets, des nouveaux sujets sur lesquels il faut
25:50 plancher. Est-ce qu'il y a des choses dans la feuille de route qu'il faut mettre très vite en
25:56 place ? Oui, moi je crois, on a parlé du changement climatique, moi je crois qu'on ne peut pas gagner
26:03 la bataille du changement climatique avec les outils qu'on a aujourd'hui, parce que en fait,
26:08 quand je regarde la façon dont on encourage le changement climatique, je parlais du secteur
26:13 financier, on le fait beaucoup sous forme de standards qui sont volontaires, appliqués par
26:21 des grandes banques, et en fait parce que les activistes se focalisent de façon tout à fait
26:29 classique sur les grands noms, les sociétés cotées, etc. Et ça marche bien, avec un détail
26:34 près quand même, c'est qu'on voit beaucoup de tonnes de CO2 qui sortent des bilans et qui sortent
26:38 pas vraiment de l'atmosphère. C'est-à-dire qu'en fait on a une espèce de, comme on avait un shadow
26:44 banking, on a un shadow carbon banking en fait qui se met en place avec des gens qui sont moins
26:48 motivés par le changement climatique et qui flairent une bonne affaire, et voilà, le capitalisme se
26:54 joue comme ça. Donc je pense que là il y a vraiment un besoin de remettre les choses un petit peu à
26:59 plat en termes de régulation, l'assurance est un investisseur à très long terme, moi je voudrais
27:05 que les fonds de pension pensent aussi au très long terme et pas seulement au prochain trimestre,
27:08 quel bien cela fait-il à un retraité anglais d'investir et de ne pas prendre le risque justement
27:16 de ces marchés émergents si dans 20 ou dans 30 ans il y a un milliard de réfugiés climatiques,
27:24 qu'est-ce qu'il va devenir en sa pension ? Et donc je crois que toutes ces choses-là qui sont
27:28 faits en mélange de régulation et de décision de business, notre système n'est pas pensé à
27:35 l'échelle de temps nécessaire à résoudre la crise climatique. Donc s'il y a une chose à changer,
27:39 je pense qu'aujourd'hui c'est cela, c'est indirectement le résultat de la guerre en
27:46 Ukraine. Je crois que la guerre en Ukraine nous amène à repenser un certain nombre de choses,
27:52 un certain nombre de choses qui nous semblent acquises, mais je crois que le défi, cette guerre
27:58 va continuer, nous soutenons l'Ukraine comme vous le savez à la beurre, de façon tout à fait
28:04 décisive et importante pour nous, mais l'enjeu des décennies prochaines c'est le changement
28:12 climatique et je pense qu'on est mal parti si on continue avec les outils qu'on a aujourd'hui
28:16 et les comportements et les incentives que le système capitaliste nous dicte. Voilà,
28:21 je suis en train d'essayer de faire la révolution communiste, mais je pense qu'il faut quand même
28:26 réfléchir à la façon dont on prioritise les investissements sur le climat. Si tu avais un
28:31 vœu à formuler ou un souhait, un coup de baguette magique, ce serait quoi ta solution pour qu'on
28:37 arrive à trouver les bons leviers ? Moi je crois qu'il y a une solution de réglementation, c'est
28:43 à dire nous on s'engage beaucoup avec les banques partenaires, donc à la beurre on travaille avec
28:47 environ 300-350 institutions financières partenaires dans les 36 pays dans lesquels on
28:51 travaille. On est passé d'un modèle où on leur prête de l'argent pour qu'elles investissent
28:55 dans le climat, à un modèle où on les aide à elles-mêmes être alignées sur l'accord de Paris
28:59 et donc à prendre l'ensemble de leurs décisions en ligne de mire le risque climatique. Et les
29:06 banques nous disent "on vous aime bien, mais on va vraiment bouger quand le régulateur nous
29:10 demandera de bouger". Et donc on a fait un sondage, elles le disent de façon un peu plus polie que
