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  • il y a 10 heures

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00:00Bienvenue dans les récits extraordinaires de Pierre Bellemare, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:11Aimé Blancard avait beau être un ancien gardien de la paix à Paris, il put difficilement résister au spectacle.
00:19Il fallait en effet avoir le cœur, comme l'on dit, bien accroché, pour passer outre son horreur et s'approcher, comme il le fit, des deux cantonniers qui tentaient de tirer à l'écart des rails, comment dire, quelque chose, oui, quelque chose qui avait été quelqu'un, qui avait été un être humain.
00:43« Et trouver ce quelque chose, un matin de novembre, à six heures, n'est pas fait pour réjouir le cœur d'un homme, fut-il ancien gardien de la paix. »
00:53C'est en passant dans sa charrette sur le pont de la vieille route de Sanlis à Chantilly, qu Aimé Blancard avait aperçu les deux cantonniers en contrebas sur la voie, se livrant à leur peu agréable besogne.
01:06Il avait tout de suite compris et s'était précipité pour les aider.
01:08« C'est dur ! » articula le cantonnier-chef Constant Gavillon.
01:16« Pour être dur, » fit Aimé Blancard en avalant péniblement sa salive.
01:22« Il a souffert, » commenta le cantonnier adjoint Louis-Augustin Doré.
01:29« Faut-il être à bout pour en arriver là ? » reprit Blancard.
01:33Déjà peu de temps avant, on avait retrouvé un autre désespéré à cet endroit, un joueur décavé venu en finir avec la déveine.
01:43« C'était un bourgeois ! » fit Doré.
01:47Les trois hommes eurent le courage de tourner à nouveau les yeux vers le cadavre.
01:51L'habit était fort convenable, en effet, un complet à carreaux de bonne étoffe, une chemise de toile bistre.
01:57Les mains n'avaient pas souffert et, manifestement, n'étaient pas celles d'un travailleur de force.
02:03Mais l'homme lui-même...
02:06C'était le visage qui avait les plus profondes blessures, à la tête et au cou.
02:11Le nez avait disparu et la jambe gauche aussi, coupée nette, au-dessus de la cheville.
02:15« Il a dû se coucher sur le rail et attendre le train, » dit Gavillon.
02:22La chose était maintenant à l'écart de la voie dans le fossé.
02:26Heureusement, le beau Vépari apparut au détour de la voie.
02:29Gavillon saisit sa lanterne et l'agita.
02:32Du train, on la vit nettement, car le jour se levait à peine.
02:36« Qu'est-ce que c'est ? » fit le mécano.
02:37Le train, bien lancé, passait à la hauteur du groupe.
02:40« Mort ! Cadavre ! Gendarme ! » entendit le chauffeur pencher à l'extérieur.
02:45Et l'un des trois hommes faisait en criant un geste,
02:48la main tenue à plat, passant sur le cou d'une oreille à l'autre.
02:52« Je crois qu'ils ont trouvé un macabé, » fit Émile, le chauffeur.
02:56« On va s'arrêter. »
02:58Le mécano hausse à les épaules et lui fit signe de forcer la chauffe.
03:02Il s'arrêta comme prévu, aori la ville et fit un rapport en une minute au chef de gare.
03:06Moins d'une heure plus tard, un brigadier à cheval et un ancien dragon à moustache blanche,
03:12surnommé le père Silence pour son verbe rare,
03:14arrivaient sur les lieux du drame.
03:17Ainsi commençait l'enquête qui allait passionner les lecteurs de gazettes.
03:22L'affaire Hippolyte Hoyos.
03:25Qui a tué Hippolyte Hoyos ?
03:28C'est la question que chacun se posa
03:30et que vous n'allez pas manquer de poser maintenant,
03:33vous, amateurs de dossiers extraordinaires.
03:36Aimé Blancard, l'ancien gardien de la paix à Paris,
03:58avait un peu l'habitude de ces choses-là.
04:00Il fit en sorte que l'on touchât le moins possible au corps
04:02et s'opposa à une fouille en attendant l'arrivée des autorités.
04:07« Je ne suis pas tellement d'accord avec vous, » dit-il au cantonnier.
04:11« En y réfléchissant, je ne suis pas sûr que ce soit un suicide. »
04:16Le brigadier à cheval Ponsard et le père Silence arrivèrent sur ses entrefaits.
