00:00Beaucoup de réactions, donc vous venez de l'entendre, notamment celle de Xavier Bertrand, le président de la région Hauts-de-France, dit ainsi préféré, vous l'avez entendu, de Sarkozy de 2007 à celui de 2025.
00:10Avec nous, pour en parler, Olivier Guillotot, bonjour, vous êtes enseignant-chercheur en stratégie et en sciences politiques à l'INSEC.
00:16Avec sa prise de position publique, Nicolas Sarkozy lève un tabou à droite, il met fin à ce qu'on l'a non-temps appelé le cordon sanitaire autour du Rassemblement national.
00:25Complètement, alors ce n'est pas le premier à évoquer cette question et dans un sens à prendre ce positionnement.
00:35Après, le fait est, et c'est ce qu'on disait dans ce reportage, c'est un ancien président de la République, c'est une figure qui est quand même assez populaire, en tout cas qui est assez reconnue.
00:44Et de ce point de vue-là, sa prise de position, elle illustre quand même un potentiel basculement, qui est le résultat d'une sorte de glissement qui a lieu depuis pas mal d'années.
00:57On parle de la droitisation de la vie politique française et de la société.
01:02Et quelque part, ce qui est intéressant, c'est que c'est parallèlement au débat qu'il y a sur le budget actuellement à l'Assemblée nationale,
01:08où on voit aussi que les plaques sont en train de bouger et que ça a l'air finalement un peu d'y correspondre.
01:14Oui, c'est-à-dire que lorsque l'on voit le Parti socialiste apporter son soutien au projet de loi de financement de la Sécurité sociale,
01:21et à l'inverse, les Républicains s'interrogeaient ouvertement dans la voix de l'ancien ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau,
01:26ou Horizon, par celle de l'ancien Premier ministre Édouard Philippe, appelé à l'abstention.
01:30Vous avez le sentiment qu'aujourd'hui, il y a un contexte propice à ce qu'un certain nombre d'électeurs de droite,
01:36voire même de centre-droite, puissent demain voter pour le Rassemblement national ?
01:41Il y a effectivement, je pense, un contexte propice.
01:45C'est d'ailleurs, il y a des hasards comme ça de calendrier.
01:49Il y a eu l'enterrement d'Alain Jamais, un compagnon de route de Jean-Marie Le Pen.
01:54Effectivement, on sent finalement la mue du Front national en Rassemblement national.
02:00Peut-être aussi avec le passage à Bardella,
02:04va faire que ce glissement vers la droite,
02:08et cette union des droites qu'appelaient de ses voeux pas mal de personnes,
02:13va peut-être finalement prendre forme.
02:15Et ça correspond aussi à une sorte de fin de cette espèce de bloc gouvernemental
02:22où LR était l'allié des macronistes pour être au pouvoir,
02:27et il s'en détourne de plus en plus.
02:29Et finalement, ce vote du budget, c'est un peu le symbole de cette glissade.
02:34Ça préfigure de futures alliances à l'Assemblée nationale d'ici 2027,
02:39voire même avant qu'à de nouvelles dissolutions, d'après vous ?
02:43Alors, pour le moment, ça va jouer à quelques députés sur le vote du budget.
02:48Je pense qu'il n'y aura pas d'alliance officielle,
02:51mais ça va effectivement poser la question de 2027 et de la prochaine élection présidentielle.
02:56Après, ce qui est vrai aussi, c'est qu'Éric Ciotti avait préfiguré cette alliance et s'est fait sortir.
03:02Donc, c'est un peu compliqué quand même de passer d'un extrême à l'autre
03:08et finalement de donner raison à Éric Ciotti.
03:11Ce qui est vrai, c'est que le rapport de force entre l'ERN et LR, c'est complètement inversé.
03:16C'est-à-dire qu'aujourd'hui, c'est l'ERN qui est dominant.
03:19Et donc, il faut aussi penser à l'après, au poids du parti, au nombre de voix, au nombre de députés, etc.
03:25Donc, il peut y avoir effectivement un peu un calcul politique derrière tout ça.
03:30Le fait est aussi qu'on se retrouve, et on l'a bien vu avec la réaction de Xavier Bertrand,
03:34il y a toujours une scission au sein de LR entre ceux qui sont attirés par l'ERN
03:40et ceux qui sont plus fidèles à une sorte de gaullisme social un peu
03:45et donc qui sont plus pronds à regarder vers le centre.
03:49Mais on sent aussi que cet équilibre-là, il va de plus en plus vers quand même la droite extrême
03:54avec aussi, je pense, un regard sur ce qui se passe à l'étranger.
03:57C'est-à-dire que si on regarde d'autres pays, si on regarde par exemple l'Italie avec Mélanie,
04:02on se rend compte finalement que l'extrême droite italienne est devenue une droite nationaliste
04:09plutôt conservatrice que réellement réactionnaire.
04:13Et peut-être que ça ouvre aussi des possibilités à certains du LR qui se disent
04:17finalement, ce n'est pas si grave que ça de s'allier avec le RN.
04:20Et pour revenir à notre sujet de départ, Nicolas Sarkozy lui-même, Olivier Guillotot,
04:24il se défend à nouveau dans son livre « De toute ambition politique nationale ».
04:31Pensez-vous qu'il ait mis derrière lui son idée de revenir,
04:35comme il en a fait état dans le passé, au premier plan ?
04:38Ou bien au contraire, voyez-vous dans ce livre une initiative pour se positionner
04:42dans le cas où Marine Le Pen serait empêchée par la justice ?
04:46Je n'ai pas le sentiment qu'il se positionne pour revenir en politique.
04:50Je peux me tromper, mais je trouve qu'il y a quand même beaucoup de temps
04:53qui est passé depuis son échec lors des primaires, il y a de ça déjà beaucoup d'années,
04:59et qu'il n'a jamais vraiment tenté de manière concrète de revenir.
05:04Donc je n'ai pas le sentiment qu'il prépare le terrain.
05:07Après, ce qui se passe par contre, c'est qu'il a des ennuis judiciaires,
05:13et qu'il y a peut-être derrière tout ça une sorte de conjoncture
05:17qu'il pousse peut-être à se rapprocher, en anticipant, qui sait, la victoire du RN.
05:23C'est toujours mieux d'être bien avec le pouvoir quand on a des ennuis judiciaires.
05:28Et c'est vrai que ces éléments conjoncturels, c'est un peu pareil pour Rétaillot d'ailleurs.
05:32C'est-à-dire que Rétaillot s'était fait élire triomphalement à la tête de LR.
05:38Et puis finalement, là, son départ du gouvernement,
05:41les consignes qu'il a données aux députés qui n'ont pas été suivies,
05:45il est un peu en position de faiblesse, alors que c'était un peu le grand dominateur de son parti.
05:51Et il y a peut-être aussi, pareil, un espèce de petit calcul politique derrière,
05:55même si je ne peux rien anticiper, c'est un peu des hypothèses.
05:58Mais en tout cas, l'hypothèse selon laquelle Nicolas Sarkozy préparait son retour,
06:02personnellement, je n'y crois pas, même si je n'ai pas de boule de cristal
06:05pour vous dire exactement ce qui va se passer.
06:07Merci Olivier Guillotto d'avoir été avec nous sur France 24
06:10pour revenir sur l'actualité politique française.
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