29:14 ça, mais c'est ça la réalité. Donc je crois que la réglementation est vraiment essentielle et au-delà
29:22 de ça, je pense qu'il y a vraiment, si j'avais une baguette magique, ce que je changerais c'est
29:25 l'allocation d'actifs des sociétés de gestion d'actifs. Aujourd'hui il y a de l'argent dans le
29:30 monde, simplement les milliers de milliards, parce que c'est quand même de ça qu'on parle, il y a
29:34 3000 milliards à investir dans les pays émergents pour l'adaptation et pour le changement climatique
29:39 chaque année. Il y a en gros deux ou trois fois ça sur les marchés émergés, j'ai moins de soucis
29:46 sur les marchés avancés que sur les marchés émergents et pourtant encore une fois la bataille
29:50 climatique, elle se jouera, elle se perdra ou elle se gagnera sur les marchés émergents. Et en fait
29:56 l'allocation, les sociétés de gestion d'actifs qui disent "mon régulateur m'interdit d'avoir plus
30:00 que 5% de mes actifs en non-investment grade" par exemple, là il y a un problème parce qu'on
30:06 va pas y arriver avec 5%. Valérie, je vous voyais réagir peut-être, un complément ou une réaction ?
30:12 Déjà effectivement l'équation est complexe, on doit à la fois faire face à une demande croissante
30:18 d'électricité et d'électricité décarbonée dans l'avenir, une nécessité qui s'est imposée à nous
30:26 de manière plus évidente qui est celle de la sécurité des approvisionnements et puis aussi
30:32 préserver à la fois le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises. Donc
30:36 le triangle, ça ressemble à un triangle d'incompatibilité et il est un peu difficile
30:42 de le sortir. Et c'est vrai, alors là je reprends un peu ma casquette d'économiste, que la question
30:48 du risque, la notion, l'équilibre entre la gestion prudentielle, les contraintes prudentielles et la
30:54 gestion et la prise de risque dans le système financier, mais là il faudrait remonter aussi
30:59 à ce qui s'est passé depuis la crise de 2008, sont véritablement des sujets qui semblent s'opposer
31:04 et non pas se compléter. Donc c'est une vraie problématique et j'ai peur de ne pas pouvoir y
31:10 répondre ou la résoudre immédiatement en tout cas. Mais ce que je vois quand même, c'est encore
31:15 une fois une opportunité par les prix dans véritablement l'accélération de cette transformation.
31:22 Alors elle est complexe, elle est pénible, il faut bien le dire, et elle est coûteuse à un moment donné,
31:27 il y a des équilibres financiers à retrouver. Dans un contexte encore une fois où on va aller vers
31:33 la... d'abord on s'est aperçu qu'on ne pouvait pas se passer des énergies pilotables, que ce soit le
31:38 nucléaire et même j'allais dire à court terme le gaz, et le gaz est une énergie de transition pour
31:43 beaucoup de pays émergents qui sont encore à sortir ou qui devraient sortir du charbon. Donc
31:48 tout ça reste quand même dans le mix énergétique un sujet global effectivement qu'il ne faut pas
31:53 complètement nier. On l'a vu au moment des déclarations du G20, les choses ne sont pas si
31:59 simples et on ne peut pas regarder uniquement du prisme européen. On est en avance de ce point de
32:03 vue mais on a aussi des énergies maintenant qui sont intermittentes et ça change complètement
32:10 le paysage et l'organisation de notre mix énergétique. Il ne faut pas croire que l'Europe
32:17 va devenir complètement indépendante et souveraine, c'est à dire que nous pouvons aussi nous trouver
32:22 en situation de remplacer des dépendances par d'autres. Certaines matières premières, certains
32:27 métaux critiques ou dits rares sont aussi produits ailleurs. Donc on n'est pas complètement, on sera
32:33 toujours dans une situation de dépendance et il va falloir gérer toutes ces paramètres.