04:21Aussitôt, pied à terre, ils examinent le cadavre.
04:23« Drôle de blessure, » fit Ponsard.
04:28« Je jurerais que c'est une hache plutôt qu'une roue de train qui a fait ce sale boulot. »
04:32« Ah ! Qu'est-ce que je vous disais, » triomphe Blancard.
04:36« Ça voudrait dire qu'il n'est pas descendu tout seul de là-haut, »
04:39fait-il en désignant le pont.
04:41« Montons voir, » propose le brigadier.
04:45« Sur le pont, les choses sont claires. »
04:47« Regardez, du sang sur le parapet, on l'a basculé par-dessus. »
04:52« C'est un crime. »
04:53« À moins persiste le cantonnier, à moins qu'il ne se soit tranché la gorge avant de sauter. »
04:59Le père Silence lui tape sur l'épaule et sans un mot désigne une traînée rouge sur le sol
05:04qui conduit à dix mètres à une large flaque sombre et épaisse
05:08dans laquelle on distingue des traces de pas.
05:12Donc on a tué là-bas, traîne le corps que l'on a précipité par-dessus le parapet.
05:17L'assassin est ensuite descendu pour disposer sa victime sur la voie.
05:22« Il a dû être dérangé dans sa mise en scène, » dit Ponsard.
05:25« Il n'a pas eu le temps de faire disparaître les traces sur le pont. »
05:30Ils redescendent, pensif.
05:32« C'est sûrement pour qu'on ne reconnaisse pas le bonhomme, » dit un cantonnier.
05:37« Sûrement pas. »
05:39« C'est juste pour faire croire à un suicide. »
05:41« Sans cela, le criminel aurait démarqué les vêtements et vidé les poches. »
05:46« Ce qu'il n'a pas fait, » précise le gendarme en se penchant sur la dépouille. »
05:49« L'identification est vite effectuée. »
05:53« On trouve dans les poches du beau costume à carreaux. »
05:56« Une facture d'un armurier, martard, embouillé, pour une douzaine de pétardes de feu d'artifice. »
06:01« Elle date de trois mois et est dressée au nom de Monsieur le Compte. »
06:06« Un papier avec une adresse. »
06:10« Enfin, une lettre, libellée d'une plume élégante. »
06:15« J'ai la copie de cette lettre sous les yeux, chers amis, je vous la lis. »
06:18« Mon cher fils, j'ai reçu votre dernière lettre ainsi que celle de votre frère Émile. »
06:24« Je comptais aller vous voir tous deux cette semaine et je vous remettrai moi-même ce que vous m'avez demandé. »
06:30« Je vous télégraphierai avant de prendre le train. »
06:33« En attendant le plaisir de vous voir, je vous embrasse mille fois de cœur. »
06:36Ce sont également les initiales qui ornaient la chemise bistre du mort ainsi que son mouchoir.
06:48La lettre était adressée à un certain Émile Hoyos, officier à Bruxelles.
06:54On ne trouve par contre pas un centime sur le corps.
06:58Enquête auprès du sieur Gopillot dont le mort possédait l'adresse.
07:01Gopillot avait négocié la vente de sa ferme un mois auparavant avec un certain Hippolyte Hoyos.
07:08H. H.
07:10L'armurier Martin répondit quant à lui sans hésiter.
07:13« Cette facture ! J'ai vendu moi-même le feu d'artifice au régisseur du comte de Roveyrollis à Poigny.
07:18Son nom ? Hoyos. Hippolyte Hoyos. »
07:22H. H.
07:24Monsieur le comte, le fils en Belgique Émile Hoyos,
07:27la victime sauvagement égorgée puis achevée à coups de hachette,
07:30était donc Hippolyte Hoyos, H. O. Y. O. S.
07:35Belge, né une quarantaine d'années auparavant dans la province de Mons,
07:40engagé comme régisseur par M. de Roveyrollis, comte et ingénieur chimiste
07:44qui possède du terrain et des fermes à Poigny.
07:47Très grand, blond, d'un abord sympathique, connaissant très très bien les travaux fermiers,
07:52il avait progressé rapidement.
07:53Mais son caractère difficile et sa tendance à commander ne lui avaient pas fait que des amis.
