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Frankenstein : le film Netflix tant attendu de Guillermo del Toro est-il à la hauteur des espérances ?

Le maître du gothique, Guillermo del Toro, nous livre sa vision du mythe de Frankenstein, un projet qui hante sa carrière depuis vingt ans. Annoncé comme le film Netflix de 2025, il promettait d'explorer des thèmes chers au réalisateur : la frontière entre l'humain et l'inhumain, la beauté cachée dans l'effroi, et la quête de compréhension des monstres.

Pourtant, malgré une ambition palpable, une mise en scène somptueuse et une atmosphère gothique industrielle immersive, le film échoue à créer l'impact émotionnel espéré.

Ce Frankenstein, aussi beau soit-il visuellement, ne parvient jamais à faire battre son cœur.

#Frankenstein #GuillermoDelToro #NetflixFilm
Transcription
00:00C'était l'un des films les plus attendus de l'année.
00:02Une des plus grosses, si ce n'est la plus grosse sortie Netflix de 2025.
00:06Tout le monde en a parlé.
00:07Il a été annoncé comme le meilleur film produit par Netflix.
00:10Ce film, c'est Frankenstein.
00:12Et avant d'entrer dans le vif du sujet, un préambule s'impose.
00:15On aime profondément Guillermo del Toro.
00:17On aime et on est fasciné par toutes les thématiques qu'il travaille inlassablement.
00:20La frontière entre l'humain et l'inhumain.
00:21La beauté cachée dans ce qui effraie.
00:23L'enfance comme chambre noire de l'imaginaire.
00:25Le pouvoir destructeur des pères.
00:27Et ce besoin viscéral de comprendre les monstres plutôt que de les détruire.
00:31Et en général, de dénoncer ceux qui sont véritablement monstrueux.
00:35Alors quand on a appris qu'il travaillait enfin sur Frankenstein, on était impatient.
00:39Véritablement impatient.
00:40Parce que ce roman hante sa filmographie depuis 20 ans.
00:43Avec l'adaptation des Montagnes hallucinées de Lovecraft, c'est le film qu'il rêve depuis toujours de faire.
00:49Et pour cause, toutes ces thématiques convergent.
00:50Que ce soit dans les Montagnes hallucinées ou dans Frankenstein.
00:53On pourrait même dire que tous les films de Del Toro n'étaient qu'une préparation du moment où il aurait l'occasion de faire ses films enfin.
00:59Et ce moment est venu.
01:01Netflix est intervenu.
01:02Guillermo Del Toro a pu faire son Frankenstein.
01:05Alors qu'est-ce qu'on en pense ?
01:06Est-ce qu'il a réussi à signer l'oeuvre somme qu'on attendait ?
01:09Est-ce qu'il a réussi à affronter ce mythe qui semble compter autant pour lui ?
01:13Alors pour nous, on ne va pas faire trop durer le suspense.
01:15Ce film est une déception.
01:17Une déception à la hauteur de l'attente.
01:19À la hauteur du respect qu'on a pour l'artiste.
01:21Et on va vous expliquer pourquoi.
01:22Mais d'abord le pitch.
01:23On suit Victor Frankenstein.
01:25Un chirurgien brillantissime.
01:27Traumatisé par la perte de sa mère.
01:28Et par la rigidité de l'éducation de son père.
01:31Qui se met en tête de recréer la vie à partir de morceaux de corps assemblés.
01:35Il trigonfera du trépas.
01:37Il ira jusqu'au dédain pour la vie même s'il le faut.
01:40Et il y parvient.
01:41Mais très vite sa création le dépasse.
01:43Et le confronte à tout ce qu'il refusait de voir.
01:45Ses peurs, ses fautes et la responsabilité d'un geste immense.
01:49Et qu'il ne maîtrise plus.
01:50Alors qu'est-ce que c'est notre problème avec ce Frankenstein ?
01:52Parce qu'en théorie ce film a tout pour nous plaire.
01:55Dès l'ouverture le film affiche un vrai souffle épique.
01:58Le grand nord, la voix grave et les aboiements de Lars Mikkelsen.
02:01Une séquence d'action qui nous plonge directement dans la découverte de la créature et de sa toute puissance.
02:06Puis une narration construite pour nous plonger dans l'esprit tortueux du savant fou.
02:10La promesse d'une plongée psychologique complète.
02:12Dans la psychose, dans la solitude, dans la dérive créatrice du génie.
02:16Et il faut le dire, la mise en scène est somptueuse.
02:19Del Toro utilise son scope avec une précision remarquable.
02:22Les décors respirent la matière, la densité du gothique industriel.
02:26Chaque plan ressemble à une gravure.
02:28Chaque mouvement de caméra possède une intention claire.
02:31Le film a tout d'un grand film.
02:33Il en possède les signes, la musique, l'ampleur, l'originalité dans les séquences.
02:37Il ressemble à un grand film.
02:38Mais il ne dépasse jamais le statut de la promesse.
02:41Il aligne les idées, les motifs, les intentions, sans jamais produire l'impact émotionnel qui devrait en découler.
02:47On voit le film que Del Toro veut faire.
02:49On comprend chaque choix.
02:50On perçoit la logique, la psychologie, le sous-texte.
02:54Mais ça ne prend jamais corps.
02:56Ça ne fonctionne jamais.
02:57Le film échoue à nous embarquer avec lui.
03:01Parce qu'on a du mal à croire aux personnages.
03:03On a du mal à croire qu'ils existent en dehors de ce qu'ils doivent symboliser.
03:06Ils ne sont jamais que les vecteurs d'une idée, les porteurs d'un discours.
03:10Victor, c'est l'hubris scientifique, le premier été moderne.
03:13Elisabeth, c'est la compassion éclairée.