32:38 Alors on arrive presque au terme de nos échanges, peut-être en guise de conclusion,
32:44 quel est chacun dans votre domaine de spécialité la bonne question à se poser aujourd'hui,
32:50 j'ai envie de dire le sujet sur lequel il va falloir plancher. Bruno.
32:54 Vous me donnez l'occasion de mentionner notre contribution au forum de Davos de
33:01 March McLennan et le global risk report que l'on fait en interviewant nos grands clients.
33:07 Tous les ans, dès janvier.
33:09 C'est ça, tout à fait. Et je crois qu'une des conclusions cette année c'était de dire que
33:15 ces 20 dernières années de globalisation, on a beaucoup privilégié la croissance, l'efficacité
33:26 dans les supply chain et en faisant cela, on a sans doute créé dans les entreprises une espèce de
33:32 dette de résilience, une espèce de vulnérabilité au fond. Et je pense que cette crise, cette situation
33:38 actuelle, elle illustre cela. Et je pense que du coup, le moment est venu de reprioriser au
33:45 sein des conseils d'administration la gestion des risques et en demandant au comité d'audit et des
33:49 risques de ne pas seulement, je veux dire, repasser le registre des risques, mais de se redire comment
33:56 est-ce qu'on va pouvoir aller chercher de la croissance, parce que c'est quand même l'objectif
33:59 de toutes les entreprises, dans un environnement où les risques sont différents et bien souvent aggravés.
34:04 Dure question. Je pense que les comités vont plancher. Valérie, vous me donnez l'occasion de
34:13 parler de la contribution de la commission de régulation de l'énergie justement au débat sur
34:17 la prochaine loi de programmation de transition climatique et énergétique. Et c'est vrai que
34:24 nous nous sommes attachés à mettre en avant ces questions à la fois de flexibilité,
34:30 de véritablement d'une approche holistique en fait de l'ensemble du mix énergétique,
34:37 au regard de ces contraintes qui restent quand même très importantes à court terme et que
34:41 nous surveillons. Francis, quelle est la question clé pour toi ? Dans mon domaine, donc c'est vraiment
34:51 le secteur, les secteurs financiers des marchés émergents, je dirais il y a deux questions. Il y a
34:56 une question du risque climatique et il y a une question de construire des systèmes financiers
35:01 qui soient davantage résilients et en particulier qui fassent davantage appel aux marchés de capitaux.
35:05 Les marchés de capitaux sont totalement sous-développés dès qu'on passe en fait la frontière
35:11 polonaise. Si on mesure la profondeur des marchés de capitaux, on donne un indice 100 à des marchés
35:16 comme la France et l'Allemagne, on est à 30 en Pologne et on passe tout de suite à 10 au deuxième
35:20 pays qui doit être la Slovénie. Donc on voit qu'on est très très loin du compte et ça, ça veut dire
35:24 une fragilité, ça veut dire 80 à 90 % de l'intermédiation financière faite par les banques.
35:30 Mais ça veut aussi dire que les acteurs de l'économie ont moins accès au capital et ça,
35:35 c'est un vrai problème justement en conjonction avec le challenge climatique qui nous attend.
35:43 Donc je crois que la question que j'ai envie de poser soit à un gouvernement, soit un gouverneur
35:49 de banque centrale ou même un banquier privé, c'est qu'est-ce que vous faites pour qu'il y ait
35:53 des marchés de capitaux qui fonctionnent dans votre pays ? Et c'est une question très compliquée et
35:56 ça va toucher jusqu'à la politique monétaire et le droit des affaires.
36:00 Merci beaucoup à tous les trois. Nous allons maintenant nous pencher sur la position de la
36:08 Chine dans le nouvel ordre économique mondial et avec Marie-Françoise Renard dans quelques instants.
36:14 Merci.
36:14 [Musique]

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