08:01À cela, d'ailleurs, ne l'avait pas aidé sa femme, maigre et sèche, qui ne parlait à personne.
08:08Ils avaient trois enfants de 8 à 2 ans.
08:10D'un premier lit, il avait deux fils, Émile et Honoré, tous deux militaires en Belgique.
08:14À cause de leurs différends assez fréquents sur la marche des fermes,
08:18le comte ne lui avait pas renouvelé son contrat.
08:21Mais dans le même temps, Hippolyte Hoyos apprit que sa femme faisait un important héritage en Belgique.
08:26Il s'installa donc avec sa famille à l'auberge Bonhomme à Poigny
08:30et le 30 octobre, parti pour Liège afin de régler cette affaire d'héritage.
08:35C'est le 3 novembre qu'on retrouva son corps sur la voie ferrée.
08:39Pas besoin de chercher très loin le mobile, il devait revenir avec une très forte somme d'argent sur lui.
08:45C'est le jour même que l'on arrêta un clochard, un certain Étienne Bouillot.
08:51Les gendarmes le trouvèrent cassant la croûte sur un talus.
08:54Comme il fuyait à leur approche, ils lui mirent la main au collet
08:57et constatèrent qu'il avait en poche un mouchoir ensanglanté
09:01et que sa veste et son pantalon étaient souillés de la même manière.
09:06« J'ai été renversé cette nuit par un attelage et j'ai saigné du nez. »
09:10Mais cette explication ne convainquit personne, d'autant moins que l'homme,
09:14avoua venir de Chantilly et être passé sur le pont tragique dans la nuit même.
09:19On tenait donc l'assassin de Hippolyte Hoyos.
09:23Vous allez penser, chers amis amateurs de dossiers extraordinaires,
09:27que celui-ci est tout à fait banal
09:28et qu'il valait mieux passer de la musique
09:31plutôt que de raconter le crime d'un cheminot
09:34dont l'auteur est arrêté à quelques kilomètres le jour même.
09:37Eh bien, cela signifierait que vous oubliez notre affection particulière
09:42pour les coups de théâtre.
09:44Et ce qui se passa dans l'affaire Hoyos,
09:47c'est un vrai coup de théâtre,
09:49répondant parfaitement à la règle du genre
09:51avec retournement de situation, nouveaux mystères et tout et tout.
09:54Les récits extraordinaires de Pierre Belmar, un podcast européen.
10:06Revenons maintenant à l'affaire Hippolyte Hoyos.
10:09« Pour quelle somme, s'il vous plaît ? »
10:13était assuré M. Hoyos.
10:16Le grand monsieur distingué s'est adressé discrètement
10:18à l'employé du guichet.
10:20« Nous sommes dans les locaux de la compagnie Le Phénix
10:23et le grand monsieur se montre bien curieux,
10:26d'autant plus qu'il est le président du conseil d'administration
10:28d'une compagnie rivale.
10:29Mais en passant dans le hall,
10:31alors qu'il sortait du bureau de son concurrent et ami,
10:34le président du Phénix,
10:35le baron du Bourdieu a entendu le nom de Hoyos.
10:40Celle qui le prononçait est une petite femme maigre et sèche,
10:44la femme du défunt.
10:45En fait, elle n'est pas vraiment sa femme.
10:48Elle se nomme Alfonsine Fig.
10:51Et Alfonsine venait toucher le montant de l'assurance
10:53sur la vie de Hoyos.
10:55En entendant la somme, le baron conseille
10:58« Différez le paiement.
11:01Il y a quelque chose là-dessous. »
11:04Oui, il y avait quelque chose.
11:07Trois mois plus tôt,
11:10la compagnie concurrente dirigée par le baron
11:12avait reçu une demande de contrat du même Hippolyte Hoyos.
11:16Cette demande était introduite par un assureur du nom de Huet.
11:19« Or, » déclare le baron au juge Auburetin
11:23qui instruit l'affaire Hoyos,
11:24« Or, je suis moi-même originaire de la région
11:27où était censé résider ce Huet.
11:29Et je sais pertinemment qu'il n'a jamais existé.
11:32J'ai donc refusé le contrat
11:34parce que je connais ce genre d'escroquerie depuis longtemps.
11:37Mais où est l'escroquerie, monsieur le baron ? »
11:40C'est très simple.