03:15La créature, c'est la figure de l'altérité blessée.
03:18Le tout premier humain qui relèverait la tête et qui dirait pourquoi, pourquoi cette violence.
03:21Et chacun avance sur des rails, sans surprise, sans déviation, sans contradiction.
03:25On ne croit pas à leur désir.
03:27On ne croit pas à leur peur.
03:28On ne croit pas à l'épaisseur de leur humanité.
03:30On ne croit pas à l'attirance de Victor envers Elisabeth.
03:32Si ce n'est conceptuellement parce qu'elle est le prolongement de sa mère.
03:35Le film insiste tellement dessus, avec une telle peur qu'on ne comprenne pas,
03:38que la même actrice incarne les deux rôles.
03:40Celui de la mère d'abord, puis celui d'Elisabeth.
03:42Mais dans les faits, on ne ressent jamais cette obsession chez Victor.
03:45Elle ne déraille pas vraiment le film.
03:47Rien ne passe dans la partition d'Oscar Isaac.
03:49C'est une idée posée sur le personnage, pas un mouvement intérieur qui l'habite.
03:53Et c'est le même problème qu'on retrouve chez Elisabeth elle-même.
03:55Son lien avec la créature s'explique parfaitement.
03:57On nous a montré qu'elle était fascinée par les insectes,
03:59et donc par les formes de vie marginales, étranges, incomprises.
04:02La créature entre donc naturellement dans ce champ d'empathie.
04:05Mais là encore, l'argument tient sur le papier, pas à l'écran.
04:09Le rapprochement paraît soudain, il ne se construit jamais.
04:11Un regard et c'est le coup de foudre.
04:13Après oui, c'est Jacob Elordi.
04:14Ce qui est un autre problème, mais quand même.
04:16Et que dire de Victor lui-même, qui passe brutalement vis-à-vis de sa créature,
04:19de la fascination à la peur ?
04:20La créature se met en colère parce qu'elle est frappée au visage.
04:23Et Victor, qui devrait en entrer en empathie avec ça, décide qu'elle est un monstre.
04:26Le film justifie ce revirement en l'inscrivant dans la reproduction des violences paternelles.
04:30Victor ne fait que rejouer ce qu'il a subi.
04:33C'est une explication psychologique limpide, encore une fois.
04:36Mais c'est un basculement dramatique qui, là encore, n'existe jamais vraiment.
04:40Mais le plus gros problème réside beaucoup dans la créature pour nous.
04:43Le film cherche à créer de l'empathie envers quelque chose de monstrueux,
04:46ce que Guillermo del Toro sait faire.
04:47Mais la créature n'a rien de monstrueux.
04:49Elle n'a rien d'inhumain.
04:51Elle traverse le cadre avec une grâce évidente,
04:53un visage harmonieux, une présence presque iconique.
04:56Cette élégance annule l'idée même de difformité,
04:59surtout dans un cadre où des gueules cassées il y en avait.
05:01Le film insiste sur son regard, sur sa stature, sur sa grâce silencieuse,
05:05au point où l'on oublie que cette créature est censée incarner une rupture avec l'ordre naturel.
05:09Rien ne heurte, rien ne dérange, rien ne secoue.
05:12La monstruosité perd de son poids dramatique.
05:15L'expérience devient trop lisse pour soutenir un enjeu mythologique,
05:18comme un homme devient dieu en recréant la vie.
05:20On voit un être magnifique là où l'histoire exigeait une tension entre la fascination et l'effroi.
05:26En somme, la créature ressemble au film de Del Toro.
05:29Le corps est magnifique, la silhouette est parfaite.
05:32C'est un rêve d'alchimiste, un être conçu pour porter toutes ses obsessions.
05:37La figure du père destructeur, la beauté cachée dans l'horreur,
05:40la solitude des êtres différents,
05:42l'enfant blessé qui cherche refuge dans la création,
05:45tout est là.
05:46Absolument tout, il ne manque que l'étincelle.
05:49Le souffle, l'âme, le coup de poing sur le cœur qui fait prendre vie au corps.
05:53Del Toro a enfin fabriqué son Frankenstein,
05:55mais à la différence de Victor avant lui,
05:58sa créature ne parvient jamais à devenir vivante.
06:01Comme si Del Toro avait du mal à déployer une morale dans le vide.
06:05Ses films les plus impactants pour nous s'adossent au fascisme espagnol,
06:08dans le labyrinthe de Pan par exemple,
06:09ou l'italien dans Pinocchio,
06:10un monde dans lequel les méchants sont des humains
06:12campés derrière une perfection esthétique
06:14qui s'adonne aux monstrueux.
06:15Pendant que l'humanité, elle, se trame et se réfugie
06:18dans les recoins parmi les monstres et les rebuts.
06:20Quand on lui donne carte blanche pour créer un système moral,
06:22on obtient Frankenstein.
06:24L'homme est mauvais parce qu'il est traumatisé,
06:26mais la violence réside à même la nature
06:28parce que les loups mangent les brebis,
06:29donc finalement, il faut tâcher de vivre.
06:31Les archétypes de Del Toro ici,
06:33le savant, le mécène, la jeune empathique, le monstre,
06:36jusqu'au capitaine, sont fluctuants.
06:38Sans épines dorsales morales,
06:40prêts à être conquis par tel ou tel retournement du scénario.
06:43Et finalement, on n'y comprend plus rien.
06:45Si vous avez aimé,
06:46parce qu'on aurait aimé l'aimer ce film
06:48et qu'on va le revoir,
06:49donnez-nous les clés qui nous ont manqué, selon vous.
06:52Et si on change d'avis,
06:53on se fera une joie de vous dire par quel chemin.
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