11:41Il faut savoir que nous avons coutume
11:43de rémunérer nos courtiers
11:44en leur abandonnant la première année de prime.
11:47Il suffit donc de créer un assureur fantôme
11:50pour gagner les versements d'un an.
11:53Le juge Auburetin réfléchit très vite
11:55et fait demander en Belgique
11:57une photographie du sieur Hoyos.
11:59Puis, il ordonne une exhumation du corps.
12:02La funèbre cérémonie
12:05a lieu en présence de nombreux témoins
12:07qui ont connu Hoyos.
12:09On ouvre le cercueil
12:10et ce n'est qu'un cri.
12:14« Ce n'est pas Hoyos ! »
12:16« Non ! »
12:17« Ce n'est pas Hoyos qui est enterré à Chantilly. »
12:20« Mais c'est baron ! C'est baron ! »
12:23Un vaché de poigny reconnaît formellement
12:25le corps mutilé.
12:26« C'est Louis baron ! »
12:28Belge également, 52 ans.
12:30Un garçon de ferme, au service.
12:32« Fils de Hoyos ! »
12:36Alors, où était Hoyos, le vrai ?
12:41Il fut arrêté assez facilement à Valenciennes
12:43où il vivait sous le nom de…
12:46« Baron ! »
12:48« Pourquoi pas, me direz-vous ? »
12:50Mais il avait lu dans les journaux
12:52que l'identité du mort de Chantilly
12:53était mise en doute.
12:54Alors, savez-vous ce qu'il avait imaginé ?
12:57Eh bien, on trouva sur lui
12:59le brouillon d'une lettre.
13:01Cette lettre,
13:02était adressée au juge aux buretins
13:03et disait ceci.
13:05« Mais non !
13:06Je ne suis pas le mort de Chantilly.
13:07Je suis bien en vie
13:08et je n'ai nul désir de quitter ce monde.
13:11J'habite Valenciennes
13:11et si vous avez besoin de quelques renseignements,
13:14je me tiens à votre disposition
13:15au premier appel. »
13:18Ainsi, pensait-il pouvoir dire le cas échéant ?
13:20« Vous voyez, j'ai la conscience tranquille,
13:22je ne me cachais pas. »
13:24Seulement, au même moment,
13:26on arrêtait Alphonsine Figue,
13:27sa concubine,
13:28et elle aussi portait sur elle
13:30un brouillon de lettres
13:30destinées à une tenancière
13:32de la pension de Poigny.
13:34Dans cette lettre,
13:34elle s'inquiète.
13:36Je dois vous lire ce texte en entier
13:37pour que vous compreniez
13:38l'importance
13:39du raisonnement machiavélique
13:41qu'il révèle.
13:41« Ma chère et bonne dame,
13:44veuillez, je vous en supplie,
13:46avoir l'extrême obligeance
13:47de me dire si Hippolyte
13:48est toujours chez vous.
13:49Il m'a quitté vendredi vers une heure
13:51pour se rendre samedi après-midi
13:52à Rambouillet
13:53et venir me rejoindre lundi.
13:56Et je ne le vois pas.
13:57Il ne reçoit aucune nouvelle de lui.
13:59Comme il est très hardi
14:00pour voyager le soir,
14:01qu'il avait une somme
14:01assez forte sur lui,
14:03je suis dans des trances mortelles
14:04redoutant un malheur,
14:06car ordinairement,
14:07il est exact à m'écrire. »
14:10Voilà donc le texte de la lettre
14:12que l'on retrouva sur Alphonsine.
14:14Le malheur,
14:15c'est que le brouillon
14:16était de la main même de Hoyos,
14:19ce qui dévoile toute la machination.
14:22L'assassin était donc confondu.
14:24D'autant plus
14:24que l'on entendit
14:26un nommé Léon Mauford
14:27coché à poigny.
14:30Le 25 du mois d'octobre,
14:32je passais sur le pont
14:33de la vieille route de Sanlis.
14:36Ce monsieur regardait
14:37avec tellement d'attention
14:37la voir en dessous de lui,
14:39j'ai bien cru qu'il voulait sauter.
14:40Alors je me suis approché
14:41et dès qu'il m'a vu,
14:43il s'est sauvé en courant.
14:44Mais je le reconnais bien.
14:46C'est lui, pas de doute.
14:48Henri Arsène Olivier,
14:49charron à Rambouillet,
14:50témoigne aussi.
14:52Cet homme-là est venu me voir
14:53pour que je lui arrange
14:54une hachette.
14:55Il m'a demandé
14:56d'aiguiser le tranchant
14:57et tant que j'y étais,
14:58de raccourcir le manche
14:59de 5 cm
14:59pour qu'elle soit plus maniable.
15:01Je ne l'avais jamais vue avant,
15:03je ne l'ai jamais revue après.
15:06Soyez-vous capable
15:07de refaire un outil
15:07exactement semblable ?
15:09Pour sûr,
15:10je l'ai encore bien dans la tête.
15:12Et Olivier reconstitue
15:13aussi exactement
15:14qu'il le peut la hachette.
15:15Elle rentre tout juste
15:16dans la vaste poche
15:18du manteau de Hoyos.
15:20Va-t-il s'avouer vaincu ?
15:21Pas du tout.
15:21Il proteste.
15:23Je jure
15:23que je ne suis jamais allé
15:25à Chantilly.
15:25Je n'y connais personne.
15:28Le juge
15:28ordonne une seconde
15:30exhumation du corps de baron.
15:32On conduit Hoyos
15:33à Chantilly.
15:33Devant le cadavre,
15:36il se cache le visage
15:36dans les mains.
15:38Mais après cette scène pénible,
15:40on l'oblige
15:40à traverser la ville
15:41à visage découvert.
15:43Alors plusieurs personnes
15:44reconnaissent en lui
15:45Antoine Luc.
15:47C'est sous cette identité
15:48qu'il avait autrefois
15:49été au service
15:50d'un propriétaire du pays.
15:52Mais Hoyos
15:53tient tête aux enquêteurs
15:54et souvent avec un aplomb
15:55qui convaincrait tout le monde
15:56s'il n'y avait pas
15:57des témoignages
15:58accablants par ailleurs.
16:00Et il va falloir
16:01beaucoup de patience
16:02pour découvrir
16:03dans le passé
16:04de Hippolytorios
16:05une série de forfaits
16:07qui laissent rêveur
16:08et pour comprendre
16:09bien sûr
16:09son plan.
16:11Fils d'infirmier
16:12très honorable,
16:14il était devenu
16:14un dévoyé au hasard
16:15de ses mauvaises fréquentations
16:16et il avait épousé
16:18une certaine Florence
16:19Anatoly Lelop.
16:21Dès le mois
16:22suivant leur mariage,
16:23il suggéra à sa femme
16:24de contracter
16:25une assurance
16:26sur la vie.
16:27Il en avait souscrit
16:28lui-même une,
16:29affirmait-il,
16:30dans une compagnie française,
16:31il la ferait mettre
16:32au nom de sa jeune femme
16:33dès qu'il aurait l'occasion
16:34d'aller à Paris.
16:36Florence Anatoly signa
16:37et deux mois et demi plus tard,
16:39dans les tables,
16:40elle était en train
16:41de soigner une vache.
16:43C'est alors
16:43que Hoyos passa
16:44conduisant à l'abri
16:46d'un jeune cheval
16:47qu'il venait d'acquérir.
16:49La bête
16:49était sûrement vicieuse
16:51puisqu'elle lança
16:52une ruade
16:52qui tua la jeune femme
16:54d'un coup
16:55en plein fond.
16:56Le médecin délivra
16:57le permis d'inhumer
16:58après avoir constaté
16:59le décès
16:59par fractures du crâne
17:01et la marque
17:01du fer à cheval
17:02au milieu du front.
17:04Mais,
17:05voyez,
17:06chers amis,
17:06comme les gens sont méchants.
17:07Voilà que devine
17:08un rapporteur
17:09envoyer à l'assurance
17:10deux lettres anonymes
17:11et que disait-elle.
17:13On aurait vu,
17:15la veille de l'accident,
17:16Hoyos
17:17en train de clouer
17:19un fer à cheval
17:20sur un maillet.
17:22Un fer à cheval
17:23sur un maillet.
17:23Oh,
17:24les gens sont méchants.
17:26D'autant plus que,
17:28vérification opérée,
17:29Hoyos avait acheté
17:29ce jour-là
17:30un fer à la forge.
17:32Mais c'est naturel,
17:33protesta-t-il.
17:34Nous possédons deux chevaux.
17:35Oui,
17:36bien sûr,
17:37naturel.
17:38Tout aussi naturel
17:39que les coliques violentes
17:40dont s'était plainte
17:41la malheureuse
17:41à des voisins.
17:42Une rapide tournée
17:43dans les deux pharmacies
17:44de Mons
17:44révélera que Hoyos
17:46y avait acheté
17:46de la poudre d'arsenic.
17:48C'est pour le jardinage,
17:49monsieur le juge.
17:50Mais,
17:52comme on n'avait rien
17:53pu prouver formellement,
17:55il obtint le non-lieu
17:56et l'assurance du payé.
17:59Hoyos s'était ensuite remarié.
18:00Cette fois,
18:01il traita si durement
18:02son épouse
18:03qu'elle opta
18:04la séparation
18:05avec une condamnation
18:06à deux mois de prison
18:06de son mari.
18:07Puis,
18:08presque aussitôt,
18:09une autre condamnation
18:10à trois ans et demi,
18:11mais cette fois
18:11pour une fausse police
18:13d'assurance
18:13sur une compagnie belge.
18:16Un magistrat belge
18:17est assassiné.
18:17Hoyos est inculpé
18:18puis relâché.
18:19Ah,
18:19j'allais oublier.
18:21Avant que sa femme
18:22n'obtienne la séparation,
18:24il avait proposé
18:24au père de son épouse
18:25d'assassiner
18:27un séparant riche
18:28pour qu'il puisse irriter.
18:29Le beau-papa
18:30ayant refusé,
18:31Hoyos tente
18:32de le supprimer
18:32en le poussant
18:33hors d'une voiture
18:34roulant à grande allure.
18:36Puis,
18:36il était arrivé en France
18:38où il vivait
18:39avec la fameuse
18:39Alfonsine Figue.
18:41C'est en France
18:42qu'il avait concocté
18:43l'opération
18:43de sa propre disparition.
18:45D'abord,
18:46il s'assure
18:47et dans plusieurs compagnies,
18:48mais uniquement sur la vie.
18:50Il veut exclure
18:51le risque accident.
18:52Pourquoi ?
18:53Quelle idée,
18:53dit un courtier.
18:55Non, non,
18:55je suis persuadé,
18:56j'ai le pressentiment
18:58que je mourrais
18:58de mort violente.
19:00Il dépose son testament
19:01chez un notaire
19:01de Rambouillet.
19:02Il y désigne
19:03comme légataire
19:04ses deux grands-fils militaires
19:05et Alfonsine Figue.
19:07Seulement,
19:08il n'a pas du tout
19:09l'intention
19:09de mettre fin
19:10à ses jours.
19:11Et comme il faut
19:11un cadavre
19:12pour que les assurances
19:13paient,
19:14ce cadavre,
19:15il va se le préparer
19:16minutieusement.
19:18Selon un plan
19:19réglé,
19:20il va le faire venir
19:21de Belgique.
19:22Mais vivant,
19:23bien sûr.
19:25Il s'agit
19:25de Louis Baron,
19:27un pauvre garçon
19:27de 52 ans
19:28qui vit séparé
19:29de sa femme
19:29et qui a le corps
19:30et l'esprit
19:31en assez piteux état.
19:33Il lui fait faire
19:34à la ferme
19:34des petits travaux mineurs.
19:35En somme,
19:36il se garde
19:36son futur cadavre
19:38sous la main.
19:39Il a recommandé
19:40aux malheureux
19:40de ne parler à personne
19:41en Belgique
19:42de sa destination,
19:43soi-disant,
19:44pour ne pas faire de jaloux.
19:45En réalité,
19:46il coupe ainsi
19:46les pistes
19:47dans ce sens.
19:49Et dans les jours
19:49qui précèdent le crime,
19:50il les coupe
19:51dans l'autre sens
19:51en répandant le bruit
19:53du retour de Baron
19:53en Belgique.
19:55Pendant ce temps,
19:55il installe
19:56sa future victime
19:56dans un hôtel
19:57de Rambouillet.
19:58Et le scénario
19:59se déroule
20:00inéluctablement.
20:0224 octobre.
20:03Il retient
20:04une chambre
20:04à Paris
20:05dans un hôtel
20:06rue du départ
20:06près de la gare du Nord
20:07pour Baron.
20:0930 octobre.
20:11Hoyos et sa famille
20:12viennent loger
20:12dans un meublé voisin.
20:1431 octobre.
20:15Il donne à Baron
20:17des vêtements
20:17à lui
20:18pour qu'il soit correct
20:20car il veut le présenter
20:22à de nouveaux patrons.
20:242 novembre.
20:25Alphonsine Figue
20:26et ses enfants
20:27prennent le train
20:28pour Valenciennes.
20:29Ce même soir,
20:30Baron et Hoyos
20:32montent dans un wagon
20:33et arrivent
20:34à Chantilly.
20:38Imaginez-les,
20:39chers amis,
20:41les deux hommes,
20:42deux silhouettes,
20:44marchant côte à côte.
20:46Il fait sombre,
20:47il pleut.
20:49Hoyos a-t-il
20:49le courage
20:50de parler,
20:50de plaisanter
20:51avec celui
20:53qu'il conduit
20:54à la mort ?
20:56Ils arrivent
20:56sur le pont
20:57de la vieille route
20:57de Sanlis.
20:58Personne n'en veut.
21:00Hoyos laisse
21:01prendre quelques pas
21:02d'avance à Baron,
21:03il sort la hachette
21:04raccourcie
21:05de la poche
21:06de son manteau
21:06et il frappe.
21:08Il frappe violemment
21:09avec méthode.
21:11Baron ne lui ressemble
21:12pas vraiment.
21:13Il est blond,
21:13aux yeux bleus
21:14comme lui,
21:14mais il a une fracture
21:16de la cheville gauche
21:17très caractéristique
21:18et surtout,
21:19son nez est surmonté
21:20d'une bosse proéminente.
21:22Hoyos frappe,
21:23il coupe la jambe,
21:24tranche le nez,
21:25taille à de la tête.
21:25Et puis,
21:27il bascule le corps
21:28par-dessus la balustrade
21:29et va le disposer
21:31sur la voie
21:31pour que le train
21:32ne puisse manquer
21:33de l'écraser.
21:35Pourquoi ?
21:36Pourquoi ?
21:38Ne termine-t-il pas
21:39son œuvre
21:39en allant faire disparaître
21:41les traces
21:41de l'accomplissement
21:42de son forfait
21:42sur le pont ?
21:43On ne le saura pas
21:44exactement.
21:47Hoyos n'avoua
21:47jamais.
21:49Il se débattit
21:50et jura son innocence
21:51sur ce qu'il avait
21:52de plus cher.
21:54Mais sans doute,
21:54les preuves
21:56étaient-elles
21:57trop nettes ?
21:58Puisque dans le palais
21:59de justice
21:59de Beauvais
22:00où il comparut,
22:02les jurés
22:02se retirèrent
22:03de la salle
22:04et on les vit
22:04avec surprise
22:05réapparaître
22:05quelques secondes
22:06après.
22:07On crut
22:07qu'ils avaient
22:08oublié quelque chose.
22:09Mais non !
22:11Ils n'avaient eu besoin
22:11que d'un instant
22:12pour écrire
22:14sur un papier
22:14leur verdict
22:15la mort.
22:16accusé.
22:20Avez-vous
22:21quelque chose
22:21à déclarer ?
22:23Que mon sang
22:23retombe
22:24sur mon beau-père
22:24parjure
22:25et sur tous
22:26ceux qui ont
22:26trompé le jury ?
22:29Hoyos
22:29refusait
22:30toujours l'aveu.
22:32Mais à l'heure
22:33de son exécution,
22:35savez-vous
22:36ce qu'il murmura ?
22:38Qu'il se repentait.
22:40A votre avis,
22:43chers amis,
22:44est-ce
22:45un aveu ?
22:46Ou
22:47une simple formule ?
22:49Vous venez d'écouter
23:09les récits extraordinaires
23:11de Pierre Bellemare.
23:12Un podcast
23:13issu des archives
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23:15Réalisation
23:16et composition musicale
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23:22Patrimoine sonore
23:23Sylvaine Denis,
23:24Laetitia Casanova,
23:26Antoine Reclus.
23:27Remerciements
23:28à Roselyne Bellemare.
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